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rigueur de ses conséquences. Parcourant ensuite les diverses bran ches du revenu public, il díscute rapidement les améliorations qu'on peut y trouver, ou les réductions qu'on peut y faire. Ainsi, il pense qu'on peut espérer pour l'avenir quelque modération dans les droits d'enregistrement, surtout dans ceux qui frappent les successions directes. Il croit que la loi des douanes, qui est une loi de réciprocité entre les peuples, devrait être l'objet des méditations nouvelles des cabinets; il semble blâmer la rigueur du tarif sur les cotons en laines. Il regarde la loterie, qui ne seconde que des penchans réprouvés par la société, comme la plus fàcheuse nécessité de nos finances, et développe le système dans lequel doit être opérée la réduction proposée sur les contributions foncière, mobilière, etc.

Sur l'observation que le ministre des finances avait faite dans son discours, relativement à l'impossibilité de terminer les rôles de 1819 avant le mois de décembre, et la nécessité d'opérer la levée des contributions d'après les rôles de 1819, sauf à effectuer le dégrevement par voie de décharge sur les contributions de 1820, le noble rapporteur s'élève avec force contre ce mode de dégrevement, dont le délai serait une violation de l'article 24 de la loi, et il déclare que les percepteurs qui exigeraient pour 1819 au delà de la proportion assignée à chaque contribuable, se rendraient coupables de concussion. Enfin, après avoir donné d'autres développemens sur les derniers articles de la loi, M. le comte Mollien termine son rapport en réclamant l'indulgence de la chambre sur un travail fait à la hâte. « Vous n'avez pas attendu sans doute, dit-il, la présentation qui vous a été faite par le ministère, pour préparer, par vos méditations et vos recherches, le jugement que vous allez porter; mais la loi des impôts touche à trop d'intérêts pour que vos commissaires se pré sentent avec la confiance de les avoir tous exactement pesés dans un si court espace de temps. Quelque lumineuses que soient sur ces questions les discussions de l'autre chambre, elle vous laisse à remplir des devoirs égaux aux siens, envers le Roi et son peuple; et le dernier vœu que votre commission se permettrait

d'exprimer, serait que les lois des finances, sur lesquelles la délibération de l'autre chambre doit précéder la vôtre, fussent en première ligne dans les communications qui ouvrent chaque session.

«C'est, au surplus, avec une vive reconnaissance envers le Roi pour le bienfait du dégrevement, et avec l'opinion que la nouvelle loi n'impose à la France que des sacrifices nécessaires et plus supportables, que vos commissaires vous proposent à l'unanimité l'adoption de cette loi. »

(16 juillet.) La matière était trop bien éclaircie aux yeux même du rapporteur et de la chambre, pour donner lieu à des délais qu'il n'était plus possible de prolonger, à des amendemens qu'il n'était plus praticable d'introduire à cette époque, où un grand nombre de députés avaient déjà quitté la capitale. Trois pairs furent entendus : le premier, le marquis de La Place, présenta des considérations sur la suppression des loteries, qu'il regarde comme le jeu le plus défavorable aux joueurs, et le plus funeste à la morale. Le second, M. le duc de Valentinots, témoigna le désir de faire disparaître du tableau des charges publiques, les dépenses de la chambre des pairs, qui, acquittées sur l'ancienne dotation du sénat, ne grevaient en aucune manière le trésor de l'état. Le troisième, M. le comte Berthollet, développa dans un discours savant les moyens de perfectionner la navigation intérieure par un nivellement général. Mais ces trois discours avaient plutôt pour but de préparer des améliorations pour l'avenir, que de faire des changeinens au budget actuel; et la loi passa dans la même séance à l'unanimité des votans, qui s'y trouvaient au nombre de cent vingt-trois. C'est la véritable clôture de la session ; mais il faut revenir sur ses pas, pour donner une idée complète de ses travaux.

CHAPITRE VI.

OBJETS divers. Lois sur l'abolition du droit d'aubaine. Sur les servitudes imposées à la propriété pour la défense de l'état. —Sur le commerce des grains. Propositions diverses. —Pétitions particulières remarquables. — Pétitions collectives. — Pour l'établissement de colléges protestans.— Pour le rappel des exilés et des bannis.- Troubles et pétition de l'école de droit de Paris. Clôture de la session. - Esprit de ses travaux.

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Au milieu des discussions d'un intérêt général, les deux chambres s'étaient occupées de divers objets dont quelques détails appartiennent à l'histoire.

On a vu que dès la session dernière M. le duc de Lévis avait fait à la chambre des pairs une proposition, tendante à supplier Sa Majesté de proposer une loi pour l'abolition du droit d'aubaine et de détraction.

Cette proposition renouvelée au commencement de janvier, convertie en résolution, adoptée par la chambre des députés, donna lieu à un projet de loi qui fut porté le 4 mai à la chambre des pairs, où il subit une discussion nouvelle.

(22-25 mai.) M. le comte Boissy d'Anglas, rapporteur de la commission, chargé d'examiner le projet de loi, considérant cette question comme historique, trouve que le droit d'aubaine est né chez les Romains du régime de la conquête, chez nous du régime féodal. Les adversaires de l'abolition de ce droit avaient beaucoup appuyé, dans leurs opinions précédemment prononcées, sur le danger d'attirer en France des étrangers qui y exerceraient une influence dangereuse, qui y feraient des spéculations fatales à notre industrie et à nos manufactures (M. le comte de Richebourg); sur la nécessité de se conduire, au moins d'après les principes de la réciprocité. Le noble rapporteur répond aux objections diverses et ne voit point de danger pour la France.... Mais il appartenait à l'auteur de la proposition d'en défendre les avantages, et il les démontre sous le double rapport de notre état

agricole et politique. « Lorsqu'on observe les progrès immenses de l'industrie française, dit M. le duc de Lévis, on s'étonne de voir l'agriculture demeurer seule en arrière, et de trouver si rares les exemples d'une bonne exploitation. Est-ce l'intelligence du cultivateur qu'il faut en accuser? Non, sans doute. Il a su depuis longtemps s'affranchir du joug de la routine, mais il lui manque les capitaux nécessaires pour faire à la terre des avances qu'elle rendrait avec usure. Voilà ce qui arrête chez nous l'essor du premier de tous les arts. Loin de pouvoir améliorer, le propriétaire, écrasé par l'impôt foncier, souvent par une dette hypothécaire, conserve à peine les moyens de pourvoir aux frais de culture les plus indispensables. De là, tant de terres en vente, et qui ne trouvent pas d'acquéreurs. Un des effets de la loi proposée sera de leur en procurer. Elle remplira aussi le premier vœu de l'économie politique en faisant passer les propriétés dans les mains qui en sauront tirer le meilleur parti. Un autre avantage qu'elle produira, c'est d'arrêter les progrès, chaque jour plus effrayans, de cette extrême subdivision de propriétés, qui n'est pas l'un des moindres fléaux de la culture. Il s'est accru à tel point par l'égalité des partages, le malheur des temps et l'agiotage des spéculateurs, que les terres ne se comptent plus par arpens, mais par perches, et que dans les plaines les plus unies souvent la bêche remplace la charrue. Quel avenir nous prépare un pareil retour vers l'enfance de la civilisation? Ce n'est pas seulement à la richesse territoriale qu'il doit être funeste; son influence ne menace pas moins le bonheur et l'indépendance de la population agricole. Jaloux de monter au rang de propriétaire, le cultivateur qui emploie de faibles épargnes à satisfaire cette vanité, trouve bientôt la misère au lieu de l'aisance qu'il cherchait. Ses peines s'aggravent encore par l'accroissement prématuré de sa famille; et celle-ci, obligée de chercher sa subsistance dans un travail mendié, met ses bras au rabais et vit à peine de ses salaires. On se tromperait en attribuant un si déplorable résultat aux vices des peuples, à leur paresse ou à leur ignorance. Il peut être amené par une institution défectueuse contre laquelle se réuniront en vain les efforts des individus, les

avantages naturel du sol et du climat. Un empire célèbre situé aux confins de l'Asie (la Chine) en offre le triste exemple. Sa population immense, active, laborieuse, demande à la terre et aux eaux tout ce qu'elles peuvent fournir de substances alimentaires. L'homme, en repoussant les animaux de trait, a pris sur lui tous les travaux de la culture pour s'en approprier les produits. Qui n'admirerait ces vastes plaines cultivées comme un jardin, ces collines taillées en terrasses couronnées de riches moissons? Là, pourtant, à côté d'une végétation magnifique, règne partout une misère générale. La moindre diminution opérée dans le produit des récoltes par l'intempérie des saisons, suffit pour ame ner la famine et à la suite la plus affreuse mortalité. Que dis-je ? L'infanticide a cessé d'être un crime, et la difficulté de nourrir l'homme a rendu la loi indifférente sur sa conservation. En fautil davantage pour établir la nécessité de retirer de la circulation le plus grand nombre possible des terres qui pourraient encore être morcelées? Acquises par les étrangers, elles resteront et prospéreront entre leurs mains. Ils pourront même, à la faveur du majorat aut‹ – risé par nos lois, transmettre dans leur intégrité les acquisitions qu'ils auront faites. » Le noble orateur recommande ces vues comme dignes de fixer l'attention d'ane chambre à qui la nature et la perpétuité de ses fonctions imposent le devoir de veiller à la fois sur les intérêts du moment et sur ceux de l'avenir.

Ce discours contenait sur l'avantage des grandes propriétés et de la grande culture des argumens qui n'ont point été réfutés. Mais M. le comte de Montalivet abordant la question dans le premier but qu'elle paraissait avoir d'attirer les hommes et les capitaux de l'Angleterre, cherche en vain ce que la France pourrait gagner au succès de cet appel. Il demande ce qu'ont gagné à de semblables relations, à de pareils secours, le Portugal, la Hollande, le Danemarck et la Russie même, « Essentiellement dominatrice, l'Angleterre commande partout où elle est reçue, Admettons les Anglais dans nos villes, et bientôt ils deviendront les arbitres de tout no¬ tre commerce. Nos vins, nos soies, nos laines n'auront plus d'autres prix que celui qu'ils auront fixé, Is vivifierout, dit – on,

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