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les automotrices Westinghouse, qui ont donné des résultats satisfaisants en Hongrie et en Hollande.

Le chemin de fer de Caen à la mer, après une tentative de courte durée, y a immédiatement renoncé. Il existe encore une voiture Westinghouse sur le chemin de fer de Dinard à SaintBriac; mais elle n'est pas considérée comme très satisfaisante. Des automotrices Pieper à électro-tamponnage ont été employées sur la ligne de Poissy à Saint-Germain ; mais ce système ne s'est pas répandu.

II. ESSAIS ET APPLICATIONS PENDANT ET DEPUIS LA GUERRE.

Depuis que les conséquences économiques de la guerre ont rendu si onéreuse l'exploitation des voies ferrées d'intérêt local, on a pensé qu'un moyen de remédier à cette situation serait l'emploi d'automotrices légères, tout au moins pour certains trains.

Toutefois le problème a dû être envisagé à un autre point de vue qu'avant la guerre.

On avait affaire à des lignes déjà pourvues d'un matériel à vapeur, et ne disposant que de faibles ressources pour y adjoindre de nouvelles automotrices. Il était essentiel dès lors de n'adopter que des types peu coûteux d'achat et de fonctionnement très économique.

Pour réaliser cette double condition, on a eu recours au moteur à explosion dont l'emploi si généralisé dans ces dernières années a montré toutes les qualités.

Avant 1914 on avait reculé devant l'emploi de ce moteur avec transmission mécanique, parce qu'on y voyait des inconvénients inadmissibles pour la traction sur voie ferrée.

On sait en effet que le moteur à explosion ne se prête pas facilement à des variations de travail, et qu'il est nécessaire pour y remédier sur les automobiles d'employer une boîte de changements de vitesse. Ces dispositions paraissent inadmissibles sur rail, et c'est pourquoi on avait adopté, dans les automotrices pétroléo-électriques, une transmission de force électrique pos

sédant toutes les qualités de souplesse nécessaire, au détriment toutefois du. rendement.

La pratique que l'on a maintenant du moteur à explosion a montré qu'il ne fallait pas s'effrayer des inconvénients signalés ci-dessus et qu'il y avait tout avantage à adopter ce moteur même avec une transmission purement mécanique.

Les premières tentatives d'emploi d'automobiles sur rails ont eu lieu à l'étranger, mais, dès 1916, l'Ingénieur français, V. Dufour, capitaine à l'Armée d'Orient, transforma des autocamions en tracteurs sur rails et les utilisa avec succès sur les lignes à voie normale et à voie étroite de la région de Salonique (1). C'est la voie dans laquelle est entré, le premier en France, M. Tartary, Administrateur de la Compagnie des Chemins de fer départementaux des Deux-Sèvres.

1o Expériences de M. Tartary. Depuis les essais dont nous venons de parler, certaines Compagnies ont de nouveau songé à l'emploi des automotrices à essence en vue de diminuer leurs déficits d'exploitation; entre autres expériences, il est intéressant de citer les expériences faites par la Compagnie des chemins de fer départementaux des Deux-Sèvres et celles que poursuivent encore actuellement la Compagnie des tramways du Loiret et la Compagnie des chemins de fer du sud de l'Aisne.

Dans ces départements, les véhicules utilisés proviennent de la transformation de véhicules routiers en vue de la circulation sur voies ferrées. La mise à l'étude de la question a nécessité en particulier la solution de deux problèmes d'ordre technique qu'il est bon de mentionner.

Le premier problème est relatif à la direction de la voiture et à son inscription dans les courbes dont le rayon peut descendre jusqu'à 25 m. Une telle manœuvre était particulièrement difficile par suite de la légèreté de la voiture dont le poids ne dépassait pas trois tonnes et par l'amplitude anormale de l'empattement qui atteignait 3 m. 20, tandis qu'il varie de 1 m. 80 à 2 m. 20 avec

(1) Génie civil du 29 novembre 1919 : « La transformation de voitures automobiles en tracteurs sur rails à l'Armée d'Orient. >>

les locomotives à vapeur ordinairement utilisées. Il était en outre impossible de réduire cet empattement car une telle réduction aurait entraîné la formation d'un porte à faux particulièrement dangereux à cause de la présence d'organes lourds à l'avant de la voiture.

Les organes normaux de direction, le volant, le différentiel, furent conservés; on y adjoignit un dispositif spécial actuellement breveté, destiné à maintenir constamment l'essieu avant dans une direction radiale.

Les fusées de l'avant sont montées sur tourillons à la façon des véhicules routiers et reliées l'une à l'autre par l'intermédiaire de deux leviers dont elles sont solidaires et d'une barre d'accouplement.

En alignement, la barre d'accouplement conserve une direction normale grâce à l'action de deux ressorts qui la relient à une plaque fixée sur la partie centrale de l'essieu; quand le véhicule aborde une courbe, la pression du rail extérieur de la courbe sur le boudin de la roue est suffisante pour forcer la tension du ressort et orienter l'essieu dans une direction radiale, par suite de la liaison établie entre les deux roues par la barre d'accouplement; le jeu des ressorts oblige l'essieu à reprendre sa direction normale dès la sortie de la courbe.

Le maintien du volant permet de contrôler la direction et facilite l'action en courbe ; quant au différentiel, on aurait pu penser à première vue que son maintien était inutile par suite de la conicité des bandages et de la valeur relativement grande du rayon des courbes par rapport à celui des routes. L'expérience a cependant démontré que cet organe contribuait à la conduite de la voiture et qu'en annulant les efforts transversaux, il ménageait le véhicule en assurant un roulement plus doux ; enfin, la présence du différentiel était absolument indispensable pour effectuer le retournement de la voiture.

C'était là un second problème qu'il fallait résoudre sans l'aide de plaques tournantes qui n'ont que 2 m. 20 de diamètre ; ainsi que nous l'avons déjà fait observer, l'empattement atteint 3 m. 20. La rotation a été obtenue à l'aide d'un matériel léger que

la voiture transporte toujours avec elle; il se compose d'une couronne en tôle dont le diamètre est égal à la distance qui sépare les bords intérieurs des rails; cette couronne, sectionnée en deux points diamétralement opposés est prolongée par deux plans de roulement en tôle, qui se raccordent avec les rails.

Pendant le retournement, les roues arrière roulent sur la couronne grâce à la présence du différentiel et l'ensemble de la voiture pivote autour de l'axe vertical passant par le centre de la couronne et par le centre de l'essieu arrière ; le centre de l'essieu avant, soulevé par un vérin, repose ensuite sur un galet de roulement et décrit un arc de cercle de 180 degrés autour du pivot indiqué. Il est fait usage de bandes de tôle dans le cas où la nature du terrain ne se prête pas à un roulement suffisamment aisé du galet.

Le poids de la couronne et du galet est de 34 kilos, celui des plaques de tôle, de 12 kilos.

Ce dispositif permet le retournement en un point quelconque de la ligne, mais il ne semble convenir qu'à un véhicule extra-léger. En dehors des particularités que nous venons de signaler, les véhicules utilisés n'offraient rien de remarquable; des bandages métalliques de wagons avaient été substitués aux roues ordinaires en vue d'assurer la circulation sur la voie ferrée. Ces bandages métalliques étaient montés sur des centres légers spécialement emboutis. Le camion utilisé dans les Deux-Sèvres provenait des stocks américains; il était du type G.M.G., son moteur avait une puissance de 18 HP, le poids à vide était de 2.000 kilos. La voiture qui a été utilisée dans l'Aisne était une camionnette de 35 HP pesant 3 tonnes à vide.

La capacité des deux véhicules était d'environ 20 voyageurs ; chacun d'eux était muni de deux freins, l'un à main, l'autre à pied; la seconde voiture comportait également une sablière en vue d'assurer le démarrage.

Dans les Deux-Sèvres, le véhicule décrit précédemment a d'abord circulé avec sa superstructure de camion routier et, durant 5 mois, a assuré le service de la poste et des voyageurs ; le parcours journalier a été en moyenne de 70 kilomètres. Une car

rosserie basse fut ensuite adaptée au châssis ; l'ensemble constitue le premier auto-rail, d'une capacité maxima de 24 voyageurs dont 16 assis. Les conditions de confort laissaient fort à désirer par suite de l'exiguïté de la voiture qui mesurait seulement I m. 66 de largeur. La vitesse, déduction faite des arrêts, a varié entre 30 et 35 kilomètres à l'heure sur une ligne dont les déclivités atteignaient 40 mm. ; la consommation a été de 20 litres aux 100 kilomètres et le parcours journalier a été graduellement porté jusqu'à 200 kilomètres. Actuellement, cette voiture a déjà couvert 30.000 kilomètres sans incidents et sans interruption. La tenue du véhicule sur la voie a été jugée satisfaisante, et des essais aussi particulièrement concluants décidèrent à effectuer d'autres expériences.

Depuis le 1er janvier 1922, la Compagnie des tramways du Loiret a mis en service une voiture provenant de la transformation d'une camionnette de 1.800 kilos, munie d'un moteur de 18 HP. Cette voiture a été surtout utilisée en vue de rechercher les sections du réseau sur lesquelles le trafic voyageurs était susceptible de se développer. Au point de vue technique, elle a donné de bons résultats : la consommation n'a été que de 20 litres; le seul reproche à lui adresser est son manque de capacité, la carrosserie légère dont était muni le châssis ne comportant en effet que 14 places.

C'est dans des conditions analogues que furent poursuivies les expériences dans le département de l'Aisne, sur la ligne de Château-Thierry à Verdelot. Avec l'auto-rail de fortune décrite précédemment, ont été effectués des essais officiels ; le parcours total fut de 130 kilomètres ; la vitesse effective demeura comprise entre 35 et 41 kilomètres à l'heure sur des sections variant de 27 à 38 kilomètres. La consommation totale fut de 25 litres d'essence, soit 19 1. 8 aux 100 kilomètres ; la consommation d'huile ne fut que de 2 kilos 5. Le retournement de la voiture à l'aide du dispositif décrit plus haut fut opéré en 20 minutes sur un terrain non préparé et en 10 minutes sur un terrain préparé; il pourrait être effectué en 5 minutes sur un terrain très bien aménagé et avec un personnel entraîné ; deux hommes sont nécessaires pour effectuer

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