Page images
PDF
EPUB

condition de la presse ? Non: car la concurrence ne ferait que s'accroître, et les journaux se verraient forcés de faire jouir leurs abonnés du dégrèvement qui leur serait accordé à eux-mêmes. Il ne leur serait donc pas plus possible de renoncer à de déplorables faiblesses, et les séductions, qui sont la suite des difficultés matérielles, garderaient sur eux tout leur empire. La moralité de la presse n'y gagnerait rien.

Enfin, une dernière considération portait la commission à repousser la proposition de M. Chapuys de Montlaville : c'était qu'elle exigeait l'abandon d'une source de revenu qui ne produit pas aujourd'hui moins de 3,600,000 francs au trésor.

Écartant également l'exemption conditionnelle du timbre accordée aux écrits périodiques qui s'engageraient à publier régulièrement le compte rendu authentique des séances législatives, ainsi que la limitation de l'impôt à la partie des journaux réservée aux annonces, la commission proposait l'abaissement dont le résultat devait être une diminution pour le trésor de 703,000 francs.

M. Emile de Girardin modifia encore la proposition par l'amendement suivant:

« Le droit de timbre fixe sur les journaux ou écrits périodiques, établi par l'article 2 de la loi du 14 décembre 1830, est réduit de six centimes à cinq pour chaque feuille de trente décimètres carrés et au-dessus. Il n'est rien innové aux autres dispositions de la loi. »

Le 15 mars, M. Chapuys de Montlaville retira sa proposition.

BUDGETS.

--

Règlement définitif du budget de l'exercice 1842. Il est souvent inutile de revenir sur les anciens exercices, même à propos de leur règlement définitif, cette opération ne présentant ordinairement d'autre intérêt que la différence entre les appréciations premières et le solde général augmenté des crédits supplémentaires et extraordinaires. Mais le projet de loi relatif au règlement définitif du budget de l'exercice 1842 ayant été l'occasion, cette année, pour M. le marquis Ann. hist. pour 1845.

11

d'Audiffret (Chambre des pairs), de jeter. dans un rapport plein de faits et de chiffres, un coup d'œil rapide sur les différentes phases politiques et financières qu'a parcourues le pays, nous suivrons le savant financier dans les rapprochements instructifs qu'il eut occasion de faire entre l'état passé et l'état actuel de nos finances.

Prenant pour point de départ le déficit du service antérieur au 1er avril 1814, le rapporteur rappela qu'après avoir pourvu, par les tributs de la conquête, aux exigences d'une guerre si longue et si glorieusement soutenue contre toute l'Europe coalisée, le trésor public ne s'était mis à découvert que de la faible somme de...... ..... 87,432,105 fr. tandis que le grand livre n'avait été grevé par

les liquidations de la République et de l'Empire que de.... 63,481,939 fr.

en rente 5 p. 100.

Mais la seconde invasion étrangère de 1815, dont les charges extraordinaires s'étaient ajoutées à un arriéré de près de 700 millions, nous avait forcés d'inscrire une

dette complémentaire de... 129,973,324

qui avait porté tout à coup

le fardeau de nos arrérages

annuels à....

193,455,263 fr.

Quinze années de repos n'avaient augmenté

lé découvert précédent que d'une avance de 79,583,330 garantie par l'Espagne,

et ne l'avaient porté qu'à la somme totale

de.....

165,015,437 fr.

Pendant le cours de cette même période financière, la France était parvenue à un degré de richesse et de puissance

assez élevé pour réduire la dette inscrite, restant à rembourser, en 1830, à la somme de 162,907,456 fr., pour constituer dès ⚫lors à son amortissement ou aux améliorations réclamées par l'intérêt général un excédant annuel de revenu montant à près de 80 millions, et pour demeurer encore inébranlable au moment imprévu d'une dernière crise politique.

Un nouvel effort avait fait surmonter en quelques années les difficultés de cette troisième commotion nationale. Le maintien de l'ordre intérieur, la conservation d'une paix féconde, avaient promptement effacé la trace d'une nouvelle charge extraordinaire de 900 millions, en même temps qu'on avait vu revenir avec le budget de 1839 la situation prospère déjà si laborieusement obtenue en 1829. Dans ce second intervalle de dix ans de paix, la dette inscrite avait été ramenée à 166,311,090 fr. de rente, et la dette flottante n'avait été élevée que d'une somme de 88,997,665 fr., représentant les excédants de dépenses des exercices 1830 et 1832; depuis l'apparition de ces deux découverts, le passif du trésor s'était arrêté à 256,013.100 fr.

Pendant cette nouvelle ère du rétablissement de la tranquillité générale, de l'activité du travail et de l'affermissement de l'équilibre politique et financier, les revenus et le crédit de l'État avaient encore retrouvé leur progression croissante. Toutefois, l'abaissement du tarif des boissons, concédé par les lois des 12 décembre 1830, 16 décembre 1831 et 12 avril 1832, le privilége d'une immunité de droits longtemps conservé au sucre indigène, la suppression des tributs payés par les jeux et par la loterie, avaient, presque immédiatement après 1830, diminué les versements des produits indirects de plus de 70 millions par année; tandis que la contribution personnelle et mobilière, celle des portes et fenêtres, l'impôt foncier des propriétés bâties, les droits d'enregistrement, enfin les centimes additionnels, s'étaient successivement élevés, en exécution des lois des 21 avril 1832, 24 mai 1834, 17 avril 1835, et par suite des votes des conseils locaux, dans une proportion suffisante pour procurer au budget de l'État près de 40 millions

de nouveaux produits, pour accroître également les revenus des départements et des communes de plus de 35 millions de ressources extraordinaires, et pour aggraver ensemble le poids des impôts qui pèsent directement sur les personnes et sur les biens immobiliers d'une surcharge de 75 millions.

. Ces diverses modifications de tarifs n'avaient pas cependant comprimé l'essor du revenu public et ne l'avaient pas empêché de doter le budget annuel d'une augmentation générale de 136,183,802 fr. Aux besoins croissants des divers ministères, à ceux de la conquête d'Algérie, ces nouveaux dons de la paix avaient permis d'affecter des sommes de plus en plus élevées. L'ensemble régulier de ces voies et moyens, et de ces crédits ouverts de 1839, s'était graduellement élevé, depuis dix années, d'un milliard à 1180 millions, et présentait, en définitive, un excédant de recettes de 80 millions, provenant à la fois de la balance générale du budget et de la réserve de l'amortissement, et composant une ressource disponible applicable à l'exécution des entreprises extraordinaires de travaux publics.

Le retour d'une situation financière aussi rassurante permettait déjà d'espérer l'exécution de la grande opération annoncée par le gouvernement antérieur, dès le 15 mars 1830, sur le remboursement ou la conversion 5 p. 100 en nouvelles rentes d'un intérêt moins élevé.

C'était sous ces auspices que s'ouvrait la carrière de l'administration pour l'exercice 1840, lorsque le traité du 15 juillet vint troubler le cours de ces améliorations et de ces espérances. A dater de cette nouvelle secousse politique, les réserves de l'amortissement furent appliquées sans interruption, jusqu'à concurrence de 355,782,737 fr., à compenser non-seulement les découverts formés sur 1840, 1841 et 1842, mais encore à couvrir ceux réalisés en 1843 et en 1844, et dont le total s'élevait à 488,473,772 fr.

Pendant que ces fonds disponibles étaient ainsi détournés, par des préparatifs de guerre et de défense, de leur destination précédente, pour supporter cette longue et grave insuffi

sance de ressources qui pèse encore sur nos budgets et sur notre dette flottante, malgré les progrès non interrompus du revenu public, le grand-livre se rouvrait aussi, par la loi du 25 juin 1841, afin d'inscrire un nouveau capital de 450 millions, applicable à raison de 75 millions par année, d'abord aux fortifications et autres charges militaires pour 276 millions, et ensuite à l'achèvement de grandes entreprises des ponts et chaussées pour 174 millions.

On s'est alors vainement flatté, ajoutait M. le marquis d'Audiffret,de reconquérir l'équilibre du budget,de dégrever le trésor de ses avances antérieures par l'application intégrale des fonds libres de l'amortissement, et de renfermer les travaux publics extraordinaires dans le crédit annuel de 75 millions. Nous n'avons pas pu parvenir, affirmait le savant rapporteur, à accomplir un seul des engagements pris dès le second exercice qui a suivi l'impulsion donnée aux dépenses publiques en 1840.

L'augmentation de l'effectif dans l'intérieur, le développement des travaux militaires et l'extension toujours croissante de nos forces dans l'Algérie, ont exigé, en 1842, pour le département de la guerre, une allocation de 382 millions, encore supérieure de 140 millions aux besoins de 1839. Le département de la marine a aussi réclamé un surcroît de 34 millions, qui a porté sa dépense totale à 114 millions. Les travaux publics se sont en même temps élevés de 106 à 116 millions. En définitive, le règlement général de l'exercice, arrêté à 1422 millions, allait présenter un accroissement réel de dépense de plus de 200 millions sur les crédits de 1839.

Toutefois le retour de la sécurité nous avait encore une fois aidés à supporter le poids de charges croissantes, en relevant le cours des effets publics et en développant avec assez de rapidité la richesse nationale pour procurer à l'État une seconde augmentation de recette de plus de 100 millions, qui avait porté à 225 millions l'excédant des produit de l'exercice de 1842 sur ceux de 1839.

Nonobstant l'abondance de ces subsides supplémentaires ob

« PreviousContinue »