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être assimilées à un aveu judiciaire; la législation nouvelle n'a rien innové à cet égard.

Si le débiteur ne sait ou ne veut signer, l'acte de dépôt fera mention de cette circonstance, ainsi que de l'affirmation de la vérité du bilan (1).

Le failli peut se faire représenter par un fondé de pouvoirs pour déposer et signer son bilan (2). La procuration doit être spéciale, mais rien ne permet d'exiger qu'elle soit notariée.

ARTICLE 440.

La faillite est déclarée par jugement du tribunal de commerce, rendu soit sur la déclaration du failli, soit à la requête d'un ou de plusieurs créanciers, soit d'office. Ce jugement sera exécutoire provisoirement.

1657. Il résultait, implicitement au moins, des art. 437 et 458, que la déclaration de faillite pouvait être provoquée, soit par le failli lui-même, soit par un ou plusieurs créanciers, soit être prononcée d'office; l'art. 440 le dit d'une manière expresse. ·

Chacun des associés dans une société en nom collectif, et chacun des associés indéfiniment responsables dans une société en commandite, qu'il soit ou non administrateur, peut faire la confession dont parle l'art. 438 et par suite provoquer le ju gement même contre ses coassociés (3).

Les créanciers sont tous admis sans distinction à provoquer la déclaration de faillite. S'il y a cessation de paiement des dettes commerciales, le créancier d'une dette, même purement civile, n'est pas excepté (4); il faut en dire autant de ceux dont les créances ne sont pas échues: en effet, a dit la Cour de Paris, « ce n'est pas le jugement de déclaration de faillite qui rend

(1) Trib. de comm. d'Aubenas, observ., etc., t. 2, 1oo part., p. 68.

(2) Chambre des députés, séance d'avril 1838; Pardessus, n. 1096; Renouard, t. 1er, p. 269.

(3) Paris, 22 déc. 1834; Dalloz, Rép., n. 105.

(4) Cass., 9 août 1849 (S.V.49.1.617); Paris, 27 nov. 1841 (S.V.42.2.50); Douai, 27 août 1852 (S. V.53.2.39).

les créances exigibles, mais le fait préexistant de la faillite résultant de la cessation de paiements » (1).

On déciderait de même pour un créancier conditionnel, ainsi que pour les créanciers privilégiés ou hypothécaires, puisqu'il est possible qu'ils ne viennent pas en ordre utile sur la chose qui leur sert de gage (2). Des héritiers ont le même droit, s'ils pouvaient y avoir intérêt.

Des raisons de convenance devraient interdire sans doute à des individus qui tiennent de trop près au débiteur d'user de ce droit, à un fils, par exemple, ou à une femme à l'égard de son mari; mais il nous semble impossible d'ériger en article de loi, ainsi que le proposent quelques auteurs(5), ce sentiment de convenance qui évidemment, pour tous, devrait avoir des limites, et que les circonstances peuvent rendre plus ou moins impérieux (4). Le Code portugais contient une disposition expresse à cet égard; elle ne peut être suppléée.

Ce droit a été dénié à l'associé commanditaire, agissant en qualité de créancier (5); il paraît que, dans l'espèce jugée par la Cour de Colmar, une clause de l'acte social bornait les droits du commanditaire, même pour les sommes versées au delà de sa mise de fonds, à demander la dissolution et la liquidation de la société. En toute autre circonstance, si l'associé commanditaire agit en qualité de créancier, nous croyons qu'il est autorisé à demander la mise en faillite de son débiteur, dans les conditions ordinaires, et s'il y a cessation de paiements (6). Mais l'associé commanditaire ne pourrait avoir le droit de demander la faillite de la société par cela seul qu'un inventaire constaterait un déficit considérable: il ne pourrait que provoquer la dissolution de la société (7).

(1) Paris, 22 déc. 1831; Dalloz, Rép., n. 105; Pardessus, n. 1099; Renouard, t. 1, p. 272; Bédarride, n. 50; Dalloz, Rép., v° Faillite, n. 105; Boulay-Paty, n. 64.

(2) Aix, 27 nov. 1835 (S.V.36.2.16); Pardessus, n. 1099; Renouard, t. 1er, p. 279.

(3) Pardessus, n. 1099; Boulay-Paty, n. 67; Renouard, t. 1, p. 272.

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Lorsque la liquidation de la société en commandite est terminée à l'égard de tous les créanciers de la société, si l'associé gérant reste débiteur envers le commanditaire, faute par lui de s'acquitter, il pourrait alors être mis en faillite sur la poursuite du commanditaire devenu simple créancier.

Il a été jugé avec raison que le créancier qui a renoncé au bénéfice de la contrainte par corps contre son débiteur n'est pas déchu du droit de le faire déclarer en faillite (1).

L'ordre public pouvant être intéressé à une déclaration de faillite, la loi a dû permettre aux juges d'agir d'office, mais ils n'useront de ce droit sans doute qu'avec une extrême réserve. Un premier jugement du reste épuise la juridiction du tribunal; s'il a rejeté une demande en déclaration de faillite, il ne pourrait se ressaisir de l'affaire et revenir sur une précédente décision, qu'autant que de nouveaux faits graves et certains seraient survenus depuis le premier jugement (2).

1658. La loi veut que ce soit par jugement que la faillite soit déclarée, et qu'il soit rendu dans la forme accoutumée, et présentant les garanties qui sont exigées pour le nombre des juges et la publicité (3); mais l'irrégularité des poursuites dirigées par les créanciers ou l'inobservation de formes de procédure ne pourraient être invoquées pour faire réformer le ju gement, s'il a été prononcé en connaissance de cause, puisque le tribunal peut déclarer la faillite indépendamment de la provocation des créanciers et d'office (4): il est donc sans difficulté que les créanciers peuvent agir par voie de simple requête, et sans qu'il soit besoin d'assigner le débiteur, sauf à lui plus tard à former opposition. Le failli ne pourrait pas se plaindre de n'avoir pas été assigné; il n'est point partie nécessaire dans le jugement déclaratif, et sauf au tribunal à ordonner, s'il le juge à propos, que le débiteur soit mis en cause (5).

(1) Orléans, 29 mai 1840 (S. V.40.2.363); Renouard, t. 1er, p. 276.

(2) Dijon, mars 1844; Dalloz, Rép., n. 112; Renouard, t. 1er, p. 280.

(3) Riom, 4 juill. 1809; Rouen, 10 mai 1813; Amiens, 24 avril 1839 (S.V.39, 2.363).

(4) Rennes, 10 juill. 1820; Dalloz, Rép., n. 114.

(5) Bédarride, n. 53; Renouard, t. 1or, p. 274; Lainné, p. 35.

Le tribunal, dans tous les cas, apprécie les faits allégués par les créanciers, et il est hors de toute contestation que, s'il n'y voit pas des preuves assez formelles d'une cessation de paiements, il doit rejeter la demande. « Le débiteur dont la répulation et le crédit souffriraient de cette attaque inconsidérée, dit M. Pardessus, pourrait même obtenir des dommages-intérêts et l'affiche du jugement » (1).

Le jugement déclaratif de la faillite est exécutoire par provision.

Nous nous occuperons, sous les art. 580 et 581, de l'opposition et de l'appel.

Ce jugement peut, comme tout jugement par défaut, tomber en péremption faute d'avoir été exécuté dans les six mois (2).

ARTICLE 441.

Par le jugement déclaratif de la faillite, ou par jugement ultérieur rendu sur le rapport du juge-commissaire, le tribunal déterminera, soit d'office, soit sur la poursuite de toute partie intéressée, l'époque à laquelle a eu lieu la cessation de paiements. A défaut de détermination spéciale, la cessation de paiements sera réputée avoir eu lieu à partir du jugement déclaratif de la faillite.

1659. La cessation de paiements constitue l'état réel de faillite; le jugement, l'état judiciaire (suprà, n. 1655).

C'est aux juges du fond qu'appartient exclusivement le droit d'apprécier les faits qui constituent la cessation de paiements, et leur décision à cet égard échappe à la censure de la Cour de cassation (3). La loi laisse aux tribunaux une liberté entière d'appréciation, et elle s'est abstenue de répéter le texte de l'an

(1) Droit comm., n. 1102; Bédarride, n. 55.

(2) Cass., 26 fév. 1834 (S. V.35.1.222); Paris, 6 déc. 1838 (S.V.39.2.480); Orléans, 31 août 1850 (S.V.54.2.23); Pardessus, n. 1110; Esnault, t. 1er, n. 148. Contrà, Metz, 30 mars 1833 (S.V.54.2.23, à la note). (3) Cass., 12 mai 1844 (S.V.41.1.663).

cien art. 441, qui indiquait comme constituant nécessairement la cessation de paiements la retraite du débiteur, la clôture de ses magasins, le refus de payer. Ces faits peuvent être pris en considération, sans doute, mais n'ont pas plus de force légale que tous les autres ainsi a été tarie la source de bien. des difficultés.

Les arrêts nombreux rendus sur cette matière, et qui ont diversement apprécié souvent les faits qui constituaient la cessation de paiements, jettent donc bien peu de lumière sur la question et ne peuvent arriver, quel qu'en soit le nombre, à former une doctrine, parce que chacun d'eux s'appuie sur les circonstances particulières du fait à juger et sur l'appréciation qui en a été faite par les juges compétents; et nous avons peu de chose à ajouter aux règles que nous avons données sous l'art. 437 ci-dessus, pour reconnaître dans quels cas existe la cessation de paiements (suprà, n. 1655 et s.). « Considérant, disait la Cour de Nancy sous l'empire de la nouvelle loi, que le législateur s'est abstenu de donner aucune définition de la cessation de paiements; qu'il s'en est rapporté à la prudence du juge; qu'il l'a dispensé de l'obligation de s'attacher, soit à la notoriété publique, soit à quelques-ups de ces faits extérieurs qui démontrent plus ou moins énergiquement la faillite; qu'il a été dans l'esprit de la loi nouvelle que l'existence commerciale du failli fût soumise à un examen attentif, surtout aux époques qui se rapprochent de la déclaration officielle de sa chute ; que le juge ne se laissât pas aller aux apparences, mais s'attachât à la réalité, afin que la faillite fût déclarée ouverte quand le mouvement commercial a été véritablement suspendu dans son ensemble, quand les principales obligations du négociant ne sont pas remplies, parce qu'à dater de ce moment la loi yeille pour tous les créanciers à la fois et les appelle au partage de la même destinée, sans autres distinctions que celles qu'elle autorise elle-même » (1).

Après les décisions de la jurisprudence que nous avons rapportées (suprà, n. 1635), et qui ne peuvent être basées, ainsi que nous l'avons dit, que sur une appréciation de faits sou

(1) Nancy, 30 juill, 1840; Dalloz, Rép., n. 64.

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