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mentation abondante et précieuse, mais aussi des suggestions très intéressantes et des vues qui lui ont paru des plus judicieuses. Ce travail doit être joint au présent rapport et on aura à s'y reporter à plusieurs reprises. Il suffit donc de tracer simplement les grandes lignes suivantes de l'histoire des travaux de l'embouchure de Soulina.

Jusqu'à la fin de 1894, c'est-à-dire pendant une trentaine d'années après l'achèvement des travaux principaux, une profondeur de 20 pieds 1/2 (1) a été maintenue, grâce à la présence des ouvrages, par le seuljeu des forces naturelles, sans utilisation de dragages. De 1894 à 1914, soit pendant 20 ans, une profondeur atteignant, d'une manière à peu près constante 24 pieds, a été obtenue au moyen de dragages.

Depuis 1914 jusqu'au mois de juin 1921, la profondeur de 20 à 21 pieds a été péniblement maintenue bien que trois dragues aient été constamment en travail.

En juin 1921, la profondeur de 22, puis de 23 pieds 1/2 a pu être réalisée.

Les dragages exécutés, tant entre les digues qu'au large des digues, ont eu l'importance indiquée ci-dessous :

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(Abstraction faite de l'année 1916, pendant laquelle les opérations de dragage ont été exceptionnellement réduites.)

Une conclusion ressort à l'évidence de ces simples constatations, c'est que les ouvrages permanents ne sont plus capables, à eux seuls, de maintenir la profondeur nécessaire et que, pour y parvenir, l'aide des dragages doit aller en augmentant. En doublant le cube dragué il y a vingt ans, on ne peut pas conserver la profondeur réalisée à cette époque.

Quelles mesures convient-il de prendre pour rétablir et main

(1) I pied (foot) ou 1' = 12 pouces om 3048.

tenir ces profondeurs ? C'est précisément l'avis qui est demandé au Comité technique.

II. CAUSES DE LA SITUATION ACTUELLE.

. L'action des forces en présence à l'embouchure de Soulina a été minutieusement analysée et décrite dans de nombreux mémoires; le plus complet à cet égard est celui qui a été écrit en 1892 par M. l'Inspecteur général des Ponts et Chaussées, Voisin Bey.

Ces forces résultent de la combinaison de phénomènes fluviaux et de phénomènes marins. Ces phénomènes sont loin de se reproduire régulièrement et des périodes, souvent assez longues, peuvent s'établir pendant lesquelles les résultats constatés diffèrent notablement de l'allure générale vers laquelle tendent les transformations qu'aucun effort humain ne saurait entraver.

Mais si la longueur de ces périodes est assez grande, il est alors permis de considérer comme permanent, au point de vue du parti que les générations présentes peuvent en tirer, le régime établi.

C'est ainsi qu'il ne viendrait à personne l'idée de régler actuellement l'existence du monde, sur ce fait, cependant absolument certain, que les réserves en charbon seront un jour épuisées.

A l'intérieur d'une de ces longues périodes se produisent aussi certaines séries anormales dont on aurait tort de tenir compte pour régler les décisions à prendre et qu'il importe de discerner avec soin.

Rechercher les causes du régime permanent au sens qui vient de lui être donné, reconnaître celles qui donnent lieu à une situation provisoire, est le problème le plus délicat de l'étude de l'amélioration des embouchures des fleuves. Une erreur d'appréciation peut conduire à de graves mécomptes et la plus grande prudence s'impose aux Ingénieurs dans leurs conclusions.

Dans le cas actuel, des causes multiples interviennent dans le maintien des profondeurs devant l'embouchure de Soulina.

Du côté du fleuve, ce sont les crues, la répartition du débit entre les différents bras, l'érosion des rives, la teneur des matières

en suspension, qui jouent un rôle prépondérant; du côté de la mer, ce sont les vents régnants, les tempêtes, les courants littoraux.

Suivant que l'on considérera les causes d'une situation défavorable comme permanentes ou comme temporaires, les moyens à employer pour y remédier seront très différents et pourront entraîner des conséquences très importantes.

Dans l'espèce actuelle, la situation résulte de deux causes principales: l'une, permanente, consiste dans l'avancement progressif de la terre vers la mer; l'autre, temporaire, est variable suivant le régime du Danube.

Pendant des années où le niveau des eaux ne s'élève que rarement au-dessus d'une cote moyenne, c'est-à-dire quand les eaux ne sont pas trop chargées d'alluvions, on se trouve dans la période la plus favorable et une profondeur suffisante, supérieure même à celle qui est nécessaire, peut être entretenue par des dragages. Le courant des eaux claires entraîne, en effet, vers la mer une partie des matières en suspension et ajoute son action à celle des dragages.

Au contraire, pendant la période des grandes crues les dépôts sont considérables; les diverses forces en jeu, même aidées par des moyens artificiels, deviennent insuffisantes pour faire disparaître les dépôts et rétablir intégralement la situation ancienne. On se trouve alors en présence d'un avancement continu contre lequel il n'est pas pratiquement possible de lutter avec succès et un moment arrive où il faut nécessairement adapter les ouvrages à la nouvelle situation.

Ce moment est-il arrivé à Soulina?

Le fait que la profondeur de 23 pieds 1 /2 vient d'être constatée à nouveau pourrait conduire, à défaut d'examen plus approfondi, à l'hypothèse que, peut-être, vient-on de traverser une de ces périodes où la coïncidence d'événements défavorables a produit une situation temporaire dont on a le droit d'envisager la fin.

S'il en était ainsi, un effort exceptionnel de dragages serait à réaliser et l'on se retrouverait, après le passage d'une période critique, dans la situation satisfaisante dont on avait joui auparavant pendant de longues années.

Tel n'est pas le cas à notre avis.

Toutes les constatations que nous avons pu faire, tous les renseignements que nous avons recueillis nous démontrent que l'on est arrivé au terme d'une évolution qui nécessite autre chose qu'un effort momentané. Rester dans la situation actuelle serait s'exposer aux pires déconvenues.

Il n'y a d'ailleurs rien d'imprévu dans cette situation.

Sir Charles Hartley, l'éminent auteur des travaux de Soulina, l'avait annoncée dans ses rapports de 1857 et de 1871, et M. Voisin Bey, dans son important mémoire de 1892, rappelle que Sir Charles Hartley n'avait jamais dissimulé l'éventualité, qui pourrait se présenter tôt ou tard, de devoir prolonger les jetées au fur et à mesure du progrès des atterrissements. Il est vrai que, dans ses rapports de 1893 à la Commission européenne, Sir Charles Hartley s'approprie la fin du mémoire de M. Voisin Bey qui contient le passage suivant :

<< Et la conclusion finale de tout ce qui précède, touchant les mouvements qui s'opèrent dans les fonds sous-marins, au nord, en face et au sud de l'embouchure, c'est que l'on peut légitimement espérer que, pendant de longues années encore, la passe continuera de se maintenir en bon état sans qu'il soit besoin de prolonger les jetées. »

Ceci a été écrit il y a trente ans : on ne peut donc pas dire que l'auteur s'est trompé; mais seulement que les longues années qu'il escomptait sont révolues.

Il eût été certainement opportun d'envisager plus tôt les mesures à prendre; les événements, qui ont bouleversé le monde, n'ont pas permis de le faire; mais ce serait s'endormir aujourd'hui dans une sécurité trompeuse que de rester sans agir devant une situation pleine de menaces.

Dans son mémoire précédemment cité, M. l'Ingénieur président de la Commission européenne signale la grande cause générale de la situation actuelle : c'est-à-dire l'avancement du delta du Danube vers la mer. En étudiant les causes secondaires, on pourra prendre des mesures de nature à retarder considérablement l'encombrement de la bouche de Soulina; mais on ne pourra

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jamais soustraire cette parcelle de l'immense delta au sort de l'ensemble dont le destin est immuable.

Parmi les causes, que nous appelons secondaires, on relève, dans le même mémoire, les suivantes :

Du côté du fleuve.

Alluvions d'après les observations faites les quantités d'alluvions débitées, en moyenne par an, par le bras de Soulina seul, auraient été :

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Répartition des débits : alors qu'en 1856 on constatait que le débit total du Danube se répartissait à :

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on aurait trouvé dans le jaugeage effectué en 1913 :

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Enfin un jaugeage effectué le 20 juillet 1921 (niveau de l'eau à Toultcha 1.64 au-dessus de l'étiage) a donné:

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Les atterrissements devant la bouche de Kilia ont formé, par rapport à la bouche de Soulina, un vaste cap qui protège cette

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