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de M. le maréchal Ney, dont la défense ne fut ni libre, ni entière ! Ce qui, dans mon esprit, a toujours frappé sa condamnation d'irrégularité. (Voyez la note p. 87).

SECTION XV. M. A. Séguier, qui à l'étude des lois joint l'amour des sciences qu'il cultive avec distinction, m'a remis une note fort intéressante sur l'utilité des sciences physiques dans l'exercice de la profession d'avocat. J'ai désiré fortifier mon livre par l'autorité d'un nom qui honore également et le barreau auquel il doit sa première illustration, et la magistrature sur laquelle il répand un si grand lustre.

SECTION XVI. L'étude isolée ne suffit il faut pas; aussi se communiquer aux autres, afin d'éprouver sa propre science dans le choc des discussions. De là l'utilité des Conférences, surtout dans la profession d'avocat, où, non content d'être savant pour soi, il faut surtout l'être au bénéfice d'autrui, et s'exercer de bonne heure au grand art de la parole.

SECTION XVII. Après avoir parcouru ce cercle d'études et de travaux, on est en état de faire la profession d'avocat. Cette section traite de la manière de l'exercer. Plaidoieries, mémoires, consultations, arbitrages, tout ce qui compose le labeur d'un avocat, a ses règles propres qu'il importe de distinguer. On ne doit pas abuser des citations. Ce sujet, traité à la fin de cette section, l'est aussi dans la dix-huitième. J'y discute la question de savoir « s'il est vrai qu'on ne doive pas citer » les auteurs vivans. »>

SECTION XIX. Enfin, cette partie se termine par un fragment de M. Berville sur l'éloquence du barreau comparée à celle de la tribune; genres semblables à quelques égards, mais pourtant fort différens, à en juger par les orateurs qui ayant réussi dans l'un ont échoué

dans l'autre.

TROISIÈME DIVISION.

Il ne suffirait pas de connaître les règles de sa profession, il faut l'aimer et savoir l'exercer avec une noble indépendance. Pour inspirer ce sentiment, j'ai cru ne pouvoir mieux faire que de donner deux des mercuriales de d'Aguesseau, l'une sur l'amour de son état, l'autre sur l'indépendance de l'avocat. Là se trouve le plus bel éloge que l'on ait fait de notre profession :

« Dans cet assujettissement presque général de toutes » les conditions, dit d'Aguesseau, un Ordre aussi ancien » que la magistrature, aussi noble que la vertu', aussi » nécessaire que la justice, se distingue par un caractère » qui lui est propre; et, seul entre tous les états, il se maintient toujours dans l'heureuse et paisible posses»sion de son indépendance.

» Libre, sans être inutile à sa patrie, il se consacre » au public sans en être esclave; et, condamnant l'indiffé»rence d'un philosophe qui cherche l'indépendance dans » l'oisiveté, il plaint le malheur de ceux qui n'entrent » dans les fonctions publiques que par la perte de leur

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» liberté. »

Cet illustre chancelier nous félicite « d'être dans un » état où faire sa fortune et faire son devoir ne sont qu'une même chose; où le mérite et la gloire sont inséparables, où l'homme, unique auteur de son » élévation, tient tous les autres hommes dans la dépendance de ses lumières, et les force de rendre hom»mage à la seule supériorité de son génie. »

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Cependant si la profession d'avocat a ses honneurs elle a aussi ses désagrémens. Le plus sensible, celui contre lequel les avocats de tous les temps se sont le plus récriés, et qui a parfois excité leur rancune et leur

animosité contre les magistrats, c'est d'être interrompus mal à propos et rabroués à l'audience sans l'avoir mérité.

Ces interruptions sont d'autant plus fàcheuses, qu'elles amènent quelquefois entre l'avocat et le juge, ou le ministère public, des altercations au milieu desquels l'amour-propre joue, de part et d'autre, un si grand rôle qu'il est bien difficile que l'un ne manque de mesure en poussant le zèle trop loin; et que l'autre n'abuse de son droit en devenant juge et vengeur dans sa propre cause. Elles ont encore un autre inconvénient.

En matière civile, le client dont l'avocat a été interrompu croit toujours que si on l'avait entendu jusqu'au bout, il aurait gagné son procès, et souvent il n'a pas tort de le penser ainsi.

En matière criminelle, le public entier se soulève contre des interruptions qui tendent à favoriser l'accusation en affaiblissant la défense. Une condamnation, surtout en matière politique, passe toujours pour injuste quand la défense n'a pas été libre; et l'on se refuse à croire à l'impartialité d'un juge qui n'a pas même eu la patience d'écouter.

Nous avons cru faire plaisir à nos lecteurs, en remettant sous leurs yeux une ancienne lettre (écrite en 1733), où l'on examine si les juges qui président aux audiences peuvent légitimement interrompre les avocats lorsqu'ils plaident.

Elle renferme des anecdotes piquantes qui intéresseront à la fois les avocats, les parties et les bons juges.

Le pouvoir disciplinaire n'est point exactement défini. De là ce conflit entre ceux qui cherchent à l'étendre outre mesure, et ceux qui s'efforcent de le réduire à rien. Une consultation donnée par M. Dupin jeune, dans laquelle les règles avaient été posées avec sagesse et netteté, m'a paru très-propre à fixer sur ce point les

idées de tous ceux qui ne cherchent que la vérité ; j'en ai donné un assez long extrait.

Le siége du pouvoir disciplinaire actuel se trouve dans le décret impérial de 1810, et dans l'ordonnance de 1822; j'ai joint à ces actes quelques notes historiques, pour montrer dans quel esprit ennemi de l'indépendance des avocats ils ont été faits, et en quoi ils blessent. les maximes de la profession et la juste susceptibilité de ceux qui l'exercent.

Mais c'est surtout dans le commentaire de M. Daviel, docte et habile avocat du barreau de Rouen, qu'il faut chercher la douloureuse interprétation de plusieurs dispositions de ces actes secondaires de la législation dans ce qu'ils ont d'hostile contre les libertés du barreau.

Mais nous vivons sous un prince qui a promis de ne gouverner que par les lois et selon les lois; sous un roi qui trouve dans son cœur l'inspiration de toutes les idées nobles et généreuses; Dupont de l'Eure et Mérilhou sont au ministère de la justice; Barthe, Bernard et Berville sont à la tête du ministère public; j'ai la certitude que l'espérance, tant de fois déçue, d'obtenir un règlement plus équitable que ceux qui nous régissent ne sera plus trompée.

A la fin du volume, j'ai rejeté, sous le titre de Mélanges et arrêts divers, plusieurs fragmens arrêts et décisions que j'ai rangés par ordre alphabétique.

Les recherches sont facilitées par une table des matières fort détaillée, que j'ai faite moi-même avec le plus grand soin.

Tel est le 1er. volume; le second contiendra la Bibliothèque des livres de droit.

J'aurai ainsi payé le tribut à ma profession, à une époque où le travail des sessions législatives me laissait déjà peu de place pour l'exercer, et où les circonstances

politiques qui viennent de se déclarer me forcent d'interrompre mes travaux habituels et mes études de prédilection, pour donner tout mon temps aux affaires de l'État.

Mais mon cœur et mes plus chers souvenirs me rappelleront toujours au barrean; je ne cesserai jamais de faire des vœux pour sa gloire, et d'encourager tous ceux qui voudront s'y dévouer.

Une belle est vaste carrière s'ouvre devant le jeune barreau! au moment où la nécessité des affaires publiques enlève partout les plus célèbres à leur profession; quand nous voyons Berville, Barthe et Bernard, illustrer le parquet, lorsque de telles places restent vacantes au palais! Jeunes avocats précipitez-vous sur leurs traces pour remplir les vides que ces orateurs laissent dans vos rangs. Au lieu de vous jeter prématurément dans les sollicitations, pour obtenir des emplois précaires où plusieurs risqueraient de n'apporter encore que de l'inexpérience, travaillez, prenez de la peine, c'est le fond qui manque le moins; il n'y a pas de place plus inamovible qu'un état honorable exercé honorablement. Efforcez-vous de former dans notre Ordre de nouvelles célébrités, de vous créer des titres à l'estime et à la confiance de vos concitoyens; et, après avoir été long-temps les conseils et les défenseurs des intérêts privés, vous deviendrez l'organe des intérêts publics. C'est l'encouragement qu'adresse aussi Justinien aux légistes, lorsqu'il leur dit au commencement de ses Institutes: Summá itaque ope, et alacri studio, has leges nostras accipite: et vosmetipsos sic eruditos ostendite, ut spes vos pulcherrima faveat, posse etiam nostram Rempublicam in partibus ejus vobis credendis gubernari.

15 août 1830.

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