Page images
PDF
EPUB

des grains dans les bonnes années? car il' en faut un pour suppléer au déficit des mauvaises récoltes qui reviennent tous les quatre ou cinq ans... Garder pour le besoin.-Ici le noble rapporteur rappelle les projets de greniers d'abondance ou de fosses souterraines soumis à l'autre chambre, et en définitif, après avoir examiné le projet amendé par la chambre des députés, après avoir considéré que les différens tarifs et la fixation si importanté des marchés régulateurs ont été long-temps débattus entre les personnes les mieux instruites des localités, les députés de tous les départemens, que cette décision est l'œuvre d'un tribunal de famille dont les lumières et l'impartialité sont au-dessous du soupçon, M. le duc de Lévis déclaré au nom de la commission que, sans rejeter les rectifications ou améliorations marquées par l'expérience, elle n'a point vu avec assez de certitude ce qu'il serait plus avantageux de substituer aux stipulations proposées, et qu'elle en a unamimement voté l'adoption pure et simple.

( 28 juin. ) La discussion ouverte, le système du projet ministériel trouva encore moins de faveur ét d'appui que dans l'autre chambre, même avec ses amendemens, lá loi proposée paraissait pire à M. le marquis d'Herbouville que celle du 16 juillet 1819, attendu que, malgré toutes les précautions prises contre les spéculateurs, ils sauraient toujours trouver le moyen de faire baisser les grains sur les marchés. Il appuya principalement sur l'inefficacité, en cas de disette, de l'importation, qui n'avait pu produire de nourriture qu'un seul jour à 30 millions de Français. M. Benoît, commissaire du roi, chargé de la défense du projet, argumentait en faveur de l'importation, de son efficacité locale, et surtout des dangers de la hausse excessive du pain « dans un pays où les agitateurs savent toujours tirer parti de la disette ». — - M. le comte Dejean, tout en appuyant la loi, tout partisan qu'il est de la libre circulation des grains, pensait que l'exportation et l'importation ont tour à tour leurs avantages, et il proposait des moyens pour conserver les grains et compenser ainsi l'inégalité des récoltes.Enfin M. le marquis de Catelan, n'adoptant le projet proposé que dans l'impossibilité d'y en substituer un autre, protestait contre

le principe qui lui sert de base, et dont les dispositions restrictives ne feraient, selon lui, que pallier les funestes conséquences par la facilité qu'elles laisseraient aux spéculateurs de faire arriver sur le marché, à l'aide d'une hausse factice, des blés étrangers qui enleveraient ensuite aux blés français la faveur que ceux-ci commenceraient à reprendre.-Ainsi notre agriculture lui semblerait « sacrifiée à celle d'un pays qui ne nous offrirait en temps ordinaire aucune compensation, aucune facilité pour le placement de nos denrées indigènes, et dont, en cas de disette, les secours seraient toujours incertains. »

Ces quatre orateurs entendus, la question paraissait suffisamment éclaircie; les articles et l'ensemble de la loi furent successivement adoptés à une majorité relative plus forte que dans l'autre chambre.

(Nombre des votans, 82.-Pour le projet, 72.-Contre, 10.)

Nous nous sommes arrêtés sur cette question, qui peut paraître peu importante aux esprits préoccupés de nos querelles politiques; mais celles-ci passeront, et l'autre laissera dans la mémoire des hommes d'état des souvenirs, des documens et des réflexions qu'il leur sera sans doute encore utile de méditer.

[ocr errors]

Comme nous l'avons déjà fait observer dans cette discussion, hors quelques réflexions relatives aux prétentions de la grande propriété et à l'influence de l'exagération des impôts sur le sort da peuple, la dissidence des opinions se manifesta indifféremment des deux côtés sans aigreur, sans applications injurieuses ; c'était un phénomène à remarquer. Mais ce n'était qu'un moment de calme au milieu de la tempête. Il s'éleva bientôt des questions où les passions politiques reprirent toute leur chaleur,

CHAPITREMI 2,990tra

7

CHANGEMENT fait à l'article 351 du code d'instruction criminelle. → Loi sur les pensions ecclésiastiques, c $5

[ocr errors]

AVANT d'entrer dans la discussion de deux lois attendues avec quelque inquiétude par tous les partis, il faut revenir sur nos pas, et dire un mot du changement fait à l'article 351 du code criminel, ainsi conçu:

« Si l'accusé n'est déclaré coupable du fait príncipal qu'à une simple majo■rité, les juges délibéreront entre eux sur le même point: et si l'avis is de la « minorité des jurés est adopté par la majorité des juges, de telle sorte qu'en « réunissant le nombre des voix, ce nombre excède celui de la majorité des ← jurés et de la minorité des juges, l'avis, favorable à l'accusé prévaudra. »

A cet article, contre lequel, suivant l'expression d'an noble pair (M. de Barbé-Marbois, rapporteur ), réclamaient depuis 'douze ans la justice, la raison et l'humanité, M. le garde des sceaux avait proposé (le 15 mars à la chambre des pairs, — le 18 avril à celle des députés) de substituer un autre article portant & qu'à l'avenir, et lorsque, dans le cas prévu par l'article 351 du « code d'instruction criminelle, les juges seront appelés à délibérer « entre eux sur une déclaration du jury formée à la simple majo«rité, l'avis favorable à l'accusé prévaudra, toutes les fois qu'il « aura été adopté par la majorité des juges. »

Au premier coup d'œil, on aurait peine à croire qu'un changement si avantageux à l'accusé pût trouver quelque opposition dans les deux chambres; c'est pourtant ce qui arriva. Dans l'une et l'autre il fut combattu par des considérations de l'ordre le plus élevé, par la nécessité d'améliorer l'institution du jury, en abolissant d'abord l'adjonction des juges, qui corrompait le principe de l'institution en confondant les juges du fait avec les juges du droit, et qui donnait au gouvernement une influence dangereuse à la liberté. Cette discussion, où se mêlèrent encore les passions politiques

dans la chambre des députés, fut remarquable par le développement des saines doctrines, et par le respect et l'attachement que des orateurs des opinions les plus opposées y témoignérent pour l'institution du jury. M. le garde des sceaux, sans éloigner l'espérance des améliorations à y faire, et toujours défendant le caractère et l'indépendance des magistrats, combattit les objections faites an changement proposé par l'amélioration sensible qu'il offrait; et, malgré des amendemens qui tendaient à augmenter les chances favorables à l'accusé, en exigeant que la déclaration du jury fût faite à la majorité des deux tiers pour entraîner la condamnation, Particle proposé par le ministère passa dans les deux chambres à une grande majorité.

[ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

-Boules blanches, 232.. Boules noires, 74m, ka si

CHAMBRE DES DÉPUTÉS,

CETTE affaire terminée, les partis se portèrent sur un terrain plus vaste et mieux ouvert à leurs querelles.

Des deux projets de loi que nous avons annoncés, l'un, présenté le, 17 mars par le ministre des finances, ayant pour objet de régler le sort des donataires français dépossédés de leurs dotations en pays étrangers; l'autre par le ministre de l'intérieur, le 21 avril, tendant à affecter les pensions ecclésiastiques annuellement éteintes et retranchées du crédit de la dette, à raison du décès des pensionnaires, à la dotation de douze nouveaux siéges épiscopaux, à l'amélioration du sort, des traitemens des vicaires, aux traitemens des curés, à la réparation, des églises, etc., etc....; malgré l'antériorité de la présentation du projet de loi relatif aux donataires, la priorité de l'examen et de la discussion fut accordée à celui qui devait fixer d'une manière plus large l'établissement du elergé.

M. le ministre de l'intérieur (comite Siméon ) avait commencé

l'exposé qu'il fit des motifs du projet par des considérations politiques sur les avantages de la religion; « puissant moyen de gouverner, disait-il, puisqu'elle sanctionne les lois humaines.» En reconnaissant qu'on avait beaucoup fait pour la religion et ses ministres ; qu'il s'élevait partout des réclamations; que 4,000 vicaires ne recevaient de l'état que 250 fr. et devaient attendre des communes des services souvent onéreux pour elles; que 350 villages manquaient de pasteurs ; qu'il y avait un grand nombre d'églises à construire ou à réparer; et enfin (car c'est le point essentiel de la question sur lequel s'élevèrent les plus violens débats) qu'il ne suffirait pas de cinquante archevêques ou évêques en France (où il y avait jadis 136 siéges cathédraux) pour y diriger dans des voies de sagesse, de prudence et dé charité les nombreux pasteurs du second ordre, qui, dans un trop grand éloignement de leur chef, échappent à leur surveillance et peuvent tomber dans le relâchement ou le rigorisme;

« Le roi, ajouta S. Ex., a eu sans cesse présent à l'esprit, et met au rang des plus vifs désirs de son cœur, l'entière restauration de la religion de l'état. Il s'en est occupé depuis plusieurs années; des embarras d'argent, des difficultés de plus d'un genre l'ont retardée. Aujourd'hui l'état plus prospère des finances lui permet de l'accomplir; S. M. peut, sans qu'on se jette dans les questions difficiles, et non moins superflues, donner à l'église de France, sans profusion ni parcimonie, tous les siéges nouveaux dont elle a besoin, dont la nécessité est des long-temps reconnue, et pour lesquels il EXISTE avec le chef de l'église DES ENGAGEMENS ANCIENS ET NOUVEAUX. C'est pour les remplir, pour satisfaire au devoir, qui les dieta, pour répondre à des vœux nombreux et répétés, que le roi nous a ordonné de vous présenter un projet de loi. »

Enfin le ministre faisait observer que la nouvelle dotation proposée pour le clergé n'ajoutait rien aux charges de l'État; qu'au lieu de partager, ainsi que cela se fait à présent, les extinctions des pensions ecclésiastiques entre le trésor et les successeurs des fonctionnaires pensionnés qui décèdent, il suffirait d'affecter aux dépenses du clergés la totalité des extinctions; que le trésor me perdrait que la perspective d'un amortissement futur; qu'ilacquitterait une dette inévitable, par un sacrifice insensible dont les contribuables ne sentiraient pas le poids, qui apporterait même un soulagement direct aux communes, en les dispensant, à mesure que

« PreviousContinue »