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CHAPITRE III.

DANEMARCK. Travaux des états des îles danoises et de Schleswig.—Questions de finances. · Débats sur une ordonnance qui restreint pour les ouvriers la liberté de voyager à l'étranger. — Question de la publicité des débats. - Pétitions.

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SUÈDE et NORWEGE. Travaux préliminaires du storthing de Norwége. Ouverture de la session. - Propositions royales relatives au veto du roi et au droit de conférer la naturalisation à des étrangers Elles sont rejetées.

- Le roi ordonne de dissoudre le storthing. - Résolution de l'assemblée sur cette mesure. Motion relative au pavillon norwégien. — Décision prise contre M. Lowenskiold, l'un des conseillers d'état norwégiens. - Dissolution du storthing. —Adresse du storthing au roi. - Réponse du roi à cette adresse. Convocation d'un storthing extraordinaire. — Mise en jugement et condamnation de M. Lowenskiold, pour n'avoir pas protesté contre la dissolution du storthing. — Nomination d'un gouverneur de Norwége. Ouverture du storthing extraordinaire. — Exposé de la situation du pays. Travaux du storthing. Clôture de la session. Convention conclue entre la France et le royaume suédo-norwégien pour la suppression de la traite des noirs.

RUSSIE et POLOGNE. Décrets divers relatifs à la Pologne.

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Convention entre

La Porte et la Russie, pour l'évacuation de Silistrie. — Opérations militaires en Circassie. —Accident arrivé à l'empereur.- Saisie d'un bâtiment anglais sur les côtes de Circassie.

DANEMARCK.

Les états de Holstein et ceux des îles danoises, que nous avons vus se réunir pour la première fois au mois d'octobre de l'année dernière, ont continué, cette année, à s'efforcer de réparer le long temps écoulé depuis la promesse faite par le roi de les convoquer, en soulevant les questions constitutionnelles les plus graves: la responsabilité ministérielle, lå liberté de la presse, la publicité des débats parlementaires, la nécessité des budgets réguliers, les réductions d'impôts les économies d'administration, etc., etc.

L'assemblée de Roskilde prit trois résolutions remarqua

bles: la première portait qu'on ne devait pas combler le déficit dans les finances par de nouvelles impositions ou par des emprunts, mais en réglant avec plus d'économie les dépenses de l'état; la seconde demandait au roi la nomination d'une commission non composée exclusivement de fonctionnaires, et chargée d'indiquer les meilleurs moyens économiques pour le service public; la troisième enfin réclamait la publication annuelle du budget.

Tout en s'occupant plus particulièrement des questions d'administration, cette assemblée ne négligeait pas les questions politiques, et lorsque le gouvernement lui eut soumis une proposition dont l'effet aurait été d'imposer législativement de nouvelles entraves à la liberté de la presse, elle opposa de la résistance à cette prétention, et insista pour que la loi actuelle ne fût pas modifiée.

S'appuyant d'une pétition signée par 1,036 artisans de Copenhague, un député avait fait la motion de demander l'abolition de l'ordonnance du 23 octobre 1835, qui interdit aux ouvriers de voyager dans les pays étrangers où les associations sont tolérées publiquement. L'auteur de cette motion avait exposé le tort que l'ordonnance faisait à l'industrie et les obstacles qu'elle apportait aux progrès des arts; il avait d'ailleurs déclaré qu'il ne regardait pas comme dangereux le retour d'un Danois dans sa patrie, lorsqu'il y revenait seul avec des opinions plus libérales qu'il cherchait à propager parmi ses concitoyens.

La pétition et la motion avaient été renvoyées à une commission qui fit, le 10 février, un rapport où elle émettait l'avis que l'ordonnance constituait un empiètement réel snr les droits des ouvriers. En conséquence la commission concluait en faveur de la prise en considération de la motion, et demandait qu'une requête fût adressée au gouvernement pour obtenir une modification des termes de l'ordonnance. Il était vrai que la confédération germanique avait pris une résolution analogue; mais la confédération n'avait aucun

pouvoir sur des pays qui n'étaient pas sous sa juridiction; elle ne pouvait pas empêcher que des ouvriers des pays étrangers se rendissent en Belgique et en France, par exemple. La commission terminait en réclamant une loi plus conforme à la justice, et plus favorable aux droits des ouvriers.

Le commissaire royal ayant fait observer que l'ordonnance n'était que transitoire, un député soutint qu'elle n'en devait pas moins être rendue avec la coopération des états. Le commissaire royal combattit cette opinion; il déclara que le roi n'avait jamais pu songer à se priver du droit de publier des ordonnances. En cette circonstance, le roi avait jugé à propos d'étendre la prohibition stipulée vis-à-vis des provinces de la confédération, à celles même qui n'en faisaient pas partie. En définitive, après une discussion longue et animée, la motion ne fut rejetée qu'à une majorité de 7 voix (36 contre 89).

L'assemblée de Roskilde en vint aussi à traiter la question de la publicité des débats parlementaires, qui avait déjà été résolue affirmativement par les états du Holstein. Une pétition signée par 1227 propriétaires de Copenhague et tendant à réclamer cette publicité, avait été adressée à l'assemblée et renvoyée à une commission dont le rapport fut favorable à la demande des pétitionnaires. Toutefois, la commission était seulement d'avis d'exprimer au roi des voeux modestes en faveur de la publicité des délibérations des états, et de laisser à S. M. le loisir de prendre à cet égard telle résolution qu'elle jugerait convenable. Cette opinion parut au député qui avait présenté la pétition (M. Hausen), trop peu en harmonie avec les exigences de l'époque; c'est pourquoi il proposa à la Chambre d'adresser au roi une requête demandant: 1° l'admission du public aux débats parlementaires pour les états provinciaux du Danemarck, hors le moment du vote et le cas du comité secret; 2° une plus grande publicité de ces débats par l'insertion des propositions et des discours des orateurs dans le Journal des États. Cette motion viveAnn. hist. pour 1836,

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ment combattue par le commissaire du roi, n'en fat pas moins adoptée à une immense majorité (53 voix contre 13). Un amendement du vice président, M. Haidts, ayant pour but de demander que cette publicité complète eût lieu dès à présent, obtint également l'assentiment de l'assemblée. La discussion de cette même question de la publicité des débats parlementaires remplit trois séances (8, 9 et 10 juin) dans l'assemblée de Schleswig. La commission avait conclu à l'adoption d'une motion recommandant la publicité au moyen de l'admission du public aux séances; publicité que le roi désirait, disait-on, qui formait la base du système représentatif, et qui pouvait seule, suivant le rapport, intéresser les citoyens aux affaires du pays. Le prince Frédéric d'Augustenbourg, membre des états de Schleswig, se prononça en faveur de la publicité; mais il voulait qu'elle fût soumise en quelque sorte à un contrôle; il jugeait la distribution des cartes d'entrée le meilleur mode d'admission du public dans les galeries. Cette fois encore, le commissaire royal s'opposa de toutes ses forces à la motion; il déclara qu'elle n'aurait aucun résultat. Le prési dent fit ensuite un résumé de tous les argumens présentés dans la discussion, et conclut en votant avec chaleur pour la publicité dans l'acception la plus large du mot. Le devoir de la Chambre, disait-il, était de proclamer la vérité, sans tenir compte d'aucune considération, et surtout sans se laisser intimider par le ton menaçant du commissaire royal. Quel ques députés ayant cru devoir prendre la défense de ce der nier et justifier son discours, auquel ils ne trouvaient aucun caractère de menace, le prince Frédéric reprit la parole pour appuyer les argumens du président. Enfin, après des débats prolongés, et parfois orageux, les conclusions du rapport de la commission furent adoptées à une très-forte majorité.

Une proposition tendant à demander que les noms des députés qui prenaient part aux délibérations parlementaires fussent publiés par la Gazette des États, obtint ensuite

mo

l'unanimité des voix; mais l'assemblée rejeta une autre tion, ayant pour objet de prescrire l'insertion des discours textuellement et in extenso dans cette même gazette.

En résumé, cette première session des états provinciaux de la monarchie danoise, avait été remarquable et par leurs efforts pour élargir le cercle étroit que le pouvoir royal avait tracé à leur action, et par le développement qu'elle avait donné à l'esprit public. Il s'était singulièrement manifesté par le nombre de pétitions adressées aux diverses assemblées des États. Celle du Holstein en avait reçu 130, et celle de Schleswig plus de deux fois autant. L'une de ces dernières, provoquée par le prince Frédéric d'Augustenbourg, contenait les voeux d'amélioration des habitans de la ville d'Eckernfoerde et des alentours. Ces voeux étaient : la publicité des débats parlementaires, la réunion des deux assemblées de Schleswig et du Holstein en une seule, la consolidation de la liberté de la presse, l'abolition de la loterie, le perfectionnement du système des ponts-et-chaussées, la rédaction d'un nouveau code qui admettrait comme bases essentielles, la suppression des justices patrimoniales et la séparation des fonctions judiciaires et administratives. Toutes ces réformes devaient être couronnées par une répar tition plus juste des impositions publiques.

SUÈDE ET Norwége.

Tandis qu'ailleurs les nations s'efforçaient d'étendre leurs droits, de conquérir de plus larges franchises, en Norwége, c'est le pouvoir royal qui luttait avec plus de persévérance que de succès, pour reculer les étroites limites dans lesquelles une constitution toute démocratique l'a emprisonné. Cette lutte, dont les précédentes sessions du Storthing norwégien ont offert des traces si remarquables, va recommencer cette année et se compliquer d'incidens nouveaux.

Les opérations préliminaires dont le Storthing s'occupe

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