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sultative internationale des travaux du Canal de Suez l'opportunité de prolonger les jetées ou d'intensifier seulement les dragages.

En deux jours, les 8 et 9 février 1908, pendant une tempête qui n'avait rien d'exceptionnel et dont la navigation n'a pas souffert, 900.000 mètres cubes de sable ont été déposés dans le chenal, compromettant gravement les conditions d'accès du canal.

Dans sa session de novembre 1908, la Commission consultative internationale des travaux a commencé l'examen des causes de cette grave perturbation et des mesures à prendre pour en éviter le retour. A ce moment l'idée déjà envisagée à plusieurs reprises d'un prolongement de la jetée Ouest, qui joue à Port-Saïd un rôle identique à celui de la jetée Nord de Soulina, n'a pas trouvé beaucoup d'appui parmi les techniciens des sept ou huit pays qui prenaient part aux débats. L'augmentation des dragages fut recommandée en vue, notamment, d'assurer le dérasement d'un banc, dit Banc des Porteurs, qui est l'homologue de notre banc du Sud.

Tout le monde a été d'accord pour reconnaître que ce banc formait un épi, dont la présence arrêtait le mouvement général des sables transportés par le grand courant littoral saturé des matières arrachées à la plage ou apportées à la mer par le Nil.

On s'efforça donc d'intensifier les dragages et d'écrêter le plus possible le banc des Porteurs.

Mais ces moyens furent jugés insuffisants et à la suite de nouveaux et brusques apports (3.300.000 m3 en 4 jours en février 1911), on décida le prolongement de la jetée Ouest qui fut entrepris à la fin de l'année 1911. Cette jetée ne dépassait pas les fonds de 8 m. 50 et on voulait, à cette époque, entretenir une profondeur d'environ 10 mètres.

En 1919, alors que le noyau principal de la jetée était prolongé jusque dans les fonds de 10 mètres, on put constater que la profondeur de 10 m. 50 s'était maintenue naturellement à l'extrémité de la jetée et que la moyenne annuelle des dragages, qui avait atteint, dans la période de 4 ans, 1911-14, 2.921.000 m3, avait pu tomber en moyenne, pendant les 4 années suivantes,

1915-18, à 728.000 m3, le cube dragué en 1918 s'étant même réduit à 114.000 m3. Ces heureux résultats étaient venus confirmer l'opinion des Ingénieurs qui voyaient dans une combinaison judicieuse des jetées et des dragages la meilleure solution de l'entretien des profondeurs des chenaux d'accès dans les ports.

Un tel exemple, joint à ce fait que l'on se retrouve aujourd'hui à Soulina, dans une situation très comparable à celle de 1857, dicte la solution à adopter. Il faut reprendre, dans ses grandes lignes, celle de Sir Charles Hartley.

Prolongement des jetées. prolongement des jetées.

Nous proposons en conséquence le

Nous sommes d'avis de conserver pour ce prolongement la direction qui a été donnée au chenal dès l'origine. Les motifs qui ont dicté son choix à Sir Charles Hartley n'ont rien perdu de leur valeur et nous ne voyons aucun motif pour le modifier.

Une solution qu'on pourrait être tenté d'accepter à première vue et en l'absence d'un examen attentif, consisterait à conserver dans sa position actuelle le chenal qui offre des profondeurs satisfaisantes et à le border de jetées en vue d'éviter son comblement par les tempêtes; mais une pareille disposition ne tarderait pas à faire apparaître des inconvénients graves pour la navigation et à faire perdre le bénéfice du concours des forces naturelles : courant du fleuve, courant littoral, vents régnants, pour l'entretien des profondeurs.

Si l'on se reporte à l'historique des travaux on verra que la direction considérée comme la meilleure au point de vue de l'action des courants sur les fonds, eût été la direction Est, voire même S.-E., et que si on a adopté la direction E. 1/4 et demi N.-E. pour faciliter le mouvement des navires, rien ne justifierait une nouvelle inclinaison vers le Nord.

Nous considérons donc comme nécessaire de rétablir le chenal extérieur dans l'axe des jetées.

Mais sur quelle longueur devra être effectué le prolongement des jetées ? Dans quel ordre les travaux devront-ils être exécutés ?

La méthode que nous préconisons devant reposer sur une judi

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cieuse combinaison du prolongement des jetées et des dragages, il est difficile a priori de fixer une longueur pour ce prolongement. C'est l'expérience qui peut, seule, guider dans ce cas. Indépendamment d'une dépense excessive et superflue à laquelle pourrait conduire un prolongement trop grand des jetées, il faut noter le danger signalé dans des études antérieures auquel on s'exposerait en prolongeant les jetées jusqu'aux profondeurs où l'action des lames ne se fait presque plus sentir. Dans ce cas, a-t-on dit, les alluvions au lieu d'être entraînées au loin vers le Sud se déposeraient dans l'eau relativement calme en dehors des jetées, à une profondeur où le courant littoral ne pourrait pas les entraîner et provoqueraient ainsi, soit de nouveaux prolongements de jetées, soit des dragages plus considérables.

Il faut donc prolonger les jetées, mais pas plus qu'il n'est nécessaire.

Cette condition s'harmonise d'ailleurs parfaitement avec la nécessité de limiter les dépenses et avec les conditions d'exécution des travaux résultant de la situation présente.

Le chenal incessamment repoussé par le développement du banc du Sud a une direction N.-E., faisant un angle très accentué avec l'axe des jetées ; il faut donc, tout d'abord, le ramener dans le prolongement des jetées.

Si l'on possédait dès maintenant un matériel de dragage suffisant, il y aurait lieu, avant d'entreprendre tout prolongement des jetées, de procéder d'abord à l'ouverture d'un nouveau chenal dans la direction définitive, tout en entretenant le chenal actuel. Lorsque la navigation aurait été établie dans le nouveau chenal on exécuterait les nouvelles jetées, destinées, d'une part, comme à Port-Saïd, à protéger le chenal contre les envahissements pouvant résulter de gros temps, d'autre part, à concentrer l'action du courant fluvial et à la faire contribuer à l'entretien des profondeurs.

De toute manière il faudra bien disposer à un moment donné de ce matériel, puisque le nouveau chenal ne peut être ouvert que par dragages et que l'ancien, pendant ce temps, doit continuer à être entretenu par le même procédé. Il serait donc possible de

suivre l'ordre d'exécution qui se présente tout d'abord à l'esprit et rien n'empêchera même de l'adopter si des considérations financières ou d'autres circonstances en font une obligation. Il est même possible qu'on s'en trouve bien; mais c'est une chance à courir.

Si, dans le rapport préliminaire, il a été déclaré et si nous confirmons ici, qu'il est préférable de commencer immédiatement les jetées, c'est que nous considérons ces ouvrages comme une garantie indispensable contre des événements sur lesquels la prudence exige de compter. Attendre que le nouveau chenal soit ouvert et mis en service, c'est rapporter à une date bien éloignée le commencement d'exécution du prolongement des jetées; c'est laisser sans protection, pendant bien longtemps, le nouveau chenal contre les effets des coups de mer malencontreux.

L'état du banc du Sud est d'ailleurs tel qu'en commençant les travaux de la nouvelle jetée Sud à une certaine distance (500 mètres comme il a été indiqué dans le rapport préliminaire) du musoir de la jetée actuelle, on se trouvera dans d'excellentes conditions. La hauteur du banc dans cette région permettra, en effet, d'établir l'ouvrage dans des conditions économiques et sa présence n'apportera aucune perturbation dans le jeu des forces naturelles.

Il y a, en effet, un écueil à éviter dans cette période de substitution d'un nouveau chenal à l'ancien et de construction d'ouvrages dans un ordre imposé, qui ne correspond pas nécessairement à l'ordre le plus logique ; c'est de donner naissance, même temporairement, à des actions susceptibles de compromettre les profondeurs du chenal utilisé par la navigation.

Si l'on commençait les travaux par le prolongement de la jetée Nord les alluvions poussées par les tempêtes du Nord seraient arrêtées par la portion de la jetée Nord déjà construite et risqueraient d'encombrer le chenal actuel, en imposant un accroissement des dragages. En commençant, au contraire, par la jetée Sud le même phénomène se produira, mais il sera combattu par le courant fluvial et le chenal actuel se trouvera ainsi à l'abri des apports venant du Nord. D'ailleurs la présence de la nouvelle Ann. des P. et Ch., MÉMOIRES, 1923-I.

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jetée Sud, dans la région où elle sera entreprise, ne modifiera guère le relief du banc et pourra, tout au contraire, constituer une protection contre son déversement dans le chenal sous l'effet de gros temps du Sud.

Les travaux préparatoires d'une grande entreprise, les organisations des chantiers, les tâtonnements inévitables au début sont toujours une cause de retard dans l'établissement d'ouvrages importants; c'est pourquoi nous estimons que la construction du prolongement des jetées doit être immédiatement mise en route.

Mais cette construction ne pourra pas se poursuivre en complète indépendance des travaux d'ouverture du nouveau chenal. On ne peut pas admettre qu'il existe pendant trop longtemps des éléments importants de jetées alors que le chenal maintenu affecté à la navigation resterait à l'extérieur et au Nord de ces deux ouvrages. Il y aurait une situation trop anormale que l'on peut accepter pendant la belle saison, mais qu'on ne saurait prolonger sans danger.

Les travaux d'ouverture du nouveau chenal devront donc être poursuivis avec la plus grande activité; la rapidité d'exécution sera, dans ce cas, un élément de succès et si des incidents toujours possibles venaient retarder ou entraver les travaux d'ouverture du nouveau chenal, mieux vaudrait limiter les travaux des nouvelles jetées à ceux de la portion de jetée Sud qui ne constitue guère qu'une consolidation du banc Sud que de s'exposer à rester un certain temps dans la situation anormale que nous venons d'envisager.

Si, au contraire, aucun incident ne vient s'opposer à la marche des travaux telle que nous la conseillons, on entreprendra les travaux de la jetée Nord dès qu'une longueur d'environ 300 mètres de la jetée Sud aura été exécutée. On placera le point de départ de cette nouvelle jetée Nord de manière à laisser à la navigation un passage suffisant aux navires qui devront continuer à utiliser le chenal actuel. La distance à ménager pourra être fixée après consultation des principaux pilotes; nous pensons qu'une distance de 500 mètres environ sera convenable.

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