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THEATRES.

ACADÉMIE ROYALE DE MUSIQUE.

Ce théâtre, le premier dans l'ordre des affiches et dans l'opinion des étrangers, n'a pas justifié cette année ses prétentions par ses succès. La reprise de Tarare, donnée le 3 février 1819, avec quelques retranchemens dans le poëme, n'a produit ni effet, ni argent. La première représentation d'Olympie, jouée le 23 décembre, promettait beaucoup plus et n'a guère tenu davantage. La tragédie de Voltaire en a fourni le sujet; elle nous dispense d'en reproduire les détails; les auteurs du nouveau poëme n'ont fait qu'en abréger le dialogue, en resserrer l'action et en précipiter le dénoùment, auquel ils ont ajouté le spectacle d'un apothéose au temple de Mémoire où Alexandre vient recevoir sa femme et sa fille qui doivent partager son immortalité.

pas

On sait avec quelle complaisance Voltaire caressait les enfans de sa vicillesse poétique. Il ne parlait qu'avec admiration de la pompe que comporte le sujet d'Olympie. Ce mérite la recommandait aux poëtes lyriques; mais la magnificence du spectacle n'a suffi pour attirer les spectateurs. L'action, trop resserrée pour être clairement développée, a fatigué leur attention; l'horrible situation où sont placés les personnages principaux, a plutôt repoussé qu'excité l'intérêt. Enfin la musique, annoncée comme le chef-d'œuvre de M. Spontini, composée dans le nouveau systeme où P'expression dramatique est sacrifice aux effets d'orchestre, le chant à l'harmonie, a paru fort inférieure en tout à celle de la Vestale et de FernandCortès, dont elle reproduisait quel ques motifs sans en rappeler la simplicité mélodieuse qui, en musique comme en poésie, est le véritable cachet du génie.

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France du joug de l'étranger, y était Sous la puissance du génie malfaisant de la parodie, un poëte anglais (M. Southey), en faisait le principal personnage d'une épopée; un poète allemand (le célèbre Schiller), lui élevait sur le théâtre germanique un trophée immortel. Dans sa nation seule Jeanne était alors comme déshéritée de sa gloire; à la fin les Francais ont rougi de leur ingratitude, et plusieurs poëtes ont en meme temps entrepris de vengersa mémoire.

Au premier coup d'œil, la bergère de Domremi parait un personnage éminemment dramatique. Ses mœurs agrestes et ses inspirations divines, ses adieux à son hameau, son arrivée à la cour de Charles VII, sa valeur dans les combats, sa résignation au supplice, l'éclat de ses victoires et l'excès de son infortune; tout ce qu'elle est, tout ce qui l'entonre, semble éminemment theatral; mais à mesure qu'on examine le sujet, on n'y trouve plus que des difficultés.

Schiller l'envisageant dans toute la liberté de l'école romantique, a largement usé de ses ressources. Il conduit l'héroïne depuis son départ de Domrerni jusqu'à sa mort. Il réunit les circonstances les plus intéressantes de sa vie. Ses adieux à son hameau, sont un des plus beaux morceaux de la poésie moderne. Présentée à Charles VII, elle réveille en son cœur le sentiment de la dignité royale; à l'armée elle relève le courage des soldats. Tant qu'elle marche au but de sa mission elle porte le sceau de la protection divine; dès qu'il est accompli, elle retombe sous la condition cominune: puis elle périt dans une bataille, fiction historique d'après laquelle Schiller a renoncé de lui-même à ce qui nous paraît l'intérêt dominant du sujet.

Un auteur français asservi à l'impitoyable règle des trois unités, était force de se décider entre les époques de la vie de Jeanne, M. Davrigni a choisi celle du jugement odieux de Rouen; le goût applaudit à son choix. Il ne reste qu'a voir s'il en a bien développé les données.

On ne voit figurer dans la pièce que cinq ou six caractères. Jeanne, déjà tombée au pouvoir des Anglais,

et sur le point d'être livrée à un tribunal ecclésiastique comme coupable de malefices; le duc de Bedford, soidisant régent de France, prince faible, irrésolu, qui ne sait que faire de sa captive à laquelle la duchesse sa femme s'intéresse; l'illustre bâtard

Dunois qui vient pour la délivrer; le brave Talbot qui prend aussi sa défense; le comte de Beauvais (personnage substitué à l'évêque Cauchon), qui a juré sa ruine; son frère, le sé néchal de Normandie, qui voudrait la sauver; et le comte de Warwick, qui ne peut oublier la honte d'avoir été vaincu par une femme..... La seule exposition de ces caractères donne une idée complète de la pièce..... Ce n'est au fait qu'un jugement criminel en cinq actes. Le premier se passe en conversations entre le comte de Beauvais et son frère, entre la duchesse de Bedford et son mari; il se termine par une espèce de conseil où il est décidé qu'elle sera livrée au tribunalecclésiastique; le second est rempli par une audience où Dunois, envoyé au duc de Bedford pour négocier la liberté de Jeanne, consent à livrer mille prisonniers pour lui servir de rançon, et dix chevaliers qui serviront d'otages pour garantic que Jeanned'Arc ne porterait plus les armes contre les Anglais, convention à la quelle l'héroïque vierge déclare ensuite dans l'entrevue qu'elle a avec Dunois, qu'elle ne souscrira jamais... Un interrogatoire que Bedford lui fait subir occupe presque tout le troisième acte; mais cette belle scène contient toute son histoire; elle y raconte comment elle reçut l'inspiration celeste, comment elle parut à la cour de Valois, comment le ciel protégea ses armes, comment sa mission remplie, soumise à la condition commune, elle tomba sous Compiegne au pouvoir des Anglais. Bedford, d'abord 'attendri, lui propose un asile en Angleterre si elle veut faire l'aveu de son erreur (c'est-à-dire, se déclarer coupable de sorcellerie). Resignée à son sort, incapable d'une lâcheté, elle lui annonce par des accens prophétiques d'une inspiration nouvelle, qu'il paraitra lui-même avant cinq ans devant le juge suprême. Alors Bedford La fait conduire devant le tribunal;

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on peut déjà dire au supplice. Encore une fois cet acte n'offre qu'une scen; mais il en est rempli. On pourrait dire qu'elle est toute la pièce.

Dunois vient ensuite, à la manière des anciens chevaliers, demander le jugement de Dieu, c'est-à-dire proposer de prouver en champ clos l'inBedford a d'abord jeté les yeux pour nocence de Jeanne. Talbot, sur qui répondre à ce défi, s'en excuse. Une sédition vient tout à propos pour saucette sedition, suscitée pour la deliver l'embarras du cartel; et pendant de Bedford la livre au conseil qui vrance de l'héroine, un ordre du duc l'envoie au supplice.

On ne conçoit pas qu'un sujet aussi simple puisse occuper pendant cinq actes. Il rappelle celui des Templiers où il y avait pourtant une conception dramatique dans le rôle du jeune Marigni qui en a fait le succès.

Ici l'héroïne est nécessairement condamnée à l'inaction; la lutte se passe autour d'elle sans qu'elle y puisse prendre part: tout le ressort dramatique est dans la volonté du duc de Bedford, dont les irrésolutions seules suspendent le sanglant sacrifice. Jeanne n'a d'autres ennemis qu'un guerrier obscur et qu'un vil renegat, tous deux sans influence réelle. Si on ne savait pas qu'elle doit périr, on croirait que Bedford, touché d'abord d'une grande infortune, et cédant aux instances de la duchesse et aux conseils du généreux Talbot, va la rendre aux Français. Pour donner au drame le mouvement qui lui manque, il aurait fallu placer Bedford sous l'empire d'une grande passion, comme le fanatisme, et qu'au lieu de deux ennemis impuissans, l'auteur eùt osé mettre sur la scène un personnage dont l'autorité put commander ce crime au nom de la religion, et faire flechir sous de prétendus oracles du sanctuaire les résolutions les plus généreuses. Alors les incertitudes de Bedford, de qui tout dépend, auraient été légitimement motivées, et le plus vif intérêt sortait de la lutte des grandes passions. Mais au lieu de les fortifier, Tauteur a meme affaibli les données historiques du sujet : quelles qu'en soient les raisons, ik

SCIENCES, LETTRES ET ARTS. (Notices.)

faut le regretter pour le mérite et la durée de son ouvrage.

A ce defaut de ressort dramatique, la critique a joint d'autres censures. On a reproché à M. Davrigny d'avoir peint Dunois et Talbot des mêmes traits, d'avoir donné un caractère équivoque à Jeanne, dont la mission divine ne se révèle guère que dans la belle scène du troisième acte. Mais le goûùt judicieux de l'auteur a pu reculer devant l'esprit du siècle et du parterre; et ce noble caractère, si noblement rendu par Mlle Duchesnois, a soutenu presque seul l'intérêt de la pièce,

En dernière analyse, l'ouvrage dramatique que M. Davrigni consacre à la gloire de Jeanne d'Arc, ne remplit peut-être pas toute l'idée qu'on se Tait de la grandeur du sujet; mais il offre des pensées généreuses expriinées dans un style constamment pur, élégant, harmonieux, qui rappelle à chaque instant les formes des grands

maitres de l'art.

Louis IX, tragédie en cinq actes, M. Ancelot. (1re représentation 5 novembre.)

par

La première chose à remarquer pour l'histoire en parlant de cette tragédie, c'est que les partis s'en étaient emparés d'avance; l'un s'était décidé à lui trouver toute sorte de beautés ; l'autre l'avait condamnée, ou du moins reléguée dans les langueurs du c'est-à-dire genre admiratif,

en

nuyeux. C'est au temps à faire justice
des jugemens passionnés. L'action et
la conduite du drame peuvent s'ana-
lyser en quelques lignes pour ceux
qui ne sont pas tout-à-fait ignorans
des grandes époques de notre histoire.
Louis IX, après la bataille de Mas-

soure,

est au pouvoir du sondan d'Egypte, avec la reine son épouse et son fils, avec la fleur de sa noblesse et l'élite de son armée. Cependant, après bien des difficultés, le soudan a signé le traité de leur délivrance; le monarque a cédé Damiette pour sa rançon, et doit donner 400,000 liv. pour celte de son armée. Mais, au moment d'exécuter le traité, le parjure soudan s'y refuse, dans la crainte de revoir bientôt les Chrétiens revenir pour ven

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ger leur affront. It redouble de ri-
gueur envers eux, il forme le dessein
de les égorger tous: il fait proposer
à Louis d'abjurer le christianisme
par un chevalier apostat que le saint
roi ramène à la religion et a la patrie.
Enfin l'extermination des Français
est résolue; ils touchent à l'heure fa-
tale; ils n'ont qu'une espérance. Un
prince syrien, Nouradin, qui, quoi-
que musulman, a été fait chevalier
par Lusignan, prend en main leur
défense. La part qu'il a cue à la vic-
toire de Massoure lui avait acquis une
grande influence, mième en Egypte;
mais il épuise en vain toutes les rai-
sons pour changer les résolutions
cruelles du perfide Almodan. Obligé
de recourir à la force, il soulève l'ar-
mée et le peuple, et il délivre Louis
aux pieds de qui le peuple met le scep-
tre de l'Egypte, que le saint roi rend

lui-même au soudan.

Ici, comme dans Jeanne d'Arc, le principal personnage reste en quelque sorte etranger à l'action de la piece imaginée pour présenter dans tout son jour un des plus grands caracteres de Thistoire. Iten resulte moins des scènes theatrales que des entrevues destinées à des développemens oratoires, où Louis IX nous apparait tour à tour avec les vertus d'un bon père, d'un époux, d'un chevalier, d'un chrétien et d'un roi; et tous les traits de ce portrait sublime sont tracés avec une abondance, une franchise, une chaleur de talent que le poëte ne pouvait trouver que dans son ame.

Aiusi, quand un chevalier, Châtillon, aigri par l'infortune et le desespoir de revoir sa patrie, s'emporte jusqu'à reprocher à Louis ses malheurs, c'est une occasion pour lui de donner à son expédition des motifs puisés dans l'intérêt des peuples (quoique démentis par les mœurs et par l'esprit du temps); quand le soudan ajoute la menace à l'indignité du parjure, il met dans tout son jour la résignation pieuse et l'inébranlable fermeté du saint roi ; quand le glaive est levé sur sa tête, il lui donne ocles devoirs casion de tracer à son jeune fils, dans une dernière entrevue qu'il aura quelque jour à remplir avec cette éloquence vive, naturelle entrainante, dont Racine avait donné

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le modèle dans Athalic; quand des sujets révoltés viennent mettre à ses pieds la couronne du soudan, il ne l'accepte que pour la lui rendre, et termine le drame qu'il a rempli de sa vertu par le spectacle du plus beau triomphe qu'elle puisse remporter sur elle-même.

Il faut distinguer de ces scènes oratoires celle où Nouradin reproche an soudan la violation de la foi jurée aux Chrétiens, celle où l'auteur a eu l'art de placer le mot si naïf et si cheva·leresque : Madame, j'y songeais; et avant toute autre, celle où l'apostat Raimond, venant faire au roi l'infâme proposition d'abjurer le christianisme, cede lui-même à l'ascendant de l'héroïsme chrétien, et tombe aux pieds de celui qu'il devait conduire à la mort c'est une des plus belles qui soient au théâtre. Voilà la véritable action, voilà du mouvement dramatique, plus animé, plus vrai, plus touchant que toutes les seditions imaginées pour dénouer des intrigues et tuer des personnages dont on ne sait plus que faire.

En se défendant des opinions inspirées par l'esprit de partí, en restant dans ce point où l'on ne considere que l'intérêt, les règles et les jouissances de l'art, on sent que cette pièce n'offre que la prolongation d'une situation douloureuse et une action sans ressort, que des caractères ou sacrifiés ou éclipses devant un seul, admirable sans doute s'il suffisait d'un caractère pour constituer une tragédie.

Quelques détails de cette pièce ont paru dénués de la couleur locale et contemporaine. Les desseins que saint Louis avait, les établissemens qu'il a laissés, pouvaient être annonces dans un langage plus conforme à l'esprit du douzième siècle. L'auteur a trop cédé au goût, disons mieux, à l'ignorance du parterre, en changeant le langage que Louis adressait d'abord à l'apostat Raymond, qu'il envoyait expier son péché dans un cloitre.

D'ailleurs, quoique les sentimens aient été si opposes sur le mérite de la conception et de la conduite dramatique de cette tragédie, tous se sont accordés sur celui du style. On ♬ rencontre peu de ces vers ambitieux

qui surprennent l'oreille, comme une étincelle frappe la vue au milieu de la nuit; c'est une poésie pure, correcte, pleine d'aisance, dont le naturel n'exclut pas la vigueur et telle qu'il la faut au dialogue de la tragédie.

Orgueil et Vanité, comédie en cinq actes et en prose; par M. S....., auteur du Chevalier de Canolle. (ire représentation, 2 avril.)

Montrer l'orgueil d'un grand qui craint de s'abaisser, et la vanité d'un petit qui cherche à se hausser, n'est pas une idée nouvelle. Le Glorieur, l'Ecole des Bourgeois, le Chevalier à la mode, l'ont plus ou moins developpée. Cependant M. S..... a cru qu'elle pouvait trouver une autre application dans nos mœurs. Il a eu raison; car les manières des Tuflieres, ou des parvenus d'aujourd'hui, ne sont plus celles des courtisans de Louis XIV, ou des financiers de la régence; et, à défaut de nouveaux caractères, la muse comique a des droits sur les nouveaux ridicules.

Nous n'entreprendrons pas de donner l'analyse de cette comédie ou l'orgueil du comte de Fierfort, ancien président au parlement, ruiné par la dépense qu'il a faite pour soutenir son rang, est aux prises avec la vanité de Trigauville, ancien fournisseur enrichi par mille bassesses. Fierfort a souscrit un billet pour une somme considérable au profit de Trigauville. Il lui est impossible d'y faire face; il consent à donner la main de sa fille Eugénie au fils du fournisseur, à condition que le mariage restera secret jusqu'à ce qu'on ail fait donner au prétendu une place qui le relève un peu. Divers incidens retardent ce dessein. D'abord Eugénie a d'autres inclinations; le jeune homme qu'elle aime est son cousin, fils d'un honnéte charpentier, Antoine Leleu, qui a épousé pendant la révolution la sœur de Fierfort, lequel veut faire casser son mariage. D'un autre côté, Fierfort rompt avec Trigauville, qui a eu l'indiscretion de se vanter de son alliance, et qui, pour se venger, met les huissiers à ses trousses, et le dénonce pour lui faire manquer une place importante. Au milieu de tant

d'embarras, un bon frère du prési- elles, on les lui souffle toutes les
dent, caché sous le modeste nom de deux: il s'en console en disant à
amours des son valet Je vais encore attendre,
Dunant, protége les
jeunes gens, et paie le fatal billet; le mot qui ne vaut peut-être pas le vers
petit cousin, Eugène Leleu, qui était de Destouches,
secrétaire du ministre, obtient une
place de conseiller d'état, au moyen
de quoi l'orgueil de Fierfort se résigne
à le reconnaître pour neveu,
l'accepter pour gendre.

et à

Telles sont les données de cette pièce où l'on a remarqué un personnage (Antoine Leleu) dont la franchise et la gaîté naturelle ont été miraculeusement rendues par Michot; d'ailleurs le sujet a paru romanesque, les caractères exagérés, le coloris moral charge, le style négligé et trop rempli de lieux communs sur l'orgueil des titres. Enfin après un succès qui lui promettait au moins quelques mois d'existence, la pièce a disparu du répertoire sans que l'esprit de parti, si habile à chercher occasion de se montrer, ait fait d'efforts pour la soutenir.

L'Irrésolu, comédie en un acte et en vers; par M. Leroy. (re représentation, 15 juillet.)

La Harpe avait prononcé que le caractère de l'Irrésolu ne peut fournir à un auteur dramatique que la matière d'un acte parce qu'il ne peut agir, ou qu'il disparaîtrait dans l'action.

M. Leroy, se soumettant à cet avis, a refait le personnage de Destouches, d'après un portrait plus ancien que lui, d'après le paysan d'Horace (ép. II, liv. 1), qui remet de jour en jour le dessein d'ètre sage. Ici, l'Irrésolu, garçon de trente ans, forme depuis long-temps le projet de se faire un état. Sera-t-il magistrat, commerçant, militaire? Quand il est prêt à se décider pour l'un, il voit dans l'autre mille fois plus d'avantages, et il a passé dix ans à délibérer. C'est par ces perpétuelles hésitations qu'il perd, dans la pièce, une commission qu'il avait vivement sollicitée. Après avoir manqué vingt mariages, voilà qu'il en a encore deux à son choix : l'une de ses deux maîtresses est vieille et riche; l'autre est jeune et jolie; et tandis qu'il balance entre

« J'aurais mieux fait, je crois, d'épouser
Célimène. »

mais qui dénoue la pièce d'une ma-
nière plus conforme au caractère.

Ainsi, cette petite comédie n'est
peut-être, comme on l'a dit, que
l'esquisse correcte et régulière d'un
grand portrait manqué; mais la tou-
che du peintre est légère, spirituelle,
et le vieillard de Molière pourrait
aussi lui crier du parterre: Courage,
voilà la bonne comédie!

SECOND THEATRE

FRANÇAIS.

(Ci-devant Odéon. )

L'érection d'un second ThéâtreFrançais est-elle utile au progrès de l'art? Cette question fut résoluc affirmativement dès le temps de Molière et an commencement de la révolution. Mais le monopole, toujours habile à profiter des circonstances, avait encore triomphé des avantages de la rivalité. Comme on ne pouvait s'en prendre à la stérilité des auteurs, dont les pièces ensevelies dans les cartons du Théâtre - Français, attendaient après leur tour, comme les ombres sur la rive désolée du Stix, on s'appuyait surtout, pour empêcher l'exercice du second théâtre, du défaut d'acteurs tragiques. Plusieurs débuts malheureux semblaient justifier les craintes ou les défiances répandues à cet égard. On ne voulait pas voir que les talens ne manquaient à la carrière, que parce qu'il manquait une vaste carrière aux talens, et que là, comme dans toute autre branche de l'industrie, l'espérance raisonnable du succès attirerait bientôt des concurrens. En attendant leur éducation, M. Picard, nommé directeur du nouveau théâtre, s'occupa, pendant qu'on reconstruisait la salle au faubourg Saint-Germain, à recruter des acteurs pour les joindre aux débris de sa première troupe. De ceux qu'il parvint à réunir, les uns avaient une grande réputation en province, les autres n'étaient pas incon

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