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serait nulle, comme l'enseigne saint Antonin, part. 11, tit. 10, ch. 6, § 4. Voyez PARJURE, cas Laurent.

CAS XI. Lucilius a promis avec serment à Justin, qu'il ferait une chose avant le premier jour de mars. Il n'a pu la faire alors; mais il le pouvait trois mois après. Y était-il tenu, quoique le terme fût expiré?

R. Il faut raisonner du serment comme du vœu; l'un et l'autre obligent quelquefois après le terme expiré, quelquefois non : et c'est ce qu'on ne peut définir que par l'intention de celui qui a fait un serment ou un væu. Si le terme qu'il a marqué, n'a pas été pour finir son obligation, mais pour n'en pas différer l'accomplissement, cette même obligation renaît avec le pouvoir de la remplir. Mais s'il a eu intention de n'être plus obligé a rien, en cas qu'il ne pût faire telle chose en tel temps, son obligation expire avec le temps. C'est donc à Lucilius à voir ce qu'il a eu dans l'esprit, quand il a fait sa promesse. Que s'il doute de sa propre intention, il doit suivre le parti le plus sûr pour la conscience, qui est d'accomplir, même dans un autre temps, ce qu'il avait promis de faire dans un temps déterminé. Au reste l'obligation d'un jurement peut cesser par la condonation qu'en fait celui à qui on s'est engagé. C'est pourquoi, si Justin remettait à Lucilius l'obligation qu'il a contractée par son serment de faire la chose dont il s'agit avant le premier jour de mars, il n'y serait plus obligé.

CAS XII. Pascal, officier, a fait vou d'aller en pèlerinage à Lorette, et a confirmé son vœu par serment. Le roi qui a besoin de son service, lui a défendu d'y aller. Peut-il obéir au roi dans cette occasion, sans se rendre coupable de parjure?

R. Le vœu n'a pas été institué pour être un engagement d'iniquité. Comme donc l'exécution du væn el du serment qu'a fait Pascal, devient illicite par la défense de son souverain, il n'est pas obligé de l'accomplir, jusqu'à ce qu'il en ait obtenu la permission, et même il ferait mal, s'il l'accomplissait contre la volonté du prince. C'est la décision de saint Thomas, qui dit que l'obligation du serment cesse, lorsque sa matière devient impossible ou illicite, comme il arrive dans le cas proposé, 2-2, q. 89, a. 7.

CAS XIII. Epimenide, prêtre savant et pieux, étant persuadé qu'il n'est pas digne d'être élevé à aucune supériorité, a fait serment de n'en jamais accepter aucune. A-t-il pu faire ce serment, et peut-il ou doitil l'exécuter?

R. Il a pu faire serment de ne briguer aucune dignité, et même de faire de justes efforts pour qu'on ne l'en chargeât pas. Mais il n'a pas pu faire serment de ne pas obéir à ses supérieurs, en cas qu'ils lui enjoign'ssent d'en accepter quelqu'une. Un tel serment étant de re illicita, est contraire à une juste subordination. Voyez saint Thomas, in 3, dist. 39.

CAS XIV. Maximin a juré qu'il fera une cerlaine chose, qui est en partie bonne et en

partie mauvaise, ou bien qui est douteuse. Que doit-il faire?

R. Comme l'on est tenu à garder le serment qu'on a fait, quand la chose jurée est bonne, et de ne la pas accomplir quand elle est mauvaise, de même lorsqu'elle est en partie bonne et en partie mauvaise, on est obligé de l'exécuter en ce qui est bon, et de ne le pas faire en ce qui est mauvais, pourvu que l'un puisse être séparé de l'autre. Mais quand il y a du doute, il faut avoir recours au supérieur pour en être dispensé, ou pour faire ce qu'il ordonnera. Quandoque aliquid sub juramento promittitur, de quo dubium est, utrum sit licitum vel illicitum, aut simpliciter, aut in aliquo casu, et in hoc potest quilibet episcopus dispensare. Saint Thomas. 2-2, 8, a. 9, ad 3.

CAS XV. Memnas a rencontré des voleurs qui l'ont obligé de leur promellre avec serment, qu'il leur apporterait dans quatre jours 30 pistoles en ter endroit. Est-il obligé à tenir cette promesse ?

R. Cette promesse n'oblige pas par ellemême, puisqu'elle est extorquée par une injuste violence; mais elle oblige à cause du serment qui y a été joint, parce qu'il n'est jamais permis de prendre Dieu à témoin du faux: c'est pour cela que, selon Innocent III, cap. 8, de Jurej. 1. 11, tit. 24. Non est tulum, quemlibet contra juramentum suum venire, nisi tale sit quod servatum vergat in interitum salutis æternæ. Cependant Memnas peut obtenir dispense de son serment, et même demander en justice la restitution de ce qu'il a donné.

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CAS XVI. Mais que dire si Memnas avait fait serment de ne demander ni dispense de son premier serment, ni restitution en justice?

R. On est partagé sur ce point. J'ai dit dans le Traité des Contrats, part. 1, ch. 4. pag. 533, qu'il faudrait accomplir ces nouveaux serments, parce qu'ils sont de re licita, puisqu'autrement un homme ne pourrait les faire pour sauver sa vie. Il n'en serait pas ainsi du serment de ne pas dénoncer le coupable; parce que dit saint Thomas, dont Pontas a tronqué le texte, tale juramentum vergeret in deteriorem exitum, 2-2, q. 89, a. 4; ce qui peut être vrai ou faux selon les différentes circonstances. Ceux qui le supposeront toujours vrai, doivent dire que je ne puis, pour éviter la mort, jurer à un voleur qui m'arrache une pistole, que je ne le dénoncerai jamais aux juges.

CAS XVII. Mutius, juge, a obligé Claude, âgé seulement de douze ans, à jurer comme témoin dans une cause importante. L'a-t-il pu faire, et le serment de cet enfant estil valide?

R. Les enfants qui n'ont pas encore l'âge de puberté, n'ont pas l'usage de la raison assez parfait pour connaître l'obligation qu'ont les hommes de respecter, comme ils le doivent, le saint nom de Dieu, dont ils invoquent le témoignage en jurant; et ainsi on ne doit ni les contraindre ni même les admettre à faire serment. Mutius n'a donc

pu, ni dû faire prêter serment à Claude, quoique ce fût dans une affaire importante, et il ne lui est pas permis de fonder le jugement qu'il doit prononcer sur le témoignage de cet enfant, parce que son serment doit être considéré comme nul.

J'aimerais mieux dire avec Sylvius : Quod pueri, etsi ante annos ætatis quatuorde cim non possint compelli ad jurandum; si tamen jurare voluerint, et sufficientem habeant discretionem, non sunt repellendi a juramento: ce qui suppose que leur serment n'est pas absolument nul. Sylvius in 2-2, q. 89, a. 10, p. 664.

CAS XVIII. Guéric, chrétien, étant à Pékin, a prêté 100 liv. à un païen, qui les lui a déniées dans la suite. On demande si l'ayant appelé en justice, il peut exiger de lui qu'il prête serment, sachant bien qu'il jurera par ses faux dieux.

R. Guéric ne peut pas engager ce païen à jurer par ses idoles; mais si le juge exige qu'il prête serment, ou qu'il s'y offre de luimême, Guéric peut y consentir. Ce n'est pas là faire un mal, c'est le permettre comme fait Dieu, et s'en servir. Cette décision est de saint Augustin, Epist. 47, alias 154, où il la prouve par quelques exemples de l'Ecriture sainte (qui, selon Suarez, ne sont guère concluants ). C'est aussi celle de saint Antonin, et elle est communément reçue.

CAS XIX. Jérôme, chanoine de Noli, a fait serment à sa réception de garder tous les statuts du chapitre. Il a reconnu ensuite qu'il y en a un qui, quoique légitime, n'est observé par aucun chanoine depuis plus d'un siècle. Pèche-t-il contre son serment en ne l'observant pas à l'exemple des autres?

R. Si la transgression de ce statut ne renferme rien de contraire au droit naturel ou divin, Jérôme ne pèche pas en ne l'observant point; parce que la loi la plus solennelle peut cesser d'obliger par un usage contraire, lorsqu'il est général; et même, comme le dit Justinien, une telle coutume, lorsqu'elle ne renferme rien de vicieux, tient lieu d'une véritable loi: Diuturni mores consensu utentium approbati, legem imitantur.

CAS XX. Avez-vous pris Dieu à témoin d'une chose que vous saviez ou que vous vous doutiez n'être pas vraie, disant: Je jure, je fais serment, je le dis devant Dieu, Dieu le sait, ou en levant la main au ciel, en la mettant sur les saints Evangiles? Parjure, péché mortel, s'il y a pleine advertance et qu'on ait l'intention de prendre Dieu à témoin. Le péché serait plus grave si, interrogé par un juge compétent, vous affirmiez ou niiez avec serment autre chose que ce que

Vous savez et que ce que vous voyez. Les lois de tous les peuples ont puni le parjure avec sévérité; chez les Romains, il était déclaré infâme; le code civil des Français décerne contre le parjure la peine des travaux forcés. Dieu le punit souvent dès ce monde même.

CAS XXI. Avez-vous négligé ou refusé de faire une chose bonne que vous aviez juré de faire? Il n'y a pas de parjure, mais un péché mortel, si la chose promise est importante. N'avez-vous pas promis avec serment quelque chose, ayant l'intention de ne pas tenir votre promesse ou sachant que Vous ne pouviez pas faire ce que vous promettiez? Parjure encore et péché mortel. Le serment, quand même il a pour objet des matières civiles, par exemple, la fidélité à une charte, est toujours un acte de religion; il n'y a pas de serment civil, ainsi que l'ont imaginé certaines personnes qui voulaient calmer leur conscience et conserver leur place.

CAS XXII. Lorsque vous avez prêté serment, ne vous êtes-vous pas servi de paroles équivoques ou de restriction mentale, au lieu de jurer selon l'intention de celui qui exigeait le serment? Parjure. Vous êtesvous engagé par serment à faire une chose mauvaise? vous avez péché mortellement, si la chose est grièvement mauvaise; par exemple, de vous venger, de ne point pardonner; en l'accomplissant vous ne pécheriez pas moins contre la religion, de plus vous pécheriez contre la charité.

CAS XXIII. Avez-vous juré avec exécration, ou imprécation, disant par exemple: Que Dieu me punisse, si je ne dis pas la vérité; que je ne voie jamais Dieu. Péché mortel et parjure, si la chose affirmée est fausse et si l'on n'est point sûr qu'elle soit vraie. Le péché ne serait que véniel, si l'on était moralement sûr que la chose affirmée fût vraie, ou si l'on ne prononçait ces paroles exécratoires que par manière de parler, sans scandale et sans grande colère.

CAS XXIV. Les paroles suivantes: Dieu sait si je dis la vérité... Dieu voit la chose.... Dieu connaît ma pensée.... n'étant proférées que pour mieux assurer qu'on ne ment pas, ne renferment point un serment, à moins qu'on n'ait l'intention d'invoquer le témoignage de Dieu.

CAS XXV. Avez-vous engagé quelqu'un à faire un faux serment ? Sachant que quelqu'un ferait un faux serment, l'avez-vous exigé sans raison? Il y aurait en cela péché grave, si la bonne foi n'excusait.

Voyez DISPENSe de serment, Parjure.

JURIDICTION.

On appelle juridiction la puissance légitime qu'a un supérieur de gouverner ceux qui sont soumis à son autorité, soit en réglant selon l'équité ce qui les regarde, soit en faisant des lois, qu'il estime nécessaires pour les empêcher de mal faire ou pour punir ceux qui y contreviennent et pour les contenir tous dans leur devoir et dans la paix. Il y a deux sortes de juridictions, l'ecclésiastique et la séculière. La juridiction ecclésiastique dont il s'agit principalement ici, est ou volontaire ou contentieuse. La première qu'on appelle aussi gracreuse, s'exerce sans procédure ni formes judiciaires. La seconde s'exerce en procédant judiciairement et selon toutes les formalités prescrites par le droit et en tenant le prétoire

destiné à rendre la justice en de certains jours déterminés et en de certains lieux fixes, et non autrement. La juridiction contentieuse ne peut être exercée ni licitement ni validement hors l'étendue du territoire qui dépend du juge ecclésiastique ou séculier. La juridiction volontaire peut au contraire être librement exercée par le supérieur ecclésiastique hors les limites du propre territoire. Ainsi un évêque qui n'est pas encore sacré, peut, hors de son diocèse, confesser son diocésain, pourvu qu'il soit prêtre et qu'il ait été confirmé par le pape. Car alors il acquiert la puissance de juridiction, quoiqu'il ne soit pas encore consacré évêque; et il la peut exercer, pourvu néanmoins que, comme l'enseignent Ducasse et les-autres, il ait auparavant notifié ses bulles au chapitre de sa cathédrale, par la prise de possession de son évêché, soit en personne ou par procureur. Il peut donner des indulgences, approuver les prêtres pour la confession, conférer des bénéfices, etc.

La puissance de juridiction est ou ordinaire ou déléguée, ou subdéléguée. La juridiction ordinaire est celle qui est attachée à la dignité qu'on possède ; telle est celle d'un évêque ou d'un curé. La juridiction déléguée est celle qu'on n'exerce que par la commission de celui à qui appartient la juridiction ordinaire; telle est celle d'un simple prêtre approuvé par l'évêque. La juridiction subdéléguée est celle qui est donnée par celui qui n'en ayant qu'une déléguée, avec la faculté néanmoins de subdéléguer, communique son pouvoir à un tiers. Non-seulement la juridiction de l'évêque est ordinaire, mais celle de l'official et du grand vicaire l'est aussi; l'autorité de l'un et de l'autre étant la même. Autrement on pourrait appeler de l'un ou de l'autre de ces officiers à l'évêque, ce qui est abusif selon le ch. 3 de Appell. in 6. Mais leur juridiction cesse, 1° par leur destitution ou par la révocation que l'évêque peut faire de leur pouvoir; 2° par là translation du prélat d'un siége à un autre ; 3 par la mort de l'évêque (1) 4o par la démission qu'il fait de son évêché, quand elle est admise par le pape. Il n'en est pas ainsi de la juridiction des délégués: car lorsqu'ils ont commencé à connaître de l'affaire dont la décision leur a été commise, ils peuvent la continuer et la terminer, quoique leur commettant vienne à mourir, ainsi que le déclare Urbain III, cap. 20 de Offic. etc. Judicis deleg. Néanmoins le pouvoir des officiaux et des grands vicaires continue après sa mort, quand elle est arrivée dans un lieu d'où l'on n'en a pas encore pu apprendre la nouvelle car en ce cas, comme ils passent dans le public pour officiers d'un évêque vivant, ce qu'ils font est censé légitime, suivant cette maxime de droit: Circa factum error communis facit jus.

CAS 1: Un monastère soumis autrefois à l'évêque diocésain, a prescrit par une possession pacifique de plus de 70 ans le droit d'exemption de la juridiction épiscopale. Prudence, nouvel évêque, n'a pas laissé de vouloir faire la visite de l'église de ce monastère ; mais le supérieur avec tous ses religieux s'est fortement opposé à son entreprise. Ne peuvent-ils pas en vertu de la prescription continuer à s'opposer à la prétention de l'évêque, et soutenir contre lui le procès qu'il leur a intenté sur ce sujet?

R. Ils ne le peuvent pas. La raison est qu'il y a une grande différence entre la juridiction qui appartient à l'évêque et celle dont jouissent les exempts. Car, puisque c'est dans l'évêque seul que réside la plénitude de la puissance ecclésiastique, sa juridiction est si essentiellement attachée à son caractère, qu'elle n'en peut jamais être séparée par aucune prescription acquise par quelque longue possession que ce soit; au lieu que le privilége d'exemption, fondé même sur un indult du pape et sur le consentement de l'évêque, peut être légitimement prescrit par un autre évêque après une possession de 40 ans, étant à présumer que les exempts qui n'ont pas fait usage pendant un si long temps du privilége qui leur avait été accordé, y ont véritablement renoncé. Cum enim tanto tempore contra indulta privilegia decimas solverint, eis renuntiasse tacite

(1) L'auteur remarque cependant d'après Loiseau, 1. in, ch. 6, qu'un Oficial n'est pas censé révoqué ou destitué de sa dignité ipso jure, par la mort de l'évêque, et qu'ainsi si quelques chapitres des églises eathédrales n'étaient pas en possession d'en nommer un autre, en ce cas l'official pourrait continner

præsumuntur, dit Innocent III, cap, 15 de Privileg. I. m, tit. 53. A l'égard des exemptions, qui ne sont fondées sur aucun titre, mais seulement sur l'usage, ce sont des abus d'autant plus condamnables que, comme le dit saint Bernard, 1. m, de Considerat. elles ôtent contre toute justice à une église une portion de son troupeau, c'est-à-dre une partie des membres dont elle est composée pour se l'attribuer. Ceux qui voudront voir cette matière traitée au long, consulteront les Mémoires du clergé, tom. 1, part. 1. Ils y trouveront les jugements rendus contre l'abbé et les religieux de Sainte-Geneviève, en 1663, l'abbesse de Jouarre en 1690, etc.

CAS H. Luc, official d'un évêque, exerce sa juridiction en tout temps et en tout lieu. Ne le peut-il pas ?

R. Non, car quoi qu'en ait statué Boniface VIII cap. 7, de Officio ordin. l. 1, tit. 16, in 6, un official doit en France avoir des jours et un lieu fixe, pour exercer sa charge; les choses dont il a à traiter, étant si importantes, qu'il est à propos qu'on puisse en avoir une connaissance juridique. Voyez Cujas ad novel. 95.

Voyez ABSOLUTION, APPROBATION, CONFESSEUR, CONFESSION, cas François; CHAPITRE, cas Florent; EXCOMMUNICATION, cas Marcellin; EVÊQUE, cas Aumond; JUGE, cas Amable; RELIGIEUX et RELIGIEUSE, cas Gabriel et Colomban.'

d'exercer sa charge comme auparavant. C'est ce qui se trouve autorisé par un arrêt du parl. de Toulouse, rendu en faveur de Bernard Ducasse, contre le chapitre de Lectoure, qui l'avait voulu destituer, lorsquo le siége vaqua par la translation de l'evêque.

L

LAMPE ARDENTE

Les curés doivent faire en sorte qu'il y ait une lampe ardente devant le saint sacrement. Une multitude d'auteurs meitent cet article au rang de leurs obligations. Pour en faire an précepte absolu et général nous souhaiterions quelques canons. Collet a insisté trèsfort sur cet article, il en fait une obligation grave. Il n'est pas, il s'en faut beaucoup, le premier qui ait ainsi pensé. Nous sommes très-disposés à seconder et appuyer le zèle de Collet. C'est pourquoi nous allons discuter les preuves et les titres de cette obligation, son étendue, et qui sont ceux qu'elle concerne principalement. Et d'abord est-ce un article de discipline générale et obligatoire de tenir toujours une lampe ardente devant le saint sacrement? nous n'en voyons pas de preuves bien décisives. On en a à cet égard de trèspositives et de très-anciennes pour la célébration du saint sacrifice. On en trouve pour l'exposition de l'Eucharistie, mais plus modernes, parce que cette exposition l'est aussi; et les canons, en se bornant à demander des cierges allumés dans ces circonstances, et orsqu'on porte le saint sacrement aux malades, semblent ne pas exiger absolument de umière dans les autres circonstances.

2. On ne peut douter que l'intention de l'Eglise ne soit qu'il y ait toujours une lampe ardente jour et nuit devant le saint sacrement; c'est même une coutume universellement Stablie, coutume très-sainte et très-propre à témoigner le respect et la vénération que mérite la présence de Jésus-Christ dans ce mystère. Mais cette coutume fait-elle loi par elle-même ? a-t-elle été introduite, s'est-elle soutenue dans ce dessein? c'est ce qui n'est pas évident.

3. S'il n'y a pas d'ordonnance générale sur cette matière, il y en a certainement de particulières et qui forment une obligation véritable dans les lieux où elles sont reçues. Observons néanmoins que ces lois ne sont pas uniformes. Les unes n'ont été portées que par forme d'exhortation; d'autres sont plus positives et renferment un précepte véritable; telle est celle de plusieurs conciles, de ceux surtout qui se sont tenus depuis le concile de Trente.

4° Ces lois ne disent pas que ce soit une charge de la cure et du curé; au contraire, c'est la fabrique, ou la paroisse à son défaut qu'elles en chargent. Le devoir du curé se borne uniquement à faire ses efforts pour procurer et soutenir cet établissement; et lorsqu'il s'en est acquitté, on ne peut lui faire aucun reproche légitime. Il y a plusieurs paroisses où cette lampe ardente est fondée. Il naît évidemment de cette fondation une obligation étroite de l'acquitter et pour le curé d'y donner tous ses soins.

5 S'il n'y a dans la paroisse aucune fondation pour cet objet, c'est à la fabrique à y pourvoir. Le devoir du curé n'est ici que d'y exhorter, de s'adresser à l'évêque dans le cas de besoin et de veiller à l'observation de ce que le prélat aura ordonné. Lorsque la fabrique est pauvre, il n'y a d'autre moyen d'y suppléer que par des quêtes, et ce moyen réussit toujours, lorsque le curé donne le premier l'exemple. Après tout, si c'est dans le diocèse une obligation positive, dans la paroisse un usage, au défaut des autres secours, celui qui est tenu par état d'y pourvoir, d'y veiller, nous paraît conséquemment tenu de fournir à la dépense, quand il le peut aisément et que les autres moyens manquent.

Ces diverses obligations sont-elles graves? Quelques théologiens, Collet en particulier, le pensent, du devoir en lui-même, et quant à son objet, d'avoir jour et nuit une lampe ardente dans les églises où le saint acrement est conservé; et l'on n'en peut douter, lorsque cette obligation est portée par une fondation, ou par une loi diocésaine communément pratiquée, et qui en fait un objet important, ou par l'usage du lieu soutenu et confirmé par les ordonnances particulières des évêques. Comme dans les églises pauvres, personne n'y est directement obligé, on ne peut en faire un grand péché quand on y manque, mais seulement exhorter à la remplir.

Nous n'ajouterons pas que laisser un seul jour la lampe éteinte, comme le prétendent quelques théologiens, c'est une faute grave et mortelle. Nous ne voyons rien dans la nature de la faute, ni dans les ordonnances de l'Eglise qui autorise cette décision rigide. C'est à la prudence du confesseur, dans ces sortes de matières généralement prescrites, à juger de la gravité de la négligence, par les circonstances, la multiplication des actes, la qualité du motif, le principe du devoir, l'engagement qu'on a pris de le remplir. Et nous n'excuserions pas de faute griève un curé qui, trouvant cet usage établi dans son église, quand même il ne serait que l'effet d'une piété libre, le laisserait tomber par nonchalance, ou pouvant aisément l'introduire ou le rétablir n'aurait pas le zèle d'y travailler; car au moins c'est la part que leur donnent les conciles dans l'accomplissement d'une loi si juste et si raisonnable.

LEGS.

Le legs est un don qu'un homme fait par son testament à une autre personne. Personne ne peut faire de legs valide, 1° s'il n'a droit de faire un testament. Ainsi, un impubère, un insensé, un sourd el muet, un religieux profès, un criminel mort civilement, ou un homme interdit en justice, n'en peuvent faire, parce qu'ils ne peuvent tester: et à l'égard du

testament d'un impubère, il demeure nul, même après qu'il a atteint l'âge de puberté, suivant cette règle de droit : Quod initio vitiosum est, tractu temporis non potest convalescere. Mais le testament d'un homme insensé, fait avant sa démence, serait valide; 2° si celui à qui il le fait, n'est pas habile à en profiter, etc.; 3° si les choses léguées ne sont pas de nature à le pouvoir être; c'est-à-dire, si elles ne sont pas en commerce parmi les hommes: ainsi l'on ne peut léguer une chose publique, ni une chose sacrée, telle qu'est un cimetière. On peut néanmoins léguer une maison où il y a une chapelle domestique, parce qu'une telle chapelle n'est qu'un accessoire de la maison, comme un droit de patronage est censé l'accessoire d'une terre qu'on a léguée ou vendue. On peut léguer une même chose, comme une terre ou une rente à plusieurs personnes; et alors si les portions ne sont pas distinguées, elles partagent entr'elles la chose léguée, ou sa juste valeur par égales portions. Un légataire, à qui le testateur a fait plusieurs legs, peut accepter ceux qu'il lui plaît, et répudier les autres, à moins que le legs qu'il répudierait ne l'obligeât à quelque charge; car il ne pourrait en accepter un qui serait exempt de charges, sans être en même temps tenu des charges de l'autre. Nul legs ne doit être délivré qu'après toutes les dettes passives du testateur payées; et il en est de même de toute autre donation à cause de mort: c'est pourquoi si le testateur a laissé plus de dettes que de biens, les legs deviennent caducs.

Toutes les causes qui peuvent rendre indigne un homme de la qualité d'héritier, rendent pareillement un légalaire incapable du legs qui lui a été fait. Outre ces causes qu'on expliquera au mot TESTAMENT, il y a un cas par iculier où le légataire perdrait son legs, quoiqu'il l'eût déjà reçu. C'est si ce légalaire s'inscrivait en faux contre le testament, et qu'il accusât injustement l'héritier institué de l'avoir fabriqué. L'inhabilité à recevoir un legs ne s'entend pas d'un legs alimentaire. Car puisque les aliments sont nécessaires à la vie de l'homme, l'équité veut qu'on puisse faire un tel legs à toutes sortes de personnes qui en ont besoin. Ainsi on le peut faire à un homme mort civilement.

Un testateur peut laisser un legs, 1° à une personne inconnue, par exemple à celui qui aidera son héritier à débrouiller les affaires de la succession qu'il lui laisse; encore qu'il ne sache pas celui dont son héritier se servira; 2° à une ville, ou à une communauté ecclésiastique ou laïque dûment établie.

Si un testateur léguait une chose qui fût propre au légataire, le legs serait nul; car on doit présumer, que si le testateur eût su que cette chose appartenait au légataire, il ne la lui eût pas léguée: d'où il suit que l'estimation de la chose ne lui est pas même due. -L'auteur décide en partie le contraire, cas Eustatius.

Quand le testateur lègue une chose qu'il avait mise en gage, son héritier est tenu de payer au créancier la somme pour laquelle elle était engagée, et de délivrer ensuite le legs au légataire; ou en cas que la chose engagée eût été vendue, lui en payer l'estimation: Nisi contraria defuncti voluntas ab hærede ostendatur, dit la loi 6, ff. de Fideicom. 1. vi, tit. 42. On peut léguer une chose qui n'est pas encore existante; par exemple les fruits que produiront les arbres d'un jardin. Mais si le testateur avait spécifié une telle quantité de grains ou de vin, à prendre sur un tel fonds, et qu'il s'y en trouvât moins, le légataire n'aurait pas droit d'exiger le surplus de l'héritier.

-L'auteur fera une exception à cette exception, cas Amable.

Quand un testateur lègue une chose comme à lui appartenante, v. g. un tel cheval, une telle montre, et qu'à son décès cette chose ne se trouve pas dans ses effets, parce qu'il l'a aliénée ou perdue, le legs demeure caduc, et le légataire n'en peut exiger la valeur. Ce serait tout le contraire s'il n'avait pas spécifié la chose, comme lui étant propre, et qu'il eût seulement légué en termes généraux un cheval ou une montre. Il y a des accessoires qui suivent si naturellement la chose léguée, qu'on ne les en peut retrancher; comme la boite à l'égard d'une montre, quand même elle serait de plus grand prix que la montre; le harnais d'un attelage de chevaux de carrosse, etc. Mais lorsque le principal vient à périr, le légataire n'a aucun droit sur les accessoires. Par exemple si ces deux chevaux viennent à mourir, les harnais n'appartiennent plus à celui à qui ils avaient été légués. Il y a d'autres sortes d'accessoires qui ne suivent pas la chose. Tels sont les meubles d'une maison léguée, sur lesquels le légataire n'a rien à prétendre, à moins que le testateur ne les ait compris en termes formels dans son testament: mais les clefs de la maison, la cour, le jardin attenant, et ses autres dépendances, sont un vrai accessoire, et par conséquent doivent appartenir au légataire, quoique le testateur n'en ait fait aucune mention. Les augmentations faites par un testateur sur un fonds qu'il a légué, soit en bâtiments, en plans, en plus grande étendue d'un nouveau terrain, demeurent au légataire, comme si c'était un véritable accessoire, quand le testateur n'a rien changé à sa première disposition.

A l'égard des legs pieux, c'est-à-dire, de ceux qu'on destine à quelque œuvre de piété et de charité, soit qu'ils regardent le spirituel ou le corporel, ou tous les deux ensemble; si le testateur n'a nommé personne pour les exécuter, ni les curés, ni l'évêque même, n'ont en France aucun droit d'exiger les sommes léguées, mais ils doivent veiller sur leur exécution. Quand un testateur a légué une som ne pour bâtir un hôpital ou une église paroissiale, et que depuis son testament fait, l'un et l'autre a été exécuté par un tiers, ou qu'il se trouve que le bâtiment n'est pas jugé utile, le legs ne laisse pas d'avoir lieu, et la

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