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ils ont, sans compter, donné au pays leur temps dans des conditions souvent plus dures que ne l'avaient prévu les arrêtés de 1906.

La date de cessation des hostilités ne doit pas être le point de départ différé des arrêtés du 28 mai 1914. Ceux-ci, en effet, ne se trouvent pas conformes aux prescriptions de la loi du 23 avril 1919 sur la journée de huit heures, au bénéfice de laquelle a droit le personnel des chemins de fer tout entier et que, seuls depuis le 5 octobre, les mécaniciens et chauffeurs n'ont pas encore vue réalisée à leur profit, tandis que les autres agents des chemins de fer l'ont obtenue à des dates échelonnées depuis le 1er mai dernier.

Sans doute, cette loi a prescrit que les règlements d'administration publique détermineront par profession les délais et conditions de son application; mais la diversité du travail dans les diverses catégories des employés de chemins de fer rend plus difficile que dans toute autre industrie la préparation de ce règlement dont la date de promulgation ne peut être encore déterminée.

J'ai estimé indispensable de ne pas attendre ce règlement d'administration publique pour fixer, par des textes provisoires, les règles nouvelles du travail des mécaniciens et chauffeurs et des agents des trains et telle est la raison d'être des nouveaux arrêtés ci-joints réglementant le travail de ces agents.

Les dispositions principales en ont, d'ailleurs, été déterminées d'après les accords intervenus entre les représentants des administrations des réseaux et ceux du personnel, au cours des travaux de la commission paritaire chargée des mesures à prendre en vue de l'établissement de la journée de huit heures pour l'ensemble du personnel des chemins de fer d'intérêt général. Elles visent la mise en vigueur d'un régime que tous les membres de cette commission, représentants des administrations aussi bien que représentants du personnel, désirent aussi rapprochée que possible.

Mais, moins que tout autre, j'ai le droit de me désintéresser de la situation actuelle des transports qui donne lieu à tant de plaintes du public, et qui menace de compromettre les intérêts vitaux du pays. Le trafic est paralysé partiellement, entraînant avec lui des chômages. et des pertes considérables. Les trains de voyageurs ont des marches irrégulières. Tout doit être tenté pour faire cesser cet état de choses.

Répondant à une circulaire du 12 août 1919, les directions des réseaux et les représentants du personnel m'ont montré combien ils étaient préoccupés de la crise actuelle et désireux d'y voir apporter des remèdes prompts et efficaces.

Dans ses conclusions des 25 septembre et 2 octobre, dont je vous ai adressé copie dès le 2 octobre, en vous invitant à les examiner sans

délai et avec la volonté d'en appliquer immédiatement les dispositions, et que, dans une circulaire du 13 octobre, je transmettais à tout le personnel du contrôle, afin que chacun, dans sa sphère d'action, s'efforce d'en poursuivre la réalisation, le comité de l'exploitation technique des chemins de fer a indiqué toute une série de mesures dont l'application lui paraît de nature à arrêter l'aggravation de la crise et à lui porter remède.

Sans doute, certaines de ces mesures avaient déjà été envisagées auparavant, et j'en avais déjà signalité l'opportunité à ceux qu'elles concernent. Elles sont en cours d'exécution. Il importe que les directions des réseaux fassent l'effort maximum pour en obtenir la réalisation effective dans le délai le plus court possible.

En particulier, le comité de l'exploitation technique a signalé : « La nécessité de rendre le courage et la confiance au personnel déprimé par la fatigue subie pendant la guerre et par les difficultés qu'il rencontre pour faire un bon service, de recruter le plus vite possible les nouveaux agents nécessaires et d'activer leur instruction, de pousser d'une manière particulièrement active le recrutement des équipes de traction et pour cela inciter les ouvriers des ateliers à passer au service des mécaniciens par des avantages pécuniaires, et encourager les mécaniciens et chauffeurs par un système de primes adaptées aux circonstances actuelles, etc.

Il a également signalé, à propos du travail des ateliers, l'intérêt des commissions mixtes d'études ou d'institutions analogues qui existent déjà sur certains réseaux. Il a insisté sur la nécessité de faire appel aux dirigeants des réseaux et au personnel des chemins de fer, à tous les degrés de la hiérarchie, pour qu'ils fassent, temporairement, plus que leur devoir en vue d'arriver à la solution de la crise.

Il semble, d'autre part, que le personnel des chemins de fer ne soit. pas toujours à même de se rendre compte des efforts faits pour combattre les difficultés que la guerre entraîne après elle et dont la disparition ne peut pas être obtenue dès le lendemain de la fin des hostilités.

Comment peut-on, mieux que dans les conversations entre les directeurs ou le personnel dirigeant d'une part, les représentants des diverses catégories du personnel d'exécution ou des comités de leurs associations d'autre part, examiner les difficultés rencontrées par les uns et les autres, envisager les remèdes apportés ou à apporter.

Ces conversations ne sont-elles pas de nature à faire renaître la confiance mutuelle? Certains réseaux entrant dans cette voie, des entretiens ont déjà eu lieu entre directions et comités; il paraît opportun de les généraliser à tous les réseaux.

A côté des facteurs qui dépassent la bonne volonté humaine (usure du matériel, qualité défectueuse du charbon, etc.), il n'est pas douteux que cette bonne volonté et le zèle des hommes peuvent permettre, dans une certaine mesure, de conjurer les effets de la guerre et d'aider à la reconstitution des territoires dévastés et à la solution du problème de la vie chère. Mécaniciens e chauffeurs et agents des trains n'hésiteront pas à faire, comme le demande le comité de l'exploitation technique, plus que leur devoir. Mais il serait injuste de ne pas chercher à procurer à ceux qui donneront ainsi leur peine et leur temps sans compter, à la chose publique, quelques facilités supplémentaires d'existence.

Les administrations des réseaux l'ont déjà compris et ont manifesté leur intention de montrer, en s'imposant des sacrifices financiers, qu'elles cherchaient à réduire au minimum l'effort demandé à leur personnel.

J'approuve entièrement le principe de tenir compte par une rémunération pécuniaire de la non-application intégrale des règles édictées dans mes arrêtés ci-joints, au point de vue du nombre total des heures de travail entre deux grands repos périodiques, du maximum de travail journalier, de celui de l'amplitude, de ceux des repos journaliers ou du nombre de découchers, etc.

Les tableaux ci-joints indiquent les modalités à adopter pour le calcul de ces rémunérations.

Sans doute, les réseaux, en demandant, pour faire face à une crise exceptionnellement grave, de ne pas appliquer intégralement les dispositions réglementaires des arrêtés de ce jour, ne peuvent avoir en vue que des mesures exceptionnelles et provisoires qui doivent disparaître avec les difficultés elles-mêmes. Il est indispensable de n'envisager que celles de ces mesures qui sont susceptibles de réaliser une amélioration sérieuse dans la marche du service sans imposer au personnel un effort disproportionné et trop lourd. Mais il est non moins indispensable que le personnel connaisse exactement les raisons de la non-application intégrale et temporaire des règles imposées par l'arrêté, qu'il puisse les examiner et rechercher, de concert avec les dirigeants, les solutions de nature à les faire progressivement disparaître. Les nécessités diffèrent d'un réseau à l'autre, les solutions doivent aussi différer d'un réseau à l'autre.

Aussi, prenant en considération les résultats obtenus par les anciens comités du travail du réseau de l'État, j'ai décidé l'organisation sur les réseaux exploités par les compagnies de comités du travail des mécaniciens et chauffeurs et de comités du travail des agents des trains. Ces comités se composeront de représentants des administrations

des réseaux et de représentants élus par les agents intéressés. Les élections pour ces comités devront avoir lieu le plus tôt possible, c'est-àdire au plus tard avant le 10 décembre.

L'organisation en doit être envisagée comme essentiellement provisoire (le statut en préparation devra déterminer les représentations du personnel).

Les comités du travail auront à faire face à des travaux de deux sortes :

1o Examen des modifications provisoires à apporter à la réglementation du travail des agents intéressés de manière à faire face aux nécessités du service public, c'est-à-dire à réaliser aussi promptement que possible l'amélioration du service aujourd'hui très insuffisant, et à assurer tous les transports que les chemins de fer doivent effectuer, notamment pour la reprise de la vie économique du pays, la reconstitution des régions dévastées, la lutte contre la vie chère, etc. A cette fin par exemple, ces comités du travail devront examiner les périodes pendant lesquelles devront être maintenues des règles analogues à celles qui sont actuellement en vigueur, et prévoir par réseau les cas dans lesquels il conviendra d'apporter à ces règles les modifications exceptionnelles qui seraient justifiées.

Les modifications provisoires et exceptionnelles ainsi étudiées devront être soumises à mon approbation;

2o Ces règles établies, les comités du travail devront en surveiller l'exécution. A cette fin:

a) Les roulements des services réguliers seront, lors de leur établissement, examinés par les comités institués auprès des ingénieurs en chef de la traction et de l'exploitation pour les réseaux où les roule ments sont établis par le service central et par les comités instituéauprès des ingénieurs de section ou d'arrondissement, pour les réseaux où les roulements sont établis par les sections ou arrondissements.

Ils seront transmis sans délai à la direction du contrôle du travail avec les observations des comités du travail; mais il doit demeurer entendu qu'à la date de l'application des horaires, ces roulements seront mis en service à titre provisoire, quelles que soient les observations de la commission si la direction du contrôle du travail n'a pas encore eu le temps de prendre ses décisions.

b) Des dérogations aux règles admises pour le réseau peuvent se produire effectivement en service régulier ou dans les services facultatifs, chaque mois, et au plus tard le dixième jour du mois, les comités fonctionnant auprès des ingénieurs ou des inspecteurs principaux de sections ou d'arrondissements devront examiner les dérogations du mois précédent et transmettre leur rapport avec l'état des dérogations à la direction du contrôle du travail.

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Sans attendre d'ailleurs le commencement du mois suivant, les comités du travail devront examiner toutes les dérogations importantes se produisant à une même journée de roulement ou à un même train facultatif, dès que le nombre de ces dérogations atteindra 5. Ils remettront à l'ingénieur ou à l'inspecteur principal de la section ou de l'arrondissement un rapport sur les modifications à apporter soit dans le roulement, soit dans la remorque ou dans l'établissement de l'horaire du train facultatif. Ces réclamations et ces suggestions devront être examinées sans délai, et, en attendant la suite qu'elles comportent, l'exécution du service devra continuer.

L'institution et l'installation des comités du travail seront réalisées dans un délai aussi court que possible; mais en attendant qu'ils aient pu obtenir les résultats espérés, mécaniciens et chauffeurs et agents des trains devront accepter, avec le dévouement et l'abnégation dont ils ont si souvent fait preuve, le nouvel effort supplémentaire qui leur sera demandé pour faire face dans tous les cas aux nécessités du service public.

Quelles que soient d'ailleurs les facilités temporaires que la tolérance prévue dans la nouvelle réglementation du travail peut leur procurer, les administrations des réseaux doivent avoir la constante préoccupation d'appliquer au plus tôt les règles prescrites par mon arrêté, tout en satisfaisant au service public d'une façon complète. Je ne doute pas qu'avec le concours loyal du personnel dans le fonctionnement du service comme dans la recherche des remèdes à apporter à la crise actuelle, les réseaux ne réalisent, dans un avenir prochain, l'application intégrale de ces règles en même temps qu'ils feront face à toutes les exigences du service.

A. CLAVEILLE.

Le ministre des travaux publics, des transports et de la marine marchande,

Vu la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer;

Vu le décret du 11 novembre 1917;

Vu l'avis du conseil d'État en date du 9 avril 1884;

Vu l'arrêté du 28 mai 1914 portant réglementation de la durée du travail et des repos des mécaniciens et chauffeurs;

Vu la loi du 23 avril 1919;

La direction des chemins de fer de l'État, les compagnies des chemins de fer de l'Est, du Nord, de Paris à Lyon et à la Méditerranée, de Paris à Orléans et le syndicat des chemins de fer de Ceinture de Paris entendus ;

Vu les conclusions de la commission paritaire instituée par l'arrêté ministériel du 24 avril 1919,

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