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leurs causes. C'était un privilége que d'être expédié des premiers; Perchambaut dit qu'il est compris dans les aveux, et qu'il s'appelle droit de menée.

Dans la suite, la menée des personnes ayant été abolie, il ne resta que la menée des causes. Cette supériorité de juridiction suivait l'ordre de la féodalité; et c'est à quoi font allusion ces mots de l'art. 269, que les bannies seront certifiées devant le juge supérieur, en l'endroit de la menée et obéissance du fief dont les choses sont tenues, si obéissance y a.

Aussi, quoique toutes les juridictions royales ressortissent aux présidiaux, dans les matières qui sont sous le premier chef de l'édit, cependant les juridictions qui, dans l'origine, étaient des sénéchaussées indépendantes de celle à laquelle le présidial est attaché, ne sont point sujettes à la juridiction du présidial pour tout ce qui concerne la menée, parce qu'il n'y a aucune sujétion féodale, et que la supériorité n'est que de ressort et de juridiction.

Au contraire, les duchés-pairies qui sont affranchis du ressort des présidiaux et des juridictions royales, sont toujours sujets aux sénéchaussées royales en cas de menée, parcequ'ils ne sont pas affranchis de la féodalité.

C'est par ces principes que l'appropriement d'un héritage, relevant de la sénéchaussée royale, indépendante dans l'origine, ne peut se faire au présidial, quoique supérieur en juridiction; et qu'au contraire, le possesseur de l'héritage mouvant d'un duché-pairie, s'approprie valablement dans la sénéchaussée supérieure, quoique le duché-pairie soit affranchi du ressort de cette sénéchaussée.

Il en est de même des autres causes qui s'expédient aux menées : ce n'est point au présidial, c'est à la sénéchaussée qu'elles doivent être portées. Ainsi, le sénéchal, qui est le véritable juge de la sénéchaussée, doit avoir l'expédition de ces causes.

Par une conséquence nécessaire, dans l'expédition des causes des menées, attribut essentiel de la sénéchaussée, on ne peut prononcer en dernier ressort. C'est ce qui a été jugé par un arrêt rendu en forme de réglement à l'audience des viennent de grand'chambre, le 6 juillet 1735, qui casse et annulle une sentence du présidial de Nantes; faisant droit sur les conclusions du procureur-général, fait défense aux présidiaux de la province de juger, par jugement présidial, les causes des menées; ordonne que l'arrêt sera lu, publié et enregistré aux siéges présidiaux et royaux de la province. (Journal du parlement de Bretagne, tome 1, chap. 46.)

Il parait, au surplus, que ces menées n'ont

plus guère d'autre objet que les appropriemens. Un arrêt du 2 octobre 1653 a jugé, en infirmant une sentence du présidial de Rennes, qu'on ne pouvait point appeler les vassaux pour toutes causes à l'endroit de la menée; en sorte qu'ils n'étaient point obligés de plaider, nonobstant leur demande en renvoi, quoique le procureur d'office de la juridiction où leurs causes allaient naturellement, ne demandát pas retrait de barre pour eux. (Additions à Sauvageau, art. 269, arrêt 5.)

2o. Comment doit-on entendre ces derniers mots de l'art. 269 : « Laquelle certification de » bannies se fera en jugement huitaine après » ladite bannie pour le moins; et sera ladite » huitaine franche, sans compter le jour de » dimanche de la dernière bannie, ni le pre»mier jour desdits plaids »?

D'Argentrée dit que ces mots, le premier jour desdits plaids, doivent s'entendre du jour où commence la menée particulière du fief de qui relève l'héritage dont on poursuit l'Appropriement, et non pas du jour où commencent les plaids généraux, c'est-à-dire, les assises où chaque menée doit assister à son tour.

Pour rendre la chose plus claire, il propose cet exemple (Loc. cit., no 131): « Vitré et » Fougeres obéissent au sénéchal de Rennes le » premier jour des plaids, Châteaubriand le » septième, la Guerche le huitième, Hedé le » neuvième, Montfort le dixième. On demande » comment se doit régler la huitaine d'inter» valle entre la dernière bannie et les plaids, » qui sont le terme ? » et il estime « qu'il ne » faut considérer la chose par rapport au pas » premier jour des plaids en général, mais par » rapport au jour de l'obéissance particulière » qui regarde chaque juridiction inférieure: » par exemple, le premier jour des plaids de » Rennes regarde Vitré; et quelques-uns ont » cru que si l'Appropriement est pour un bien >> relevant de Chateaubriand, il faut également » que la huitaine soit franche entre la dernière » bannie et le premier jour des plaids où il » s'agit seulement des héritages relevans de >> Vitre ».

Mais, continue-t-il, cette interprétation est fausse, « parce que ce sont autant de plaids » qui ne commencent pour chaque juridiction » inférieure, que par la tenue de l'obéissance » particulière qui la concerne ».

Sauvageau paraît avoir embrassé la même opinion dans ses notes sur l'art. 269.Il observe « qu'il serait à propos d'ajouter à la fin de cet » article, que la huitaine franche d'entre la » dernière bannie et l'ouverture des plaids, se » doit entendre de l'ouverture des plaids de la » menée dans laquelle on se veut approprier,

» quoiqu'elle ne fût pas échue lors de la pre
»mière ouverture des plaids généraux, sui-
» vant l'arrêt du 31 septembre 1657, donné à
» l'audience, plaidant Me François Legal et
» Me Pierre Hevin, fondé sur ce qu'autant
» de menées font autant de plaids comme l'ob-
» serve le sieur d'Argentrée sur l'art. 268 de
» l'ancienne coutume in verbis, à l'endroit de
» l'obéissance de fief; conformément à l'avis
» du sieur d'Argentrée, son père, dans son
» Traité des menées, lequel se trouve à la fin
» de la très-ancienne coutume ».

Cet arrêt est encore rapporté dans les obser-
vations du même auteur sur du Fail, liv. 1,
ch. 259 et 410, et dans le commentaire d'Hevin
sur la coutume. Dans l'espèce de cet arrêt, un
héritage situé dans la ville de Rennes, avait
été banni pour la troisième fois le 28 avril
1652 : les plaids généraux de la sénéchaussée
avaient commence neuf jours auparavant, c'est-
à-dire, le 17 du même mois; mais les causes de
la ville n'y avaient été appelées et introduites
que dans les premiers jours du mois de juin
suivant, et c'était le 10 de ce mois-là même
que la certification s'était faite. On préten-
dit que l'Appropriement était nul; que la hui-
taine franche, requise par la coutume, devait
précéder, même pour Rennes, l'ouverture des
plaids, qui se fait par les menées de Vitré;
qu'ainsi, la certification n'avait pu se faire à
ces plaids ; que l'on eût dû attendre, aux ter-
mes de la coutume, l'ouverture des plaids gé-
néraux subséquens ; qu'en voulant trop accé-
lérer, on avait contrevenu à la loi et vicié
l'appropriement. On répondait, d'après d'Ar-
gentrée, que les menées particulières de cha-
que district sont autant de plaids ; qu'il suffit
que la dernière bannie précède l'ouverture de
la menée en laquelle la certification doit être
faite; que, dans l'espèce, il n'y avait non-seu-
lement huitaine, mais plus d'un mois entre la
dernière bannie et l'assignation, pour l'expédi
tion des causes de la ville de Rennes; que par
conséquent la certification était valable. La
communauté des habitans de Rennes interve-
nait dans la cause, pour dire que son usage
avait été jusqu'alors conforme à l'avis de d'Ar-
gentrée; et que, si la cour trouvait qu'il fût
contraire à l'esprit de la coutume, au moins il
était à propos de ne le réformer que pour l'a-
venir. Par l'arrêt cité, la sentence qui avait
déclaré l'appropriement nul a été infirmée, et
toutes les parties mises hors de cour sur la
demande à laquelle l'allégation de cette nullité
servait de base.

Le contraire avait été jugé, dans l'ancienne coutume, par un arrêt du 12 mars 1576, rapporté dans le recueil de du Fail, liv. 1, chap.

410; et cette jurisprudence paraît avoir pour elle l'opinion de deux célèbres commentateurs, Poulain de Belair et Poulain du Parc.

Le premier, après avoir donné une traduction abrégée du système de d'Argentrée (art. 269, no 131), dit : « La coutume porte abso» lument que la huitaine doit être franche en»tre la dernière bannie et le premier jour des » plaids; de sorte qu'il n'y a plus de distine»tion à faire ».

Le second (même article, no 141, note t), commence par dire, d'après Sauvageau, que le motif du premier des arrêts cites fut que les menées particulières de chaque fief sont autant de plaids: après quoi, il observe « que » cette interprétation paraît forcée : si les ré» formateurs (continue-t-il) avaient eu l'in»tention que leur donne cet arrêt, il eût été » facile de mettre à la fin de l'art. 269, le pre»mier jour de la menée, au lieu du premier » jour des plaids. La coutume dit que l'appro» priement se fera aux prochains plaids géné»raux, en l'endroit de la menée et obéissance » du fief: ces premiers mots annoncent que » les plaids généraux renferment toutes les » menées. Après cela, la coutume porte que » la huitaine précédera les premiers jours des » plaids : peut-on dire que ces derniers mots » ne se rapportent pas aux plaids généraux, » dont il est parlé quelques lignes auparavant, » et qui, comme on vient de l'observer, ren>> ferment toutes les menées ? »>

En consultant la coutume, il semble qu'elle présente un sens bien plus simple que les deux opinions de ces commentateurs. On voit d'abord que l'art. 269 distingue deux juridictions où la certification peut se faire, la juridiction prochaine ou immédiate, et la juridiction supérieure ou justice d'appel. Il y a lieu de croire que ce sont les audiences ordinaires de la juridiction prochaine, et non pas celles de la juridiction supérieure, que cet article entend, lorsqu'il dit que les bannies doivent être certifiées « en jugement des prochains plaids gé»néraux subsequens lesdites bannies devant » le juge du lieu où sont lesdites choses situées ». Il est bien vrai que d'Argentrée, du Fail, Sauvageau, Hevin, Perchambaut et les deux Poulain paraissent entendre par plaids géné raux les grandes assises de la juridiction supéricure; mais outre que cette interprétation ne paraît pas facile à concilier avec le texte de l'art. 269, on peut voir dans plusieurs coutumes, et particulièrement dans les coutumes voisines d'Anjou, art. 64, et de Poitou, art. 19, qu'on appelle assises ou grandes assises, la tenue des juridictions d'appel; et plaids ou petites assises, ceux des juridictions immédiates.

Ces mêmes coutumes distinguent encore les jours ordinaires où l'on expédie toutes sortes de causes, et les audiences extraordinaires où l'on juge les causes provisoires ou privilégiées, ou même d'autres causes en vertu de lettres d'abréviation. Ne serait-ce point ces jours ordinaires d'audience que l'art. 269 entend par plaids généraux ? Il ne veut pas qu'on certifie les bannies aux jours extraordinaires, parcequ'ils n'avaient pas la même publicité que les jours ordinaires; et que la tenue n'en étant point fixée à tel ou tel temps déterminé d'avance, le public ne pouvait pas s'y rendre pour veiller à ses intérêts.

Quant à la cour supérieure, l'art. 269 exige seulement que la certification s'y fasse en l'endroit de la menée et obéissance de fief, c'est-àdire, au temps qui est destiné à l'appel des causes particulières de ce fief.

Quoi qu'il en soit, ce que la coutume ajoute ensuite de la huitaine franche, paraît étranger ‚à la distinction qu'elle vient de faire entre les plaids généraux et extraordinaires, et entre la juridiction immédiate et la juridiction d'appel; elle veut seulement qu'il y ait huit jours francs entre la dernière bannie et le jour de la certification. Ces derniers mots, et sera ladite huitaine franche, sans compter le jour de dimanche de la dernière bannie, ni le premier jour desdits plaids, ne sont que l'explication de ces autres mots qui précèdent, laquelle certification de bannie se fera en jugement, huitaine après la dernière bannie pour le moins. Ils indiquent qu'on ne pourra pas certifier le premier jour des prochains plaids, s'il n'y avait pas une huitaine franche entre la dernière bannie et ce premier jour.

Ainsi, en observant cette huitaine franche, on pourra faire la certification quand on voudra, pourvu que ce soit un jour de plaids généraux (c'est-à-dire, un jour de plaids ordinaires), si l'on certifie en la juridiction immédiate des lieux; ou que ce soit un des jours de la menée du fief, si l'on certifie en la juridic tion supérieure. Quand bien même il n'y aurait pas eu huit jours francs entre la dernière bannie et le premier jour de la menée du fief, il suffit qu'il y ait cet intervalle entre la dernière bannie et le jour où se fera la certification; c'est là tout ce que semble exiger la coutume, et l'opinion de Poulain du Parc y paraît surtout bien opposée.

S. VII. Des oppositions et de leur péremption. Tous ceux qui prétendent des droits sur la chose que l'on met en bannies, sont obligés de s'opposer à l'appropriement, sous peine de perdre leurs droits, lorsqu'ils ne sont pas du

nombre de ceux que l'appropriement ne purge pas. Ces oppositions sont reçues jusqu'à ce que le juge ait donné acte de la certification des bannies, et déclaré l'acquéreur approprié, à la charge des oppositions, si aucunes sont.

C'est ce que dit Hévin au chap. 52 de ses observations et consultations. D'Argentrée, sur l'ancienne coutume, art. 266, et Hevin, sur la nouvelle, art. 270, assurent même que, si l'audience en laquelle se fait la certification n'était pas levée, l'opposition serait toujours reçue. On voit que cela ne s'accorde pas trop avec ce que dit d'Argentrée sur l'inutilité de l'office du juge dans la certification. (V. le commencement du §. précédent.)

Il est même permis de s'opposer sur le prix après l'appropriement, lorsque des oppositions antérieures ont donné lieu à le consigner: cette opposition est une espèce de saisie-arrêt entre les mains du débiteur. Mais, dans ce cas, le créancier postérieur en hypothèque, qui s'est opposé à l'appropriement, est préférable au créancier antérieur, qui ne s'est opposé que sur le prix, quoique, suivant la jurisprudence de Bretagne, l'opposition sur le prix dans les décrets forcés, conserve au créancier son hypothèque, comme l'opposition au décret même.

dans le cas de l'appropriement, a souffert longCette préférence du créancier postérieur, temps des difficultés. Enfin, elle a été admise par un arrêt rendu en très-grande connaissance de cause, en la première chambre des d'établir le bien jugé de cet arrêt, que les enquêtes, le 2 août 1735. Il est plus facile fondemens de la jurisprudence du parlement de Bretagne sur les décrets forcés. On trouve néanmoins beaucoup de détails à ce sujet dans le Journal de ce parlement, tom. 1, chap. 4.

On distingue deux sortes d'oppositions à l'appropriement : les judicielles ou judiciaires, qui

se font lors de la certification des bannies aux

plaids généraux; et les extrajudicielles, qui tion, signific à l'acquéreur. Les opposans peuse font auparavant par un exploit d'opposivent faire juger leurs oppositions, soit avant, soit après le jugement de certification, et cela a le même effet; mais les oppositions qui ne sont pas jugées avant l'appropriement, se periment après l'appropriement, savoir, par un an, lorsqu'il n'y a qu'une demande sans contestation, et par trois ans, lorsque l'instance

a été contestée.

C'est ainsi qu'on interprète les art. 278 et 279 de la coutume de Bretagne, dans une consultation en forme d'acte de notoriété, du 20 janvier 1679, que l'on trouve dans le recueil

d'Hevin, no 52. On y ajoute, 1o que, lorsque, sur l'opposition, il y a jugement définitif qui adjuge à l'opposant ses conclusions, ou qui déclare les heritages affectés et hypothéqués à son profit, ce jugement dure trente ans, soit qu'il ait été prononcé avant ou aprés l'appropriement; 2o que, lorsque les oppositions ne tendent pas à l'éviction ou revendication du fonds, mais seulement à la conservation des créances, la formule de prononciation usitée dans ce cas par les juges de la province, est de déclarer les héritages affectés et hypothéqués aux prétentions de l'opposant; ce qui est un jugement définitif qui dure trente ans ; mais que, s'il est rendu avant l'appropriement, il n'est pas besoin de répéter l'opposition lors de l'appropriement ou certification, et que, si on le fait, c'est un acte surabondant et inutile, parce que l'appropriement ne se fait qu'à la charge des oppositions jugées ou à juger.

La disposition des art. 278 et 279, dont on vient de parler, a fait douter si une ordonnance de fournir ses moyens d'opposition à l'appropriement, non exécutée dans l'an, pouvait opérer l'effet d'une contestation, comme l'appointement, et durer trois ans. Les arrêts ont jugé que non, et que, pour avoir cette durée, il était nécessaire que les moyens d'opposition eussent été fournis dans l'an, parce qu'ils commencent la contestation. Ces arrêts sont rapportés sur cet art. 278, par Belordeau, par Frain et par Hevin; le dernier a été donné, chambres et semestres assemblés, le 19 juillet 1755; et il a jugé que la simple ordonnance de fournir moyens ne vaut pas contestation, quoique l'opposant fût décédé dans les trois ans, mais avant la contestation, ayant vécu plus d'un an depuis son opposition. Le commentaire de Perchambaut annonce que ces maximes, qui sont très-différentes de celles du parlement de Paris sur la péremption, s'observent toujours en Bretagne.

Deux autres arrêts des 25 et 28 septembre 1612 ont jugé que la simple assignation donnée dans l'an après l'opposition, interrompait la péremption, et prorogeait l'action jusqu'à une nouvelle année, quoiqu'il n'y eût point eu de contestation dans le même intervalle. Ce dernier arrêt est le trentième du recueil de Frain: mais il y avait cela de remarquable dans le fait, que le délai de l'assignation tombait dans l'an. L'exploit avait été signifié le dernier jour, à trois heures après-midi, avec assignation à quatre heures du même jour.

Lors, au contraire, que le délai de l'assignation ne tombe pas dans le temps fatal, d'Argentrée décide qu'elle est inutile pour proroger

l'opposition. C'est sur l'art. 266, dans sa glose sur le mot interruptio. Tiraqueau et plusieurs auteurs décident le contraire, surtout lorsque l'opposant a été forcé de faire tomber l'assignation hors de l'an, par la nécessité des délais requis pour l'assignation, et par l'éloignement du défendeur.

La question s'étant présentée, fit de la difficulté; elle fut appointée le 25 juin 1610. Il y avait même eu précédemment un arrêt du 9 mars 1609, qui avait jugé que la signification faite dans le temps fatal, mais avec assignation après les trente ans, ne conservait pas l'action. (Arrêts ajoutés au commentaire de Sauvageau, art. 278, arrêt 4.)

Il faut remarquer enfin qu'un arrêt du 18 jugé que l'opposition générale à un approprieaoût 1775, rendu les chambres assemblées, a ment ne pouvait pas être déterminée au retrait lignager. Les principaux moyens de l'approprié étaient qu'une opposition conçue en termes vagues et généraux, sans expression d'aucunes causes, ne peut être réputée avoir eu en vue que les deniers, qui demeurent seuls saisissables, aprés que l'acquéreur est déclaré approprie; qu'elle ne peut se diriger sur le fonds, soit pour retrait ou pour revendication, parce que ce serait une demande en eviction formée contre l'acquéreur, qui aurait dû être libellée, à peine de nullité, aux termes de l'ordonnance.

Mais Poulain du Parc observe que l'arrêt n'adopta point la généralité de cette proposition, et qu'il ne jugea que la question du retrait. Cet auteur pense que les vrais motifs du jugement furent le peu de faveur des retraits, et la jurisprudence constante du parlement de Bretagne, qui avait toujours rejeté les demandes en retrait formées après l'appropriement depuis la réformation de la coutume, quoiqu'on observat le contraire auparavant, comme d'Argentrée le reconnaît dans son Aitiologie, sur l'art. 307. On a cru, depuis la réformation, que l'esprit de la coutume, en faisant cesser le droit de retrait par l'appropriement, était d'obliger les lignagers à exercer ce droit le plus promptement possible, afin de ne pas laisser les acquéreurs trop long-temps dans l'incertitude. On trouve en faveur des acquéreurs, trois arrêts qui l'ont ainsi juge, le premier, du 2 mars 1600, dans Belordeau, lettre P, controverse 14; le deuxième, du 24 mai 1639, dans Devolant, lettre O, chap. 21; et le troisième, du 8 octobre 1685, dans le Commentaire imprimé à Nantes, art. 92.

On verra du moins, au S. suivant, que les surenchères sont, à cet égard, dans le même cas que le retrait.

S. VIII. Des surenchères des opposans.
Comme les bannies du domaine dont on veut

s'approprier, équivalent aux criées du décret,
elles laissent aux créanciers du vendeur le droit
de surenchérir le domaine, et de se le faire
adjuger, à moins que l'acquéreur ne couvre
aussi les surenchères. Ce point de droit n'est
fondé sur aucune disposition de la coutume,
mais sur un usage constamment observé en
Bretagne.

Les surenchères doivent se faire avant que le juge ait mis la sanction légale à l'appropriement, en donnant acte de la certification des criées; ou du moins il est nécessaire que l'opposition faite auparavant, porte que l'opposant entend surenchérir. Un arrêt du 11 mai 1733 l'a ainsi jugé, en infirmant la sentence qui avait reçu la surenchère. L'arrêt déboute l'intimé de ses demandes, sauf à lui à suivre son opposition sur le prix du contrat, que l'on avait consigné. L'appelant convenait bien que le créancier avait la faculté de surenchérir le prix de l'héritage qui lui est hypothéqué; mais il soutenait que cette faculté expirait au moment que l'acquéreur faisait certifier les bannies et qu'il était déclaré approprié, parceque l'appropriement a le même effet que l'adjudication par décret, après laquelle on ne peut recevoir aucunes enchères.

Belordeau remarque, sur l'art. 269, que le subrogé à une adjudication faite judiciairement, doit aussi faire bannir la subrogation avec l'adjudication, à peine de nullité de l'appropriement : il assure qu'on l'a souvent jugé de cette manière.

Cela est nécessaire, lors même que l'acqué reur qui avait fait bannir son contrat, reste en possession du domaine, en couvrant les surenchères des opposans: on l'a ainsi jugé dans l'espèce suivante.

L'abbé de Menoray, acquéreur conventionnel par contrat de réméré de trois ans, du 17 novembre 1731, s'appropria aux plaids généraux de Hennebond, du 3 juillet 1732; le contrat fut surenchéri, et l'adjudication fut faite, à l'audience du 14 août suivant, à l'abbé de Menoray, comme plus offrant et dernier encherisseur : il ne s'appropria point, croyant sans doute que la certification de bannie, faite le 3 juillet 1732, était suffisante. Après sa mort, la demoiselle Trouedec forma sa demande de retrait lignager contre ses héritiers, au mois de février 1747; et dans le même temps ils vendirent ces biens à Guillas et à sa femme.

La demoiselle Trouedec avais été déboutée du retrait par la sentence du 17 août 1747; mais cette sentence fut réformée par l'arrêt

était

du 8 juin 1763, sur le motif que l'approprie ment du contrat conventionnel de 1731, devenu sans effet, ce contrat ayant été anéanti par l'enchère et l'adjudication judiciaire, qui

était désormais le seul titre de l'abbé de Menoray, et sur laquelle la demande de retrait lignager avait été formée. (Journal du parlement de Bretagne, tom. 3, aux additions, p. 783.) S. IX. Des effets de l'appropriement par trois bannies.

On peut considérer les effets de l'approprie ment par trois bannies, soit relativement aux droits dont il purge les choses appropriées, soit relativement aux personnes auxquelles il peut ou ne peut pas préjudicier.

I. Quant aux droits, le principal effet de l'appropriement est d'assurer à l'acquéreur qui en a rempli toutes les formalités, la propriété libre et irrévocable de l'héritage, ou du droit réel dont il s'est approprié.

Ainsi, l'appropriement purge, non-seulement les charges dont le bien était tenu, mais même le droit qu'un tiers pouvait avoir de le revendiquer à titre de propriété. En cela, il étend son efficacité plus loin que les décrets volontaires, les lettres de ratification et les lettres de purge qui sont usitées dans les Pays-Bas ; il imite le décret forcé.

Ainsi, un propriétaire vend son heritage à faculté de rachat indéfini. L'acheteur le revend purement et simplement à un tiers qui s'en approprie. Par arrêt du 29 novembre 1612, le

parlement de Bretagne juge que l'appropriement a purgé la faculté de rachat en faveur de celui-ci, et que le premier vendeur n'a qu'une action en dommages-intérêts contre son acheteur immédiat. (Hévin, sur l'art. 287 de la coutume, no 3.)

On pourrait citer une foule de décisions semblables, mais ce point de jurisprudence est trop constant, pour avoir besoin d'autres preuves.

Il faut pourtant remarquer que l'approprie ment, en garantissant l'acquéreur des poursuites du propriétaire, n'anéantit pas tous les droits de celui-ci. L'art. 273 de la coutume décide qu'il peut agir en récompense contre le vendeur, et que cette récompense doit lui être fournie en heritages ou autrement, à son choix.

L'action que la coutume accorde à cet effet au propriétaire, dure trente ans, parcequ'elle est personnelle.

Mais de quel jour doit-on compter les trente ans? Suivant d'Argentrée, traduction de Poulain de Belair, art. 273, no 6, c'est du jour que le tiers-possesseur a été approprié, parceque, dit-il, jusqu'à ce jour l'action en revendication avait lieu, et non l'action en récom

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