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fiée à sa personne, et que l'acte en soit insinué au greffe des insinuations ecclésiastiques du diocèse; après quoi, tout ce que le grand vicaire pourrait faire devient absolument nul. Cependant nous croyons que dans le for intérieur, dès qu'un grand vicaire a connais sance de sa révocation, il ne lui est pas per mis de s'ingérer en aucune manière dans les choses qui concernent le gouvernement du diocèse, quoique l'acte ne lui en ait pas encore été signifié dans la forme ordinaire; 2°que les commissions données aux officiaux et aux vice-gérants doivent aussi se faire par écrit, ainsi que celles de promoteur et de greffier de l'officialité, et être insinuées comme celles des grands vicaires, par la raison que l'official est le vicaire de l'évêque en ce qui regarde la juridiction contentieuse, et qu'il est de l'intérêt public qu'on connaisse l'institution et la destitution de ces sortes d'officiers. C'est en effet ce qui est porté par la même ordonnance de 1691.

-CAS III. Gaston a nommé pour son grand vicaire Thomas, homme très-savant, mais qui n'est point gradué, ou qui n'est que maître ès-arts. L'a-t-il pu validement ?

R. L'art, 45 de l'ordonnance de Blois dit : << Nul ne pourra être vicaire général ou official d'aucun archevêque ou évêque s'il n'est gradué et constitué en l'ordre de prêtrise.»> Ainsi le grand vicaire doit être gradué. Mais comme cet article ne détermine pas la nature du degré, et que la déclaration du 22 mars 1680 ne parle que des officiaux, en demandant le grade de licencié en droit canon ou en théologie, il semble qu'on peut dire que le plus simple grade suffit pour être vicaire général. Cependant Gibert, sur le nombre 18 du 13 chap. du 1er liv. de Cabassut, dit: Monere debuisset vicarium generalem in Gallia debere esse baccalaureum in theologia sacris ve canonibus; mais il n'en donne aucune preuve: sans doute qu'il s'est fondé sur l'usage. Voyez ce que j'ai dit au titre DOYEN.

CAS IV. L'archevêque d'Armach, fuyant d'Irlande pour éviter la persécution, s'est embarqué à Cork pour passer de là en quelque autre lieu de sûreté, après avoir établi Pallade pour son grand vicaire; mais des corsaires d'Alger ayant pris son vaisseau, l'ont fait esclave. La commission de Pallade finit-elle par cet accident?

R. Non; car le pouvoir d'un grand vicaire ne peut finir que par la révocation ou par la mort naturelle ou civile de l'évêque: or cet archevêque n'est pas mort civilement, quoiqu'il soit détenu par les corsaires turcs; car la servitude dont parlent les lois romaines et quelques canons n'est censée, fictione juris, une mort civile que dans le cas exprimé par le droit, comme l'est celui de la profession solennelle de religion. Or, le cas dont il s'agit ne se trouve exprimé dans aucun canon. 11 faut donc dire avec Fagnan, in cap. Per tuas 32, de Simonia, et Covarruvias, que cet évêque conserve toujours la juridiction; ou, ce qui revient au même, qu'elle peut toujours être exercée par celui à qui il l'avait confiée, comme le serait celle qu'un évêque

aurait donnée à ses grands vicaires avant que de tomber en démence : c'est la comparaison dè Fagnan.

Au fond rien ne paraît plus conforme à la justice et à la charité que de ne pas trou-bler un tel prélat dans la jouissance d'un droit aussi essentiellement attaché à sa dignité que l'est sa juridiction épiscopale, puisqu'on ne pourrait entreprendre de le faire sans lui causer un nouveau sujet d'affliction et de douleur contre l'esprit de l'Eg ise:Cum... nec afflicto afflictio sit addenda: imo potius ipsius miseriæ miserendum, ainsi que parle Innocent III, cap. 5, de Clerico ægrot. Aussi avons-nous vu de nos yeux, que nonobstant la détention et la fuite du cardinal de Retz, archevêque de Paris, ses grands vicaires continuèrent toujours, sans aucune opposition, à gouverner le diocèse jusqu'au jour qu'il donna au roi sa démission; à quoi l'on peut ajouter un second exemple plus récent, qui est celui de M. l'évêque de Québec, qui ayant été pris sur mer par les Anglais lorsqu'il allait résider en cette ville-là, fut mené et détenu prisonnier pendant plusieurs années en Angleterre, sans que ses grands vicaires cessassent d'exercer les fonctions de la juridiction épiscopale.

CAS V. Pouange, prêtre, conseiller-clerc au parlement de Bretagne, et docteur de Sorbonne, étant dans la réputation d'être un homme d'une grande intégrité et très-habile en ce qui regarde les affaires ecclésiastiques, l'évêque de Saint-Pol de Léon l'a nommé son grand vicaire. Ne peut-il pas exercer les fonctions de cette dignité ?

R. Non; parce que l'édit de Blois, art. 12, défend expressément, non-seulement à tous conseillers, mais encore à tous les autres of ficiers des parlements du royaume, du grand conseil, de la chambre des comptes, de la cour des aides, et généralement à tous autres officiers, même des cours subalternes, d'accepter les charges de vicaires généraux des évêques, tant à l'égard de leurs évêchés que des abbayes ou prieurés dont ces prélats seraient revêtus; et c'est ce qui s'est observé de tout temps dans le royaume, comme on le voit par un ancien arrêt du parlement de Paris, rapporté par du Luc et par plusieurs autres. Févret raconte la grande difficulté que fit le parlement de Dijon, le 4 juillet 1558, d'admettre la dispense en forme de lettres patentes que le roi avait accordée à M. Berbis, l'un des conseillers de ce parlement, par laquelle Sa Majesté lui permettait d'accepter la charge de grand vicaire du cardinal de Givri, évêque de Langres. Sa raison était, dit Févret, « que cela divertirait les officiers de rendre la justice avec assiduité, étant occupés aux affaires de leur vicariat, et par ainsi que le service du roi serait délaissé; qu'au lieu d'être juges ils deviendraient solliciteurs des affaires des prélats... que les contentions de juridictions entre les cours ecclésiastiques et séculières étaient les plus fréquents différends qui se présentassent à juger, et qu'il serait péri!feux que les conseillers qui exercent les vi

tres fonctions de sa dignité, pendant que cet évêque était allé faire un voyage à Léopold, où il est mort huit jours après y être arrivé. On demande si tout ce que Bernardin a fait depuis la mort de son prélat, qu'il a ignorée pendant plus d'un mois, est valide et canonique?

cariats opinassent en ces procès, étant as-néfices, donné des dimissoires et fait d'ausuré qu'ils favoriseraient plutôt l'une des juridictions que l'autre. » Enfin, l'entérinement de ces lettres patentes ne passa qu'à condition que ledit sieur Berbis ne néglige rait point le service du roi ni les affaires de la cour à raison de son vicariat; qu'il n'assisterait point au jugement des causes du cardinal, et qu'il ne les solliciterait point; qu'enfin, il ne ferait aucune chose qui pût être contraire à la dignité de conseiller.

Il est bon d'observer, 1° que, suivant l'édit de 1554, fait par Henri II à Villers-Cotterets, tous les grands vicaires des évêques doivent être Français et régnicoles; 2° qu'il en est de même des vicaires généraux, que les religieux, généraux d'ordres étrangers, établissent en France; car s'ils en établis saient qui fussent étrangers, il y aurait abus, comme le jugea le parlement de Paris, le 13 juin 1674, contre le P. Cavalli, général des jacobins, en faveur du P. Nicolas Bourin, Français de nation, que ce général avait destitué de sa charge de vicaire général pour lui substituer un étranger; 3° que ces lettres de vicariats doivent être expédiées par l'évêque, scellées de son sceau et signées par son secrétaire et deux témoins, et ensuite insinuées au greffe du siége de l'évêché, suivant l'édit de 1513, art. 10; 4° que le vicariat général doit être donné en ces termes généraux : In spiritualibus et temporalibus, et non autrement; 5° qu'un vicaire général ne peut conférer aucun bénéfice à l'évêque ni à soi-même, et qu'il y aurait abus, quand même il le ferait avec dispense du pape; vu, comme le dit encore Févret, que les collateurs peu scrupuleux se feraient donner par celte voie et retiendraient tous les bons bénéfices qui sont à leur collation; 6° que si le grand vicaire a conféré un bénéfice, même à un sujet incapable, soit par erreur ou autrement, il ne peut plus conférer le même bénéfice à un autre sous prétexte de réparer sa faute, mais doit avoir recours à l'évêque même, au droit de collation duquel il n'a pu préjudicier; 7° que dans une province où la collation est alternative entre le pape et l'évêque, comme en Bretagne, le grand vicaire ne peut conférer en la place de l'évêque, à moins que, 1° les lettres de vicariat général ne portent expressément ce pouvoir; 2 et que l'évêque ne soit actuellement résidant, parce qu'il n'a le droit d'alternative que précisément à raison de sa résidence. C'est pourquoi la collation qu'il donnerait lui-même serait abusive et nulle s'il la donnait étant hors de son diocèse, comme l'observe Févret, liv. m, ch. 5, n. 20. -Pourquoi un évêque qui ne s'absente que pour une cause très-légitime, par exemple pour assister à une assemblée générale du clergé, perdrait-il son privilége d'alternative? La remarque de Févret n'est donc pas juste, et celui qui a fait des notes sur lui dit qu'en Bretagne on n'a garde de suivre ces vaines délicatesses, p. 302.

CAS VI. Bernardin, vicaire général de l'évêque de Cracovie, a conféré plusieurs bé

R. Il est vrai que l'évêque et son grand vicaire ne sont censés dans le droit qu'une seule personne, et qu'ils n'ont qu'une seule et même juridiction. Il est vrai, par conséquent, que les pouvoirs du grand vicaire finissent par la mort de l'évêque. De sorte qu'il ne peut pas, en ce cas, continuer de connaître d'une affaire qu'il aurait commencée auparavant; en quoi il diffère d'un juge délégué, dont la juridiction n'est pas éteinte par la mort de celui qui l'a commis, à l'égard de l'affaire dont il avait à connal tre avant le décès de son commettant, ainsi que le déclare Urbain III, cap. 20, de Officio et Potest. jud. deleg. Il faut cependant dire que tout ce qu'a fait Bernardin doit être réputé valide, sans même excepter la collation des bénéfices et les dimissoires qu'il a accordés, pourvu que l'évêque lui eût communiqué ces deux sortes de pouvoirs par une concession spéciale (car un grand vicaire ne les a pas de droit). La raison est que la mort de l'évêque n'étant pas encore connue dans le pays, et au contraire le public le croyant encore en vie, Bernardin passait communément pour grand vicaire. C'est pourquoi tous les actes de juridiction qu'il a faits pendant ce temps-là sont canoniques et incontestables; parce que l'Eglise est censée suppléer dans ces sortes d'occasions à tout ce qui n'est que de droit humain, nonseulement pour conserver le repos des consciences, mais encore pour obvier aux contestations et pour remédier aux scandales qui autrement arriveraient infailliblement. Ce fut par cette raison que, quoiqu'un esclave ne pût être jugé chez les Romains, tout ce que fit Barbarius, qui devint préteur sans qu'on connût la servilité de sa condition, fut ratifié après qu'on l'eut connue. Voyez la loi Barbarius, ff. de Officio prætorum, lib. 1, tit. 24: Quid dicemus? dit-elle, quæ edixit, quæ decrevit, Barbarius, nullius fore momenti? An fore propter utilitatem eorum qui apud eum egerunt... et verum puto, nihil eorum reprobari: hoc enim humanius est. Ajoutez que, comme le dit la Glose sur ce chapitre : Circa factum error... communis facit jus.

CAS VII. Aristophane, vieaire général de Spire, a admis une permutation faite par deux bénéficiers du diocèse, ou bien a reçu une démission qu'un curé lui a faite de sa cure. L'a-t-il pu faire légitimement, quoiqu'il ne soit pas autorisé spécialement par l'évêque à conférer les bénéfices?

R. Il ne l'a pu; car il faut avoir le même pouvoir pour recevoir une démission ou pour admettre une permutation que pour conférer un bénéfice: Ejusdem namque potestatis est exuere, cujus est investire, dit Cabassutius, lib. 1, cap. 13, n. 6, où il ajoute que d'ail

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leurs une permutation ne se peut faire sans une double collation qu'il n'est pas au pouvoir d'un grand vicaire de donner, à moins que l'évêque ne le lui ait accordé expressément. Ce canoniste confirme son sentiment par cette règle du droit canonique: Omnis res per quascumque causas nascitur, per easdem dissolvitur: à laquelle est conforme cette autre loi du droit romain: Nihil tam naturale est, quam eo genere quidque dissolvere, quo colligatum est. Reg. 35, ff. de divers. Reg. juris antiqui.

Il est bon d'observer, à l'occasion de la présente difficulté, que, selon notre jurisprudence, le vicaire général d'un chapitre, sede vacante, peut conférer aux gradués, même simples, les bénéfices qu'ils requièrent, suivant l'arrêt du parlement de Toulouse, du 8 avril 1604, rapporté par Laurent Jovet en sa Bibliothèque des Arrêts, où il cite aussi Rebuffe pour le même senti

ment.

CAS VIII. Archilochus, vicaire général d'un évêque, a conféré à Gabriel une cure vacante, en vertu du pouvoir spécial qu'il a de conférer. L'évêque, qui n'en savait rien, a conféré le même bénéfice à Bertrand. Laquelle de ces deux collations est valide et légitime?

R. La co'lation que l'évêque a accordée à Bertrand doit prévaloir à celle que son grand vicaire a donnée à Gabriel, propter conferentis ampliorem prærogativam, ainsi que parle Boniface VIII, cap. 31, de Prebendis, etc., in 6. C'est ce qu'enseigne Rebuffe, quand il dit : Collatio facta extra dicecesim ab episcopo, valet; licet a vicario in diœcesi eadem die fiat; ce sont ses termes. La première raison qu'il en apporte, et qu'il a prise de Boniface VIII, que nous venons de citer, est que le pouvoir de l'évêque est plus noble que celui de son grand vicaire, quia est facta a majori; et ideo prævalet. La seconde est que l'évêque ayant conféré le bénéfice, est censé avoir révoqué à cet égard le pouvoir de son grand vicaire, et quia censetur revocatus vicarius quoad illam collationem: de la même manière qu'un procureur, nommé pour agir dans une affaire, est censé révoqué, quand celui qui l'a commis la termine lui-même, suivant ces paroles du même pape, cap. 3, de Procurat. Tractando ipsam (causam) eum (procuratorem) revocare censeris; et qu'un juge subdélégué l'est aussi, lorsque celui qui l'a délégué agit lui-même dans la cause pour le jugement de laquelle il l'avait nommé, ainsi qu'il est dit cap. 68, de Appellat. C'est sur ces principes que le même Boniface VIII déclare cap. 14, de Præbendis, que s'il donne une prébende, sa collation doit prévaloir à celle que son légat aurait accordée à un autre: Penes nos tamen, dit-il, nihilominus remansit major, licet eadem, potestas etiam in prædictis; propter quod nostra qui eamdem præoccupavimus potestatem potior debet esse conditio; præsertim quod secundum canonicas sanctiones per speciem generi derogatur; quanquam de genere in derogante specie men

tio nulla fiat. Or, de là il suit, par identité de raison, que la collation de l'évêque doit prévaloir à celle de son vicaire général; et c'est en effet ainsi que l'a jugé le parlement de Paris, par son arrêt du 19 août 1564, rapporté par Chopin. Rebuffe observe né nmoins que, si le pourvu par le grand vicaire avait déjà pris possession du bénéfice avant que l'évêque l'eût conféré, il serait préférable à celui qui n'aurait encore que la simple collation de l'évêque, parce qu'en ce cas cette règle de droit à lieu. In pari. causa potior est conditio possidentis. Voyez Cabassulius, lib. 1, c. 13, n. 10, où il suit Rebuffe pas à pas.

Si plusieurs grands vicaires, qui auraient le même pouvoir de conférer les benéfices, avaient nommé au même differents sujets, la collation de celui qui aurait été pourvu le premier l'emporterait sur tout autre. Si tous avaient nommé en même temps, elles seraient nulles, et ce serait à l'évêque à nommer.

-CAS IX. Médard, grand vicaire d'un évêque, a conferé une cure à un sujet qui en était indigne. L'évêque peut-il la coniérer à un autre? Il semble que non; puisqu'un ecclésiastique ne peut varier, et que l'évêque et son grand vicaire ne sont qu'une même personne, fictione juris.

R. Plusieurs canonistes, dont M. de Héricourt ne s'est pas éloigné, permettent, en ce cas, à l'évêque de conférer le même bénéfice dans les six mois de la vacance; mais celle décision n'est pas sans difficulté, et Duperrai prétend qu'elle est fausse, et qu'alors la collation de l'évêque est nulle; c'est-à-dire qu'on plaidera et qu'on pourra perdre ou gagner. Voyez les Mémoires du Clergé, t. XII, pag. 1158.

ČAS X. Archippus, vicaire général, ayant fait quelque chose qui a déplu à son évêque, celui-ci l'a révoqué par un acte en forme. Sur quoi l'on demande si les actes de juridiction qu'il a exercés avant que d'avoir été informé de sa révocation, sont canoniques et valides?

R. Les canonistes sont partagés sur celle question : les uns, comme Guimier, prétendent que si un grand vicaire a été révoqué pour quelque crime dont il soit coupable, les actes de juridiction qu'il exerce dans le cas proposé sont nuls, mais qu'autrement ils sont valides. Mais, comme cette distinction ne se trouve pas fondée dans le droit cauonique, les autres canonistes la rejettent et estiment indistinctement que de tels actes sont valides dans un pareil cas, soit que le grand vicaire soit coupable ou innocent. Rebuffe est de ce nombre, et il cite pour son sentiment plusieurs autres jurisconsultes célèbres, comme Calderinus, que Joannes Andræas adopta pour son fils vers le milieu du quatorzième siècle, Décius et Félinus, évêques de Lucques, et un grand nombre d'autres célèbres canonistes, auxquels nous ajoutons Cabassutius, ibid., n. 15, Panorme et autres, dont l'opinion a été confirmée par le parlement de Paris, le 18 juillet 1514.

Toutes ces autorités nous persuadent que la distinction que Guimier a inventée n'est capable que de causer des scrupules dans les consciences et de faire naître des contestations au sujet de la validité des actes de juridiction, qu'on révoquerait souvent en doute par l'incertitude où l'on serait presque toujours de la cause d'une telle révocation.

CAS XI. Némésius, grand vicaire de Nice, s'étant brouillé avec son évêque, ce prélat lui a déclaré, sans témoins, qu'il le révoquait; mais Némésius n'a pas laissé depuis d'approuver quelques confesseurs et d'exercer d'autres actes de sa juridiction. On demande sur cela si tout ce qu'il a fait depuis sa destitution est valide.

R. Il est constant que les actes de juridic. tion que Némésius a exercés depuis sa destitution secrète, et déclarée seulement de vive voix par l'évêque, sont valides et canoniques. La raison est que cette destitution étant ignorée du public, elle ne peut éteindre sa juridiction, puisqu'elle n'empêche pas qu'il ne passe communément et dans l'opinion du public pour grand vicaire légitime. C'est pourquoi le droit autorise toujours en ce cas tous les actes qu'exerce un tel officier, jusqu'à ce que la révocation de ses pouvoirs soit notoire, suivant cette maxime que nous avons déjà citée ailleurs: Circa factum error... communis facit jus. Il faut donc nécessairement que la destitution de Némésius soit faite dans les formes et rendue publique, comme l'a été son institution, avant que les actes qu'il a exercés puissent être réputés illégitimes, c'est-à-dire qu'il est nécessaire que cette destitution soit faite par écrit, et que l'acte en soit insinué au greffe des insinuations du diocèse, ainsi qu'il est porté par les art. 21 et 22 de l'édit de 1691, à l'égard non-seulement des grands vicaires, mais encore des officiaux, vice-gérants el promoteurs. Cette décision est de M. du Casse, part. 1, ch. 2, n. 4.

L'auteur a remarqué, dans sa seconde décision, qu'il n'est pas permis dans le for intérieur à un grand vicaire qui connaît sa révocation, de continuer à user de ses pouvoirs. M. Durand, dans son Dictionnaire de Droit canonique, dit la même chose, et il cite le chapitre Romana, de Officio Vicarii, in 6. CAS XII. Marcien, évêque, a été nommément excommunié ou interdit. Lucius,

qu'il avait établi son grand vicaire, peut-il continuer à en faire les fonctions?

R. Non; dès que la personne de l'un est par fiction de droit la personne de l'autre, l'évêque ne peut perdre sa juridiction sans que son vicaire perde la sienne. Mais si l'évêque est rétabli, le grand vicaire l'est en même temps, sans avoir besoin d'une nouvelle commission. Voyez le même auteur, ibid., pag. 836.

CAS XIII. Pantaleon, ayant été nommé vicaire général de Sisteron par Adolphe, qui avait été nommé à cet évêché par le roi, et qui en avait déjà le brevet, a approuvé plusieurs confesseurs et exercé d'autres actes de la juridiction volontaire. Ces actes sontils valides, quoiqu'Adolphe n'ait pas encore pris possession, et qu'il n'ait pas même encore obtenu ses bulles?

R. Ces actes sont nuls; car celui qui est nommé à un évêché, et qui n'a encore que le brevet du roi, ne peut sans abus établir un grand vicaire pour le gouvernement du spirituel du diocèse, puisqu'il n'a pas luimême pouvoir d'exercer aucune juridiction à cet égard, avant qu'il ait obtenu ses bullcs ou provisions du pape, conformément au concordat qui est en usage en France. Il n'y a donc alors que le seul grand vicaire et l'official du chapitre, qui puissent exercer la juridiction spirituelle, volontaire et contentieuse, sede vacante; mais, dès qu'il a obtenu ses bulles, il peut, de plein droit, même avant sa prise de possession, exercer la juridiction épiscopale, et, par conséquent, nommer un ou plusieurs grands vicaires pour l'exercer en sa place; ce que nous disons néanmoins, sans prétendre préjudicier au droit que certains chapitres seraient en possession d'exercer au contraire jusqu'à la prise de possession de 1 évêque, comme il se pratique en France.

- La maxime de M. de Héricourt, chap. des Grands Vicaires, n. 9, est que « le nouvel évêque ne pouvant exercer la juridiction ecclésiastique, qu'après avoir obtenu ses bulles et pris possession de son évêché, il ne peut nommer de grands vicaires que lorsqu'il a satisfait à cette formalité. » Mais, poursuit-il, «< il n'est point nécessaire qu'il soit sacré avant que d'expédier la commission d'un grand vicaire. » La Combe et M. Durand, pag. 834, croient qu'il vaut mieux s'en tenir à ce sentiment qu'à celui de Févret, de Duperrai et autres qui pensent le contraire.

- VICAIRE DE PAROISSE.

Les vicaires de paroisse, qu'on nomme secondaires en Provence, sont des prêtres choisis spécialement pour aider les curés dans les fonctions de leur ministère.

Un vicaire doit être pieux, retiré, ennemi du jeu, surtout avec les séculiers, et trèsstudieax; sur quoi il peut consulter la petite bibliothèque que nous avons indiquée au mot THÉOLOGIEN. Un vicaire ne devrait jamais être établi que par des lettres qui lui marquassent ses pouvoirs.

L'évêque peut ôter à un curé un vicaire dont il est content, et, faute par lui de se retirer, l'interdire; parce qu'il tient tous ses pouvoirs de l'évêque, et que c lui-ci peut les limiter pour le temps et pour le lieu, etc. Ajoutez qu'il peut arriver qu'un vicaire ne plaise au curé que parce qu'il ne vaut pas mieux que lui.

Il y a plus de difficulté à décider si l'évêque peut donner au curé un vicaire malgré lui, DICTIONNAIRE DE CAS DE CONSCIENCE II.

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invito parocho. M. la Combe, v. Curé, croit que non, en convenant toutefois que l'évêque peut ne point approuver les sujets que ie curé lui pré entera; ce qui rend le choix de ce dernier bien peu libre. Je ne prétends pas traiter à fond une ques ion aussi étendue. On peut voir dans les Mémoires du feu évêque de Chartres (M. de Mérinville) les raisons du sentiment contraire. Ce prélat disait que le curé (soit qu'il soit ou ne soit pas de droit divin) n'a qu'une autorité communiquée et communique pour lui seul, dont il ne saurait par conséquent disposer, et qu'il ne peut communiquer. Il s'appuyait sur ces paroles: Attendite vobis et universo gregi, etc. Ce texte regarde donc toutes les âmes de chaque diocèse, et les curés comme les autres, puisqu'ils sont membres du diocèse comme les autres. Et c'est en ce sens que M. Ta'on a adopté ce passage dans son plaidoyer de 1664. Le curé n'est pas chef, puisqu'à proprement parler le diocèse ne fait qu'une Eglise, dont le curé est un des membres. Il n'a de pouvoirs que pour partager le ministère de l'évêque, qui les donne cumulative et non privative. C'est pour cela qu'il peut prêcher et confesser dans toutes les paroisses de son diocèse, et commettre, invito parocho, des prêtres pour la confession et pour le mariage de quelques paroissiens, sans pouvoir néanmoins dépouiller les curés de toutes leurs fonctions, à moins qu'il ne les destitue dans toutes les formes. Ce pouvoir général des évêques est bien enseigné par saint Thomas, nodl. 12, art. 19, sect. 30, où il dit: Alii dicunt, quod nullus potest, etiam auctoritate superio is prælati, absolvere subditum inferioris prælati contra voluntatem presbyteri parochialis; hoc eliam est erroneum, quia... episcopus habet jurisdictionem in omnes: unde episcopus potest omnium confessiones audire, contra voluntatem presbyteri parochialis, et similiter etiam ille cui episcopus committit. Il est vrai qu'un évêque met communément la clause de consensu parochi; mais c'est pour observer le non dominantes in cleris du prince des apôtres; ce qui n'empêche pas qu'il ne puisse quelquefois être obligé d'user de toute l'étendue de ses droits.

M. de Mérinville ajoutait que, dans la cause du curé de Villenauxe, en 1722, M. l'évêque de Troyes, qui était partie, rapportait des certificats de l'archevêque de Sens, des évêques d'Auxerre, de Langres, de Metz, de Toul, d'Orléans, qui attestaient cette discipline. L'assemblée du clergé de 1625 envoya à tous les prélats du royaume, du consentement du roi, plusieurs règlements qui ont été confirmés en 1635, et renouvelés en 1645, dont l'art. 18 statue que les prêtres envoyés dans les paroisses pour y confesser, prendront le consentement des curés, si l'évêque où son grand vicare, pour certaines considérations, n'en ordonnent autrement.

Enfin le même évêque de Chartres faisait valoir un arrêt du 14 juillet 1700, par lequel le parlement déclara n'y avoir abus dans la confirmation d'un prêtre renvoyé par le sieur Coignet, curé de Saint-Roch, et rétabli par M. le cardinal de Noailles, etiam renitente parocho. M. Daguesseau, alors avocat général, donna ses conclusions en faveur dudit seigneur archevêque de Paris, suivant les principes de saint Thomas cités ci-dessus, et cependant le sieur Coignet n'était pas alors au point de discrédit où on l'a vu depuis. La même chose fut jugée le 20 mars 1722, contre le curé de Villenauxe, en faveur de M. l'évêque de Troyes, après sept audiences: sauf au curé à se retirer par-devant l'évêque de Troyes, pour lui faire les représentations nécessaires sur le choix de son vicaire, et par l'évêque de Troyes y avoir tel égard qu'il jugera à propos. Mais ce point CAS I. Pomponius, curé, étant venu à mourir, Léonard, son vicaire, a continué d'exercer ses fonctions ordinaires, en assistant à des mariages et en faisant les mêmes choses qu'il faisait avant la mort du curé. Avait-il ce pouvoir?

R. Quoique nous ayons dit ailleurs que le pouvoir d'un pénitencier et de tout autre confesseur subsiste après la mort de l'évêque, jusqu'à ce que son successeur l'ait expressément révoqué, on ne peut pas conclure de là que le pouvoir d'un vicaire subsiste à l'égard de toutes les fonctions pastorales. La raison est que, comme le grand vicaire d'un évêque n'est censé être, fictione juris, qu'une seule et même personne avec l'évêque, parce qu'ils n'ont tous deux qu'une seule et même juridiction volontaire, de même le vicaire d'un curé n'est réputé qu'une même personne avec le curé. C'est pourquoi, comme le pouvoir du grand vicaire cesse absolument par la mort de l'évêque, de même le pouvoir du vicaire cesse pareillement par la mort du curé. Ainsi Léonard n'a pu assister à des mariages après la mort de Pomponius, puisque le concile de Trente n'a attribué ce pouvoir qu'à la seule

demanderait à être traité avec plus d'étendue. personne du propre prêtre, c'est-à-dire du curé, et qu'on le suppose mcrt, et par conséquent hors d'état de pouvoir déléguer Léonard. Mais Léonard a pu continuer à entendre les confessions; car l'approbation de l'évêque subsiste, quoique la commission que ce vicaire avait reçue du curé soil finie par la mort.

Ainsi, si le curé meurt le lundi gras au soir, et qu'il y ait trois ou quatre mariages préparés pour le lendemain, il faudra, si la paroisse est éloignée de douze ou quinze lieues de la ville épiscopale, attendre jusqu'à Pâques. Cela ne paraît ni prouvé, ni bien raisonnable. Ains au contraire.

CAS II. Léonard, vicaire d'un hameau qui dépend de la cure de Saint-Amand, et qui en est distant d'une lieue, étant devenu trèsinfirme, a commis un prêtre de ses parents pour exercer en sa place les fonctions euriales dont il était chargé, sans en avoir parlé au curé du lieu. L'a-t-il pu faire valide

ment?

R. Un vicaire n'a pas pouvoir de commettre un autre prêtre pour exercer toutes ses fonctions en général, selon cette maxime de droit: Delegatus delegare non potest; mais il

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