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1888, sur le territoire de la commune de Tourves, chassé le lièvre à l'aide d'un chien lévrier dit ‹ charnigue » ;

Et, en répression, les condamne solidairement à 50 francs d'amende chacun envers ladite commune et conjointement et solidairement aux frais envers l'État.

Prés., M. Fabry. Min. publ., M. Chevalier. Me de l'Estang, av.

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NOTE. Sur le premier point: L'usage de lévriers pour la chasse est interdit par l'art. 9 de la loi du 3 mai 1844. Pour les raisons énoncées dans le jugement ci-dessus, la jurisprudence étend cette prohibition aux lévriers croisés: Nancy, 18 décembre 1844 (S.46,2,84); Douai 19 janvier 1846 (D. 46,2,60). Adde: Discussion de la loi de 1844 (D.44,3,60); Berriat Saint-Prix, Législation de la chasse, p. 326; Guillon et Villepin, Code des chasses, n° 225 et 226; Dalloz, Code forestier annoté, Loi sur la chasse, n° 213 et suiv.

On peut se demander en vertu de quel article cette infraction est punie.

Deux articles peuvent en effet s'appliquer : ou l'art. 11, § 3, qui punit d'une amende de 100 à 200 fr. ceux qui auront contrevenu aux arrêtés des préfets concernant... l'emploi des chiens lévriers, ou l'art. 12, § 2, qui décide que seront punis d'une amende de 50 à 200 fr. et pourront l'être d'un emprisonnement de six jours à deux mois, ceux qui... auront chassé par d'autres moyens que ceux autorisés par l'art. 9.

La jurisprudence applique ce dernier article à l'espèce ci-dessus. Elle estime que la chasse au lévrier est un mode de chasse défendu par l'art. 9, délit puni par l'art. 12, § 2, tandis que l'art. 11, § 3, ne se réfère qu'à l'infraction à un arrêté préfectoral qui autoriserait dans telles et telles conditions la chasse au lévrier: Nancy, 4 décembre 1844 (Bull. Annales forestières, 1844-45, p. 49); Cass. 19 février 1846 (Bull. Annales for., 1846, p. 175); Dalloz, v° Chasse, n° 280.

(Gazette du Palais, 16 février 1889.)

No 16. COUR D'APPEL DE DIJON (Ch. corr.). 14 Janvier 1889!

Présidence de M. Golliet.

Chasse. Chiens. Maître.

Participation (absence de).

L'existence de tout délit de chasse est subordonnée à un acte personnel et volontaire ayant pour but de rechercher et de poursuivre le gibier afin de se l'approprier. En conséquence, on ne saurait relever un délit de chasse contre celui dont les chiens se sont échappés et, guidés par leur seul instinct, ont poursuivi du gibier sur le terrain d'autrui, sans qu'il y ait eu, de sa part, aucune participation.

SERRE C. MAGNJEN.

LA COUR: Attendu, en droit, qu'il résulte de l'esprit de la loi du 3 mai 1844 sur la police de la chasse, et d'une jurisprudence constante, que l'existence de tout délit de chasse est subordonnée à un acte personnel et volontaire, ayant pour but de rechercher et de poursuivre le gibier afin de se l'approprier;

Attendu que ce principe s'applique spécialement au cas où des chiens, en dehors de toute participation directe ou indirecte de leur maître, auraient poursuivi seuls le gibier sur le terrain d'autrui ;

Attendu, sans doute, que si le maître de ces chiens, sans les suivre ou sans les appuyer, les avait mis ou fait mettre en chasse, ou s'il s'était posté pour guetter la sortie du gibier et pour profiter du résultat de la poursuite, l'existence d'un délit de chasse pourrait être à bon droit relevée à sa charge, puisqu'il y aurait eu participation au moins indirecte à la recherche ou à la poursuite du gibier en vue de le capturer; mais qu'il en serait autrement si les chiens s'étaient échappés à l'insu de leur maître, et si, guidés par leur seul instinct, ils avaient poursuivi du gibier sur le terrain d'autrui, sans la participation de personne ;

Attendu qu'en pareil cas il peut y avoir lieu à une action civile pour réparation du dommage causé par l'incursion du chien sur le terrain d'autrui, mais que légalement il n'y a ni délit de chasse, ni matière à une répression légate;

Attendu que la circonstance que le maître des chiens négligerait fréquemment de les tenir enfermés et qu'il aurait persisté dans son incurie malgré des avertissements réitérés, ne transforme pas la situation et ne saurait fournir au prétendu délit l'élément essentiel qui lui manque; que cette circonstance pourra être prise en considération par les tribunaux civils pour fixer la quotité des dommagss-intérêts à allouer au propriétaire du terrain où auront eu lieu les incursions;

Mais que les tribunaux correctionnels, en l'absence de toute participation directe ou indirecte à un acte de chasse établie à l'encontre du maître des chiens, ne sauraient prononcer une peine contre celui-ci, ni, par suite, le condamner à des dommages-intérêts, la juridiction de répression étant incompétente pour le faire en l'absence du délit ;

Attendu, en fait, que le procès-verbal qui sert de base à la poursuite du sieur Serre, et en vertu duquel les premiers juges ont condamné Magnien par application du § 2 de l'article 11 de la loi du 3 mai 1844, constate que son rédacteur a aperçu, le 1er octobre 1888, à sept heures et demie du matin, quatre chiens courants chassant dans les bois du sieur Serre, au lieu appelé le Percheret, et que, s'étant approché, il a reconnu deux de ces chiens comme appartenant au sieur Magnien; mais qu'il ne relève aucun fait, aucune circonstance quelconque d'où l'on soit autorisé à induire une participation, si indirecte qu'elle puisse être, à un acte de chasse de la part de Magnien; qu'il résulte, au contraire, de l'ensemble du procès-verbal que les chiens chassaient seuls;

Attendu, il est vrai, que le jugement frappé d'appel déclare que le 1er oc

tobre Magnien a laissé vaguer ses chiens dans le but évident de leur permettre de rabattre le gibier sur les propriétés où son droit de chasse est toléré; mais que rien dans les documents de la cause ne vient à l'appui de cette affirmation; que, sur ce point, le garde, entendu comme témoin à l'audience, n'a pas même été appelé à fournir des explications; qu'il n'a jamais été allégué que Magnien fût posté pour attendre la sortie du gibier poursuivi par ses chiens, et que l'intention à lui prêtée par les premiers juges n'est rien moins qu'établie, et se trouve même contredite par les circonstances de la cause; Attendu que ce qui paraît avoir déterminé les premiers juges, c'est ce fait par eux relevé, que Magnien aurait été averti à plusieurs reprises et même par deux procès-verbaux versés aux débats d'avoir à surveiller ses chiens et de ne pas les laisser vaguer sur les terrains de Serre, et que Magnien n'aurait pas tenu' compte de ces avertissements et aurait continué à tolérer les incursions de ses chiens sur lesdites propriétés;

Mais attendu que cette négligence, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, ne saurait suppléer un acte volontaire de chasse de la part de Magnien, à la charge duquel aucune participation directe ou indirecte à la poursuite du gibier sur le terrain de Serre n'est prouvée à la date du 1er octobre 1888; que c'est donc à tort que les premiers juges ont prononcé des condamnations contre Magnien, à raison d'un prétendu délit de chasse qui n'est pas établi; Attendu que la partie qui succombe doit supporter les frais;

Par ces motifs,

Statuant sur l'appel émis par Magnien du jugement du Tribunaf correctionnel de Beaune du 6 décembre 1888;

Dit qu'il a été bien appelé, mal jugé;
Infirme le jugement entrepris;

Renvoie, en conséquence, Magnien des fins de la plainte portée contre lui par Serre ;

Le relaxe des condamnations prononcées contre lui ;

Et condamne Serre à tous les frais de première instance et d'appel.

NOTE. Il est de jurisprudence que, pour qu'il y ait délit de chasse, il faut, de la part eu chasseur, un acte de volonté, une participation matérielle à la chasse. V. conf. Paris, 27 mai 1882 (Gaz. Pal., 82,2,116); Cass., 11 mai 1883 (Gaz. Pal. 83,2,137 (4 partie); Orléans, 31 juillet 1883 (Gaz. Pal. 83,2,457) (2° partie); Nancy, 15 mai 1884 (Gaz. Pal. 84,1,32); Trib. simp. pol. Nogent-sur-Seine, 7 décembre 1887 (Gaz. Pal. 88, 1, supp. 89), avec nos observations et les renvois.

Il existe des jugements en sens contraire.

(Gazette du Palais, 6 février 1889.)

N° 17. COUR DE CASSATION (Ch. des req.). 16 Janvier 1885.

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Animaux. Lapins. - Bois. - Dommages aux champs.
Responsabilité.

Le propriétaire d'un bois ne peut encourir aucune responsabilité à raison du dommage causé aux propriétés voisines par les lapins séjournant dans ce bois, lorsqu'il est constant qu'il n'a commis aucune négligeance et a fait tout ce qui dépendait de lui pour détruire ces animaux. Il en est ainsi notamment lorsqu'il est constant qu'indépendamment de chasses et battues répétées, il a fait défoncer les terriers dans les limites du possible et autorisé les propriétaires riverains à se livrer à la destruction des lapins par tous les moyens permis par la loi, sans autre condition que de prévenir le garde de la propriété.

LA COUR:

LEROY C. ANGLADE.

Sur le moyen unique du pourvoi, pris de la violation des art.

1382 et 1383 C. civ. : Attendu qu'il est constaté par le jugement attaqué qu'Anglade, propriétaire de bois où se trouvent des lapins, n'a commis aucune négligence et a fait tout ce qui dépendait de lui pour détruire ces lapins; qu'en effet, indépendamment de chasses et de battues répétées, il a fait défoncer les terriers dans les limites du possible; que non seulement il avait invité Leroy, fermier des propriétés riveraines, qui se plaignait que ses récoltes fussent endommagées, à participer le dimanche aux battues, mais qu'en outre il l'avait autorisé à se livrer, en semaine, par tous les moyens permis par la loi, à la destruction des lapins, sans autre condition que celle de prévenir le garde de la propriété ; que c'est à bon droit, par suite, que le jugement a déclaré qu'Anglade ne pouvait être rendu responsable du préjudice dont se plaignait Leroy et qu'il n'a point violé les articles visés au pourvoi;

Rejette.

Prés., M. Bédarrides. MM. Delise, rapp.; Chevrier, av. gén.

NOTE. La jurisprudence de la Cour de cassation s'est affirmée un grand nombre de fois en ce sens; elle est suivie par les tribunaux et approuvée par les auteurs. V. Gaz. Pal. T. Q. 1882-1886, vo Animaux, nos 22 et suiv. Adde. Trib. civ. Civray, 3 mai 1888 (Gaz. Pal. 88,1,864) et les renvois.

(Gazette du Palais, 31 janvier 1889.)

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L'énonciation précise des jour et heure auxquels les procès-verbaux des gardes particuliers ont été affirmés est une condition substantielle de la formalité de l'affirmation; si cette énonciation fait défaut, le pro. cès-verbal est nul.

On ne peut y suppléer par une enquête tendant à établir le jour et l'heure précis de l'affirmation, car ce serait substituer le moyen si dangereux d'une enquête aux dispositions impératives de la loi qui a voulu que la fixation du jour et de l'heure fût l'œuvre du magistrat.

DE TUDERT c. POULAIN.

LE TRIBUNAL: Attendu que Poulain prétend que le procès-verbal d'affirmation, dressé en conformité de l'art. 24 de la loi du 3 mai 1844, est nul comme ne relatant ni le jour ni l'heure de la présentation et de l'affirmation du procès-verbal du garde Cottin du 22 novembre 1888;

Attendu que Tudert demande à faire cette preuve par témoins de ce jour et de cette heure;

Attendu que la loi du 3 mai 1844 est une loi spéciale dont les dispositions, en ce qui concerne les procès-verbaux dressés par les agents ou gardes forestiers, doivent être rigoureusement appliquées;

Attendu que l'art. 22 de cette loi dispose que les procès-verbaux des gardes particuliers feront foi jusqu'à preuve contraire, mais sous la condition prévue par l'art. 24, à savoir que, dans les vingt-quatre heures du défit, les procèsverbaux des gardes seront, à peine de nullité, affirmés par les rédacteurs, devant le juge de paix ou l'un de ses suppléants, ou devant le maire ou l'adjoint, soit de la commune de leur résidence, soit de celle ou le délit a été commis;

Attendu qu'il ressort de ce qui précède que l'énonciation précise des jo ur et heure auxquels le procès-verbal a été affirmé est une condition substantielle de la formalité de l'affirmation devant le magistrat ;

Attendu que les procès-verbaux de gardes doivent relater les circonstances de lieu et de temps dans lesquelles a eté commis le délit ;

Attendu que la formalité de l'affirmation n'a pas seulement pour but de rappeler au garde l'importance de l'acte qu'il accomplit; qu'elle a pour but, en outre, dans la pensée du législateur, de faciliter au prévenu l'administration de la preuve contraire en déterminant le jour et l'heure exacte du délit ;

Attendu que le poursuivant pourrait sans doute, si l'indication du jour et de l'heure du procès-verbal d'affirmation a été oubliée ou est erronée, y suppléer et prouver que la formalité de l'affirmation a été accomplie dans le TOME XV. JUIN 1889. III. – ỏ

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