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CHAPITRE XXII.

Excursions des réformés au-delà du fort.

Pillage du château de

Léaz, Balon, des monastères de Chézery et de Nantua. Ils sont repoussés par les habitants des vallées Le Credo. D. Amédée reprend le Fort-de-l'Ecluse. - Désolation du pays de Gex par les deux partis. Ambition ridicule du duc Charles. Défaite des Savoyards dans la plaine de Gex. Ils battent à leur tour les Genevois. D. Amédée surprend et défait les soldats de Genève. Arrivée du baron de Conforgien. Il est repoussé d'Evian. Combat sur la Menoge. · Guerre à outrance. Arrivée de Sancy

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- Prise et destruction du château de Buringe.

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de Guitry avec de nouveaux secours. Prise de Thonon et d'Evian.

- Bataille décisive de Monthoux.

Le pays de Gex entre les mains

des confédérés franco-genevois. - Le baron d'Hermance prisonnier. - Impuissance des Savoyards. — De Sancy rentre avec ses troupes en France.

Maîtres de ce passage important, les coalisés de Berne et de Genève poussèrent leurs excursions plus loin sur les terres de la Savoie. Après avoir assuré leur conquête par une bonne garnison, ils suivirent la rive droite du Rhône, saccagèrent le château de Léaz, les villages de Vanchy, Balon, Lancrans et Confort. Ils s'engagèrent ensuite dans la sauvage vallée de

Chézery, attirés par la richesse de son monastère et de son église, dont ils emportèrent les reliquaires et les riches

ornements.

Déjà les propriétés que les moines possédaient sur le territoire de Gex avaient été saisies et vendues; il ne leur restait, pour vivre et réparer leurs désastres, que la charité publique et quelques revenus qu'ils possédaient hors de l'atteinte des Bernois.

Les protestants confédérés, dans l'exaltation de leur victoire, franchirent ensuite la Valserine et s'avancèrent jusqu'à Nantua. Ils en dévastèrent l'église et détruisirent les restes du corps de saint Maxime pour s'emparer de sa châsse en argent. La crainte d'être surpris dans cette longue et sinueuse vallée, hâta leur retour dans le pays de Gex.

Les populations de la Michaille se défendirent énergiquement. Après avoir expulsé ces hardis spoliateurs d'églises, ils plantèrent, selon la tradition vulgaire, sur les sommités les plus apparentes, des poteaux sur lesquels ils avaient écrit le mot latin Credo, comme pour marquer les limites du protestantisme et du catholicisme: de là le nom de Credo que porte encore aujourd'hui la croupe inférieure du Mont Sorgiaz, au-dessus de Lancrans, de Balon et de Vanchy.

Les alliés bernois et genevois ne possédèrent que quelques jours le Fort-de-l'Ecluse; don Amédée de Savoie, frère naturel du duc, arriva le 1er de mai devant la place. Il prit position sur le revers du Wache, en face du fort, y fit placer deux pièces de canon et une batterie sur la route de Lyon. Le poste de la montagne était défendu par le capitaine Desgaillon, qui

eut la lâcheté de le livrer sans résistance aux Savoyards, et qui pour ce méfait fut décapité, le 23 de mai, à Genève.

Lurbigny, témoin de cette trahison, conclut qu'il lui était impossible de conserver sa conquête devant des forces aussi considérables; il l'abandonna, le 11 mai 1590, après avoir fait sauter les fortifications principales. Ses troupes revinrent à Genève, poursuivies par l'ennemi; les deux armées désolèrent la plaine de Gex, brûlèrent tous les villages et en massacrèrent les habitants. Les réformés n'écoutaient que leur haine contre le duc Charles et ses adhérents, et les Savoyards se vengeaient sur une population qui avait abandonné le culte de ses pères pour embrasser la religion de Calvin.

Le souvenir de ce double brigandage vit encore dans la mémoire des habitants du pays; transmis de génération en génération, il perpétuera l'insurmontable antipathie des Gessiens contre les Genevois et les Savoyards.

Cette seconde entrée des troupes de Savoie et de leurs cruels alliés, fut signalée, comme la première, par le pillage, l'incendie et le meurtre des malheureux habitants du bailliage. Voici la relation qu'en donnent les Mémoires de la Ligue, vol. IVe :

1° Collonge et lieux circonvoisins.

«En la deuxième entrée des Savoyards, qui fut le 11 de mai 1590, furent massacrés :

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Trois petits enfants de Jean Jacquet, dit Croset ou Moret, âgés l'un de douze ans, l'autre de neuf, et le dernier de six, assommés avec une coignée, et laissés morts au foyer où les père et mère les trouvèrent morts;

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François Chabot, d'Ecorens, tué; sa femme et un fils, nommé Ami, perdus, sans que l'on ait pu savoir ce qu'ils

étoient devenus;

Françoise, fille de Jean Venier, dit Leonard, cy-dessus dénommé, âgée d'environ quinze ans, et Teuene, fille de feu Genis Noël, surnommée la Rousse, âgée d'environ dix-huit ans, souffrans d'être violées, tuées.

Furent aussi massacrés le dit jour, à Chalaix, en la maison des seigneurs de la Corbière, avec plusieurs aultres cy-après nommés et les suivants, de la paroisse tant de Collonge que de Pouni:

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«

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Tiven Michel, dit Pourchair, du lieu de Pierre ;

Bernarde, femme de Gonet Pache, du Cret;

Balthasarde, femme de François Gagnod, dit Cambardon;

Jaquema, femme de Rolet de la Biere, dit Convers;

Mie, veuve de Claude Marchant Morens;

Françoise Pariset, femme du sus-nommé Tiven Michel, ayant été fort blessée par l'ennemi, d'un grand coup d'espée sur la teste, et portant un petit enfant entre ses bras, fut noyée le même jour en la London avec l'enfant, âgée la dite femme d'environ vingt-cinq ans, et l'enfant de six à sept mois;

« Jean Mareschal, de Collonge, et George Buclin, sa femme, retirés pour lors à Pouni, tous deux malades et gisans au lict, furent cruellement massacrés. >>

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