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vice dudit seigneur roy, soient ainsi induement vexés et persécutez; et ledit seigneur président distrait par tels moyens de l'exercice de la justice, laquelle il a toujours administrée, en toute droiture et équité. J'ay voulu rapporter au long cette délibération, parce qu'elle m'a semblé une preuve, non-seulement de la vertu de ce président, mais même de la sagesse et de Féquité de cette assemblée. »

Le glorieux témoignage rendu au président de Latomi, par les Etats de la province, nous dispense de faire ici l'éloge de ce magistrat. Ses Mémoires embrassent un espace d'environ 15 années, et offrent une série de faits qui jettent souvent des lumières inattendues sur l'histoire de son époque. Il écrivait à Toulouse, sous l'influence des idées catholiques, et nous croyons pouvoir l'opposer avec avantage à Gaches, qui écrivait à Castres, ville entièrement soumise aux sectaires de la religion prétendue réformée, et qui, en racontant ce qui s'est passé dans cette ville, est peu digne de créance, tandis que Latomi, témoin oculaire, et dont l'esprit nous paraît avoir été éloigné de toute exagération, était bien mieux placé que l'auteur protestant. pour connaître les événemens qui arrivaient dans cette capitale de la Languedoc.

Les planches qui ornent ce volume, sont en partie les mêmes que celles que Dom Vaissete a données; mais il faut remarquer, que le savant bénédictin a été très-mal servi par les artistes chargés de l'exécution de ces planches. Ainsi, celle qui représente l'entrée de Louis XI encore Dauphin, et portant sa mère en croupe, est fausse; car d'abord les écussons des huit capitouls manquent dans cette gravure, tandis qu'ils existent dans la peinture originale que l'on conserve encore dans l'Hôtel-de-ville. Cette peinture indique l'instant où le cortége s'approche de la ville, et l'on voit se dessiner, au fond du tableau, les tours, les remparts, si pittoresques, de la vieille capitale du Midi. Il n'y a rien de tout cela dans la gravure donnée par Dom Vaissete. La vue de l'église de Notre-Dame du Puy est de même conplètement fausse dans l'ouvrage de Dom Vaissete, et nous en publions une lithographie faite d'après un dessin exécuté depuis peu d'années. L'entrée du roi Charles VII manquait dans l'édition des Bénédictins et nous la donnons ici d'après l'original existant encore dans les

archives de l'Hôtel-de-ville de Toulouse. L'entrée du dauphin François II est inexacte en quelques points dans la planche donnée par Dom Vaissete; nous l'avons rétablie ici d'après la peinture originale conservée encore à Toulouse. Les Annales manuscrites de cette ville avaient consacré dans un tableau, peint sur vélin, le souvenir du rétablissement du parlement de Languedoc; Dom Vaissete avait négligé ce tableau. Nous en donnons ici un calque, d'après le dessin, qui existe à la bibliothèque publique de la ville, et qui est l'ouvrage d'Antoine Rivalz.

Ainsi, sous le rapport artistique, cette portion de l'Histoire de Languedoc, sera, ainsi que celles qui la précèdent, préférable à l'édition publiée par les Bénédictins. Nous avons ajouté quelques pages à celles si remarquables que Dom Vaissete écrivit, il y a aujourd'hui plus d'un siècle ; et si, dans ces Additions, nous sommes parvenu à étendre le domaine de la vérité historique, nos désirs les plus ardens seront accomplis. C'est, en effet, vers la manifestation de cette vérité que tendent, depuis bien des années, nos recherches, toujours consciencieuses, et des études qui ne sont que la suite et le complément nécessaire de celles des savans religieux de la congrégation de Saint-Maur.

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GÉNÉRALE

DE LANGUEDOC.

LIVRE TRENTE-QUATRIÈME.

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Le roi remet sous sa main les domaines du Languedoc. Le duc de Bourgogne envoye des émissaires dans la province pour exciter les peuples à la révolte.

AUSSI-TÔT après la mort du duc de Berri, le roi réunit sous sa main le domaine du Languedoc qu'il avoit cédé à ce prince. I ordonna 1 le 14. d'Octobre suivant au sénéchal de Toulouse, de faire sortir de la sénéchaussée tous les ecclésiastiques et religieux sujets et amis du roi d'Angleterre, parce qu'ils cabaloient pour soumettre à ce prince les châteaux et les villes où ils demeuroient. Un de ces ecclésiastiques avoit livré en effet depuis peu aux Anglois le château de Rochefort et un autre, dont on ne dit pas le nom, aux environs de Toulouse; d'où ces peuples se seroient étendus aisément dans tout le païs, si les troupes du roi n'avoient incessamment assiégé et repris ces châteaux. Le roi défendit en même tems à ces mêmes ecclésiastiques, de posséder des bénéfices dans la sénéchaussée de Toulouse, et aux religieux des quatre ordres mendians en général, de posséder des bénéfices cures, comme ils l'avoient fait abusivement par le passé.

Le roi voulant se mettre en état de résister aux Anglois, et de reprendre sur eux les villes d'Harfleur en Normandie, et de la Réole

1 Reg. 13. de la sén. de Toul.

TOME VIII.

en Gascogne, imposa au mois d'Avril de l'an 1416. une ayde générale dans tout le royaume. Tous ses sujets eurent ordre1 d'y contribuer, «<excepté les nobles nés et extraits de >> génération, vivant noblement et sans mar>>> chander, gens d'église, qui par autre ma>>> niere y ont accordé ayde, vrais escoliers »> non pratiquans ne marchandans, et pou>> vres mandians. » La levée de ce subside rencontra de grandes difficultés en Languedoc, sur-tout dans les sénéchaussées de Toulouse et de Carcassonne, où la plupart des villes refuserent absolument de le payer, et prirent les armes, nonobstant les nouveaux ordres que le roi donna le 24. de Juillet, aux sénéchaux du païs, et aux commissaires nommés pour l'assiéte de cette ayde, d'enjoindre à tous les habitans de la payer inces

samment.

Il est dit dans les lettres du roi, que divers émissaires s'étoient répandus dans le Languedoc, pour y défendre aux peuples, au nom du dauphin, de payer les subsides, et qu'il avoit écrit à toutes les bonnes villes pour les détromper. C'étoit sans doute le duc de Bourgogne, qui avoit envoyé ces émissaires; car nous savons qu'il se donna alors divers mouvemens pour exciter les principales villes du royaume à la révolte. Le roi indigné de cette

Hôt. de ville be Narb. Domaine de Montpell. sén. de Toulous, act. ram. liasse 3. n. 4.

1

servoit à ce siége avec les milices de sa sénechaussée, écrivit 1 le 6. de ce mois «‹ à ses >>> très-chers sires et freres, les seigneurs offi>> ciers du conseil du roi à Toulouse. » Il leur manda, que les Anglois étoient encore assemblés en grand nombre entre deux mers, et qu'ils étoient dans le dessein de marcher au secours du château de la Réole; mais que leurs menaces ne retardoient en rien les attaques. Il leur ordonna de veiller à la garde du païs, et de faire crier à Toulouse, que tous ceux qui étoient du parti des Anglois, et qui leur servoient d'espions, eussent à sortir de la ville dans un certain tems sur peine de la hart.

manœuvre, leur écrivit de son côté, pour | Jean de Bonnay sénéchal de Toulouse, qui les exhorter à demeurer fideles. Dans celle qu'il adressa de Paris, à ce sujet, le 6. de Septembre de cette année, aux consuls, bourgeois et habitans de Narbonne, il leur défend d'obéir à ce duc, et il leur marque qu'il avoit ordonné aux sénéchaux, baillis, et à ses autres officiers, de faire prêter serment aux gens d'église, nobles et bonnes villes, qu'ils ne lui obéiroient pas, ainsi qu'à ses lettres et à ses adherans, qu'ils ne le favoririseroient en rien, etc. Il leur ordonne de prêter ce serment, et de contribuer incessamment à l'ayde qu'il avoit imposée pour résister aux Anglois. On prétend que le dauphin Charles fit cette année un voyage en Languedoc; qu'il tomba malade à Toulouse, et qu'il y fut guéri par les soins d'un eunuque Africain trés-habile dans la médecine: mais suivant tous les historiens et les monumens du tems, ce prince ne s'écarta pas des environs de Paris, durant toute l'année 1416.

II.

1

Le vicomte de Lomagne, fils du comte d'Armagnac, capitaine général en Languedoc.

Le dauphin fit un voyage à Angers et ensuite à Rouen l'année suivante, pour remettre sous l'obéissance du roi cette derniere ville, que le duc de Bourgogne avoit séduite. Ce duc tâcha en même tems de mettre dans son parti les autres villes du royaume; et s'étant ligué avec le roi d'Angleterre, il causa une grande division et des maux infinis dans toute la France. Le roi nomma 2 cependant Jean d'Armagnac vicomte de Lomagne, fils aîné du connétable, capitaine général en ses païs de Languedoc et duché de Guienne, aude-là de la riviere de Dordogne ; et ce vicomte s'étant mis en campagne, assiégea et prit sur les Anglois au mois d'Avril de l'an 1417. la ville de la Réole sur la Garonne. Il assiégea ensuite le château au mois de May, et il fit venir entr'autres, pour l'abattre, une grosse bombarde de la cité de Carcassonne *.

1 Bardin. Preuves.

2 Hột. de ville de Care.

*V. Additions et Notes du Livre xxxiv, no 1.

Le vicomte de Lomagne, pour continuer le siége du château de la Réole et soudoyer les gens-d'armes qui y servoient, emprunta 2 en son nom, divers joyaux du sire d'Albret, et s'engagea de les lui rendre, par un acte daté de Nerac le 15. de Juin: mais nous ignorons s'il soumit ce château. La descente que le roi d'Angleterre fit au mois d'Août suivant en Normandie, l'obligea peut-être à en lever le siége, pour aller au secours de cette province, dont les Anglois soumirent une grande partie, tandis que le duc de Bourgogne faisoit des progrès étonnans dans les autres provinces; ensorte que tout le royaume étoit dans la désolation. En cette extrêmité 3, le roi convoqua le 10. de Septembre, par ma- | niere d'arriere-ban, tous ses vassaux, tant nobles que non nobles, tenant fief et arrieresuivant. Entre ceux de la sénéchaussée de fief, pour être à Etampes le 15. d'Octobre Toulouse, cet ordre fut signifié au vicomte de Ville-mur, au seigneur de Cestairols en Albigeois, au vicomte de Conserans, à Geraud de Mauleon, au seigneur de Montbrun,

au vicomte de Carmaing, et au comte d'Astarac. Le quartier d'assemblée de ces troupes, et des autres de la province, étoit à Castelsarrasin le vicomte de Lomagne capitaine général en Languedoc s'y rendit à la fin de

1 Reg. 15. de la sén de Toulous. fol. 89.

2 Ch. de Pau, tit. de Foix.

3 Reg. 15. ibid. fol. 157.

4 C. de la sén. d Toul.

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