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M. Antonio Rodríguez Villa, à qui l'histoire de Belgique doit un bon nombre de contributions importantes, vient de publier deux ouvrages particulièrement intéressants pour nous et que j'ai l'honneur d'offrir en son nom à l'Académie.

Le premier est une étude sur un personnage qui a joué un rôle assez considérable dans nos provinces à la fin du XVIe siècle et au commencement du XVII, Francisco de Mendoza, amirante d'Aragon, grand majordome de l'archiduc Albert et son conseiller d'État et de guerre, capitaine général de la cavalerie légère, gouverneur des armes en l'absence de l'archiduc, chargé de plusieurs missions diplomatiques (Extracto del Homenaje á Menéndez y Pelayo en el año vigésimo de su profesorado. Antonio Rodríguez Villa, D. Francisco de Mendoza, almirante de Aragón. Madrid, 1899, 126 pages in-8°. Portrait). M. Rodríguez Villa passe rapidement sur le séjour de Mendoza dans les Pays-Bas et s'attache au récit de certaines aventures qui lui survinrent après son retour en Espagne, en 1603. Un de ces incidents mérite tout spécialement notre attention parce qu'il nous fait apercevoir sous un jour nouveau les relations d'Albert avec Philippe III.

La cession des Pays-Bas aux archiducs, les délibérations qui la précédèrent, les vues de Philippe II, les sentiments de son successeur, l'accueil qui fut fait en Espagne à cet acte important sont autant de points restés obscurs jusqu'à nos jours. Cabrera, à qui sa situation permettait d'observer les dispositions des esprits à cet égard, parait refléter les opinions qui avaient cours dans l'entourage de Philippe II quand il écrit que les conseillers du roi ne croyaient pas la puissance de l'Espagne amoindrie par là, que l'armée ne se résignait pas si

facilement, que certains prétendaient que l'Infante n'aurait pas de postérité, qu'ainsi l'aliénation durerait quelques années seulement, mais qu'il serait dangereux de laisser les Pays-Bas à Albert si l'Infante mourait avant lui. L'ambassadeur vénitien Contarini remarque que Philippe III et ses conseillers étaient peu satisfaits du gouvernement comme de la personne de l'archiduc, que ce qui le maintenait, c'était l'affection du roi pour sa sœur. C'est ce que confirment les documents cités par M. Rodríguez Villa. Le retour de Mendoza en Espagne était précisément motivé, en partie du moins, par le désir de contrecarrer des intrigues qui visaient à contraindre Albert à résigner le gouvernement des Pays-Bas. Déjà en 1600, Philippe III avait proposé à Albert d'échanger sa souveraineté sur ces provinces contre une autre situation. Albert refusa. Mendoza, qui l'avait encouragé dans ce refus et s'efforçait de le maintenir dans sa disposition à la résistance, finit par être arrêté et poursuivi pour haute trahison, crime qui entraînait la peine de mort. Ce n'est qu'en 1614 que, l'affaire étant abandonnée, l'amirante fut mis en liberté.

Dans son étude sur Ambroise Spinola, publiée en 1893, M. Rodríguez Villa nous avait fourni une preuve frappante des sentiments hostiles qu'on entretenait à la cour à l'égard de l'archiduc. Une instruction secrète de Philippe III, datée de 1606, insérée dans cette étude, charge Spinola de surveiller Albert et, dans le cas où, Isabelle mourant avant lui, il manifesterait des velléités d'indépendance, de s'emparer de sa personne et de l'enfermer dans la citadelle d'Anvers.

On voit que ce qu'on est convenu d'appeler le « règne des archiducs »> ne constitue pas en réalité d'interruption dans l'histoire de la domination étrangère en Belgique.

Le second ouvrage que j'ai l'honneur d'offrir à l'Académie est une histoire de don Juan d'Autriche par un écrivain du XVIIe siècle dont Lope de Vega a vanté les écrits et à qui l'on doit notamment une histoire anecdotique de Philippe II, Balthasar Porreño (Historia del serenissimo señor D. Juan de Austria, por el Licenciado Baltasar Porreño. Publicala la Sociedad de Bibliófilos Españoles. Madrid, 1899, 1 volume in-8°, XVI-596 pages. Portrait). M. Rodríguez Villa, l'éditeur, fait remarquer que, même après la publication luxueuse de Stirling Maxwell, don Juan attend son historien. L'observation. reste vraie après la mise au jour de l'œuvre de Porreño. Le volume toutefois n'en offre pas moins un grand intérêt, grâce aux appendices dont il est enrichi. On y trouve des renseignements curieux sur Barbara Blomberg, la mère de don Juan, Pyrame Kegel, son frère utérin, et surtout un grand nombre de documents inédits sur don Juan, gouverneur des Pays-Bas.

Dans cette dernière série, nous remarquons les avis émis dès 1573 sur l'envoi projeté du fils naturel de Charles-Quint dans ces provinces. Plusieurs conseillers de Philippe II se montraient, avec raison, opposés au choix de ce prince bouillant, passionné, trop peu souple pour une mission d'apaisement, car Philippe II reconnaissait la nécessité de rompre avec le système de la terreur. Granvelle surtout trouvait don Juan impropre à cette tâche il ne lui reconnaissait ni les talents militaires ni l'habileté diplomatique que les circonstances réclamaient. Philippe ne tarda pas à s'apercevoir qu'il s'était trompé en n'écoutant pas ces conseils.

ERN. GOSSART.

1899. LETTRES, ETC.

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CONCOURS.

M. le Secrétaire perpétuel fait savoir qu'il a reçu les mémoires suivants :

CONCOURS ANNUELS DE 1900.

SECTION D'HISTOIRE ET DES LETTRES.

PREMIÈRE QUESTION.

On demande une étude critique sur les sources de l'histoire du pays de Liége pendant le moyen âge.

Devise du mémoire reçu Legia magnarum artium nutricula. Commissaires: MM. Kurth, Bormans et le

baron de Chestret de Haneffe.

QUATRIÈME QUESTION.

Faire l'histoire de la littérature française en Belgique, de 1815 à 1850.

Devise du mémoire reçu: Faut-il désespérer d'un peuple auquel n'ont manqué ni les grands hommes ni les grandes choses? (J.-B. Nothomb.)—Commissaires: MM. Stecher, Discailles et Potvin.

PRIX DE STASSART (Histoire nationale).

(Septième période : 1895-1900.)

Faire l'histoire des origines et des développements des béguinages dans les anciens Pays-Bas jusqu'à nos jours.

Devise du mémoire reçu :

Den uytverkoren staet van het beggynen leven

Kan door geen pen oft mont genoegsaem syn verheven.

Commissaires

MM. Fredericq, Vanderkindere et

Ch. De Smet.

RAPPORTS.

MM. Willems, Vollgraff et Lamy donnent lecture de leurs rapports sur des notes de voyage soumises par le R. P. Lammens et intitulées Le pays des Nosairis (itinéraire et notes archéologiques). L'auteur sera

remercié pour ces notes.

COMMUNICATIONS ET LECTURES.

L'Escaut est-il flamand ou brabançon? par Ch. Duvivier, membre de l'Académie.

1.

Le droit romain place les eaux courantes parmi les choses communes, dont l'usage est à tous; soumises à la gérance d'une autorité en vue d'une jouissance publique, elles n'ont point de propriétaire dans le sens civil du terme.

Confondant un pouvoir de gérance avec un droit privatif, le moyen âge mêla, ou même substitua à la thèse romaine l'idée d'un droit de propriété : l'État exerce alors, sur les voies navigables, non pas seulement la direction et la haute police dans l'intérêt du public, mais un véri

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