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» tion de S. A., les plaintes de la compagnie devinrent chaque jour » plus pressantes, et furent bientôt suivies, de sa part, de demandes » toujours croissantes d'indemnités et de dommages-intérêts. Obli »gée de recourir aux voies légales, la ville obtint enfin, le 21 juillet » 1823, un jugement du conseil de préfecture qui a décidé que » la loi du 29 floréal an X avait ordonné la dérivation totale de la » rivière d'Ourcq pour, ladite rivière, être amenée à Paris, et qui, »en conséquence, a autorisé M. le préfet, au nom de la ville de Paris, » à continuer les travaux pour introduire les eaux de ladite rivière dans » le canal dont l'ouverture a été ordonnée.

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» Ce jugement venait enfin de recevoir l'exécution provisoire, » qui, d'abord, avait été paralysée sous divers prétextes, lorsque de » nouvelles propositions furent soumises au conseil municipal par » l'intermédiaire de son Exc. le ministre de l'intérieur.

» Le conseil avait pu se convaincre par les précédentes discus»sions, que deux causes principales avaient nui au succès des » négociations tentées jusqu'alors.

» D'un côté, partant du principe que le Prince devait rester »possesseur de tout l'ancien lit de la rivière, et de la disposition » du cours supérieur des eaux, on s'était attaché à régler à l'avance > toutes les difficultés que ces rapports de propriété devaient faire >> naître, et l'on n'avait pas tardé à s'apercevoir que l'on s'était jeté » dans un labyrinthe dont on ne sortirait jamais; qu'aucune pré

voyance n'était en état de calculer les combinaisons presque >> infinies qu'une foule d'incidens devait amener; qu'enfin l'expé»rience manquait, et que néanmoins elle seule eût pu servir de » guide dans des rapports aussi compliqués.

D'un autre côté, la ville avait d'abord attaché trop peu d'im»portance aux engagemens qui la lient avec la compagnie con>> cessionnaire.

» Dans le desir d'arriver à un arrangement, on s'était persuadé » que la compagnie se trouverait toujours disposée à adopter les » mesures qui tendraient à lui procurer une prompte jouissance; » mais, soit qu'elle fût mieux éclairée sur ses intérêts, soit qu'elle » crût pouvoir tirer avantage de sa situation, sa résistance à quel»ques mesures préliminaires proposées entre le Prince et la ville » fut un des principaux motifs de la rupture des premières con» férences.

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» L'expérience des discussions précédentes ne permettait donc » plus d'écouter des propositions qui n'auraient pas pour base » essentielle la cession entière et sans réserve à la ville, de tous » droits sur la rivière d'Ourcq dans toute son étendue.

» La négociation, ouverte sur cette nouvelle base, a été traitée

» simultanément avec les mandataires du Prince et les membres » de la compagnie concessionnaire.

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» L'affaire, considérée sous ce nouveau point de vue, >> geait tout-à-fait de face dans le procès : il n'était pas question de » la propriété du lit même de la rivière d'Curcq, mais d'une ser» vitude imposée à ce te propriété par l'obligation de souffrir au » point de Mareuil la dérivation des eaux. Quel était l'effet de » cette servitude! Quel était le sens du mot dérivation, et, par » suite, quelle devait être la quotité des eaux à laquelle elle s'ap»pliquait! La ville prétendait que la dérivation devait être totale et sans réserve. Le Prince, après avoir contesté d'abord l'existence » même de la servitude, s'était vu réduit à la reconnaître, mais » avec des restrictions.

» Voilà l'unique question que le conseil de préfecture a jugée >> en faveur de la ville de Paris, la seule sur laquelle il pouvait » prononcer, la seule soumise encore aujourd'hui par le pourvoi » à la décision du Conseil d'état.

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>> La mission de vos commissaires devenait bien plus étendue: » il ne s'agissait plus seulement de résoudre la question relative aux »eaux, ni de la terminer par une transaction, mais de négocier » l'acquisition de propriétés sur lesquelles la ville ne pouvait elever » aucun droit. Le Prince ne se refusait pas à cette cession; mais, »en abandonnant ses droits sur la rivière, il annonçait toujours » le desir de se réserver sur la navigation, soit ancienne, soit >> nouvelle, une action quelconque pour assurer le transport de ses » bois de la forêt de Villers-Cotterets.

»De son côté, la compagnie, outre l'exécution de ses anciens » traités, revenait toujours armée de ses réclamations d'indemnités » et de dommages-intérêts.

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» Placée au milieu d'intérêts aussi compliqués, et cependant » obligée de plus de consulter les besoins du commerce et d'écouter » ses observations, arrêtée souvent par les obstacles résultant soit » des localités, soit de la possibilité d'avaries ou de défectuosités » presque inévitables dans les travaux de navigation, votre com» mission a dû étendre sa prévoyance sur une foule d'objets acces»soires, et se livrer à la discussion d'un grand nombre d'articles »réglementaires; mais chacun d'eux se rattache au même principe » qui tend à rompre tout rapport de propriété entre le Prince et » la ville relativement au canal de l'Ourcq.

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» Ainsi la question, quoique simplifiée par l'adoption de cette » base unique, n'a pas moins présenté des difficultés graves et » nombreuses. Quelques explications vous feront connaître tout ce qu'a fait votre commission pour les surmonter.

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» Les objets à acquérir du duc d'Orléans ne se composent pas >> seulement du cours d'eau supérieur à Mareuil, et du lit de cette » partie, mais encore du lit de la partie inférieure, qui, en le sup» posant même privé des eaux, resterait toujours une propriété étrangère à la ville, et lui serait indispensable, soit pour le ser>>vice provisoire jusqu'à l'entière mise en activité du canal, soit » pour le reversement des eaux surabondantes dans quelques sai

>> sons.

» Il est nécessaire cependant de faire une distinction entre ces >> divers objets. La partie supérieure de la rivière, ne pouvant, dans >> aucun cas, souffrir de la servitude imposée par la loi de floréal »an X, forme une propriété claire et libre, et sa valeur peut être » déterminée en raison de son produit moyen, calculé sur un cer» tain nombre d'années.

» Mais, pour la partie inférieure, dont le produit, quant à >> présent, consiste pour toute chose dans les droits de navigation, » qui s'anéantiront par la perte des eaux, si le jugement du conseil » de préfecture est confirmé, quel prix assigner à une propriété si >> incertaine!

» Sa valeur dépend de l'issue du procès existant sur la dériva» tion des eaux; elle doit donc entrer dans le calcul hypothétique >> des clauses de la transaction projetée pour éteindre ce procès. » Dans la négociation avec le Prince, la pensée de vos commis»saires s'est ainsi naturellement divisée entre ces deux points bien » distincts, savoir:

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» La fixation du prix des objets réels et utiles à acquérir par la » ville, et celle des sacrifices à faire par la ville, pour terminer » une discussion dont le jugement le plus favorable ne lui garanti» rait pas les suites.

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» La connaissance exacte des produits de la rivière actuelle » par ses droits de navigation, était la principale base sur laquelle » votre commission eût pu former son avis. Les agens du Prince, qui pouvaient seuls fournir le tableau de ces revenus pour les dix » dernières années, les portent, déduction faite de toutes charges, » à une année commune de quarante-quatre mille francs.

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>> Mais, de son côté, l'administration de la ville, en contestant » plusieurs des articles portés en recette, et signalant une atténua» tion notable sur quelques-uns des articles de dépense, réduisait » ce produit présumé à vingt-huit mille francs.

» Dans cette incertitude, sur laquelle votre commission n'avait » aucun moyen de se fixer, l'idée la plus naturelle a été d'adopter » le terme moyen, c'est-à-dire, trente-six mille francs.

» En partant de cette base, elle a commencé par distraire des 1. VII. Série. B. n.° 680 bis.

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» trente-six mille francs la portion applicable à la partie supérieure » de la rivière, partie dont le produit, d'après des documens non » contestés, peut être évalué aux deux cinquièmes du revenu total. » Elle a donc supposé à cet objet non contesté une valeur >> annuelle de... .... 14,000 fr. » Quant aux vingt-deux mille francs restans, appli» cables à la partie qui fait l'objet de la transaction, elle a » ouvert l'avis d'un partage par moitié, et, joignant ainsi » à la somme précédente cette moitié de............. » elle est arrivée à la proposition de constituer par la » ville, au profit de S. A., une rente annuelle, rembour>> sable au denier vingt, de....

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... 11,000.

.... 25,000.

» Sans rejeter les calculs, les mandataires du Prince se sont >> attachés à discuter, non la quotité, mais la nature du revenu offert. Vous reconnaissez, disaient- ils, qu'il y a lieu de rem>> placer au Prince un produit annuel de vingt-cinq mille francs. Or » ce revenu dont il se trouve privé, est d'une nature immobilière, » susceptible par conséquent d'une évaluation proportionnée à la » valeur des biens-fonds: comment mettre sur la même ligne une >> rente constituée au denier vingt, dont le Prince est obligé de >> réaliser de suite le capital pour satisfaire au remploi prescrit par >> l'ordonnance royale du 10 décembre 1823! Au moment où l'Etat » trouve des emprunts à quatre pour cent, peut-on évaluer au» dessus de vingt mille francs de revenu immobilier les cinq cent » mille francs capital réel de la rente proposée! Ils concluaient donc » à demander l'appréciation d'un revenu immobilier de vingt-cinq >> mille francs sur le pied du denier vingt-cinq, ce qui portait le » capital à six cent vingt-cinq mille francs, et la création d'une >> rente cinq pour cent sur ce capital, c'est-à-dire, de trente-un » mille deux cent cinquante francs. Enfin ils ont apporté, comme » ultimatum du Prince, son consentement à recevoir une rente de » trente mille francs au capital de six cent mille francs.

» Vous aurez à prononcer, Messieurs, sur ce point, resté in» décis entre S. A. et votre commission. Vons jugerez si la nature » du revenu dont il s'agit peut être comparée à des produits » immobiliers; si, en lui refusant une pareille assimilation, il ne » doit pas néanmoins être placé dans une classe plus élevée que la » simple rente constituée: vous aurez à prendre en considération la véritable valeur de cette rente dans un moment où le dé>>veloppement du crédit public et la prospérité du royaume ont » multiplié la circulation des capitaux à un point dont on ne peut » citer aucun exemple; vous comparerez cette valeur avec les » avantages que vous trouvez dans l'arrangement, non-seulement

» par l'extinction d'un procès dont la durée et les suites étaient » incalculables, non-seulement par l'acquisition d'objets réels, tels » que la partie supérieure de la rivière d'Ourcq, mais encore par » la continuation de la jouissance de la rivière inférieure, jouis"sance qu'il eût toujours été indispensable de conserver, au moins » pendant les premières années de la mise en activité du canal, et » qu'il vous eût fallu acheter à tout prix.

>> Des considérations aussi puissantes auraient été décisives pour >> votre commission. Elle n'eût pas hésité à vous proposer d'ad» mettre la demande faite au nom du Prince, si la ville eût dû retirer de suite le fruit de ces sacrifices; mais ici viennent se » placer des intérêts d'une autre nature, et c'est maintenant qu'il » faut vous parler de la compagnie concessionnaire.

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>> Le traité du 19 avril 1818, relatif à la confection du canal de » l'Ourcq, en assurant le droit de la ville, lui avait aussi imposé >> des obligations, et la plus importante sans doute était celle de » mettre la compagnie en jouissance des eaux destinées au canal >> aussitôt que les travaux permettraient de les y introduire. Arrêtée » dans l'accomplissement de cette condition par l'opposition de » S. A., la ville était en brtte à de justes demandes d'indemnité; » mais elle avait pris ses mesures pour conserver son recours contre >> le Prince, si, comme tout devait le faire présumer, il était défini>>tivement déclaré mal fondé dans le trouble qu'il venait de faire » éprouver à la ville et à la compagnie. Un article aussi important » devait être d'une haute considération dans la discussion de » l'arrangement avec S. A.; mais sur ce point votre commission »a, dès le principe, éprouvé une résistance invincible. Pour ne » pas rompre la négociation, il a fallu céder au refus positif, fait » au nom du Prince, de contribuer au paiement de l'indemnité » dans une proportion quelconque. Néanmoins, dans tout le cours » des débats, vos commissaires n'ont pas omis de se servir de ce » moyen pour repousser ou atténuer les prétentions qu'ils avaient » à combattre, et sur-tout pour motiver leur insistance contre la » fixation de la rente aux trente mille francs demandés au nom du » Prince.

» Quoi qu'il en soit, la ville s'est trouvée dans la nécessité de pourvoir seule à une indemnité dont le principe ne pouvait être » contesté, mais dont les réclamations exagérées de la compagnie »rendaient la fixation difficile.

» D'un autre côté, il fallait s'occuper d'appliquer à la destination » que l'on s'était proposée, la rivière d'Ourcq, dont la ville venait » d'acquérir la disposition; propriété presque insignifiante si elle

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