Page images
PDF
EPUB

tacle à ce que le locataire portàt les contestations qui s'étaient élevées au sujet de cette résiliation devant les tribunaux civils, à la juridiction desquelles il n'avait pu être dérogé par une disposition du cahier des charges.

C'est donc à tort, semble-t-il, que la Cour d'Alger a cru devoir, en retenant la cause, baser l'affirmation de sa compétence sur ce que la solution du litige n'exigeait que l'application de dispositions claires et précises n'ayant pas besoin d'être interprétées.

Elle aurait eu également qualité pour fixer, le cas échéant, d'après les règles du droit civil, le sens de clauses ambiguës ou obscures; et, en fait, on peut dire qu'elle a interprété, tout en s'en défendant, la décision ministérielle du 29 décembre 1885 qui, modifiant le contrat primitif et substituée à ce contrat, pouvait être, comme lui, discutée et interprétée par les tribunaux, malgré le rejet des réclamations du St Cruvès par la seconde décision d'octobre 1886.

N° 44. Loi tendant à proroger pendant deux années la loi du 6 juillet 1870 relative aux mesures à prendre contre les incendies de la région boisée des Maures et de l'Estérel.

Le Sénat et la Chambre des députés ont adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Article unique. Est prorogée pendant deux années la loi relative aux mesures à prendre contre les incendies dans les régions boisées des Maures et de l'Estérel.

La présente loi, délibérée et adoptée par le Sénat et par la Chambre des députés, sera exécutée comme loi de l'Etat.

Fait à Paris, le 8 août 1890.

Par le Président de la République :

Le Ministre de l'Agriculture,

JULES DEVELLE.

CARNOT.

[blocks in formation]

COUR DE CASSATION (Ch. req.). — 16 Avril 1889.

[ocr errors]

Section. Distraction. Biens communaux.

--

Copropriété.

Les décisions de l'autorité publique, qui, dans un intérêt administratif, séparent des fractions de commune, ne peuvent exercer aucune influence sur les droits de propriété et de copropriété dont ces fractions étaient précédemment saisies 1.

Spécialement, une section de commune, distraite de la commune dont elle faisait partie, conserve les droits de propriété ou de copropriété qu'elle avait sur les biens communaux et patrimoniaux indivis de celle commune antérieurement à la distraction

COMMUNE DE LARZICOURT C. COMMUNE D'AVRIGNY

[ocr errors]

ᎪᎡᎡᎬᎢ :

Attendu que

LA COUR-Sur le moyen unique, tiré de la fausse application des art. 5 et suiv. de la loi du 18 juill. 1837, des art. 7 et suiv. de la loi du 5 avril 1884, de la violation de l'art. 542, C. civ., et d'un défaut de motifs: l'arrêt attaqué reconnaît un droit de copropriété sur les biens communaux et patrimoniaux de Larzicourt, non pas aux habitants de la Rue individuellement, mais à la Rue-sur-Blaise considérée comme section de commune, qualité dont ce groupe d'habitation s'est trouvé investi ipso facto, du moment où sa séparation d'avec la commune de Larzicourt lui a créé des intérêts distincts de ceux de ladite localité; Attendu que les décisions de l'autorité publique qui, dans un intérêt administratif, séparent des fractions de communes, ne peuvent exercer aucune influence sur les droits de propriété ou de co propriété dont ces fractions étaient précédemment saisies; que, de ce principe, formellement réservé par la loi du 12 mai 1883, sur la délimitation de la commune de Larzicourt, il résulte que le village de la Rue-sur-Blaise doit être maintenu dans la copropriété indivise des biens de la communauté dont il a été distrait par ladite loi; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel de Paris, loin de violer les dispositions de loi visées plus haut, en a fait, au contraire, une juste application; - Rejette, etc.

1. La délimitation faite dans l'intérêt de l'administration publique et communale, ainsi que la réunion ou la séparation de sections de communes et leur délimitation nouvelle, ne changent rien, en vertu des art. 5 et 6 de la loi du 18 juill. 1837, lesquels ne sont que la reproduction des principes précédemment admis, aux droits des propriétés patrimoniales des communes ou des sections des communes réunies ou séparées (V. Cass. 29 juill. 1856, motifs. S, 1857. 1. 655. P. 1858.447), ni aux droits conférés aux habitants de ces communes ou tions. V. Cass. 13 avril 1889 (S. 1881.1.81. — P. 1881.1. 166). V. aussi Cass. 13 févr. 1865 (S. 1865.1122. - P. 1865.270). Il en est de même sous l'empire de la nouvelle loi du 5 avril 1884, dont l'art. 7 reproduit les art. 5 et 6 de la loi de 1837. V. M. Morgand, La loi municipale, t. 1er, p. 93.

sec

(Sirey, 12 cah. 89.)

Du 16 avril 1889.

Ch. req.

MM. le cons. Petit, prés. ; Cotelle,

rapp.; Petiton, av. gén. (concl. conf.); Brugnon, av.

N° 46. COUR D'AIX (Ch. corr.) 17 Octobre 1889.

[blocks in formation]

[blocks in formation]

Renvoi à fins civiles.

Lorsque les propriétaires d'un troupeau de chèvres trouvé dans un bois communal opposent aux poursuites dirigées contre eux une exception préjudicielle tirée de ce que le terrain fait partie d'une bandite cédée par la commune à leurs auteurs en payement de ses dettes, le tribu· nal correctionnel meconnaît les prescriptions de l'article 182 du Code forestier, en retenant la cause et nommant un expertpour appliquer les titres, au lieu de renvoyer les prévenus à fins civiles.

ADMINISTRATION DES FORÊTS C. SASSI PAUL; SASSI AUGUSTIN ET ROMAGNI CHARLES.

Le 23 février 1889, le tribunal correctionnel de Nice a rendu le jugement suivant :

Attendu que Sassi Paul, demeurant à Sospel, et Sassi Augustin, demeurant à Breil, prétendent que la parcelle 41, dans la forêt du Bois Noir, appartenant à la commune de Breil, sur laquelle le garde forestier Barberis Honoré a surpris, le 6 décembre 1888, leur berger et fermier Romagni Charles, faisant pacager un troupeau composé de 90 chèvres, fait partie de la bandite appelée Béchion et Morgon, donnée et cédée par la commune de Breil en payement de ses dettes à leurs auteurs par acte du 7 septembre 1645, notaire : Cotto;

[ocr errors]

Que, le tribunal ne possédant pas, quant à présent, les éléments suffisants d'appréciation, il y a lieu de recourir à une expertise;

Par ces motifs,

« Le Tribunal,

Avant dire droit, dit que, par Figuières, conducteur des ponts-et-chaussées de Sospel, expert agréé par les parties et qui, avant d'opérer, prêtera entre les mains du Président du siège le serment prescrit par la loi, il sera accédé sur les lieux litigieux, à l'effet de les visiter, de les décrire, d'en dresser un plan; de rechercher si, ainsi que le prétendent Sassi Augustin et Sassi Paul, la parcelle de bois, sur laquelle a pacagé le troupeau de • chèvres de ces derniers, le 6 décembre 1888, fait réellement partie de la ban« dite qui leur a été cédée par acte du 7 septembre 1645; de faire sur les << lieux l'application de l'acte du 7 septembre 1645 et de tous actes, pieces et documents quelconques qui pourraient lui être soumis, soit par les deux • prévenus, soit par l'Administration des forêts;

De faire toutes constatations utiles ou requises par les parties en cause; d'entendre tous témoins qui pourraient lui être presentés par elles; de recueillir, en un mot, tous les renseignements de nature à faciliter l'accomplissement de sa mission;

De tout quoi l'expert dressera rapport, sur le vu duquel il sera statué par le tribunal ce qu'il appartiendra. »

Ce jugement a été infirmé et les prévenus ont été renvoyés devant les juges civils par un arrêt de la Cour d'Aix, du 17 octobre 1889, dont la teneur suit:

ARRÊT:

Attendu qu'aux termes de l'article 182 du Code forestier, quand il y a lieu à renvoi à fins civiles, le jugement fixera un bref délai dans lequel la partie qui aura élevé la question préjudicielle devra saisir les juges compétents de la connaissance du litige et justifier de ses diligences;

Attendu que les premiers juges, au lieu de renvoyer à fins civiles les prévenus pour l'établissement du droit de bandite dont ils excipaient, ont retenu la cause et nommé un expert pour faire sur les lieux l'application des titres; Qu'ils ont ainsi méconnu les prescriptions de l'article sus-énoncé; Par ces motifs,

La Cour,

Surseoit à statuer sur la poursuite de l'administration des forêts;

Dit que, dans le délai de deux mois, les prévenus seront tenus de saisir les juges compétents et que, faute par eux de ce faire, il sera passé outre; Réserve les dépens.

Président, M. Chabriniac. Conseiller rapporteur, M. Boyer.

OBSERVATIONS. - - Au point de vue des règles de compétence, l'arrêt de la Cour d'Aix est irréprochable. Dès que le tribunal de Nice avait admis la recevabilité de l'exception préjudicielle, il devait prononcer le renvoi à fins civiles.

On peut toutefois se demander si l'exception était bien recevable, et si le titre des S. S. Sassi était de nature, dans le cas où l'existence en serait reconnue, à ôter au fait poursuivi tout caractère de délit, comme l'exige l'article 182 du Code forestier.

En effet les prévenus ne contestaient pas le fait du pacage de leurs chèvres dans une parcelle de forêt communale; ils ne prétendaient pas que cette parcelle n'eût pas été soumise au régime forestier, ce qui aurait suffi pour écarter l'action de l'administration forestière.

Ils soutenaient seulement et offraient de prouver que la parcelle faisait partie d'une bandite (suivant les termes du jugement de première

instance), ou qu'elle était grevée d'un droit de bandite (si l'on adopte l'expression adoptée par la Cour d'Aix dans son arrêt).

Or, quel que soit le caractère légal propriété ou droit d'usage des bandites ou des droits de bandite constitués dans l'ancien comté de Nice, il ne parait pas possible d'y trouver la justification de l'introduction de chèvres sur un terrain soumis au régime forestier.

D'après les définitions des auteurs qui ont fait une étude spéciale de cette question, les bandites sont des territoires plus ou moins étendus, dans lesquels les communes ou leurs ayants droit, appelés bandiotes, sont depuis plusieurs siècles en possession du droit d'affermer le påturage sur l'ensemble de toutes les propriétés communales ou particulières. Lorsqu'il s'agit de moutons ou de chèvres, les propriétaires de forêts comprises dans ces bandites doivent pouvoir s'opposer à l'exercice d'un pacage interdit expressément par le Code forestier, sauf le règlement de l'indemnité que les bandiotes pourraient réclamer (Code for., art. 78 et 112). Les bandiotes ne peuvent donc pas, sans commettre un délit, faire pacager des chèvres dans un bois communal, malgré l'opposition qu'impliquerait forcément la soumission de ce bois au régime forestier.

Mais les communes dont les forêts sont affectées de ce genre de servitude ne disposent pas des ressources pécuniaires qui seraient nécessaires pour leur libération; aussi l'administration forestière a-t-elle. renoncé à gérer leurs bois; le maintien, sous le régime forestier, d'une parcelle grevée d'un droit de bandite ne pourrait résulter que d'un malentendu.

Dans ces conditions, on comprend que, décidés d'avance, pour éviter des embarras à la commune de Breil, à provoquer eux-mêmes la distraction de la parcelle litigieuse du régime forestier, s'il venait à être démontré qu'elle fit réellement partie d'une bandite, les agents forestiers aient voulu être fixés définitivement sur ce point et qu'ils aient, à cet effet, accepté ou demandé un renvoi à fins civiles.

On n'en doit pas tirer la conclusion que, soit à leurs yeux, soit à ceux du tribunal de Nice et de la Cour d'Aix, le droit de bandite puisse prévaloir, en tout état de cause, sur les prohibitions expresses et formelles du Code forestier.

« PreviousContinue »