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Mines. Accord sur la délimitation entre le concessionnaire et le propriétaire de la surface. Validité.

L'accord entre le concessionnaire d'une mine et le propriétaire de la surface, relativement aux limites de leurs droits respectifs, est subordonné à la délimitation administrative à intervenir.

En conséquence, une Cour, appelée à statuer sur la question de validité de cet accord, surseoit, à bon droit, à statuer jusqu'à ce que l'administration ait procédé à la délimitation de la mine.

SOCIÉTÉ JOHN COCKERILL C. KÉTY.

Ainsi jugé, après délibéré en Chambre du conseil, par le rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour de Nancy, du 21 août 1885.

Du 8 nov. 1886. Ch. des requêtes, - MM. Bédarrides, prés.; Féraud-Giraud, cons. rapp.; Petiton, av. gén. (concl. conf.); Me Fosse, av.

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OBSERVATIONS. La délimitation d'une concession de mines n'est pas un contrat tel qu'en peuvent former deux propriétaires voisins pour déterminer la limite de leurs héritages; c'est un acte unilatéral de l'autorité administrative, analogue quant aux formes à celui qui intervient pour les bois du domaine public (loi du 22 déc. 1789, 8 janv. 1790). Le Tribunal des conflits considère cet acte comme l'interprétation du décret de concession de la mine (confl., 28 fév. 1880, Holtzer. Pal. adm., XVII, 453); c'est donc un décret en Conseil d'État qui doit régler les difficultés soulevées au sujet de l'étendue de la concession, tant à l'égard des gites souterrains que des gites superficiels (minières) qui peuvent y être rattachés. (V. art. 70 de la loi du 27 juil. 1880.)

Lorsqu'une concession de mines a été accordée au-dessous d'une forêt, les agents forestiers ne doivent donc pas procéder à la délimitation et au bornage suivant les articles 8 et suivants du Code forestier; l'opération serait nulle et de nul effet. Ils doivent attendre ou provoquer l'acte administratif qui seul produira des résultats opposables à tous.

Malgré la décision ci-dessus relatée du Tribunal des conflits, sera-t-il toujours nécessaire de faire intervenir le président de la République et

le Conseil d'Etat? Nous comprenons cette intervention lorsqu'il s'agit de trancher une difficulté véritable, car alors il y aura réellement interprétation de titre de concession. Mais si l'on demande uniquement à appliquer sur le terrain le plan joint au décret, il nous semble qu'un arrêté préfectoral doit suffire; cette distinction est en harmonie avec l'ensemble de la loi de 1880, qui attribue expressément au préfet (art. 43) le droit de régler les occupations et les indemnités y relatives, c'est-à-dire des affaires au moins aussi importantes qu'un bornage, sans avoir besoin de recourir à une autorité supérieure.

(Le Droit du 9 novembre 1886.)

N° 5. COUR DE CASSATION (Ch. crim.).— 25 Avril 1884.

Contrainte par corps.

Personnes civilement responsables.
Frais de justice.

La contrainte par corps ne peut être prononcée contre les personnes civilement responsables pour assurer le recouvrement des frais de justice1. (C. civ. 1384, 2063; LL. 22 juill. 1867, art. 1or et 3; 19 déc. 1871, art. 1er et 2.)

ADMINISTRATION DES CONTRIBUTIONS INDIRECTES C. CAMPEL.

ARRÊT:

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LA COUR; Sur le moyen tiré de la violation par fausse application de l'art. 2063 C. civ., et de la violation des art. 156, 157 et 174 du décret du Attendu 18 juin 1811, et des art. 1er et 2 de la loi du 19 décembre 1871: qu'aux termes de l'art. 2063 C. civ., la contrainte par corps ne peut être ordonnée que dans les cas expressément déterminés par la loi, et qu'aucun texte ne permet de la prononcer contre les personnes civilement responsables, pour assurer le recouvrement des frais de justice, qu'il résulte en effet de la combinaison des art. 51 et 52 C. pén., 33, 39 et 41 de la loi du 17 avril 1832, 1er et 3 de la loi du 22 juillet 1867, 1er et 2 de la loi du 19 décembre 1871, que la responsabilité civile à raison d'un crime, d'un délit ou d'une contra

1. Principe applicable pour toutes les condamnations quelconques à l'égard des personnes civilement responsables. Sic Darbois, Traité de la contrainte par corps, n° 91,253; Guyot et Puton, Contrainte par corps, n° 13; et comme application dans un cas spécial et pour une affaire forestière: Cass. cr., 25 mars 1881. Chiappini, Rep. for., XI, 251.

vention, ne peut soumettre celui qui l'a encourue qu'aux dispositions de la loi civile, et que l'intention manifeste du législateur de 1871, en rétablissant la contrainte par corps pour le recouvrement des frais de justice criminelle, alors qu'il en maintenait la suppression en matière civile, a été de n'autoriser l'emploi de cette mesure qu'à l'égard de ceux qui ont été condamnés comme coupables de crimes, délits ou contraventions; qu'en refusant d'ordonner que Campel père serait contraint par corps au payement des frais auxquels il a été condamné comme civilement responsable de Justin-Bernard Campel, son fils mineur, l'arrêt attaqué, loin d'avoir violé les textes de loi susvisés, en a fait au contraire une saine application; Rejette le pourvoi de l'Administration des Contributions indirectes contre l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix, en date du 29 août dernier, etc.

Du 25 avril 1884. - Cour de cassation (Ch. crim.). -MM. Baudouin, prés.; Vételay, rapp.; Rousselier, av. gén.; Arbelet, av.

(Sirey, 1887, I, 340.)

No 6. CIRC. MIN. DE L'INTÉRIEUR. 6 Avril 1887.

Pigeons voyageurs. Interdiction de capture.

MONSIEUR LE PRÉFET, Depuis plusieurs années, de grandes quantités de pigeons voyageurs sont tués pendant la durée de la chasse, soit par des braconniers, soit par des chasseurs qui se croient fondés à les assimiler au gibier ordinaire.

Dans l'intérêt de l'État, qui a reconnu l'utilité des colombiers militaires, et dans l'intérêt des sociétés colombophiles, qui s'imposent des sacrifices pour l'élève de ces oiseaux, mon département a été invité à intervenir pour les protéger contre la destruction.

Les diverses espèces de pigeons ne sont pas susceptibles d'une réglementation uniforme. Ceux qui vivent à l'état sauvage sont classés, dans plusieurs départements, par les arrêtés réglementaires de la police de la chasse, dans la nomenclature des animaux nuisibles, que le propriétaire peut détruire, sur ses terres, en tout temps et sans permis. Les pigeons domestiques sont régis par la loi du 4 août 1789. De la jurisprudence qui s'est établie en cette matière, il résulte que, dans les communes où la fermeture des fuies ou colombiers est ordonnée, pendant un temps déterminé par des arrêtés spéciaux, le pigeon est, durant cette période, considéré comme gibier, et susceptible d'être chassé. Lorsqu'aucun arrêté ne prescrit la fermeture des fuies ou colombiers, et c'est le cas le plus ordinaire, les pigeons sont considérés comme propriété privée. A ce titre, ils ne peuvent être chassés; mais le propriétaire a le droit de les tuer sur ses terres, même à l'aide d'armes à feu, s'ils portent dommage à ses propriétés. Il ne lui est d'ailleurs pas permis de les enlever et il doit les laisser sur place.

Cette législation ne protège pas suffisamment le pigeon voyageur. Mais, en raison des services spéciaux auquels on l'emploie, cet oiseau ne rentre plus dans les conditions prévues par la loi du 4 août 1789 et semble comporter une réglementation spéciale. Le pigeon de course perd son caractère de gibier et devient essentiellement un oiseau utile. L'oiseau qui peut, à l'occasion, servir de messager à une population assiégée ne semble pas avoir moins de titres que celui dont l'utilité consiste à dévorer les insectes, pour entrer dans la catégorie des oiseaux utiles et bénéficier ainsi de la disposition de la loi du 22 janvier 1874, qui permet aux préfets de prendre des arrêtés pour protéger ces espèces contre la destruction.

Tel est aussi le sentiment de mes collègues des départements du commerce, de la guerre et de la justice, dont j'ai eu soin de prendre l'avis. La classification des pigeons voyageurs dans la catégorie des oiseaux utiles aura d'ailleurs pour effet de provoquer sur cette matière des décisions judiciaires et de créer une jurisprudence à laquelle l'autorité administrative ne manquera pas de conformer ses décisions.

Pour ces motifs, je vous prie de vouloir bien prendre un arrêté à l'effet d'interdire, dans votre département, la capture et la destruction, en tout temps. et par tous procédés, des pigeons voyageurs. Si votre département se trouve du nombre de ceux où la chasse de certaines espèces utiles est déjà prohibée par la réglementation en vigueur, l'arrêté que vous prendrez à l'occasion des pigeons de course pourrait, sans inconvénient, en reproduire la liste et donner ainsi une nomenclature complète des oiseaux dont la chasse est interdite sous toutes les formes et en toute saison.

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Cet arrêté visera la loi du 4 août 1789 1, la loi du 22 janvier 1874 2, l'arrêté, s'il y a lieu, qui régit la police de la chasse dans votre département et les présentes instructions.

La constatation des contraventions qui incombera, par l'effet de votre arrêté, aux divers agents chargés de la police de la chasse, ne présente aucune difficulté. Pour s'assurer si les pigeons capturés ou abattus appartiennent aux espèces dont la chasse est interdite, il suffira aux agents de regarder s'ils portent, sous les grandes pennes des ailes, le cachet d'une société ou d'un établissement colombophile. Tout pigeon revêtu de cette marque fait partic des colombiers postaux. Quant au chasseur, il reconnaîtra assez facilement le pigeon voyageur, oiseau de haut vol et de petite taille, pour ne pas le confondre avec les espèces domestiques ou sauvages.

Je désire que l'arrêté que vous prendrez conformément aux instructions contenues dans la présente circulaire me soit communiqué, afin que je puisse vous présenter telles observations qu'il appartiendra.

Recevez, etc.

Le Président du Conseil, Ministre de l'intérieur et des cultes,
René GOBLET.

1. Loi du 4 août 1789. Art 2.... Les pigeons seront enfermés aux époques fixées par les communautés, et, durant ce temps, ils seront regardés comme gibier, et chacun aura le droit de les tuer sur son terrain.

2. Loi du 3 mai 1844, modifiée le 22 janvier 1874. Art. 9...... (Les préfets des départements) pourront prendre également des arrêtés: 1° pour prévenir la destruction des oiseaux ou pour favoriser leur repeuplement.

No 7. CASS. BELGIQUE. 21 Novembre 1887.

Délit de chasse.

Administration forestière.

Action en justice.

L'administration forestière a qualité pour poursuivre les délits de chasse dans les bois soumis au régime forestier 1. (Arr., 28 vendém. an V; C. instr. crim., 1.)

COORENLAND.

ARRÊT :

LA COUR; Sur l'unique moyen, pris de la violation de l'art. 1er C. instr. crim., qui ne donne l'action pour l'application des peines qu'aux fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi, en ce qu'aucune loi ne donne à l'Administration forestière l'action publique en matière de délits de chasse commis dans les bois et forêts, action que lui reconnaît cependant l'arrêt attaqué : Attendu que l'arrêté du 28 vendém. an V avait assimilé les délits de chasse aux délits forestiers, en ordonnant aux agents de l'Administration d'en dresser procès-verbal dans la forme prescrite pour les autres délits forestiers; que cette assimilation a sa raison d'être dans l'atteinte que ces délits peuvent porter à la propriété et à la conservation des bois soumis à la surveillance de l'État; - Attendu que, par suite, la compétence de l'Administration pour poursuivre en son nom les délits de chasse commis dans les bois soumis au régime forestier a toujours été admise; Attendu que rien, dans les discussions de la loi du 19 déc. 1854, ne révèle l'intention du législateur d'innover sur ce point; qu'un texte formel eût été nécessaire pour modifier cette compétence jusqu'alors non contestée; que, loin de là, l'art. 121 de la loi de 1854 consacre à nouveau l'assimilation des délits de chasse dans les bois aux contraventions forestières, en en ordonnant la recherche et la constatation par les mêmes agents et gardes forestiers; Attendu que l'art. 120, en reconnaissant à l'Administration le droit de poursuite pour tous délits et contraventions commis dans les bois et forêts soumis au régime forestier, a, par cette formule générale, entendu conserver à l'Administration l'action publique quant aux délits de chasse constatés dans les bois confiés à sa garde; qu'en le décidant ainsi, l'arrêt dénoncé a fait une juste application des lois sur la matière; Attendu, au surplus, que toutes les formalités substantielles ou prescrites à peine de nullité ont été observées, et que la peine appliquée est celle de la loi; Rejette, etc.

-

Du 21 nov. 1887. Cass. Belgique (2o ch.). — MM. le chevalier Hynderick, prés.; Corbisier de Méaultsart, rapp.; Bosch, av. gén. (concl. conf.).

(Sirey, 1888, 3 cah.)

1. La jurisprudence française est depuis longtemps fixée dans ce sens. Voir Répertoire 1866 67. Colmar, 13 juillet 1865. p. 56. — Colmar, 15 janvier 1867, p. 322. Cass., 2 août 1867, p. 338. Rép. 1868-69, Cass., 24 décembre 1868.

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