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Le décret permettra qu'on couronne comme ouvrage d'analyse celui qui appliqueroit à une science déterminée une analyse nouvelle, et comme ouvrage d'une sciences oumise au calcul rigoureux, celui qui avanceroit cette science par l'application d'une analyse connue. L'ouvrage qui réuniroit ces deux mérites, pourroit être rangé à volonté dans l'une ou l'autre classe, suivant les circonstances particulières du concours ; et le choix seroit déterminé par l'importance des ouvrages qui pourroient se disputer la palme dans l'un ou l'autre genre.

En conséquence, et comme l'astronomie et la mécanique proprement dite n'offrent, à l'époque du concours, aucun ouvrage qui ait fait faire à l'une ou l'autre de ces sciences de progrès comparables à ceux qu'elles doivent à la Mécanique céleste, le Jury, avec toute confiance, propose la Mécanique céleste de M. le comte Laplace, pour le prix des sciences soumises aux calculs rigoureux, en accordant une mention honorable à quelques ouvrages d'astronomie et de mécanique, tels que les Tables solaires de M. Delambre, les Tables dè Jupiter et de Saturne par M. Bouvard, et l'architecture hydraulique de M. Prony.

RAPPORT D'UNE COMMISSION

Composée de MM. DELAMBRE, BURCKHARDT et LACROIX, sur le deuxième grand Prix de première Classe.

Le choix du meilleur ouvrage dans les sciences soumises aux calculs rigoureux', comme l'Astronomie, la Mécanique, ne pouvoit être douteux. L'époque actuelle n'en présente aucun qui puisse entrer en concurrence avec la Mécanique céleste, tant pour l'importance et l'étendue de son sujet que pour les découvertes qu'elle renferme, non seulement sur l'Analyse et sur l'Astronomie, mais encore sur

la Physique, dans la Théorie de l'attraction capillaire, dont les phénomènes sont pour la première fois expliqués par le Calcul dans les deux premiers Supplémens à cet ouvrage.

Nous ferons observer ici que, suivant la durée assignée au concours dans le Décret Impérial, ce ne sont pas seulement les deux derniers volumes de la Mécanique céleste qui se trouvent dans les limites de ce concours, mais l'ouvrage entier. (1).

A l'égard des mentions honorables, nous ne voyons pas non plus qu'il y ait aucun changement à faire; seulement la majorité des Membres de votre Commission pense qu'on devroit ajouter à la simple indication des Tables solaires de M. Delambre, que c'est par ses propres observations qu'il a donné la dernière perfection à ces Tables, et qu'il a tiré de ses calculs de nouvelles déterminations des masses de plusieurs planètes, élémens nécessaires dans la mesure d'un grand nombre de phénomènes célestes.

En donnant ce détail, il convient de dire aussi que les recherches de M. Bouvard, pour établir les élémens de ses nouvelles Tables de Jupiter et de Saturne, l'ont conduit à rectifier la masse de Saturne, sur laquelle il restoit encore des incertitudes, et que l'Architecture hydraulique de M. de Prony doit être considérée comme augmentée d'un troisième volume, comprenant un Traité sur la poussée des terres, la théorie et la pratique du jaugeage des eaux courantes, enfin la théorie physico-mathématique des eaux courantes, Traités qui contiennent plusieurs résultats nouveaux, et dont l'objet est important pour les arts de construction.

A Paris, le 13 Août 1810.

Signés, DELAMBRE, BURCKHARDT, LACROIX, rapporteur.

Le Rapport ci-dessus a été adopté par la Classe des Sciences Mathématiques et Physiques dans la Séance du 13 août 1810.

Signés, DELAMBRE, secrétaire perpétuel;

G. CUVIER, secrétaire perpétuel.

(1) Avant la date de ce rapport, le Jury avoit vérifié le fait, et s'étoit assuré que les deux premiers volumes ont paru en fructidor an 7, neuf mois après l'ouverture du concours.

Troisième grand Prix de première Classe,

A l'Auteur du meilleur ouvrage de Physique proprement dite, de Chimie, de Minéralogie, etc.

RAPPORT DU JURY.

Le Jury, avant de soumettre son jugement à VOTRE MAJESTÉ, croit devoir rappeler à son attention les principaux ouvrages qui ont paru depuis dix ans dans chacune de ces sciences.

La chimie, qui est devenue aujourd'hui la régulatrice des sciences naturelles, avoit éprouvé une grande révolution quelques années avant l'époque du concours. Il en étoit résulté une activité sans exemple dans tous ceux qui cultivoient la science, et une grande curiosité dans le Public, par les découvertes intéressantes que cette activité faisoit naître. De là cette foule de beaux mémoires, d'expériences ingénieuses, de recherches piquantes, qui forment la grande collection des Annales de chimie. Quoique la plupart de ces petits écrits aient exigé beaucoup de patience, d'efforts d'esprit et de sagacité, il est cependant impossible de les faire entrer en lice avec les grands ouvrages où l'on a recueilli leurs résultats, et encore moins avec ceux où l'on a ouvert des routes nouvelles.

Le principal des ouvrages systématiques sur l'ensemble de la chimie, qui ait paru depnis l'an 7, est celui de M. le comte Fourcroy. On y trouve, en dix volumes, un exposé clair et complet de tous les faits dont cette science se composoit à l'époque où il a paru; et comme une grande partie de ces faits

appartiennent à l'auteur, son livre prend par-là un caractère d'ouvrage original qui lui donne un mérite supérieur à celui qu'il auroit, s'il n'étoit qu'une simple exposition bien faite des découvertes des autres. Presque tout ce qui concerne les matières animales appartient à l'auteur : l'histoire des combinaisons salines, celle des matières végétales, doivent aussi beaucoup à ses recherches; et de plus, le rapprochement de tous les faits épars ailleurs, en un seul faisceau de lumière, est un travail dont on doit tenir compte à l'homme laborieux et d'un esprit étendu qui a su les recueillir.

On ne peut se dissimuler cependant que la théorie générale des affinités, qui fait la base et la partie philosophique de la chimie, ne soit traitée un peu superficiellement dans le Système des Connoissances chimiques. M. le comte Fourcroy s'en est tenu aux opinions reçues avant lui, et ne les a même présentées que d'une manière très-abrégée, comme s'il en eût déjà pressenti l'insuffisance.

Cette branche importante de la science fait l'objet du deuxième grand ouvrage dont nous avons à entretenir VOTRE MAJESTÉ, et qui est la Statique chimique de M. le comte Berthollet, livre aussi original dans ses principes fondamentaux, que dans les développemens et dans les expériences qui lui servent de preuves.

Les affinités électives y sont bannies de la chimie : tout y est soumis à l'attraction mutuelle des différens corps les uns pour les autres, limitée dans ses effets par des causes de diverses natures, telles que l'indissolubilité de quelqu'une des combinaisons résultantes, la volatilité, etc. Chaque phénomène chimique devient en quelque sorte un problème de mécanique; et la chimie, autrefois si abstruse, si mystérieuse, achève de

rentrer dans le domaine lumineux de la géométrie et de la physique ordinaire. Il est bien à regretter que l'auteur, tout occupé du fond, n'ait pu mettre une partie de ses soins à exposer plus clairement une doctrine que les difficultés inhérentes au sujet rendent si abstraite, et qui, pour exercer toute l'influence qu'elle ne peut manquer d'avoir sur les découvertes ultérieures, a besoin de toute la méthode qu'on exige, avec raison, dans les livres faits pour devenir classiques.

Après les deux ouvrages dont nous venons de faire mention, il est inutile de s'occuper des autres Traités généraux de physique théorique; quelque mérite que puissent avoir, comme livres élémentaires, ceux de MM. Adet, Bouillon-Lagrange et de quelques autres, ils ne peuvent prétendre à être mis à côté des grands ouvrages originaux.

La chimie d'un côté, et la mécanique de l'autre, ont tellement resserré le domaine de la physique générale, qu'il ne lui reste plus qu'un bien petit nombre d'attributions, en comparaison de celles qui lui appartenoient il y a un siècle. L'électricité est, de toutes les parties de cette science, celle qui a produit le plus de découvertes dans l'époque dont nous examinons les ouvrages; et le seul galvanisme pourroit illustrer un siècle : mais ce n'est pas à la France qu'il appartient. Les recherches de nos compatriotes n'ont fourni que des Mé moires isolés sur des phénomènes partiels. Les Traités généraux qu'on en a écrits ne paroissent avoir rien d'assez neuf dans le fond, ni d'assez parfait dans la forme, pour être pris en considération.

Les découvertes sur la chaleur sont dans le même cas. MM. de Rumford, Dalton et Leslie, qui ont enrichi cette

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