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pour voir infirmer ou confirmer la sentence. Les baillifs et sénéchaux ont depuis été dispensés d'assister à l'appel du rôle de leur province : cette formalité ne s'observe plus qu'à l'égard du prévôt de Paris, et des autres juges du Châtelet de Paris, qui sont (1) encore obligés d'assister à l'ouverture du rôle de Paris, du moins ceux qui sont de service au Parc Civil; mais on n'intime plus aucun juge en son nom, si ce n'est dans le cas de prise à partie : on intime seulement sur l'appel la partie, au profit de laquelle a été rendu le jugement.

Dès avant Philippe le Bel, le parlement tenait communément ses séances à Paris; cette cour était déjà même appelée parlement de Paris: mais ce fut ce prince qui, en 1302, rendit le parlement sédentaire à Paris, et ordonna qu'il tiendrait deux fois l'année, à l'octave de Pâques, et à celle de la Toussaint; chaque parlement durait deux mois. Quelques années après, ce même prince lui donna le palais, où il tient encore présentement ses séances, qui était l'ancien palais de nos rois, dès le temps de la première race (2).

A mesure que les affaires se multiplièrent, les séances du parlement devinrent plus fréquentes; il y en eut jusqu'à cinq dans l'année.

Philippe V ordonna en 1319 que les prélats n'auraient plus entrée au parlement, à l'exception de quelques-uns en petit nombre, auxquels ce droit fut conservé. Comme il ne restait plus que les barons ou chevaliers qui faisaient tous profession des armes et qu'ils n'étaient point versés dans l'ordre judiciaire, qui fut introduit par les établissemens de saint Louis, ils furent obligés d'appeler avec eux des gens loi, lesquels n'avaient d'abord que voix consultative; mais vers la fin du règne de Philippe de Valois ils eurent voix délibérative, de même que les chevaliers; on les créa mêe chevaliers en lois, afin qu'ils fussent assimilés et égaux aux

de

(1) L'auteur écrivait ceci en 1753.

(2) C'est ce que nous appelons le Palais de Justice.

chevaliers ou barons, auxquels seulement l'administration de ja justice avait jusqu'alors été confiée dans le parlement. Ces chevaliers en lois portaient le même habit que les chevaliers d'armes, ainsi qu'on le remarque encore dans l'habillement des présidens à mortier, lorsqu'ils sont revêtus de l'épitoge ou manteau, qui est l'habit des anciens chevaliers; manteau qui est retroussé sur l'épaule gauche, comme cela se pratiquait alors, pour laisser libre le côté de l'épée. Ces chevaliers en lois siégèrent sans épée, parce que les barons eux-mêmes n'en portaient point lorsqu'ils siégeaient au parlement.

Le roi envoyait tous les ans le rôle de ceux qui devaient tenir le parlement pendant l'année. Mais vers l'an 1400, sous le règne de Charles VI, ce prince étant devenu infirme et hors d'état de pourvoir lui-même au gouvernement de son royaume, les rôles des officiers ayant cessé d'être envoyés à l'ordinaire, au commencement de la tenue des parlemens, les officiers, qui étaient la plupart gens de loi, se continuèrent d'eux-mêmes, et devinrent ordinaires.

A peu près vers le même temps, les barons ou chevaliers étant rebutés par la discussion des affaires contentieuses, dans lesquelles ils n'étaient point versés, cessèrent de venir au parlement.

Il ne resta plus que les pairs laïcs et ecclésiastiques, qui y venaient rarement, et les gens de loi qu'on appela magistrats, pour les distinguer des juges d'épée, quoique dans le principe ce titre fût commun aux uns et aux autres; ce terme désignant toute personne qui exerce quelque portion de la puissance publique.

Ces magistrats ou gens de loi furent amovibles jusqu'au temps de François Ier, qu'ils devinrent perpétuels par la vénalité des charges.

Dès que le parlement commença à connaître des affaires. contentieuses, il y eut des avocats qui s'y attachèrent, et qui y prêtèrent serment.

Tandis que le parlement fut ambulatoire, ces avocats le suivaient dans les différens lieux où il tenait ses séances, pour y plaider les causes dont ils étaient chargés.

Les établissemens de saint Louis, faits en 1270, sont la plus ancienne des ordonnances de la troisième race qui fasse mention des avocats; le chapitre XIV contient plusieurs règles qu'ils devaient observer dans leurs fonctions. Cette ordonnance parle des avocats en général, et ne dit rien de particulier des avocats au parlement.

Il est cependant certain qu'outre les avocats au parlement, il y avait aussi dès lors des avocats attachés au Châtelet de Paris, et dans les bailliages et autres justices royales des provinces; et que les avocats au parlement étaient distingués de ceux qui s'attachaient aux autres tribunaux inférieurs.

C'est ce qui paraît par une ordonnance de Philippe III, du 23 octobre 1274, qui porte que les avocats, tant du parlement que des bailliages et autres justices royales, jureront sur les saints évangiles, qu'ils ne se chargeront que de causes justes; qu'ils les défendront diligemment et fidèlement, et qu'ils les abandonneront, dès qu'ils connaîtront qu'elles ne sont point justes; que les avocats qui ne voudraient point faire ce serment, seront interdits jusqu'à ce qu'ils l'aient fait. Cette même ordonnance règle que l'honoraire des avocats ne pourra excéder trente livres, somme qui était considérable pour ce temps-là, qu'ils jureront de ne rien prendre au delà, qu'ils feront ce serment tous les ans, et que cette ordonnance sera lue tous les ans aux assises.

Une ordonnance de Charles le Bel, du 25 mai 1325, fait mention des avocats au Châtelet.

Une autre ordonnance de Philippe de Valois, du mois de février 1327, donne à ces avocats du Châtelet la qualité d'avocats commis, apparemment parce qu'ils étaient reçus d'abord au parlement, qui les avait ensuite commis pour plaider au Châtelet. Cette ordonnance fait mention que ces avocats au Châtelet y prêtaient serment, et y étaient inscrits dans un rôle particulier.

Le même prince, dans une autre ordonnance du mois de septembre 1345, parle des avocats fréquentant les foires de Brie et de Champagne, c'est-à-dire qui plaidaient devant le conservateur des priviléges de ces foires,

Depuis que le parlement eut été rendu sédentaire à Paris, les avocats qui y étaient attachés devinrent pareillement sédentaires à Paris, c'est-à-dire qu'ils n'allèrent plus plaider dans les provinces.

Un des premiers soins du parlement fut de faire une ordonnance vers l'an 1344, concernant les fonctions des avocats; afin de maintenir cette profession dans la pureté qui lui convient, et qu'elle fût exercée d'une manière honorable pour les avocats, et utile pour le public.

Cette ordonnance, qui est en latin, porte en substance, que les noms de tous les avocats seraient mis par écrit; que l'on choisirait ensuite ceux qui auraient la capacité nécessaire pour exercer cet emploi, et que les autres seraient exclus.

Une autre disposition détaille les articles compris dans le serment que doivent prêter les avocats plaidans et consultans. Elle donne à ces derniers le titre de conseillers, consiliarii titre qui se réfère non-seulement à leur qualité de consultans, mais aussi à l'honneur que la cour leur a fait plusieurs fois anciennement, de leur demander leur avis; en conséquence de quoi, on leur a accordé une séance sur les fleurs de lis, aux bas siéges, lorsque messieurs sont sur les hauts siéges aux grandes audiences. Cette séance sur les fleurs de lis (1), était accordée par la cour à douze des plus anciens avocats. Cet honneur n'était pourtant pas dévolu de droit aux plus anciens; c'était la cour qui les choisissait entre ceux qui étaient les plus célèbres; ils étaient nommés par arrêt. L'usage de les nommer ainsi subsistait encore eu 1582, ainsi qu'on le voit dans les registres du parlement. On faisait une liste particulière des avocats qui avaient droit de siéger sur les fleurs de lis. Le roi défendit aux jeunes avocats de s'y placer. Le droit de committimus, attribué aux douze anciens avocats, paraît venir de cette distinction.

Quoique la cour ne soit plus dans l'usage de nommer ceux qui doivent siéger sur les fleurs de lis, ce droit appartient

(1) Sur les bancs de la cour, dont l'étoffe est parsemée de fleurs de lis.

toujours au bâtonnier et autres anciens avocats qui y viennent prendre séance quand ils jugent à propos, ainsi que je l'ai vu encore pratiquer plusieurs fois dans des audiences solennelles. Nous rapporterons ci-après les articles qui ont rapport au serment des avocats en général.

L'ordonnance de 1344 défend qu'aucun avocat soit reçu à plaider, qu'il n'ait prêté serment, et qu'il ne soit inscrit dans le rôle des avocats.

Elle enjoint aux avocats. de retrancher les faits et moyens, repliques et dupliques inutiles, et de ne point contrevenir à ce règlement par complaisance pour leurs cliens.

Elle leur ordonne de donner les faits et articles qu'ils auront avancés en plaidant, dans deux ou trois jours au plus tard, à moins que la cour ne leur accorde un plus long délai; ce qui est à remarquer, attendu qu'il y avait déjà des procureurs postulans pour les parties.

Enfin, elle porte que les avocats nouvellement reçus ne doivent point se presser d'en faire trop tôt les fonctions; qu'ils doivent pendant un temps suffisant écouter leurs anciens, afin de s'instruire du style de la cour; elle leur prescrit aussi d'avoir de la déférence pour leurs anciens.

CHAPITRE VII.

QUELLES PERSONNES SONT ADMISES À FAIRE LA FONCTION D'AVOCAT,
ET DES FORMALITÉS DE LA RÉCEPTION.

La première qualité requise pour être admis dans l'ordre des avocats, est d'être de bonne vie et mœurs; c'est pourquoi Philippe le Bel, par un mandement du 23 avril 1299, adressé aux baillifs de Touraine et du Maine, leur défendit d'admettre les excommuniés à faire la fonction d'avocat, et même à former aucune action en justice.

Avant la révocation de l'édit de Nantes, on recevait des avocats, quoiqu'ils fussent de la religion prétendue réformée;

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