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Le ministre combattit l'utilité de cette proposition par des motifs analogues à ceux même qui avaient dicté le jugement de l'assemblée de Francfort. Néanmoins, le travail de M. Eisenstück fut renvoyé à une commission extraordinaire chargée de l'apprécier et de faire un rapport à ce sujet. Cette circonstance fit ajourner, par la première Chambre, une autre proposition qui se rattachait, par voie de conséquence, à cet important débat. Deux membres de cette assemblée auraient voulu que l'on plaçât sous la protection spéciale de la Confédération, la constitution saxonne, du 4 septembre 1831 (voir l'Annuaire). On ne pouvait témoigner plus clairement les craintes qu'inspiraient les conjonctures où se trouvait le Hanovre, bien que les précédents du gouvernement de Dresde, et les paroles d'ailleurs si franches, du prince qui le dirigeait, fussent de nature à rassurer les plus timorés.

Quoi qu'il en soit, la proposition n'eut point de succès; il fut décidé qu'on attendrait le travail de la commission de l'autre Chambre, à la suite duquel il serait sans doute fait, à la première, une communication politique.

Tel était l'état des esprits, et il y avait tout lieu d'espérer que l'on persisterait dans la voie d'amélioration civile et politique ouverte sous les deux derniers règnes.

CRACOVIE.

La situation de cette république n'était point changée : l'espèce de chartre-privée dans laquelle on l'avait placée se prolongeait. Le 24 juin, les trois puissances mirent le comble aux mesures déjà adoptées contre la loi fondamentale en déclarant au sénat que la Chambre des représentants ne se réunirait plus, comme par le passé, tous les trois ans, mais seulement lorsque le sénat le jugerait convenable, et toutefois avec l'assentiment des puissances; qu'elles seules

aussi, et non plus la Chambre, nommeraient à l'avenir les sénateurs aussi bien que les juges ordinaires, sauf, en ce qui touche ces derniers, la sanction ultérieure du sénat. Les résidents, représentant les trois puissances, annonçaient ensuite des modifications au régime judiciaire actuel suppression du tribunal de troisième instance; abolition de la publicité en matière criminelle; en un mot, substitution du système autrichien à celui qu'avait établi la loi fondamentale. Au surplus, la liberté individuelle n'était pas respectée davantage; les arrestations se multipliaient. Il suffirait pour justifier cet exposé, de citer l'incarcération du neveu d'un sénateur, pour de prétendues relations avec l'étranger. Le sénateur lui même ne fat point couvert par sa dignité; il avait eu dans sa bibliothèque des livres dont on défendait la lectore; il fut, à raison seulement de ce délit, déchu de son titre.

Il était difficile, en présence d'un semblable état de choses, que la voix des citoyens ne s'élevât point pour faire appel aux sympathies du dehors. Ainsi s'expliquerait une pétition dont il fut beaucoup parlé, et dont au surplus l'authenticité fut contestée, pétition dans laquelle les notables habitants de la république auraient exposé à la GrandeBretagne leurs nombreux griefs et sollicité son intervention pour en tarir la source.

Ann. hist. pour 1839.

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CHAPITRE III.

DANEMARCK. Mort de Frédéric VI. — Avénement du prince

-

tiern. Allocutions.-Des fonctionnaires. - Des étudiants. société de la liberté de la presse. - Lettres patentes du roi. du pays.

SUEDE ET NORWEGE.

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Ouverture du Storthing.- Propositions soumises

à cette assemblée. - Réponse du roi aux députés de l'armée. - Travaux de l'armée.

RUSSIE ET POLOGNE. — Politique du pays.- Continuation de la guerre du Caucase. Proclamation du général Rajewski. — Réponse des habltants de Notkuhatch. - Mollah-Schemil chez les Desghiens. — Déclaration de guerre au Khan de Chiva. Réunion des Grecs-Latins à l'église grecque. Réscrit impérial en faveur des Juifs. - Emancipation de 5,518 serfs. ➡ Progrès des lettres, des sciences, des arts, de l'industrie, de l'agriculture. Organisation d'un district scolaire Défense aux évêques catholiques de communiquer avec le Saint-Siége. — Révocation de la nomination de Skrzynecki, au généralat dans l'armée Belge.

à Varsovie.

DANEMARCK.

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La mort de Frédéric VI est le grand événement de cette année. Ce prince était né le 28 janvier 1768. Nommé corégent de son père, en 1784, il lui avait succédé en

1808.

Le roi actuel, fils du prince héritier mort en 1808, est né le 15 décembre 1786. Élu roi de Norwège en 1834, il abdiqua ce titre le 18 août de la même année. Les nécessités de la politique lui imposaient cette grave résolution; car, dès le 14 janvier précédent, un traité conclu avec l'Angleterre et la Suède, plaçait la Norwège sous la domination de cette dernière puissance.

C'est au règne de Frédéric VI, surtout à ses dernières années que commence, pour le Danemarck, un progrès plus sensible dans l'esprit de la nation, que dans ses lois.

La crainte que cet état stationnaire de la législature ne se prolongeât encore, se produisit peu déguisée, dans les adresses de félicitations présentées au successeur du roi défunt.

« Votre Majesté, disaient les trente-deux hommes, connaît la constitution présente du pays, ainsi que celles des états les plus éclairés. Nous nous consolons dès lors, par la pensée que votre coup d'œil pénétrant reconnaîtra qu'à côté des grands progrès que notre patrie a faits, il en reste beaucoup à faire. Le peuple espère avec fermeté, que la Providence vous accordera le bonheur d'achever l'œuvre commencée, et que la prospérité actuelle et future sera le but des efforts de V. M. Nous tenons particulièrement à la liberté communale, et nous espérons que la sagesse royale et les conseils du peuple, établiront l'indépendance et la publicité de l'administration communale qui inspirera aux citoyens cet intérêt vivace, condition nécessaire de la prospérité des communes. C'est aussi de cette manière que, sous Christiern VIII, le Danemarck fera des progrès ultérieurs dans la civilisation dont Frédéric VI a ouvert la carrière à son peuple. »

L'université vint à son tour: elle rappela l'intérêt que le roi avait toujours témoigné pour les sciences, et en augurait bien pour l'avenir. Le conseiller d'état Oersted renouvela, en sa qualité, cet hommage; mais il en tira d'autres considérations et fit ressortir surtout, les résultats politiques que la propagation des lumières devait amener à sa suite.

S. M. répondit que l'on saurait, par les lettres patentes. publiées le jour même, d'après quels principes, le successeur de Frédéric VI entendait gouverner. Le roi annonçait, en effet, dans ce document officiel (3 décembre), qu'il continuerait avec le zèle infatigable dont son prédécesseur lui avait donné un exemple si éclatant,

son système de gouvernement paternel, en ayant toujours en vue les améliorations administratives que l'expérience pourrait suggérer.

Les étudiants avaient aussi présenté une Adresse où il était dit, que l'on espérait des lumières et du libéralisme du nouveau roi qu'il assurerait à la presse la plus large liberté.

La réponse du prince ne porta pas seulement sur cette partie de l'adresse de la jeunesse studieuse, elle put encore être considérée comme un programme de gouvernement.

Personne, disait S. M., ne connait mieux que moi les heureux effets de l'esprit commun, mais tout doit se fonder sur l'expérience. Mon prédécesseur, ayant établi les états provinciaux qui facilitent au peuple l'accès au trône, avait pensé qu'il fallait s'arrêter là. Telle est aussi mon opinion. On a parlé de la constitution norwégienne, mais cette constitution a dû sa naissance à des circonstances toutes spéciales; elle eút pu prendre plus de développement, si les conjonctures avaient été favorables; mais avant tout, il faut prendre conseil de l'expérience, guide infaillible. Quant à la liberté de la presse, elle n'a point de partisan plus déclaré que moi. Je reconnais hautement que la prospérité du peuple et de l'Etat ne peut que gagner par le libre échange des idées. La liberté de la presse ne peut pas toutefois demeurer sans limites: il faut qu'elle soit restreinte dans de justes termes, par la loi. L'abus seul rendant nécessaires les délimitations, il est évident qu'il dépendra de la presse elle-même de s'assurer des droits plus ou moins larges, suivant l'usage qu'elle aura fait de cette liberté. »>

Le roi fit à la société, pour l'exercice légitime de la liberté de la presse, une réponse analogue :

Rien, disait le souverain, ne serait plus pénible pour moi que d'être obligé d'imposer de nouvelles restrictions à la presse; rien ne me sera plus agréable que de voir que les entraves auxquelles elle est soumise aujourd'hui pourront, après mûr examen, être supprimées. Je ne demande, ajoutait S. M., que la vérité; ce n'est qu'à la vérité que le gouvernement peut accorder une valeur durable. »

Nous venons de reproduire, en les analysant, la série des allocutions officielles amenées par l'avénement de Christiern. Comme fait, nous n'avons guère à parler que d'une résolution des états de Roeskilde adoptée à une ma

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