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CHAPITRE XI.

Traité d'alliance entre Amédée V et Bertrand de Baux. Nouvelle

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guerre.
Genève et la Savoie.

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Aimé-du-Quart, évêque de Genève. —

Aliénation de la tour de la Maladière de Gex. Hommage du comte du Genevois à l'évêque. — Hommage de Guillaume de Joinville au

même prélat.

de Genève.

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Manoeuvres des comtes de Savoie pour s'emparer

Lutte sanglante entre les comtes du Genevois et de Savoie. -Episode du château de Gaillard et de Marnal. — Domination d'Amédée sur le pays de Gex. Mort d'Amé II du Genevois. Généalogie de Hugues de Genève. Loi salique deux fois violée en Savoie.-Passage de Henri VII à Genève. - Investiture solennelle faite à Amédée V. Mort de l'évêque du Quart.

C'est le 5 mai de l'année 1300 que le comte de Savoie fit un traité d'alliance offensive et défensive avec Bertrand de Baux, prince d'Orange, contre le dauphin Viennois, leur ennemi commun. Celui-ci, informé de cet arrangement, déclara la guerre à Amédée V de Savoie : chaque seigneur prit parti pour ou contre; la neutralité n'était pas permise à cette époque de violence et de haute ambition. Le comte du Genevois, son frère Hugues, le seigneur de Gex et le sire de Villars vinrent se ranger sous les bannières du dauphin.

Le comte de Savoie ouvrit cette longue guerre de destruction par la prise et l'incendie de plusieurs places sur les confins du Viennois, faisant partout, dit Guillaume Paradin, toutes les violences, gast el pilleries possibles. Il envoya même un cartel au dauphin, le défiant corps-à-corps. Le dauphin répondit au héraut de Savoie : « Dis à ton maître que la force et la vertu d'un « prince ne consistent en force corporelle, et s'il veut se vanter d'être « nerveux et robuste, je lui réponds que je n'ai taureau qui ne soit a plus fort et plus roide que lui. »

Il fallut l'autorité de Charles de Valois, frère du roi de France, pour mettre fin à des hostilités qui ruinaient deux vastes pays: il posa pour condition que celui des deux champions qui romprait la trève paierait, entre les mains du pape, la somme de 40,000 livres qui seraient applicables au secours de la Terre-Sainte. Ce traité, signé en 1301, portait que tout ce qui avait été pris serait restitué et que les prisonniers seraient rendus.

Le dauphin, mécontent de cet arbitrage, excita Hugues de Genève et son frère Guillaume III à rompre la trève. Hugues assiégea et prit le château de Monthoux, près de Genève, en 1302. Le comte de Savoie vint aussitôt pour le reprendre. Le comte du Genevois, soutenu du seigneur de Gex, voulut s'opposer à son passage; mais ils furent battus et le château de Monthoux repris par Amédée, Cette guerre entre tous ces petits princes et seigneurs dura dix ans, et ne finit qu'à la paix de 1314.

Au pacifique évêque Martin succéda, en 1304, Amé ou Aimon du Quart, chanoine et chantre de l'Eglise de Lyon; il

mécontenta les deux partis qui se disputaient le pouvoir à Genève, et débuta par un décret qui fait époque dans son diocèse, en ordonnant que l'année qui commençait à Pâques compterait, par la suite, du jour de la Nativité.

Le 1er mars de l'année suivante 1305, Gérard, fils d'Aimon, seigneur de Greizy en Savoie, vendit à Guillaume de Joinville, seigneur de Gex, la tour ou petite forteresse de la Maladière, située sur une éminence qu'on appelle la Motte, à quelques mètres au nord-est des vestiges de l'ancien hôpital de la Maladière, au lieu dit aujourd'hui Crêt - des - Murailles, à un kilomètre environ au-dessus de Gex.

Cet hôpital fut reconstruit à neuf en 1525 et incendié par les Savoyards dans les guerres qui, en 1589, désolèrent cette malheureuse contrée.

La même année, le comte du Genevois, humilié de la supériorité du comte de Savoie, s'empressa de rendre hommage au nouveau prélat, pour gagner son affection. Cet acte de soumission et de politique eut lieu à Sacconex, dans le château du comte, en présence de plusieurs témoins. (Voyez Spon, Preuve XXX.)

A son exemple, Guillaume de Joinville, seigneur de Gex, fit son hommage au même prélat, et par les mêmes motifs, à Seyssel, au mois de juin. Il reconnut tenir le fief d'Avison, le marché de Gex du lundi, la foire de Gex et le marché de Divonne qui se tient le mardi, et le marché de Saint-Jean de Govellies (Gonville) qui a lieu le mercredi, sans préjudice du droit qu'avait le seigneur-évêque d'exiger cet hommage dans l'église Saint-Pierre de Genève. Les droits de péage étaient

perçus par les seigneurs qui, pour augmenter leurs revenus, multipliaient les marchés et protégeaient les marchands forains et ambulans.

Voici le texte de l'hommage rendu en français par Guillaume de Joinville à l'évêque Aimon de Genève, en 1305, le dimanche après la Saint-Jean-Baptiste :

« Nos Guillames de Jonville, sirez de Gez, facons savoir a << tot cez qui verront cez presants lettres, que nos confessons <«<estre et devoir estre hons de en crit Pare de sire Aimu, par « la grace de Deu, evesque de Geneva, et tenir de celluy en « feu (fief) le feu de Avison et le marchie de Geyz, lyques est « le dylons (lundi) et la feyre de Geyz et le marchie de Divones « le ques est le dimar (mardi), et le marchie de Sant Johant « de Goveillies, liques est et doibt estre le dimècre (mercredi), « le quel homage nos li avons fait a Seissie, le dimenge apres feste Sent Johant Baptite, l'ant de Notre Seniour corant « P. M. et tres cens et cinq antz, en nom de luy et de l'Eglese « de Geneva; sal tres seniour (sauf trois seigneurs, c'est à savoir) su est a savoir, sal (sauve) la feitée (fidélité) dou « seniour de Fucignie, et sal la feitey du conte de Geneva, et « sal la feitey de l'abey de Sent Toant de Sour (Saint-Oyen« de-Joux). Et ly prometons, en nostre bonne foy, en non que « desus porteir et tenir bonne foy, ensy que bons vassas doibt porteir et tenir a son bon seniour. Voluns et outreyons « que ly feitey que nos ly avons fait a sessie, a lenavant « (dorénavant) ne pout porteyr prejudice au dit evesque, ne « a ses successors, ne a l'Eglese de Geneva, que nos et nostre «<heir (hoir) non fussent tenu fayre la dite feitée en lEglese

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«Sant Pere (Saint-Pierre) de Geneva, ou temoin de la quel

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chose, nos li devans sirez de Geyz, avons mis nostre sel

pendant ces presens lettres données en lant et jour que « desus.» (Spon, Preuve XXX.)

Le comte de Savoie n'approuva pas ces soumissions faites par ses ennemis à un évêque dont il enviait la puissance; Genève excita toujours l'ambition des princes savoyards: ils aimaient cette ville et se plaisaient, dit Levrier, à y faire leur demeure, comme plus riche et plus agréable qu'aucune ville de leurs états. Les fêtes et les tournois qu'ils y donnaient, les dépenses qui en étaient la suite, plaisaient au peuple. Promesses, séductions, menaces, violences, tout fut employé par eux pour s'y maintenir et en faire le siége de leur puissance. La crainte des empereurs allemands, la vigilance des évêques, jaloux de conserver l'autorité qu'ils y exerçaient, le zèle des citoyens pour défendre et maintenir leurs droits, sauvèrent l'indépendance que cette petite république a toujours conservée.

L'évêque, n'ayant rien à opposer aux caprices du comte Amédée, engagea les citoyens de Genève à se rapprocher du comte du Genevois et de ses alliés, les seigneurs de Gex et du Faucigny. Tous voyaient avec peine le château de l'Ile entre les mains du prince de Savoie; ils résolurent de s'emparer de cette place forte d'où partaient tant de vexations et d'outrages à l'évêque et aux citoyens de Genève.

Le comte du Genevois usa de finesse pour exécuter ce projet. Il attaqua, pour faire diversion, le château d'Entremont, qui appartenait à la Savoie. Amédée se hâta de dégarnir le château

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