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chines pour le filage des laines et la fabrique des draps que jusqu'alors elle avait fait construire à Manchester, à Leeds et à Birmingham. D'ailleurs, cette acquisition pouvait faire entrevoir la réalisation du projet depuis longtemps conçu de rapprocher Saint-Pétersbourg et Moscou par un chemin de fer : le manque de matériaux n'y ferait plus obstacle.

Enfin, jamais l'agriculture, la navigation intérieure et le commerce n'avaient été aussi actifs ; c'est ainsi que dans les jours de décembre, il se trouvait à la fois dans le port d'Odessa, 124 bâtiments Anglais, Français, Italiens et Espagnols, qui allaient y prendre des chargements de froment et d'orge. Tous les autres ports de la mer Noire étaient également encombrés de navires venus dans le même but. Depuis 1857, il avait été construit 8.197 nouveaux navires marchands, et la valeur des marchandises introduites en 1859 àl'antique et célèbre foire de Nowgorod s'était élevée à la somme énorme de 161,497,000 roubles, 5,304,500 de plus qu'en 1858.

Les développements du commerce extérieur ne furent pas moins considérables. En 1838 la Russie exporta pour 313,523,687 roubles, soit 49,040,627 de plus qu'en 1837. Elle importa pour 243,928,585, c'est-à-dire, 4,041,685 de plus qu'en 1857. Ainsi la valeur de l'exportation dépassa de 63,810,193 roubles celle de l'impor

tation.

POLOGNE. Le contre-coup de cette prospérité publique ne se faisait guère ressentir dans ce pays chaque jour il se voyait enlever une à une toutes les institutions qui pouvaient lui rappeler le souvenir de sa nationalité. Un district scolaire fut organisé à Varsovie, conformément aux règles en vigueur dans les universités russes, et placé sous l'administration du ministre de l'instruction publique. Ainsi, le gouvernement façonnerait ces jeunes intelligences

à ses principes, et sans doute rendrait moins mouvante la base de sa domination, par le rapprochement des idées. Une autre mesure, que l'esprit de tolérance qui caractérise le dix-neuvième siècle, jugea de son point de vue avec quelque sévérité, tendait au même but de fusion : c'est la défense signifiée aux évêques catholiques d'entretenir aucune correspondance directe avec le Saint-Siége.

Un dernier acte témoigna à l'égard de la Pologne des intentions du Cabinet de Saint-Pétersbourg. En effet, il fit révoquer en Belgique la nomination de l'officier polonais Skrzynecki, qui venait d'y être admis dans l'armée avec le grade de général. La Russie, tout en protestant qu'elle ne voulait susciter aucune difficulté aux émigrés polonais dans les lieux qu'ils auraient choisis pour retraite, ne pouvait souffrir, disait-elle, qu'une puissance étrangère les plaçât dans une sphère d'action où ils auraient l'occasion de manifester leurs intentions hostiles contre leur légitime souverain.

CHAPITRE IV.

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TURQUIE-EGYPTE. - Préparatifs de guerre. - Sortie de la flotte ottomane du Bosphore. - Note du sultan à la Russie et à l'Autriche.- Sommations faites au pacha d'Egypte. Hafiz-Pacha reçoit le commandement des forces de terre. Sortie d'Alexandrie de la flotte égyptienne. Intervention de la France à Alexandrie, à Constantinople. -Bataille de Nézib. Victoire d'Ibrahim. Mort de Mahmoud. Avénement d'Abdul-Medjid, son fils. Défection du commandant de la flotte turque. - Note des cinq puissances. Hatti-schériff de Gulhané. Instruction adressée à ce sujet aux gouverneurs de province. - Réformes diverses. Commerce extérieur. SERVIE - Révolte des troupes dans le dessein de renverser la consiitution de 1835. Triomphe de l'aristocratie. protestation du prince Miloseh. Michel.

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Abdication forcée et Avénement de son second fils,

Les efforts de la diplomatie étaient parvenus jusqu'à ce jour à tenir suspendu l'effet des menaces et des apprêts guerriers que le sultan et le vice-roi faisaient avec une égale ardeur. Mais le moment de la péripétie semblait enfin venu.... L'impatience de Mahmoud s'agitait péniblement dans les limites des conventions de 1855.

Dès le commencement de l'année, un mouvement extraordinaire se faisait remarquer sur la flotte ottomane, comme dans l'armée de terre, et vers le milieu de juin, l'escadre turque sortait du Bosphore. En même temps, l'impétueux adversaire de Méhémet-Ali adressait aux représentants de l'Autriche et de la Russie une note où il déclarait qu'il préférait à l'état actuel des choses une solution quelconque, favorable ou non; qu'il ne pouvait plus tolérer l'insolence d'un pacha rebelle, qui, foulant aux pieds les principes de 1. . . pour 1839.

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l'Islamisme, n'avait pas craint d'expulser avec violence les gardiens établis par son souverain au tombeau du prophète! N'avait-il pas, de même, donné un autre cours à son audace, en refusant seul et sans en avoir référé au sultan, le passage de Suez sur le territoire égyptien, réclamé par la Grande-Bretagne, c'est-à-dire, par une nation amie de la Porte-Ottomane ? Enfin, que n'avait il pas fait pour empêcher les Anglais de s'emparer d'Aden? Puis, il a excité dans les provinces de Bassorah et de Bagdad des mouvements séditieux, de nature à inspirer les plus sérieuses inquiétudes! En un mot, il a parcouru et dévasté, d'occident en orient, toute la presqu'île arabique, et comblé la mesure en s'emparant, pour en faire le centre de ses opérations, des îls Bahrein, dans le golfe Persique. Jamais, ajoutait sa Hautesse, jamais, la Sublime-Porte ne se soumettra aux prétentions exagérées du pacha d'Egypte.

A fa suite de cette déclaration, un envoyé du Divan se rendit à Alexandrie pour sommer le vice-roi: 4° De rétablir les gardiens du tombeau nommés par le sultan ; D'acquitter régulièrement le tribu imposé par les traités; 3o De renoncer à l'exercice de tous droits de majesté et de souveraineté, à moins d'une délégation formelle.

Dans l'intervalle, le séraskier Hafiz-pacha, recevait du sultan, le commandement des forces de terre; il dut s'avancer vers l'Euphrate. Bir, situé sur ce fleuve, fut fortifié pour couvrir, à l'événement, la retraite des Turcs. Tout annonçait donc que les parties belligérantes allaient se trouver en présence! En effet, le mouvement de la flotte égyptienne suivit de près celle de la flotte ottomane. Méhémet en fit part lui-même à son fils Ibrahim ( 4 juin ). Le pacha régiait ainsi ses combinaisons sur celles de son ennemi. Lors donc que le généralissime des troupes égyptiennes eut informé son père que les Turcs avaient ouvert les hostilités par l'attaque de plusieurs villages du district

d'Ain-Teb, il lui fut répondu qu'il devait continuer de se tenir sur la défensive, et suivre en cela, les avis des consuls-généraux des quatre grandes puissances; toutefois, en repoussant la force par la force.

Le pacha fit encore preuve de cette longanimité de sa politique, en accueillant les ouvertures pacifiques qui lui furent faites au nom de la France, pendant qu'un autre envoyé du gouvernement de ce pays, se rendait, sans autant de succès, à Constantinople. Méhémet adressa, en effet, à son fils (16-17 juin), des instructions nouvelles qui tendaient encore à lui faire calculer sa marche sur celles des troupes du sultan.

Cependant l'heure était sonnée, et la résolution du Grand-Seigneur était devenue irrévocable. Ce fut le 24 juin, et dans les plaines de Nezib, que les deux armées qui semblaient récéler dans leurs flancs les destinées du monde, vinrent se heurter, et l'une se briser contre l'autre. Le généralissime des troupes du sultan avait sous ses ordres 17 régiments d'infanterie, 9 de cavalerie, un grand nombre de fantassins irréguliers, et à sa disposition 100 pièces d'artillerie. Les forces d'Ibrahim étaient à peu près équivalentes 14 régiments d'infanterie, 8 de cavalerie, 4 d'artillerie, et 12 à 1500 hanadis. La position des Turcs était formidable, bien que la ligne d'étendue, occupée par les deux armées, fût à peu près la même. Hafiz avait sa droite appuyée à une haute montagne; sa gauche couvrait la rivière de Nezib, et son front de bataille était défendu, sur toute sa longueur, par des ouvrages bien construits et fortement armés. Ibrahim, qui, la nuit précédente, avait contenu avec vigueur plusieurs de ses régiments syriens, qui menaçaient de passer à l'ennemi, (et quelques-uns des plus mutins y étaient parvenus en effet), Ibrahim mesura avec fermeté sa position; il comprit qu'il n'y avait pour lui de chances de succès qu'en prenant l'en

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