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I. USINES DE BASSE CHUTE AVEC CONDUITE FORCÉE

J'en citerai deux exemples: les usines de Champ et d'Avignonet créées sur la rivière le Drac (Dauphiné).

Dans l'usine d'Avignonet, les conduites forcées, très courtes, débouchent à l'amont dans un bassin créé dans la rivière par un barrage de 26 mètres de hauteur. Ainsi que je l'ai dit au début de ces notes, ce bassin s'est rapidement colmaté et l'on n'a pu arriver, malgré des chasses énergiques, à évacuer ces apports. Une pareille usine ne présente rien de spécial.

Dans l'usine de Champ, au contraire, la prise d'eau est située à 4 km. 6 en amont de l'usine et la chute de 37 m. 40 de hauteur est constituée par une conduite forcée de pareille longueur placée à peu près parallèlement à la rivière et suivant sa pente.

La chute nette utilisable résulte simplement de ce que la perte de charge dans la conduite est beaucoup plus faible que dans le lit de la rivière. Cette conduite, qui a 3 m. 30 de diamètre intérieur, est exécutée, dans sa partie amont, en béton armé, et dans sa partie aval, en tôle d'acier rivée.

Si nous nous reportons à l'expression qui définit le coup de bélier d'onde (formule 3), nous voyons que l'influence de la charge initiale est faible. Le coup de bélier sera d'autant plus important que la conduite est très longue

b

yo

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et, comme Yo est petit, sa valeur relative pourra être énorme. On serait donc amené, ou à allonger T indéfiniment, ce qui est incompatible avec une bonne régulation, ou à augmenter les épaisseurs de la conduite dans des conditions inacceptables pour une bonne économie du projet.

Or, la présence d'une cheminée d'équilibre de diamètre convenable au voisinage du distributeur a pour résultat d'étouffer à peu près complètement, dans le cas de fermetures qui ne sont pas rigoureusement instantanées, les coups de bélier d'onde, dans la partie de la conduite située en amont du point d'insertion de la cheminée et de les remplacer par une oscillation en masse

dont on peut limiter l'amplitude par un choix convenable du diamètre de la cheminée (1).

La cheminée qui a été établie à l'usine de Champ, près des turbines, a 35 mètres de hauteur. Son diamètre est de 3 m. 30 à la base et de 1 m. 40 au sommet.

Le schéma d'une pareille usine est donné ci-dessous (fig. 35).

Niveau statique.

Chambre

de mise encharge

Cheminee

d'équilibre

Fig. 35.

Distribut

De plus, M. de Sparre a montré que lorsqu'on ne redoutait pas les pertes d'eau, on pouvait réduire l'amplitude de ce mouvement d'oscillation en arasant le haut de la cheminée au niveau statique ou très peu au-dessus. En cas de montée, l'eau se déverse par le haut de la cheminée et la valeur du coup d'oscillation ne dépasse pas la hauteur comprise entre le niveau statique et le niveau de déversement.

C'est ce qui a été fait à l'usine de Champ qui a été trop souvent décrite pour que j'entre dans de plus grands détails à son sujet. Il me suffit d'avoir indiqué le mécanisme de fonctionnement des cheminées employées dans ce cas. On remarquera d'ailleurs que le débit maximum qui se déverse par le haut est au plus égal à celui que débitait la conduite au moment de la fermeture.

Il faut donc, en pareil cas, prévoir à l'extrémité aval de la conduite une cheminée déversante et lui donner un diamètre suffisant, non pas tant pour parer aux fermetures (M. de Sparre a montré qu'il suffirait que sa section soit voisine du quart de celle de la conduite), que pour éviter, aux ouvertures, de trop grandes dépressions. On pourra utilement, sur ces conduites à faible pente, prévoir d'autres petites cheminées, particulièrement aux points hauts, pour évacuer les poches d'air.

(1 J'ai démontré ces divers points qui, jusqu'à présent, avaient été admis un peu empiriquement, dans une étude qui paraîtra prochainemens sous le titre : Contribution à la technique de la Houille blanche. — Le mouvements de l'eau et les coups de bélier dans les cheminées d'équilibre.

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Leur type est l'usine de Chèvres, sur le Rhône, près de Genève, les usines du Rhin supérieur dont j'ai parlé, et l'usine de Tuilières, sur la Dordogne, construite sous le contrôle de M. l'Inspecteur général Claveille, qui en a d'ailleurs donné la description complète dans les Annales des Ponts et Chaussées (III-1910).

Les chambres des turbines reçoivent directement l'eau du bassin amont formé par un barrage de retenue créé en travers de la rivière.

Il y a, à propos des prises d'eau de ces usines, un point intéressant à noter. La prise est constituée en général par un grand barrage en rivière et le problème qui se pose est exactement le même que pour les rivières canalisées : maintenir l'eau dans un bief amont à un niveau supérieur à celui du bief aval. C'est la différence de niveau entre les deux biefs qui constitue la chute utilisée.

On peut même dire que les sujétions rencontrées sont en général plus importantes que sur les rivières canalisées; les différences de niveau sont plus grandes et les crues plus rapides, car le cours d'eau est souvent plus torrentiel.

Dans ces conditions, on a recouru, d'une façon pour ainsi dire elassique, à un type de barrages qui n'était pas habituel en navigation intérieure. C'est le barrage formé de piles en maçonneries isolées reliées par une passerelle supérieure et laissant entre elles des pertuis que l'on peut obturer à l'aide de grandes vannes à rouleaux et à contre-poids du système Stoney et que l'on peut manœuvrer à l'aide de moteurs électriques placés sur la passerelle supérieure, soit pour laisser passer les crues, soit pour faire des chasses.

Voici, par exemple, les caractéristiques du barrage sur le Rhin qui alimente les usines d'Augst et de Wyhlen, situées l'une sur la rive suisse, l'autre sur la rive badoise et qui se partagent le débit du Rhin par moitié.

Le barrage peut produire une retenue variant de 8 m. 40 en

eaux moyennes à 5 mètres en hautes eaux et son remous se fait sentir jusqu'à 6 km. 5 en amont.

Il comporte 11 piles laissant 10 pertuis de 17 m. 50 de largeur chacun où se meuvent des vannes de 18 m. 70 de longueur, de 9 mètres de hauteur et pouvant se relever de 10 m. 50. Le poids de chaque vanne est de 103 tonnes. En outre, 4 de ces vannes qui pèsent alors 115 tonnes sont munies de hausses mobiles que l'on peut déclancher à la main pour laisser passer les glaces. Ajoutons que le débit du Rhin est de 300 m3 à l'étiage, 1.000 m3 en eaux moyennes et 2.200 m3 en hautes eaux.

La puissance fournie est de 15.000 HP dans chaque usine.

Des barrages à vannes Stoney sont également prévus pour des usines en projet sur la Garonne moyenne entre Montréjeau et Toulouse.

D'autres fois on a réalisé un barrage fixe couronné simplement par des vannes de décharge pour laisser passer les crues.

Je citerai, dans cet ordre d'idées, le barrage de dimensions exceptionnelles de Keokuk sur le Mississipi.

Cet ouvrage, qui a une longueur de 1.300 mètres et réalise une chute moyenne d'environ 10 mètres, est formé par un mur parabolique en béton formant déversoir et surmonté de 119 vannes de décharge de 9 m. 15 de largeur chacune.

Le débit du Mississipi varie de 550 m3 en basses eaux à 10.500 m3 en crues. L'armement de l'usine est prévu pour 300 000 chevaux et le remous du barrage s'étend sur 260 km2, ce qui est de nature à constituer une réserve, une tranche d'eau de 0 m. 50 représentant 130 millions de mètres cubes.

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On a cherché aussi à obtenir des barrages réglant automatiquement le niveau d'amont. Ils ont fait l'objet de quelques applications parmi lesquelles je citerai une vanne automatique à clapet formant le barrage de l'usine hydraulique des forges d'Audincourt, à Audincourt.

Mais ces systèmes n'ont pas encore fait l'objet d'applications aussi étendues et aussi importantes que les barrages à vannes Stoney.

Quel qu'en soit le type, les barrages de prise d'eau sont tou

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jours des ouvrages importants et d'exécution difficile et coûteuse (le barrage d'Augst, terminé en 1912, a coûté 7.600.000 francs), mais l'installation des usines de ce type contre les barrages mêmes présente deux avantages résultant de la suppression du canal d'amenée l'un, d'ordre uniquement pécuniaire, résulte de l'économie provenant de la non exécution de cet ouvrage souvent très coûteux l'autre ressort de l'exploitation même ; un grand canal à découvert peut subir des accidents et des arrêts soit par éboulements, soit par infiltrations importantes qu'il faut réparer en arrêtant l'eau, soit par les glaces, et la disparition de ces causes d'accidents qui peuvent occasionner un chômage prolongé des usines a bien son importance. Aussi doit-on recommander, toutes les fois que la chute n'est pas très haute, de la réaliser par un barrage mobile du type précédent, si son remous ne doit pas avoir de conséquences inacceptables, et de placer l'usine au voisinage du barrage. Cette disposition pourra d'ailleurs se réaliser parfois même avec une chute haute quand celle-ci est constituée par une retenue formée par un barrage de grande hauteur, comme à l'usine de la Sioule que j'ai déjà citée et à l'usine projetée à Genissiat sur le Haut-Rhône.

III.

RÉDUCTION DE LA PUISSANCE EN HAUTES EAUX.
RENFORCEUR DE CHUTE CLEMENS HERSCHEL.

En dehors de l'inconvénient inhérent aux variations de débit, et qui existe pour toutes les usines non régularisées, il en est ici un autre ; la chute est variable et diminue quand les eaux sont hautes. Il en résulte une réduction souvent importante de la puis

sance.

J'ai indiqué qu'aux usines d'Augst et Wýhlen la chute pouvait varier de 8 mètres en basses eaux à 5 mètres en hautes eaux.

A l'usine de Jonage, près de Lyon, la chute varie dans les mêmes conditions de 12 à 10 mètres.

On sait, en effet, que, dans un cours d'eau, l'influence perturbatrice d'un barrage s'atténue à mesure que le débit augmente. Dans de pareilles usines, au moment des hautes eaux, l'eau

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