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ques observations que nous croyons devoir rapporter « 1° qu'on ne doit point inquiéter au tribunal de la pénitence les fidèles qui ne se confessent qu'une fois par an, s'ils le font avec les dispositions requises; ce qu'ils peuvent certainement faire, quoiqu'ils soient exposés à se confesser d'une manière moins parfaite que ceux qui se confessent plus Souvent. Mais les curés et les confesseurs ont de puissants motifs à mettre en avant, non pour les obliger, mais pour les engager à s'approcher, au moins deux ou trois fois par an, des sacrements de pénitence et de l'eucharistie; 2° que les peines portées par le concile de Latran ne s'encourent point par le fait, ipso facto; elles ne sont que comminatoires, arceatur. Ainsi, un curé doit bien se donner de garde d'interdire l'entrée de l'église ou de refuser la sépulture ecclésiastique à un paroissien qui a manqué à la confession annuelle et à la communion pascale. Les évêques eux-mêmes, en France, ne croient pas devoir sévir contre ceux qui ne remplissent pas ce double devoir, à raison du trop grand nombre de ceux qui malheureusement s'éloignent des sacrements; 3 qu'un curé ne peut, sans prévariquer, refuser d'entendre en confession ceux qui, n'ayant pas rempli le devoir de la confession annuelle depuis quelques années, désirent se confesser pour se préparer au sacrement de confirmation ou au sacrement de mariage. Il n'est pas moins coupable que celui qui refuse, à l'article de la mort, le vialique aux malades, uniquement parce qu'ils n'ont pas satisfait au devoir pascal avant leur maladie. Un évêque ne peut tolérer de semblables abus, qui rendraient suspecte l'orthodoxie d'un prêtre, si on ne savait qu'il n'agit que par suite d'une ignorance qu'il ne peut alléguer sans se condamner lui-même. »

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Sit simplex, humilis, confessio, pura, fidelis,
Atque frequens, nuda et discreta, libens, verecunda,
Integra, secreta et lacrymabilis, accelerata,
Fortis et accusans, ut sit parere parata.

22. Ces conditions, pour la plupart, rentrent l'one dans l'autre : il y en a quelquesunes qui ne demandent que quelques mots d'explication.

1° La confession doit être simple; le pénitent ne doit dire précisément que ce qui est nécessaire pour faire connaître au confesseur le nombre, l'espèce, la gravité de ses péchés, sans y mêler aucune circonstance superflue.

fautes à sa malice, à ses imperfections, sans rejeter ses péchés sur les autres.

3 La confession doit être pure dans l'intention, c'est-à-dire faile avec le dessein de se corriger de ses défauts, d'effacer ses péchés par une sincère pénitence, et de profiter des grâces que confère ce sacrement. Elles pèchent donc contre cette qualité, les personnes qui se confessent par habitude, quelquefois par amour-propre, quelquefois encore par d'autres vues qu'on devine sans les exprimer. C'est abuser d'une manière bien fâcheuse d'un remède institué pour la sanctification des âmes.

Il y a trois autres qualités sur lesquelles nous devons nous arrêter un peu plus, ce sont la sincérité, l'intégrité et la nécessité de faire la confession de vive voix. Nous ajouterons un quatrième article concernant les causes de nullité des confessions.

ARTICLE PREMIER.

De la sincérité de la confession.

23. Pour être sincère, une confession doit être faite sans détour, sans ambiguïté, sans artifice, sans déguisement. C'est bien à celui qui apporte du déguisement dans sa confession qu'on peut appliquer ces paroles de l'Ecclésiastique: Væ duplici cordel

24. Il ne suffit pas de condamner le mensonge et la duplicité faite à confesse, il faut encore examiner son action sur le sacrement de pénitence. Il est vrai que mentir au ministre de Dieu c'est mentir à Dieu lui-même « Néanmoins le défaut de sincérité n'est pas toujours une preuve que la contrition manque absolument, et les fautes qu'il occasionne ne sont pas toujours graves. Un pénitent cherche à s'excuser, il ne déclare pas certaines choses avec toute la sincérité qu'il devrait mettre dans son accusation; il ne faut pas tout de suite en conclure qu'il pèche mortellement et qu'il n'est point dans de bonnes dispositions. Ce qu'il fait n'est peut-être que la suite d'une sorte de timidité, d'une crainte d'être grondé, en un mot, d'une faiblesse répréhensible à la vérité, mais non point une faute grave; peut-être même n'osant dire les choses comme elles sont, veut-il mettre le confesseur dans le cas de le questionner. Il faut donc, avant de prononcer sur la grièveté du défaut de sincérité qu'on remarque en lui, voir quelle a été la nature, le principe et l'objet de ses excuses ou de son déguisement; jusqu'où il a poussé ce dernier abus, et s'il y lieu de croire qu'il l'eût poussé jusqu'à cacher des choses graves si le confesseur n'y eût pas fait attention, ou jusqu'à lui donner le change sur son état en matière grave (1). »

Pour faire plus sûrement l'application de celle sage observation, nous devons distinguer plusieurs sortes de mensonges. Ou ils sont en matière grave, ou ils sont en matière légère. Cette distinction est essentielle pour bien déterminer l'influence du mensonge sur le sacrement de pénitence.

2° La confession doit être humble: l'humilité est la vertu de l'accusé; son extérieur doit être modeste, sans aucun luxe; l'bumilité intérieure est encore plus nécessaire que l'extérieure; le pénitent doit attribuer ses (1) La Science du confesseur, par une société de prêtres retirés en Allemagne, re partie, chap. 1, art. 2, § 2.

25. Lorsque le mensonge du pénitent est

un péché mortel, il est évident que le coupable n'a pas de contrition, ou il faudrait supposer un changement bien subit de disposition entre son mensonge et l'absolution. Dans l'état ordinaire,ce changement subit n'est pas croyable Ainsi, quiconque fait un péché

mortel en mentant à confesse, rend la confession nulle, et commet de plus un sacrilége.

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- Le

26. Lorsque le mensonge n'est qu'un péché véniel, il faut examiner quel en est l'objet. En effet, cet objet peut être entièrement étranger à la matière de la confession comme il peut la concerner.-Lorsqu'il est étranger à la matière de la confession, il ne nuit point à la validité du sacrement, parce que le sacrement de pénitence peut être valide avec l'affection au péché véniel. Il diminue cependant la grâce du sacrement, car il est une preuve de disposition imparfaite. Cette espèce de mensonge peut arriver souvent : une femme, pour demander des avis et puiser des consolations, fait connaître certains défauts de son mari; elle les exagère, y met des circonstances qui n'existent pas; cependant ces exagérations ne vont pas au delà du véniel cette femme n'est certainement pas pour cela indigne de l'absolution. mensonge véniel peut avoir pour objet la matière de la confession. On peut nier d'avoir commis des péchés dont on est coupable, comme on peut s'accuser d'avoir commis des péchés qu'on n'a pas faits. Pour juger de l'action de ce mensonge sur le sacrement de pénitence, le confesseur doit examiner si c'est une matière nécessaire du sacrement de pénitence, ou si c'est une matière volontaire. Il faut observer qu'un péché peut être matière nécessaire du sacrement de pénitence, 1° quand c'est un péché mortel qui n'a pas encore été soumis aux clefs (Voy. ci-dessous, n° 28); 2° quand c'est un péché véniel, et qu'il n'y a pas d'autre péché soumis au jugement du prêtre; car le péché n'existant pas, il n'y a plus de matière au sacrement, l'absolution est nulle. La matière libre du sacrement de pénitence est celle qu'on peut soustraire sans porter atteinte à sa validité. Tels sont (quand il y a d'ailleurs une matière suffisante) les péchés véniels, les péchés mortels remis directement par une absolution antérieure, même des péchés mortels qu'à cause de certaines circonstances que nous ferons connaître au no 37, on est dispensé de confesser. Si le mensonge a pour objet la matière nécessaire du sacrement de pénitence, il est certain que l'absolution est nulle, parce qu'un sacrement ne peut exister sans l'une de ses parties essentielles: or, la matière nécessaire est une des parties essentielles du sacrement de pénitence. La conséquence est facile à tirer. Si au contraire le mensonge a pour objet une matière libre, et que d'ailleurs il ne soit que véniel, quoiqu'il diminue l'abondance des grâces, il n'empêche pas la validité du sacrement, puisqu'il y a tout ce qui est essentiel à son existence, et que le mensonge vé. niel, comme nous l'avons dit ci-dessus, n'est pas un obstacle à sa validité.

ARTICLE II.

De l'intégrité de la confession.

27. L'intégrité est une des qualités les tés dont nous avons parlé accompagnent plus essentielles de la confession. Les qualiplutôt la confession qu'elles n'en sont partie constitutive. C'est celle-ci qui lui donne l'existence qu'elle doit avoir, qui la fait ce qu'elle doit être. Car si la confession est intègre, on a accusé tout ce qu'on doit déclarer au confesseur. On distingue deux espèces d'intégrité : l'une absolue, et l'autre morale. La première consiste à confesser sans aucune omission tous les péchés mortels qu'on a commis, avec explication de leur nombre, des circonstances qui changent l'espèce et des circonstances qui sont aggravantes en supposant que la loi divine oblige à les con fesser. L'intégrité morale tenant compte de la faiblesse de l'homme et des diverses circonstances dans lesquelles il peut se trouver, ne demande pas qu'il confesse tout, mais seulement qu'il déclare ce qu'il peut faire connaître. De l'aveu de tous les théologiens, cette dernière espèce d'intégrité est suffisante pour la validité du sacrement de pénitence. Mais il est à craindre qu'on ne se fasse illusion sur ce sujet. Pour éclairer suffisamment le fidèle, 1° nous déterminerons rigoureusement ce qui constitue l'intégrité absolue de la confession; 2° nous rechercherons les causes qui dispensent de cette intégrité, et rendent suffisante l'intégrité morale.

§ 1er. De ce qui constitue l'in'égrité absolue de la con fession.

28. Comme on le voit par le titre de ce paragraphe, nous voulons rechercher ici ce que la loi commande de déclarer dans la confession, sans nous occuper des circonstances qui peuvent modifier la loi. La de Trente qui fixe ce qui est commandé par règle nous a été donnée par le saint concile la loi divine. Voici le canon de ce concile : Si quis dixerit, in sacramento pœnitentiæ, ad jure divino, confiteri omnia et singula pecremissionem peccatorum necessarium non esse cala mortalia, quorum memoria cum debita et diligenti præmeditatione habeatur, etiam occulta et quæ sunt contra duo ultima Decalogi præcepta, et circumstantias quæ peccati speciem mutant... anathema sit. Voilà la règle. Dans ce canon il y a des choses qui sont certaines, d'autres qu'on ne peut tirer que par induction et d'une manière dubitative.

I. De ce qui est certainement prescrit par la loi de l'intégrité de la confession.

29. L'intégrité absolue exige qu'on confesse, 1° l'espèce des péchés qu'on a commis. 2° leur nombre, 3 les circonstances qui changent l'espèce du péché commis.

1° De l'obligation de faire connaître l'espect des péchés mortels qu'on a commis. Il n'est pas un tribunal appelé à se prononcer sur un crime qui n'ait besoin d'en connaitre l'espèce. Comment pourrait-il apprécier la

culpabilité du criminel, appliquer une peine proportionnée au crime, s'il n'en connaissait l'espèce? car il y a une distance immense entre un vol de cinq francs et un assassinat. La nécessité est plus grande encore dans le tribunal de la pénitence que dans toute autre espèce de tribunal. Dans celui-là le confesseur est non-seulement juge, il est encore médecin. Comment appliquera-t-il le remède s'il ne connaît l'espèce de maladie? Si enim, dit le concile de Trente (sess. 14, cap. 5), erubescat ægrotus detegere medico vulnus quod ignorat, medicina non curat. Le confesseur appliquerait-il le même remède et la même pénitence à l'ivresse, à l'adultère et à l'homicide? La nature même des fonctions du confesseur prouve qu'il ne suffirait pas de lui dire J'ai péché mortellement; que ce ne serait pas même assez de faire connaître le genre de péché sans en nommer l'espèce. Le confesseur serait-il bien instruit si on se contentait de dire, J'ai péché grièvement contre la chasteté? Est-ce en pensées, en paroles, en actions? Si c'est en actions, est-ce un simple attouchement, est-ce la fornication, l'adultère? etc. C'est donc avec bien de la justice que le pape Alexandre VII a condamné cette proposition: Qui habuit copulam cum soluta satisfacit præcepto confessionis, dicens: Commisi cum soluta grave peccatum contra castitatem, non exprimendo copu

lam.

-

30. 2° De l'obligation d'exprimer le nombre des péchés que l'on a commis. · Le concile compte le nombre parmi les conditions requises pour l'intégrité de la confession: Omnia et singula peccata mortalia. Cette condition ressort évidemment de la nature de la confession. Comment le confesseur porteraitil un jugement assuré sur l'état du coupable, s'il ne connaît pas le nombre de ses péchés? Comment lui appliquerait-il le remède qui convient aux récidives et aux habitudinaires, si l'on ne lui expliquait le nombre de fois qu'on est tombé dans le même péché? « Ainsi, disons-nous avec Mgr Gousset, le pénitent ne peut se dispenser de dire en confession, s'il s'en souvient, combien de fois il a commis tel ou tel péché. S'il croit avoir blasphémé dix fois, ni plus ni moins, il doit s'accuser d'avoir blasphémé, non pas neuf, non pas onze, mais bien dix fois. Si, comme il arrive souvent, on ne peut préciser le nombre de fois qu'on a commis une faute, il suffit de dire qu'on y est tombé à peu près tant de fois, ou par jour, ou par semaine, ou par mois, ou simplement depuis la dernière confession. De là ces formules auxquelles on est souvent obligé de recourir quand on se confesse rarement, et qu'on a contracté quelque mauvaise habitude: J'ai commis tel péche huit ou dix fois. Je l'ai commis vingt fois, plus ou moins. - - Je me suis enivré trente fois environ, peut-être plus, peut-être moins. li n'est pas rare que le confesseur ne puisse pas même obtenir ce résultat de certains péDitents qui, ayant vécu des années entières

dans des habitudes criminelles, source féconde de péchés de pensées, de désirs, de paroles et d'actions, ne font connaître que très-imparfaitement le nombre de leurs péchés. Si on les interroge, ils répondent au hasard, disant plutôt trop que pas assez, comme si cela était indifférent. Il suffit alors que le confesseur connaisse l'espèce de l'habitude, le temps qu'elle a duré, le genre de vie du pénitent, les principales occasions où il s'est trouvé, avec un à peu près du nombre de fois qu'il est retombé par jour, ou par semaine, ou par mois : Confessarius, dit saint Alphonse, non debet esse nimis anxius circa exquirendum numerum peccatorum in pœnitente consuetudinario, quia sæpe est impossibile talem numerum certum habere. Plures enim ad importunitatem confessarii solum divinando respondent CENTIES, MILLIES; sed quis prudens eis fidem præstabit? Unde melius faciet confessarius, si diligenter statum conscientiæ exquirat; et exinde interrogando pœnitentem de lapsibus plus minusve in die, vel hebdomada, vel mense saltem IN CONFUSO numerum peccatorum apprehendat durante consuetudine commissorum, quin certum judicium faciat cum periculo errandi (Lib. VI, n. 468). Nous lisons aussi dans Billuart: Si tandem nullus certus vel probabilis numerus reperiri potest, sufficit, si pœnitens exponat suum statum, consuetudinem et moram in peccato,... v. g. meretrix : A decem annis me exhibui paratam ad omnes obvios; concubinarius: A quinque annis usus sum concubina tanquam uxore (1).

« Nous ferons remarquer que celui qui, s'étant accusé de certains péchés en disant qu'il les a commis à peu près, environ tant de fois, vient à en découvrir le nombre exact, n'est point obligé de revenir sur son accusation, à moins que le nombre réel ne soit notablement plus grand que le nombre appréciatif qu'il a déclaré. La raison en est qu'une accusation approximative, qui est faite de bonne foi, comprend moralement le nombre réel, et suffit pour l'intégrité morale, la seule nécessaire pour la confession sacramentelle. Mais il en est autrement lorsque, plus tard, on découvre une erreur notable dans le nombre des péchés dont on s'est accusé : on doit alors déclarer l'excédant, quoiqu'on ait lieu de croire que la confession ait été bonne et suivie de son effet, »>

31. 3 De l'obligation de faire connaitre les circonstances qui changent l'espèce du péché. -Le concile de Trente met au nombre des conditions d'une bonne confession l'obligation de confesser les circonstances qui changent l'espèce du péché. Au mot CIRCONSTANCES, nous avons expliqué la nature de ces circonstances. Lorsqu'on vient à réfléchir que la circonstance qui change l'espèce du péché donne à ce péché la malice de plusieurs péchés différents, on n'est pas surpris que le concile ait prescrit d'accuser ces circonstances. Il est bon d'observer qu'on suppose que la malice différente ajoutée au pé

(1) Tract, de sacramento Pœnitentiæ, dissert. ven, art. 2, § 5.

ché est mortelle; car si elle n'était que vénielle, on ne serait pas obligé de la déclarer, puisqu'on n'est pas tenu de confesser les péchés véniels.

II. De ce qui, selon quelques théologiens, appartient à l'intégrité de la confession.

32. Il y a deux points qui paraissent intimement liés à ce qui constitue l'essence de l'intégrité de la confession. Les péchés douteux peuvent être liés aux péchés mortels. Les circonstances aggravantes ont beaucoup de rapport avec les circonstances qui changent l'espèce du péché. De là plusieurs théologiens en ont conclu que ces deux points appartiennent à l'intégrité de la confession. Ils ont rencontré des adversaires. Nous allons rechercher de quel côté l'homme sage doit se ranger.

33. 1° Est-il nécessaire de confesser les péchés douteux ? Il peut s'élever différents doutes sur les péchés mortels dont on a lieu de se croire coupable. On peut douter s'ils sont mortels ou véniels, douter si on a ou si on n'a pas commis tel péché mortel; enfin, on peut douter si on les a soumis au pouvoir des clefs. Voilà trois espèces de péchés douteux : on demande donc si on est obligé de les confesser. Liguori pense qu'on n'y est point tenu, parce que le concile oblige seulement à accuser les péchés dont on a la conscience : or, avoir la conscience d'une chose, c'est avoir la certitude de son existence, ce qui est incompatible avec le doute. Il paraît que le plus grand nombre des théologiens ne partage pas cette opinion. Ils s'appuient sur ce que le concile exige que le pénitent fasse entièrement connaître son état. Il doit donc confesser les péchés douteux et expliquer le doute au confesseur.

34, 2° Est-il nécessaire de confesser les circonstances notablement aggravantes? Au mot CIRCONSTANCES, no 5, nous avons donné une idée des circonstances aggravantes. Il est fort controversé entre les théologiens s'il y a obligation de les confesser. Ce dont tout le monde convient, c'est que le concile de Trente n'a rien décidé à ce sujet.

Voici les raisons des partisans de l'opinion affirmative. Le concile de Trente établit pour principe que le confesseur, étant juge au confessionnal, doit connaître l'état de son pénitent tel qu'il est, sans aucune réticence: or, les circonstances notablement aggravantes augmentent considérablement la cu!pabilité du pénitent; il faut donc les connaltre pour le juger. Aussi dans les tribunaux civils les circonstances influent beaucoup sur la peine que l'on veut appliquer. Ces motifs ont déterminé les docteurs les plus sages à exiger la déclaration des circonstances notablement aggravantes. Telle est l'opinion

(1) In 4, dist. 16, art. 2, quæst. 5.
(2) Sum. part. 1, tit. 14, cap. 19, § 7.
(3) Theol. moral. lib. vi, no 468.

(4) Traité de la Pénitence, à l'usage des pénitents et des confesseurs; Paris, 1601, in-12. On peut citer en faveur du même sentiment Navarre, Vasquez. Tolet, de Lugo, Lessius, Béçan, Bonacina,

des auteurs du Catéchisme romain et de saint Charles.

Mgr Gousset expose ainsi l'opinion miligée (Théol. moral., II, n. 420–425): « Les autres, également en grand nombre, croient qu'il n'y a pas d'obligation d'expliquer les circonstances qui aggravent notablement la malice du péché. C'est le sentiment de saint Thomas: Quidam dicunt quod omnes circumstantiæ, quæ aliquam notabilem quanti tatem peccato addunt, confiteri necessitatis est, si memoriæ occurrunt. Alii vero dicunt quod non sint de necessitate confitendæ, nisi circumstantiæ quæ ad aliud genus peccati trahunt et HOC PROBABILIUS EST (1). Saint Antonin s'exprime comme l'Ange de l'école (2); et saint Alphonse regarde ce sentiment comme plus probable que le sentiment contraire: Sententia mihi probabilior negat esse obligationem confitendi circumstantias aggra vantes (3).

«Nous lisons aussi dans le Traité de la Pénitence de Paul Boudot, mort évêque d'Arras : « Quant aux circonstances qui ne changent pas l'espèce du péché, mais qui le rendent plus grief et énorme, voire que quelquesuns tiennent qu'il faut les confesser, néanmoins l'opinion la plus commune, qui est aussi la plus probable, est de dire qu'il n'est pas nécessaire de le faire, quoique ce serait très-bien fait de s'en confesser. Car, puisque déjà les pénitents ont beaucoup de peine à discerner les circonstances qui changent l'espèce du péché, ce serait par trop les charger que de vouloir les contraindre à confesser celles qui aggravent notablement le péché, parce qu'il y a peu d'offenses qui ne soient beaucoup plus ou beaucoup mo.as grièves les unes que les autres, même entre celles qui sont d'une semblable espèce. Ainsi, on rendrait toujours le pénitent en scrupule et perplexité de n'avoir pas confessé entiè rement ses péchés, quand il resterait que, quasi toujours, il aurait omis quelque-unes de telles circonstances (4). »

« Le second sentiment nous paralt assez probable pour pouvoir être suivi dans la pratique. Il ne s'agit pas ici de la substance du sacrement, de valore sacramenti, au sujet de laquelle on ne peut suivre une opinion probable, en s'écartant de la plus sûre. On convient que l'intégrité formelle de la confession suffit pour l'absolution. D'ailleurs, la connaissance des circonstances simplement aggravantes ne peut guère, généralement, modifier le jugement du confesseur à l'égard du pénitent qui s'accuse, autant que possible, de tous les péchés mortels qu'il a commis, soit intérieurement, soit extérieurement. Au reste, quelque opinion qu'il embrasse sur ce point, un curé, un confesseur, un catéchiste

Bonal, Gervais, Terzago, évêque de Nari, dans son Instruction pour l'administration du sacrement de Pénitence, etc., etc. Voyez sur cette question nos Lettres à M. le curé de....., sur la Justification de la doctrine de saint Alphonse de Liguori; Besançon, 1851.

discret se gardera bien de décider une question que le concile de Trente n'a point décidée, de représenter comme certaine une opinion qui est certainement douteuse, comme on le voit spécialement par l'instruction publiée avec les actes du concile de Rome, de l'an 1725, en faveur des enfants qui se préparent à la première communion. On doit exhorter les fidèles à déclarer en confession les principales circonstances du péché, même celles qui n'en changent point l'espèce; mais nous pensons qu'il faut s'en tenir là; il serait imprudent de les y obliger sous peine de péché mortel.

On doit seulement leur rappeler qu'un pénitent est toujours obligé de répondre selon la vérité, quand le confesseur l'interroge sur ses péchés, afin de connaître l'état de sa conscience, et les obligations qu'il a pu contracter (1). Le pape Innocent XI a condamné cette proposition: Non tenemur confessario interroganti futeri peccati alicujus consuetudinem (2). D'où résulte indirectement l'obligation, pour le pénitent, de déclarer certaines circonstances qui ne changent point la malice ou l'espèce du péché. Quia ut plurimum confessarius inquirere debet de quantitate furti, ad hoc ut sciat quomodo se gerere debeat circa absolutionem impertiendam, et obligationem restitutionis imponendam; ideo ut plurimum tenetur pœnitens confiteri in furto circumstantiam quantitatis (3). I en est de même des circonstances aggravantes qui entraînent une censure où la réserve. Par exemple, celui qui a frappé un clerc doit dire si la violence a été légère, griève ou énorme, s'il a frappé un simple clerc ou un évêque; s'il ne le dit pas, le confesseur doit l'interroger, afin de savoir à qui il doit recourir pour obtenir la faculté d'absoudre de l'excommunication. Nous ajouterons qu'il ne faut pas confondre, comme le font plusieurs auteurs, les circonstances qui multiplient le nombre des péchés avec celles qui ne font que d'en augmenter la malice.

«La question que nous traitons nous donne l'occasion de faire une observation qui ne sera pas inutile pour les confesseurs, surtout pour ceux qui sont encore jeunes. Comme il n'est pas certain qu'on soit obligé de faire connaître en confession les circonslances notablement aggravantes, et que, toutes choses égales, il vaut beaucoup mieux, sans contredit, rester en deçà que d'aller trop loin dans les interrogations concernant le sixième précepte et les obligations des époux, un confesseur peut, sans danger de compromettre son ministère, se burner à celles des interrogations qu'il juge nécessaires pour connaître les circonstances qui augmentent le nombre des péchés ou qui en changent l'espece. Il ne doit pas oublier que s'il est obligé de procurer, autant que possible, l'intégrité de la confession, il est obligé

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plus strictement encore de ne pas scandaliser les pénitents, et d'éviter tout ce qui peut affaiblir en eux l'idée qu'ils doivent avoir de la sainteté et de la modestie sacerdotale. Co qui est conforme à ce que disent les rédacteurs des Conférences d'Angers sur la Pénitence et l'auteur des Instructions sur le Rituel de Toulon. Après s'être déclarés pour le sentiment le plus sévère, ils ajoutent : « Ce sentiment ne doit pas être entendu universellement, comme s'il y avait une obligation de confesser en toutes occasions, toutes les circonstances notablement aggravantes. Ce serait un terrible embarras pour les confesseurs, une gêne d'esprit insupportable pour les pénitents, et une cruelle torture pour les àmes scrupuleuses; car il n'est pas facile de discerner les circonstances qui augmentent la malice du péché, jusqu'au point qu'on soit obligé de les confesser. D'ailleurs, les suites seraient même dangereuses pour le pénitent et pour le confesseur, quand il s'agirait de péchés contre le sixième commandement (1).»

esse

«Quæritur utrum in confessione sint explicandi omnes gradus incestus commissi cum consanguineis usque ad quartum gradum? Prima sententia affirmat; quia est specialis reverenta inter unum gradum consanguinitatis et alium. Secunda sententia docet solum incestum cum consanguineis in primo gradu, tam lineæ recte quam transversalis, specie differre ab aliis gradibus. Tertia sententia docet omnes incestus inter consanguineos, excepto tantum primo gradu lineæ rectæ, ejusdem speciei. Ratio quia, excepto primo gradu linee recta, alii gradus tantum constituunt circumstantiam aggravantem quam in confessione explicandi valde probabile est non esse obligationem. Prima sententia est minus probabilis, secunda et tertia æque probabiles videntur. Ainsi s'exprime saint Alphonse de Liguori (Lib. vi, n. 469). Mais le second sentiment nous paraît beaucoup plus probable que le troisième. Nous ajouterons avec le même docteur et de Lugo: Explicandum est an pater peccaverit cum filia, vel cum matre filius, cujus culpa habet diversam malitiam ratione specialis reverentiæ matri debitæ (Lig., ibid.). Incestus autem cum affinibus varios gradus, extra primum, commune est inter doctores esse ejusdem speciei (Id. ibid.). »

§ 2. Des motifs qui exemptent de l'intégrité de la confession

35. Il est certain que l'intégrité formelle est essentielle au sacrement de pénitence, car toutes les fois qu'on se confesse on est obligé de se confesser de tous les péchés moriels qu'on peut accuser (Concil. Trid., sess. 14, cap. 5). Il n'est pas moins certain que celui qui est dans l'impuissance de se confesser en tout ou en partie, n'est tenu de le faire que selon son pouvoir; car personne n'est tenu à l'impossible. Toute la difficulté

(4) Conférences d'Angers, sur le sacrement de Pé nitence, conf. 3, quest. 3; Instructions sur le Rituel de Toulon, du sacrement de Pénitence, § De quoi doit s'accuser le pénitent.

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