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pas sans courir risque de sa personne. Et raporta qu'on y estoit très-satisfaict du proceddé de MM. de la Ville, lesquelz l'on prioit néantmoings de faire destendre les chesnes. Et sur ce qu'il dict que les bons bourgeois n'osoient prendre les armes sans un mandement exprès de MM. les prévost des marchands et eschevins, il fust résolu les deux mandemens qui ensuivent :

De par les prévost des marchands et eschevins de la ville de Paris.

<< Monsieur....., colonel. Nous vous prions de faire continuer à tenir les capitaines, officiers et bourgeois de vostre colonelle soubz les armes, à ce qu'il ne s'y face aucune assemblée dans l'estendue de cette ville. Vous y veillerez soigneusement s'il vous plaist, et nous donnerez advis à l'Hostel de Ville de ce qui s'y passera. Vous priant n'y vouloir faillir. Faict au bureau de la Ville, le 26 aoust 1648. »

Pareil envoyé aux seize colonelz.

De par les prévost des marchands et eschevins de la ville de Paris.

<< Sire Jacques Tartarin, quartinier. Faictes demain matin détendre les chesnes de vostre quartier, que vous ne ferez retendre qu'en cas de nécessité, et allez par les boutiques les faire ouvrir, et nous venez rendre raison à sept heures du matin de tout ce qui se sera passé cette nuict en vostredict quartier. Sy n'y faictes faute. Faict au bureau de la Ville, ce 26° aoust 1648. » Pareil envoyé aux autres quartiniers.

Ce faict, chascun de MM. les prévost des mar

chands et eschevins se sont retirez en leurs maisons sans avoir laissé personne en l'Hostel d'icelle. Le greffier de ladicte Ville y demeurant1.

DU JEUDY 27° AOUST 16482.

Ledict jour, cinq heures du matin, MM. les prévost des marchands, eschevins, procureur du roy de la Ville, s'estans rendus en icelle, auroient envoyé par tous les quartiers de Paris pour sçavoir ce qui s'y estoit passé, en quelle posture estoit le peuple. Dont n'ayant rien appris qu'une suite de mutinerie, et qu'il leur fust confirmé par les quartiniers qui vinrent rendre raison de ce qu'ils avoient voulu faire pour l'exécution des mandemens précédens. A quoy les bourgeois avoient fortement résisté, n'ayant voulu laisser abattre les chesnes, ny ouvrir les boutiques; ayant faict des barricades en plusieurs endroictz; ayant esté si osez que de courir sur M. le chancellier qui alloit au parlement, le contraindre de prendre un autre chemin, mesme de se sauver en l'hostel de Luynes', où ces mutins entrèrent de force, à dessein de le maltraicter, l'ayant fallu retirer de ce lieu à main armée. A quoy M. le mareschal de La Meilleraye fust employé avec quelques trouppes, qui eurent assez de peine de se garentir de

1 Martin Le Maire. Voy. les Notices biographiques.

2 Suite du récit des barricades.

3 Cet hôtel, dont Israël Silvestre nous a laissé une vue extérieure, se trouvait situé à peu près sur le terrain du marché à la volaille, nommé autrefois la Vallée. Il fut détruit en 1671. Voy. G. Brice, Nouvelle description de la ville de Paris, t. IV, p. 111. (Édit. de 1725.)

la foulle du peuple qui tua le sieur Picault, lieutenant du grand prévost, près dudict sieur chancellier. Ce qui fut cause que l'on manda le conseil de ladicte Ville et MM. les colonels d'icelle, suivant les mandemens qui ensuivent :

<< Monsieur le président Aubry. Plaise vous trouver et venir présentement à l'Hostel de cette ville, pour adviser à ce qu'il est à propos de faire sur l'estat présent des affaires. Vous priant n'y vouloir faillir. Faict au bureau de la Ville, ce 27 aoust 1648.

« Les prévost des marchands et eschevins de la ville de Paris, tous vostres. »

Pareil envoyé à tous MM. les conseillers de Ville.

De par les prévost des marchands et eschevins de la ville de Paris.

<< Monsieur....., colonel. Nous vous prions vous trouver ce jourd'huy en l'Hostel de cette ville, une heure de relevée, pour adviser à ce qu'il y aura à faire en la conjoncture des affaires présentes. Vous prions n'y vouloir faillir. Faict au bureau de ladicte Ville, ce 27 aoust 1648. »

Pareil envoyé à MM. les colonels.

En conséquence desquelz mandemens se seroient trouvez au bureau de la Ville :

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MM. de Santeuil, Gaigny,-Le Vieux, — Héron, Gervais, Le Conte, —

Cottard,

Desnots, — Joubert, de Faverolles, - Barillon, — Baudequin, Tronchet, de La Court, conseillers de ladicte Ville. Ausquelz M. le prévost des marchands auroit représenté l'estat présent des affaires, et ce qu'ils avoient

faict jusques icy pour empescher les désordres qui estoient parmy le peuple; l'effect qui s'en estoit ensuivy en quelques quartiers; le peu d'obéissance dans les autres. Qu'ils estoient mandez pour adviser avec eux ce qu'il y auroit à faire. Où après s'estre longuement entretenus, il a esté advisé d'en demeurer à ce qui avoit esté faict, jusques à ce qu'on eust apris ce qui se seroit passé au Palais-Royal, où le parlement estoit allé en corps avec la résolution de donner arrest sur la responce qui leur sera faicte, avant que la cour se sépa

rast.

Et ledict jour, de relevée, seroient venus en l'Hostel de ladicte ville, MM. de Theles', d'Estampes, de Lamoignon, Miron, Scaron de Vaure et de Montauron, colonels de ladicte ville, M. Marescot, lieutenant-colonel de M. de Chastignonville, et M. Du Fresnoy, lieutenant-colonel de M. Tubeuf. Ausquelz M. le prévost des marchands dict qu'il les avoit assemblez tant pour sçavoir de leur bouche ce qui s'estoit passé en leurs colonelles depuis vingt-quatre heures, leur faire entendre tous les ordres qui avoient esté donnés par la Ville, que pour adviser avec eux aux moyens et expédiens qui se pourroient proposer pour estouffer ces désordres en leurs commencemens, puisque la suitte en seroit de dangereuse conséquence. Là-dessus, un de MM. les colonels qui s'estoit trouvé jusques à deux heures au Pallais-Royal, leur fist un ample récit de tout ce qui s'estoit passé, et qu'après les remontrances faictes à la reyne par la cour de parlement à plusieurs reprises, il s'y estoit proposé un accommodement, qui estoit de

Lisez de Thélis

faire revenir les exillez, pourveu que la cour cessast de s'assembler. Que MM. du parlement avoient faict reffus d'en délibérer sur-le-champ, et estoient sortis pour s'en retourner au Pallais à cet effect, mais que le peuple les avoit obligez à retourner, comme ils avoient faict, audict Pallais-Royal; dans la grande gallerie duquel ils estoient entrez pour faire ladicte délibération, de laquelle on espéroit un grand effect. Après laquelle relation, ouy sur ce le procureur du roy et de la Ville en ses conclusions et l'affaire mise en délibération, a esté résolu et conclu que les ordres donnez par MM. les prévost des marchands et eschevins de ladicte Ville seroient continuez jusques à nouveau mandement, qui seroit envoyé ausdicts sieurs colonels après que lesdicts sieurs prévost des marchands et eschevins auroient sceu ce qui auroit esté arresté au Palais-Royal avec MM. du parlement, et que ce pendant chaque colonel se promèneroit avec ses capitaines dans l'estendue de sa colonelle pour empescher les désordres et inviter les marchands à ouvrir leurs boutiques.

Après laquelle résolution, chascun s'estant retiré, MM. de la Ville, sur les cinq heures du soir, estans à cheval, ayant vingt archers de la ville de Paris devant et derrière eux, avecq quatre de leurs sergens, furent par la rue de la Vannerie jusques au Grand-Chastelet. De là, tout au long de la rue Sainct-Denis, entrèrent dans la rue de la Féronnerie, revinrent par celle Aubri-Boucher, descendirent par la rue Neufve-Sainct-Médéric et celle de Saincte-Croix et par la rue Bourtibourg, passèrent au travers du cimetière Sainct-Jean, furent à la rue Sainct-Anthoine, revinrent par la rue Geoffroyl'Asnier, par-dessus les quaiz de ladicte ville en l'Hostel

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