spectacle, acheté la maison dite des Trois-Poissons. En effet, depuis plusieurs années cette question de construire un théâtre digne de l'importance et de l'avenir de la cité, préoccupait vivement sa population et son conseil municipal.

Plusieurs emplacements avaient été indiqués pour l'exécution du monument: celui d'abord où se trouvait l'ancienne salle, augmenté de l'acquisition des maisons qui l'entouraient, ensuite celui dit des Capucins, puis ceux de l'ancien arsenal, de l'ancien collége, de l'ancienne sous-préfecture1, de la halle aux grains avec une façade sur la rue de la Sellerie, et enfin l'ancienne place Louis-Philippe Ir.

Ce fut ce dernier emplacement qui fut d'abord choisi par la commission municipale, parce qu'il devait coûter moins cher, attendu qu'il n'y avait aucun terrain à acheter 2; mais le 1er juin 1839, le conseil n'adopta pas cette proposition, et vota seulement les voies et moyens, en renvoyant de nouveau la question à une commission qui devait s'adjoindre un habile architecte avec lequel elle aurait à se mettre de suite en communication.

Cet architecte 3, après avoir examiné les divers emplacements qui lui avaient été le plus généralement indiqués, comme pouvant convenir à la construction du

1 L'ancienne sous-préfecture était située rue Saint-Thomas.

2 Délibération du 14 janvier 1839.

3 M. Félix Duban architecte des beaux-arts au ministère de l'intérieur.

nouveau théâtre, s'empressa de soumettre à la commission les observations et les conclusions suivantes :

« L'emplacement qui m'a paru réunir le plus » d'avantage, disait M. Duban, et offrir le moins d'in» convénient, est la localité sur laquelle se trouve au»jourd'hui la salle de spectacles, agrandie par l'achat » de plusieurs propriétés mitoyennes, occupant à peu » près un des axes de la place publique où s'élève » l'hôtel-de-ville; cet emplacement me semble avoir » l'avantage d'occuper la position la plus centrale de » la ville, de réunir sur un même point plusieurs édi >>fices importants, et de ne pas déranger les habitudes » des habitants de Saint-Quentin.

Le rapport se terminait ainsi : « La localité qui m'a >> semblé offrir les avantages essentiels d'un édifice de >> cette nature est l'emplacement agrandi et rendu >> apparent par une saillie de l'édifice, sur la place >> publique, de la salle actuelle de Saint-Quentin. »

L'honorable architecte formulait ensuite le vœu: que la façade de la maison de bois dite la Maison de » l'Ange qui devait être démolie, fut rétablie dans un >> autre lieu, et offerte à la curiosité des artistes, comme » un reste précieux des constructions anciennes de la » ville de Saint-Quentin 1. >>

Les conclusions de ce rapport furent accueillies, et le conseil municipal vota, à l'unanimité, la construction d'une nouvelle salle de spectacle sur l'emplacement de l'ancienne; il autorisa l'administration à

1 Cette façade fut achetée par M. le duc de Vicence.

passer, moyennant 128,000 francs, tous les actes pour acquérir les immeubles indiqués au rapport, et il décida enfin qu'une somme de 300,000 francs serait affectée à la construction de la nouvelle salle de spectacle, et la ville demanderait à cet effet l'autorisation de contracter un emprunt de 400,000 francs.

que

Les membres de la commission chargés de poursuivre l'édification du nouveau théâtre pensèrent avec raison qu'ils ne pouvaient mieux remplir leur mandat, qu'en se transportant dans les villes où les salles de spectacle pouvaient, par leur dimension et leur importance, servir de modèle à celle dont le conseil municipal avait décidé la construction. Ils visitèrent, à cet effet, à Paris, celles des Variétés, du Vaudeville et des Nouveautés; ils furent ensuite au Havre, puis à Caen dont, après le plus consciencieux examen, la salle de spectacle leur parut remplir toutes les conditions qu'ils cherchaient.

Ils firent, à leur retour, connaître au conseil les résultats de leur voyage, de leurs investigations; et, dans un rapport parfaitement motivé, ils lui proposèrent de prendre pour modèle de la salle de spectacle à construire à Saint-Quentin celle de Caen1, sauf quelques corrections intérieures indiquées dans le rapport et les modifications que la différence des lieux exigera.

Le conseil vota toutes ces propositions, et dans sa séance du 22 août 1840, approuva les plans et les

1 La salle de spectacle de Caen avait coûté 300,819 fr. 96 centimes.

devis de ladite salle qui, jolie et convenablement disposée, fut inaugurée le 7 novembre 1844.

Cette salle et les terrains acquis pour son agrandissement coûtèrent au budget de la ville la somme de 720,000 francs.

Une société industrielle avait été fondée en 1826 à Mulhouse et en peu d'années elle avait dépassé par ses résultats toutes les espérances de ses fondateurs 1. Une réunion d'hommes de progrès et d'intelligence se forma en 1838 pour, dans le même but, en créer une à SaintQuentin. Elle se composait de 60 membres et avec des ressources provenant, tant de leurs cotisations que de subventions et de droits d'entrée, cette société organisa des écoles du dimanche pour les ouvriers et étudia de nombreuses questions d'économie industrielle et commerciale. Ses comités fonctionnèrent activement sous l'impulsion de son zélé fondateur M. Mallet. Mais le savant professeur qui la présidait ayant quitté l'université et Saint-Quentin, elle ne tarda pas à se dissoudre après 4 ou 5 ans d'existence.

Cette dissolution fut d'autant plus regrettable que cette société était certainement appelée à rendre aux industries et au commerce de cette ville les plus grands services.

La question de construire un marché couvert était une de celles qui avait été agitée plusieurs fois dans le

1 La Société industrielle de Mulhouse est arrivée au point de n'avoir plus d'émule que dans la Société d'encouragement de Paris Son programme en 1860 comprenait 84 prix ou médailles, dont le montant s'élevait à près de 200,000 francs.