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que le mur ait, à partir du sol le plus élevé, la hauteur réglementaire. Cette partie supérieure se fait à frais communs; quant à la partie inférieure, les frais en restent à la charge de celui des voisins qui, par des travaux exécutés dans son fonds, aurait rendu nécessaire la construction d'un mur de soutènement 10

Du reste, si les voisins sont d'accord à cet égard, ils peuvent donner à la clôture la hauteur qu'ils jugent convenable, fût-elle au-dessous de celle qui est fixée par la loi 11.

CHAPITRE III.

Des manières d'acquérir la propriété.

I. De l'occupation.

$201.

L'occupation est un moyen d'acquérir la propriété d'une chose, par le seul fait de l'appréhension de cette chose dans l'intention de se l'approprier 1.

Ce moyen d'acquérir s'applique, suivant diverses distinctions qui seront ci-après indiquées : 1o aux res nullius et aux res derelictæ (occupatio pagana); 2o au butin fait sur l'ennemi (occupatio bellica); 3o au trésor et à certaines épaves (inventio).

1° De l'occupation proprement dite.

Nous nous bornerons à renvoyer au § 168 pour l'indication des res nullius et des res derelicta susceptibles d'être acquises par l'occupation proprement dite.

Parmi les différents faits d'appréhension au moyen desquels s'acquièrent les res nullius, il importe de mentionner spécialement la chasse et la pêche.

Pardessus, op. cit., I, 150. Demolombe, XI, 384. Caen, 13 mai 1837, Sir., 37, 2, 333. Voy. cep. Demante, Cours, II, 517 bis, V.

10 Cpr. en sens divers: Toullier, III, 162, à la note; Pardessus, op. et loc. citt.; Duranton, V, no 319, p. 330, à la note; Marcadé, sur l'art. 663, no 1 ; Demante, op. et loc. citt.; Demolombe, XI, 384 bis.

C'est ce qui a été formellement reconnu dans la discussion au Conseil d'État. (Locré, Lég., VIII, p. 343 et suiv., nos 21 à 23.) Voy. cep. Demolombe, XI, 378 et 383 bis.

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Voy. sur ce qu'il faut entendre par appréhension: § 179, texte n° 1.

a. La chasse est un moyen d'acquérir par occupation les animaux sauvages vivant dans leur état de liberté naturelle (in laxitate naturali). Ce moyen d'acquérir ne s'applique pas aux animaux de nature sauvage vivant dans une sorte de domesticité, en ce qu'ils ont l'habitude de revenir à un gîte fixe, par exemple aux pigeons de colombiers, qui appartiennent au propriétaire du colombier dans lequel ils ont l'habitude de se retirer 2.

La loi des 28 septembre - 6 octobre 1791 règle d'une manière particulière le droit d'occupation en ce qui concerne les essaims d'abeilles. Aux termes de l'art. 5, tit. I, sect. III, de cette loi, le propriétaire du fonds sur lequel vient s'abattre un essaim est autorisé à s'en emparer, lorsque le propriétaire des abeilles ne les poursuit pas.

La faculté de chasser sur un fonds ne peut être exercée d'une manière licite que par le propriétaire ou l'usufruitier de ce fonds, et par ceux auxquels ces derniers auraient cédé leur droit de chasse.

D'un autre côté, la faculté de chasser est soumise à certaines conditions ou restrictions établies, soit par mesure de police, soit dans l'intérêt de l'agriculture et de la conservation du gibier. Art. 715. Loi du 3 mai 1844, sur la police de la chasse, art. 1er. Mais la circonstance qu'un fait de chasse a été exercé soit sur le terrain d'autrui, soit en contravention aux règles dont il vient d'être parlé, n'empêche pas que le chasseur ne devienne propriétaire du gibier qu'il a tué, sauf les dommages-intérêts dus à celui au préjudice duquel le fait de chasse a eu lieu, et sauf aussi la confiscation du gibier, lorsque ce fait a été commis en temps prohibé3.

Art. 524 et 564. Cpr. Civ. rej., 28 janvier 1824, Sir., 24, 1, 259; Rennes, 29 octobre 1847, Dalloz, 1849, 2, 225; Paris, 11 novembre 1857, Sir., 58, 2, 173. - Il convient toutefois de remarquer que tout propriétaire est en droit de tuer sur son terrain les pigeons qu'il y trouve aux époques où, d'après les règlements locaux, ils doivent être enfermés dans les colombiers, et même, en l'absence de règlements, lorsqu'ils causent des dommages aux semences ou aux récoltes. Loi des 4 août 11 septembre 1789, art. 2. Demolombe, X, 180. Crim. rej., 1er août 1829, Sir., 29, 1, 369. Rouen, 14 janvier 1845, Sir., 45, 2, 236.

L. 9, § 3, D. de usuf. (7, 1). Proudhon, De l'usufruit, III, 1209. *Cette circonstance, en effet, n'enlève pas au gibier le caractère de res nullius. §12, Inst. de rer. div. (2, 1). Pothier, De la propriété, no 24. Toullier, IV, 7. Duranton, IV, 279 et 283. Proudhon, Du domaine privé, I, 386. Demante, Cours, III, 11 bis, III. Demolombe, XIII, 23. Cpr. Crim. cass., 17 juillet 1840, Sir., 40, 1, 732.

Loi du 5 mai 1844, art. 4, art. 16, al. 5.

L'occupation par un fait de chasse ne peut être considérée comme consommée que par l'appréhension du gibier. Un tiers qui se serait emparé du gibier blessé par un chasseur, ne serait pas tenu de le lui restituer ".

b. La pêche est libre dans la mer et dans les fleuves ou rivières qui s'y jettent, jusqu'aux limites de l'inscription maritime, en ce sens qu'elle ne s'exerce pas au profit de l'État, et que toute personne peut s'y livrer, à la condition d'observer les lois et règlements qui en règlent l'exercice 3. La pêche maritime comprend non-seulement celle du poisson, mais encore celle des choses du cru de la mer, comme l'ambre, le corail' et les herbes marines, telles que le varech ou goëmon 10, et l'algue ". Il est toutefois à remarquer que les choses de cette nature rentrent dans la catégorie des épaves, lorsqu'elles sont jetées sur la grève, et que, d'un autre côté, la récolte du goëmon de rive est attribuée, d'une manière exclusive, aux communautés d'habitants riveraines de la mer 12.

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§ 13, Inst. de rer. div. (2, 1). Duranton, IV, 278. Demolombe, XIII, 25. Voy. cep. Proudhon, Du domaine privé, I, 386.

Ce sont les limites de l'inscription maritime qui déterminent, pour les fleuves et rivières affluant à la mer, le point où cesse la pêche maritime et où commence la pêche fluviale. Cpr. Loi du 15 avril 1829, art. 3, al. 2; Ordonnance du 10 juillet 1835; Décret du 20 février 1852, art. 1.

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• Ordonnance de 1681, liv. V, tit. I, art. 1. Cpr. Décret sur l'exercice de la pêche côtière, du 9 janvier 1852; Décrets portant règlement sur la pêche còtière dans le premier, le second, le troisième et le quatrième arrondissement maritimes, en date du 4 juillet 1853 (Bulletin des lois, partie supplémentaire, série XI, B. 35, no 623); Décret portant règlement sur la pêche côtière dans le cinquième arrondissement maritime, du 19 novembre 1859 (op. cit., série XI, B. 617, no 9222). Les quatre décrets réglementaires du 4 juillet 1853 ont reçu de nombreuses modifications par suite de décrets postérieurs, dont l'indication se trouve dans le Recueil des lois et arrêts, Sir., 60, 3, 24.

0

Voy. sur la pêche du corail : Ordonnance de 1681, liv. IV, tit. IX, art. 29; Arrêté du 27 nivôse an IX; Loi du 17 floréal an X; Ordonnance du 9 novembre 1844.

1o Les dispositions du tit. X, liv. IV de l'ordonnance de 1681, sur la coupe du varech ou goëmon, ont été abrogées par l'art. 24 du décret du 9 janvier 1852. Cette matière est aujourd'hui réglée par les quatre décrets du 4 juillet 1853, cités à la note 8 supra.

La récolte de l'algue est régie par les art. 78 à 82 du décret du 18 novembre 1859, cité à la note 8 supra.

12

texte n° 3, notes 36 et 37 infra.

Voy. sur les épaves du cru de la mer
Voy. sur le goëmon de rive: § 170, texte et note 16.

Le droit de pêche s'exerce au profit de l'État dans les fleuves, rivières, canaux, contre-fossés et dépendances, navigables ou flottables, avec bâteaux, trains ou radeaux, et dont l'entretien est à la charge de l'État ou de ses ayants cause. Les particuliers ne peuvent y pêcher qu'à la ligne flottante et tenue à la main, à moins d'avoir obtenu une licence ou d'être adjudicataires de la pêche.

Dans les rivières et canaux autres que ceux ci-dessus désignés, les propriétaires riverains ont le droit de pêche, chacun de leur côté, jusqu'au milieu du cours de l'eau, sans préjudice des droits contraires établis par possession ou titre 13. La faculté accordée à toute personne de pêcher à la ligne flottante, tenue à la main, ne s'applique ni aux rivières dans lesquelles le droit de pêcher appartient aux riverains, ni aux canaux qui forment une propriété privée 14.

Du reste, la pêche dans des cours d'eau quelconques ne peut s'exercer que conformément aux dispositions établies pour la conservation et la police de la pêche.

Le poisson pêché en délit, dans un cours d'eau quelconque, n'en devient pas moins la propriété du pêcheur qui s'en est emparé ", sauf la restitution du prix de ce poisson à celui auquel appartient le droit de pêche, et le paiement des dommages-intérêts qui peuvent lui être dus, et sauf aussi, s'il y échet, la confiscation du poisson 16.

La pêche dans les lacs et étangs appartient aux propriétaires de ces eaux, et la soustraction du poisson qui s'y trouve constitue le délit de vol ".

2o De l'occupation par fait de guerre.

On acquiert par occupation le butin fait sur l'ennemi, conformément au Droit de la guerre, tel qu'il est pratiqué d'après nos usages, lorsqu'il s'agit d'une guerre sur terre.

Quant aux prises maritimes, les conditions et les effets en sont

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"Voy. sur ces différentes propositions: Loi du 15 avril 1829, art. 1, 5, al. 3, 11 et suiv.; Loi du 6 juin 1840.

"C'est ce qui ressort du rapprochement des art. 1 et 2 de la loi du 15 avril 1829, et de l'art. 5, al. 3 de la même loi. Crim. cass., 4 juillet 1846, Sir., 47, 1, 72.

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Cpr. Proudhon, Du domaine privé, I, 368. Voy. cep. Demolombe, XIII, 29. ** Cpr. art. 5 et 42 de la loi du 15 avril 1829.

17 Code Napoléon, art. 524. Code pénal, art. 388, al. 2.

réglés par des lois spéciales et par des conventions internationales 18.

3o De l'invention.

a. Du trésor. La loi attribue à l'inventeur la moitié du trésor découvert par le pur effet du hasard, l'autre moitié restant au propriétaire de la chose dans laquelle il a été trouvé. Art. 716 9.

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On entend par trésor, tout objet caché ou enfoui 20 dans un immeuble ou dans un meuble 1, et de la propriété duquel personne ne peut justifier. Art. 716. La circonstance que la chose cachée ou enfouie se trouverait être de création plus ou moins récente, n'empêcherait pas que cette chose ne constituât un trésor, si d'ailleurs personne n'était à même de justifier de sa propriété "2.

On doit considérer comme inventeur celui qui, le premier, a rendu le trésor visible, bien qu'il ne l'ait pas appréhendé, qu'il ne l'ait rendu visible qu'en partie, ou que même il n'ait pas tout

13 Cpr. Ordonnance de 1681, liv. III, tit. IX et X; Règlement du 26 juillet 1778; Arrêté du 2 prairial an XI; Décret impérial du 28 avril 1856, portant promulgation de la déclaration du 16 avril 1856, qui règle divers points de Droit maritime; Bravard, Manuel de Droit commercial, liv. II, chap. XV, p. 537 et suiv.

1o Cpr. sur cet article : Dissertation, par Latour, Revue de législation, 1852, II, p. 40 et suiv., 1853, I, p. 277 et suiv.

20 Les tombeaux antiques et les objets précieux qui s'y trouvent peuvent-ils être considérés comme des trésors? Cpr. Latour, op. cit., 1852, II, p. 53; Demolombe, XIII, 37; Bordeaux, 6 août 1806, Sir., 6, 2, 175; Lyon, 19 février 1856, Sir., 56, 2, 307.

* La définition que le second alinéa de l'art.716 donne du trésor, n'en restreint pas l'idée aux choses cachées dans un fonds de terre ou dans un bâtiment. Quoique le premier alinéa de cet article ne paraisse avoir en vue qu'un objet trouvé dans un immeuble, il n'en est pas moins applicable à l'hypothèse plus rare d'un trésor découvert dans un meuble : Eadem est ratio. Duranton, IV, 311. Marcadé, sur l'art. 716, no 2. Demolombe, XIII, 34.

** La loi 31, § 1, D. de acq. rer. dom. (41, 1), définit le trésor : Vetus quædam depositio pecuniæ, cujus non exstat memoria. Cette définition est exacte, sans doute, en ce sens qu'une chose cachée ou enfouie ne prend réellement le caractère de trésor qu'autant que personne ne peut justifier de la propriété de cette chose, ce qui ne se rencontre d'ordinaire que pour les dépôts anciens. Mais on aurait tort d'en inférer qu'un dépôt de date plus ou moins récente ne constituerait pas un trésor, dans le cas même où, par suite de circonstances exceptionnelles, personne ne serait en état d'établir son droit de propriété sur l'objet déposé. Aussi l'art 716 ne rappelle-t-il pas la condition de l'ancienneté du dépôt. Duranton, IV, 311. Proudhon, Du domaine privé, 1, 398. Demolombe, XIII, 40. Cpr. Toullier, IV, 36; Bordeaux, 22 février 1827, Dalloz, 1827, 2, 104; Orléans, 6 septembre 1853, Sir., 56, 2, 54,

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