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trairement divisé le troupeau commun en plusieurs troupeaux pour l'exercice des droits d'usage, constitue un délit passible des pénalités édictées par l'art. 72, sus-visé; qu'il appartient aux tribunaux civils seuls, à défaut d'entente entre les communes usagères et les propriétaires des forêts, de statuer sur les contestations relatives au mode d'exercice des droits d'usage, et que l'art. 72 conserve son empire toutes les fois que le juge civil n'en a pas autrement ordonné; que c'est donc à tort, et par une fausse interprétation de cet article, que l'arrêt attaqué déclare, dans une partie de ses motifs, que le fait par l'autorité municipale de diviser arbitrairement le troupeau commun en plusieurs troupeaux, et de faire conduire chacun de ces troupeaux à garde séparée, par des pâtres choisis par elle, ne constitue pas un délit ; que cette partie des motifs de l'arrêt attaqué ne saurait en justifier le dispositif ; Attendu, d'autre part, que les constatations de fait de l'arrêt entrepris ne sauraient davantage justifier le relaxe prononcé, qu'en effet, pour déclarer que la division du troupeau communal en plusieurs troupeaux et la conduite des bestiaux à garde séparée par les pâtres de la commune avaient eu lieu avec le consentement d'Abat, l'arrèt se fonde sur des délibérations du conseil municipal d'Orla et sur la correspondance échangée entre Abat, demandeur, et le maire d'Orla, au sujet de la division du troupeau communal des bêtes à laine en plusieurs troupeaux; que les motifs de l'arrêt, sur ce point, empruntés textuellement à trois autres arrêts rendus le même jour par la Cour d'appel de Toulouse, et statuant sur les délits de garde séparée de bêtes laine, ne pouvaient être utilement invoqués dans la cause, où il s'agissait d'un délit de garde séparée de bêtes aumailles (bêtes à cornes) par un pâtre de la commune; que le consentement du demandeur à la division du troupeau communal des bêtes à cornes en plusieurs troupeaux, qui aurait pu seul justifier le relaxe du prévenu, ne résulte pas des motifs de l'arrêt attaqué; qu'enfin, ledit arrêt déclare statuer sur un délit constaté par procès-verbal du 23 mai 1887, alors que le délit poursuivi résultait d'un procès-verbal dressé le 17 juin 1887, ce qui peut laisser subsister un doute sur le point de savoir si la Cour a bien statué sur le délit qui lui était déféré; Attendu que, dans ces conditions, l'arrêt attaqué doit être annulé pour insuffisance de motifs; Casse, etc.

Du 22 déc. 1888. Ch. crim.MM. Loew, prés.; Sevestre, rapp. ; Loubers, av. gén. ; A. Périer, av.

N° 34. COUR D'APPEL DE BOURGES (Ch. corr.).

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L'étang qui sert de déversoir à un canal de navigation avec lequel il conmunique par une rigole artificielle n'est que l'accessoire de ce canal. En conséquence, celui-ci étant grevé, au profit du public, du droit de

pêche à la ligne flottante tenue à la main, l'étang doit supporter la même charge. Tout individu a donc le droit, aux termes du dernier paragraphe de l'art. 5 de la loi du 15 avril 1829, d'y pêcher à ladite ligne.

En vain prétendrait-on que les travaux d'art effectués pour mettre en communication l'étang et le canal, empêchant d'aller en bateaupêcheur de l'un à l'autre, la pêche à la ligne ne saurait être permise dans cet étang, aux termes du § 2 de l'art. 1or de la loi précitée, ce texte ne s'appliquant qu'aux cours d'eau naturels et au cas où il s'agit de rechercher si le droit de pêche appartient à l'État ou aux riverains (1re espèce).

DUCHEMIN C. FRÈRES RENAULT.

LA COUR: Attendu qu'il résulte d'un procès-verbal, en date du 13 novembre 1888, que Renault Louis et Hubert ont pêché le même jour dans l'étang du Puits à la ligne flottante tenue à la main ; qu'ils ne méconnaissent pas le fait, mais qu'ils prétendent qu'en agissant ainsi ils ont usé du droit, accordé à tout individu par l'art. 5 de la loi du 15 avril 1829, de pêcher dans les fleuves, rivières et canaux désignés dans les deux premiers paragraphes de l'art. 1er de ladite loi;

Attendu que l'étang du Puits est un vaste réservoir (180 hectares environ) aménagé à proximité du canal de la Sauldre, qui est alimenté par la rivière de ce nom; qu'il est destiné à recevoir le trop plein des eaux de ce canal et à les lui restituer ensuite, lorsque la rivière qui l'alimente devient insuffisante, pendant une partie de l'année, pour assurer le service de la navigation; qu'à cet effet des travaux d'art établissent la communication entre ces deux ouvrages au moyen d'un réservoir et de vannes qui, lorsqu'elles sont ouvertes, permettent aux poissons de passer du canal dans l'étang et de l'étang dans le canal;

Attendu que cette voie de navigation et son réservoir appartiennent au domaine public de l'État; qu'ils concourent l'un et l'autre au même but, et que l'établissement du réservoir n'a été nécessité que par l'ouverture du canal; que le droit de pêche y est exercé au profit de l'État; que, dans le cahier des charges auquel sont soumis les adjudicataires, toutes les prescriptions relatives à la police de la pêche qui y sont contenues s'appliquent indistinctement au canal et au réservoir; qu'en un mot, au point de vue de la pêche, ils sont soumis au même régime; qu'il suit de là que, le canal étant grevé, au profit du public, du droit de pêche à la ligne flottante tenue à la main, l'étang du Puits, qui n'en est que l'accessoire et qui tire ses eaux du canal, doit supporter la même charge, de même que les noues, boires et fossés, qui tirent leurs eaux des fleuves et rivières navigables, sont assimilés à ces rivières au point de vue de la pêche;

Mais attendu que Duchemin, adjudicataire du droit de pêche sur l'étang du Puits, prétend qu'il faut pousser l'assimilation jusqu'au bout et décider que. la communication du canal avec l'étang ne pouvant s'effectuer en bateau de pêcheur, le public n'a pas le droit d'y pêcher à la ligne flottante tenue à la main;

Attendu, il est vrai, que les travaux d'art, destinés à déverser les eaux du canal dans le réservoir et à les rendre au canal, ne permettent pas à un bateau de pêcheur de pénétrer dans l'étang; mais que cette condition, imposée à l'État par le paragraphe 2 de l'art. 1o de la loi du 15 avril 1829 pour qu'il puisse exercer le droit de pêche dans les dépendances des fleuves et rivières navigables ou flottables, doit être restreinte aux cours d'eau naturels et limitée au cas où il s'agit de rechercher si le droit de pêche appartient à l'Etat ou aux riverains; qu'en effet, cette disposition de la loi a eu pour but de permettre aux fermiers de la pêche de pouvoir exercer librement leur droit, sans être obligés de passer sur les propriétés qui bordent les noues, boires et fossés, et qui ne sont grevées d'aucune servitude de navigation; que tout autre mode de pénétrer dans les boires, noues et fossés eût exposé l'État ou ses ayants cause à des réclamations et à des responsabilités; que c'est en vue de les prévenir que la loi a soumis le droit de l'État à la pêche, dans les dépendances des fleuves et rivières navigables, à des conditions qui en permettent l'exercice non interrompu et sans préjudice pour les riverains;

Mais attendu que ces considérations ne peuvent s'appliquer à la pêche sur les canaux et leurs déversoirs, lorsqu'ils appartiennent à l'État ; que le public a en tout temps un libre accès sur leurs bords, et que le droit de pêche peut y être exercé autrement qu'en bateau de pêcheur sans causer de dommages aux propriétés voisines;

Attendu, au surplus, que, si la loi eût voulu s'attacher à d'autres communications que celle qui permet au poisson de passer des canaux dans leurs dépendances, il est manifeste que, s'agissant de travaux d'art, elle eût soumis cette communication à d'autres conditions que celles qui résultent des accidents naturels des fleuves, puisqu'il serait toujours permis à l'État de s'exonérer d'un droit écrit dans la loi, en exécutant ses travaux de façon à ce qu'ils s'opposent au passage libre et permanent d'un bateau de pêcheur;

Attendu, enfin, que, depuis l'ouverture du canal qui remonte, pour cette section, à plus de trente années, jusqu'au jour où Duchemin est devenu, en novembre 1887, adjudicataire du droit de pêche sur l'étang du Puits, le public a toujours été admis à y pêcher à la ligne flottante tenue à la main; que sans doute cet exercice de la pêche ne crée aucun droit en faveur des frères Renault, mais qu'il indique que jusqu'à présent il n'avait pas paru douteux à l'État ou à ses ayants droit que la pêche à la ligne flottante tenue à la main ne fût autorisée par la loi au profit du public dans l'étang du Puits; que cette solution doit être adoptée par les motifs qui viennent d'être exposés, et que c'est par conséquent à tort que Duchemin a fait citer les frères Renault devant la juridiction correctionnelle sous la prévention de vol ou de tentative de vol de poissons dans un réservoir, ou d'infraction à l'art. 5 de la loi du 15 avril 1829:

Sur les dommages-intérêts réclamés par les prévenus:

Attendu qu'ils ne justifient d'aucun préjudice, et qu'il est certain que Duchemin n'a pas agi malicieusement et dans l'intention de leur nuire;

Par ces motifs,

Confirme le jugement dont est appel, et renvoie les frères Renault de la plainte, sans dépens;

Dit n'y avoir lieu à leur allouer des dommages-intérêts;

Condamne Duchemin en tous les dépens d'appel.

MM. Bonabeau, prés. ; Simonnet, rapp.; Daniel, av.gén.; Mes Lebrasseur (du barreau de Paris) et Thiot-Varennes, av. 1.

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Il n'est pas permis de pêcher à la ligne dans les ruisseaux ou rigoles qui alimentent le réservoir d'un canal, ces ruisseaux ou rigoles ne tirant pas leurs eaux des fleuves, rivières et canaux navigables ou flottables.

:

MIN. PUB. C. ROYER.

LE TRIBUNAL - Considérant qu'il résulte d'un procès-verbal régulier, dressé par le garde particulier Bontemps, à la date du 7 mars dernier, dûment enregistré, que Royer a été trouvé pêchant à la ligne flottante dans la rivière de Mouche, territoire de Perrancey, dans la partie louée par l'État au sieur Décollogne, suivant adjudication publique en date du 6 octobre 1888; que Royer reconnaît l'exactitude du procès-verbal, mais soutient qu'il n'a fait qu'user d'un droit résultant pour tous du dernier paragraphe de l'article 5 et des deux premiers paragraphes de l'article 1er de la loi du 15 avril 1829;

Mais considérant que Royer invoque à tort les dispositions exceptionnelles précitées; que, pour le démontrer, il est sans intérêt de rechercher si, dès aujourd'hui, comme le prétend l'inculpé, le réservoir dit de la Mouche et les terrains sur lesquels il sera établi font partie du domaine public de l'État, et si tout au moins ils entreront ou non dans ledit domaine à l'ouverture à la navigation du canal de la Marne à la Saône, dont ils sont une dépendance; qu'il suffit de remarquer que ledit réservoir, placé bien en amont, à une distance notable du canal, alimenté par les ruisseaux de la Mouche et du Morgon, ne tirera nullement ses eaux du canal auquel, au contraire, selon les besoins du service, il transmettra les siennes par une rigole artificielle ne permettant pas de remonter dans ledit réservoir, même au moyen d'un bateau pêcheur, sans qu'il puisse y avoir aucune libre circulation du poisson entre ledit réservoir et le canal; qu'ainsi ce bassin ne se trouve point dans les conditions prévues par les deux premiers paragraphes de l'article 1er de la loi de 1829; qu'en conséquence, il doit être exclu de la permission d'y pêcher à la ligne flottante tenue à la main », puisque cette permission n'est donnée à tout individu par le dernier paragraphe de l'article 5 de la loi que dans les fleuves, rivières et canaux navigables ou flottables et dans un cours tirant ses eaux des fleuves, rivières et canaux navigables et flottables, et dans

1. Voir Répertoire, tome V, p. 409, un arrêt de la Cour de Dijon, conforme à celui de la Cour de Bourges.

lequel on peut en tout temps librement passer en bateau pêcheur »; que, par conséquent, la prétention de Royer ne saurait être accueillie, le canal et ses accessoires fussent-ils déjà ouverts à la navigation;

Considérant, au surplus et en tout cas, que le fait incriminé a été accompli, non dans le réservoir lui-même, qui n'est point actuellement en eau, mais dans le cours de la Mouche », dans un endroit non encore inondé et bordé de chaque côté de terrains appartenant à l'État; que Royer n'allègue point avoir la permission de Décollogne, à qui l'État a transmis son droit de pêche ; que le fait qui lui est reproché tombe donc évidemment sous l'application de l'article 5 de la loi de 1829;

Considérant que le préjudice causé est inférieur à 25 francs, et qu'il existe des circonstances atténuantes en faveur de Royer;

Par ces motifs :

Déclare Royer convaincu du délit de pêche, sans autorisation de l'adjudicataire, dans un cours d'eau amodié par l'État;

Le condamne à 2 francs d'amende et aux dépens.

MM. Noble. prés.; Guenot, proc. de la Rép.; Me Mougeot, av.

No 36. TRIB. CIV. DE BAUME-LES-DAMES.

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Affouage. Commune.

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Les habitants d'un hameau qui, par mesure administrative, a été distrait d'une commune et rattaché à une autre, continuent à exercer le droit d'affouage dans la commune à laquelle ils appartenaient autrefois.

COURTOT c. COMMUNE DE CHATILLON-GUYOTTE.

Le sieur Courtot est propriétaire d'une maison sise au Moulin-deQuennecy. Ce hameau faisait anciennement partie de la commune de Châtillon-Guyotte; en 1826, lors de la confection du cadastre, il en fut détaché pour être incorporé à celle de Pouligney. Pendant quelque temps, les habitants du Moulin-de-Quennecey continuèrent à figurer sur la liste affouagère de Châtillon; mais en 1831, ils en furent rayés. Ils actionnèrent alors la municipalité de Pouligney. Le Tribunal de Baume les débouta de leur demande, en décidant que l'affouage était dû, non point par la commune à laquelle ils avaient été réunis, mais par celle dont ils avaient été séparés. Ils se retournèrent donc contre la commune de Châtillon-Guyotte, qui fut condamnée, en 1833, à leur délivrer l'affouage.

Les auteurs du sieur Courtot ont exercé jusqu'en 1886, à Châtillon

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