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quoique ceux-là aient été nommés par des associés ayant le même intérêt (Rej., 23 nov. 1824, aff. Delours, V. no 1083; Toulouse, 9 août 1833, aff. Azais, V. eod.; 1er mars 1834, af. Dubourg, V. cod.; Lyon, 21 mars 1838, aff. Marleix, V. no 84).

760. Mais il y a partage, si, trois arbitres étant nommés, ils adoptent trois opinions différentes. Cela est de sci-même évident, et ne saurait faire difficulté que dans le système de ceux qui prétendent que les arbitres doivent, comme les juges, se réduire à deux seules opinions, ce qui sera examiné plus loin, chap. 11.

761. Il n'est pas nécessaire, pour qu'il y ait entre des arbitres partage véritable, que le discord se soit manifesté successivement sur chaque chef particulier de la contestation qui leur est soumise, si le chef à l'occasion duquel le discord se déclare comprend les autres, et est de nature à les préjuger (Req., 10 fév.

ration préalable faite conjointement par les deux autres arbitres, et par conséquent point de partage constaté. — Dulac fait néanmoins son rapport par lequel il estime les biens vendus 20,250 fr.

Muguet forme opposition à l'ordonnance d'exequatur. Il soutient, 1° que son arbitre ayant refusé de fixer le prix, la vente est nulle aux termes de l'art. 1592; 2° que, n'y ayant pas eu de procès-verbal signé par les deux arbitres constatant la discordance, il n'y a pas eu lieu à l'opération du tiers arbitre; et que c'était le cas du déport qui met fin au compromis. -Jugement par défaut qui déclare nuls les procès-verbaux des sieurs Janson et Dulac, et l'acte de vente du 23 nov. 1811.-Appel par d'Espinay devant la cour de Lyon qui, par arrêt du 5 juin 1815, infirme, et ordonne l'exécution du jugement arbitral. Elle a considéré : « que l'opération confiée à Janson, Rivière et Dulac, par l'acte de compromis du 25 nov. 1811, a été un véritable arbitrage, parce qu'ils ont été autorisés à prononcer en dernier ressort, et que les parties se sont engagées à se soumettre sans appel à leur décision; qu'on ne peut même concevoir que la fixation du prix d'un objet vendu puisse être faite par des experts qui ne seraient pas arbitres, puisque le rapport de simples experts discordants ne conduirait à aucun résultat; que l'art. 1592 c. civ. donne le titre d'arbitrage à l'opération que peut faire un tiers pour la fixation du prix d'une vente; qu'il résulte de toutes les circonstances de la cause que Rivière a commencé de procéder, le 10 déc. 1811, à la visite et à l'examen des lieux, opération qui devait nécessairement précéder l'estimation du prix du moulin de Roffray et dépendances; que, conformément à l'art. 1014 c. c. pr., Rivière, expert arbitre, ne pouvait se déporter du moment que l'opération dont il avait été chargé conjointement avec Janson avait été commencée; qu'il résulte encore de tous les faits de la cause, qu'il y a eu discordance entre lesdits Rivière et Janson; que dès lors, et d'après l'art. 1017 c. pr., chacun des arbitres était tenu de rédiger un avis distinct et motivé; que Janson a satisfait à cette obligation, en rédigeant le sien; que le défaut d'avis distinct et motivé de Rivière, n'a pu neutraliser l'arbitrage, et constate d'autant plus la discordance, que, cette discordance établie, Dulac a eu qualité et pouvoir de fixer seul irrévocablement le prix de la vente. »

Pourvoi de Muguet; -1° Contravention à l'art. 4 du décret du 30 mars 1808 et aux art. 18 et 40 du décret du 6 juillet 1810. - 2° Contravention à l'art. 1592. Cet article, disait-il, contient une exception; il doit être rigoureusement interprété; et puisque la loi ne parle que d'un tiers, c'est-à-dire d'une seule personne, il faut en conclure qu'elle n'a point entendu que les contractants abandonnassent à plusieurs arbitres la fixation du prix de la vente. Ainsi, dans l'espèce, la clause qui chargeait les sieurs Janson et Rivière d'estimer les biens vendus était infectée d'une nullité radicale. Mais, en supposant que cette clause fut valable, elle est restée comme non avenue à défaut d'exécution par le refus de l'un des arbitres, ce qui rentre dans le cas prévu par la seconde partie de l'art. 1592, portant qu'il n'y a pas de vente, si le tiers choisi ne peut ou ne veut faire l'estimation; quand deux experts sont chargés d'une mission ensemble, ils n'ont séparément aucun pouvoir: c'est ici la même chose; 2° Violation des art. 1012, 1014, 1017 c. pr., en ce que le compromis a pris fin par le déport ou refus de l'un des arbitres de signer, de dresser un acte de partage et de rediger un avis distinct, lequel n'a pu être suppléé par les allégations de l'autre arbitre. - Arrêt.

LA COUR; Attendu qu'il n'a été appelé des juges des autres chambres de la même cour qu'en nombre suffisant pour remplacer les juges empèchés ou absents, et que, dans cet état, tous appartenant à la même cour et étant investis des mêmes pouvoirs, aucun article des lois citées n'empêchait qu'à défaut de président, on ne fit choix du plus ancien des conseillers-juges pour présider; - Attendu, sur les moyens au fond, qu'il était convenu, par le compromis, qu'en cas de discordance entre les deux premiers experts, Dulac était nommé pour tiers et unique expert, à l'effet de fixer définitivement, librement et d'après son opinion personnelle, sans être tenu de se réunir à l'un ou à l'autre avis des deux premiers experts, le prix de l'immeuble vendu; - Attendu qu'il est constaté par l'arrêt que le fait de la discordance des deux premiers arbitres ne résulte pas seulement du procès-verbal dont il s'agit, mais encore de tous les faits de la cause, du refus du sieur Rivière, l'un d'eux, de signer le

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1835) (1). Cette décision se rapproche sensiblement du principe consacré en jurisprudence, et suivant lequel le juge n'est pas tenu, à peine de nullité, de motiver sa décision sur chaque chef de demande, dès qu'il y a indivisibilité entre eux; alors, en effet, la liaison du raisonnement et la chaîne des idées tiennent lieu de motifs distincts et spéciaux. L'esprit du juge, par un aperçu collectif, qui peut être défectueux comme combinaison de logique, mais qui échappe à toute critique en droit, assimile et confond tous les chefs en un seul ou plusieurs; et de même, quand un arbitre, après avoir déclaré qu'un chef du différend sur lequel il ne partage pas l'avis de son coarbitre doit fixer le sort de l'arbitrage, il n'est pas d'une nécessité absolue qu'il atteigne la limite extrême de son mandat, c'est-à-dire qu'il épuise un à un tous les autres points. Sans doute, il est à désirer qu'il les soumette tous

procès-verbal, après avoir procédé à l'expertise, de déférer à la sommation faite, de ses dires et réponses et de la plaidoirie des parties; d'où il suit qu'il n'y a nulle contravention à l'art. 1592 c. civ., ni aux art. 1012, 1014 et autres c. pr.; Rejette, etc.

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Du 18 mai 1814.-C. C., sect. req.-MM. Henrion, pr.-Sieyes, rap.Jourde, av. gen., c. conf.-Mailhe, av.

(1) Espèce - (Faill. Carol C. Sabatié.) Une société de commerce existait entre les sieurs Carol et Sabatié; ils avaient nommé pour arbitres MM. Rousset et Dufour, avec pouvoir de juger en dernier ressort. Depuis, ils prirent pour tiers arbitre le sieur Recoules. - Carol, étant tombé en faillite, fut représenté par ses syndics. — Les syndics Carol concluaient à ce que les discussions eussent lieu en présence du sur-arbitre, et Dufour, leur arbitre, était de cet avis. M. Rousset, conformément aux combinaisons du sieur Sabatié, pensait qu'on devait juger sans nouveaux débats, et que le sieur Carol, gérant de la maison de Toulouse, était responsable de sa gestion le 31 oct. 1831, il déposa son avis ainsi motivé : - « La cause étant en état, la délibération commencée par la solution de la question relative à la différence des mises, et par le discord sur celle qui donna lieu au point préjudiciel, la manière de procéder des arbitres réglée par plusieurs jugements souverains, je n'ai pu voir dans le refus de M. Dufour qu'un discord entre lui et moi sur toutes les questions du procès non encore résolues, et je lui ai déclaré que j'allais dresser mon procès-verbal.»A la suite de ce dépôt, Sabatié fait sommation à l'arbitre Dufour de rédiger et déposer le sien, et il notifie, le 22 nov. 1851, à M. Recoules, sur-arbitre, le dépôt de l'avis de M. Rousset. Le 26, les arbitres se réunissent avec le sur-arbitre : le fait de cette réunion est constaté par procèsverbal de ce jour. L'arbitre Dufour y déclare que son collègue et lui ont été divisés sur la 2 question, mais qu'ils ne se sont pas occupés des autres. Le 19 décembre, jour fixé pour une conférence, M. Dufour, qui s'y trouva, fut interpellé sur le point de savoir s'il avait rédigé et s'il portait son avis distinct et motivé, ou bien s'il l'avait déposé au greffe du tribunal de commerce. Sa réponse fut conforme à celles qu'il avait déjà faites. Le lendemain, une seconde conférence a lieu. Le 21 décembre, jour de l'expiration du délai, M. Recoules dépose sa sentence au greffe. Elle commence en ces termes : -« Nous, sur-arbitre susdit et soussigné, après avoir murement réfléchi sur les conférences que nous avons eues avec les arbitres Rousset et Dufour, et sur leur avis différent; Après avoir examiné avec la plus grande attention les divers mémoires qui ont été produits de part et d'autre dans ce procès, ainsi que les livres, titres, pièces et actes y relatifs, qui ont été mis sous nos yeux; Après avoir lu et relu attentivement, et porté l'examen le plus approfondi sur l'avis distinct et motivé rédigé par l'arbitre Rousset, et par lui déposé au greffe du tribunal de commerce de Toulouse; Considérant qu'il est parfaitement établi que les deux arbitres Dufour et Rousset ont été divisés d'opinion, notamment sur la question la plus importante du procès, qui est la deuxième, et de laquelle découlent presque toutes les autres examinées par l'arbitre Rousset, et par lui décidées dans son avis; Considérant qu'après la lecture des titres, livres et pièces du procès, il n'est pas possible d'adopter une autre opinion que celle manifestée par l'arbitre Rousset; que cette opinion est justifiée par tous les actes du procès et toutes les circonstances de la cause; que la conséquence de cette décision amène aussi à l'adoption pure et simple de toutes les autres solutions données par l'arbitre Rousset, et que le sieur Dufour, autre arbitre, l'a si bien reconnu, qu'il a cru inutile de s'occuper de ces diverses questions, qu'il ne considérait que comme secondaires et comme la conséquence de cette deuxième question, sur laquelle il a déclaré lui-même qu'il y avait partage dans le procès-verbal du 26 novembre dernier, sur lequel il a apposé sa signature; · Considérant, au surplus, que les calculs et les opérations faites par l'arbitre Rousset dans son avis, que nous adoptons en entier, sont tous aussi bien justifiés que les diverses solutions qu'il a données, et que, des lors, il convient de le déclarer;-Par ces motifs, nous, surarbitre, jugeant en dernier ressort, etc... »

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Pourvoi pour violation des art. 1017 et 1018 c. pr. civ., en ce que le sur-arbitre avait prononcé sans qu'il y eût discord entre les deux arbitres, sans conférer préalablement avec chacun d'eux, et sans andre qu'ils

à son examen, d'après le cours accoutumé des choses; mais si, interpellé par des sommations formelles, il s'y refuse, on peut envisager le partage comme suffisamment manifesté pour appeler lé sür-arbitre, notamment si la prochaine expiration du délai accorde à l'arbitrage laisse à peine assez d'intervalle pour que la décision puisse être rendue.

762. De même, il suffit que, sur une question complexe, embrassant à la fois l'instruction et le fond, telle que celle qui présénte à juger s'il y a instruction suffisante et, en cas d'affirmative, à statuer sur le fond, l'un des arbitres ait déclaré qu'il n'y a pas Instruction suffisante et se soit abstenu de juger le fond, et que l'autre arbitre ait déclaré le contraire et ait jugé le fond, pour qu'il y ait partage sur les deux points, et que, par suite, le tiers arbitre nommé par eux ait pu lui-même statuer sur le fond, en adoptant l'avis de l'arbitre qui s'était prononcé à cet égard (Rej., 23 mai 1837, aff. Dubuc, V. no 767).

763. Le partage résulte-t-il suffisamment de la nomination, par les arbitres divisés, d'un tiers arbitre?. Non; car la nomination du tiers arbitre peut précéder comme elle peut suivre le partage. Le contraire résulte cependant d'une manière implicite de plusieurs arrêts; mais il convient de remarquer que ces arrêts n'ont pu être rendus que dans des espèces où une conférence s'était établie entre les arbitres divisés et le tiers arbitre, et où la preuve du partagé résultait de la signature du procès-verbal du jugement du tiefs arbitre par les arbitres partagés.

764. Ainsi, lorsque, sur le partage, les arbitres ont appelé le tiers arbitre; que l'un des arbitres, sommé, après qu'il a en plusieurs fois conféré avec l'autre arbitre et le tiers arbitre, de rédiger son avis, s'y est refusé, et que, sur ce refus, le tiers arbitre s'est réuni à l'avis de l'autre arbitre, on ne peut soutenir que le partage n'a pas été suffisamment constaté, et qu'en conséquence le tiers arbitre est resté sans pouvoir (Nimes, 20 mars 1839, aff. Delanche, V. no 785).

765. Les parties qui ont choist elles-mêmes le tiers arbitre sont réputées avoir renoncé à se prévaloir du défaut de déclaration de partage de la part des arbitres (Pau, 24 avril 1823, aff. Casse, V. n° 785). Et, dans le meme sens, il a été jugé que, de ce eussent rédigé leur avis distinct et motivé. D'abord, disait-on, le partage n'existait pas dans le sens de la loi, puisque deux questions seulement sur soixante-quatorze avaient été examinées. L'intervention du sur-arbitre a donc été prématurée, et, dès lors, il y a eu de sa part un excès de pouVoir incontestable. Enfin, la loi ne lui faisait-elle pas un devoir impérieux de conférer avec les arbitres et d'attendre qu'ils eussent motivé leur opinion dans un procès-verbal distinct et séparé? Les art. 1017 et 1018 précités ne laissent aucun doute là-dessus.-Arrêt.

que des arbitres, au lieu de déclarer partage sur un point, le laissent à la décision du tiers arbitre, il n'y a pas nullité, si les parties, dans un compromis, ont formellement approuvé ce mode de procéder (Colmar, 29 mai 1813, aff. Zoepffel, V. n° 899).

766. Quoique le concours de tous les arbitrés dans un même procès-verbal ou dans des procès-verbaux séparés, ne soit pas rigoureusement nécessaire pour constater l'existence du discord entre les arbitres, il faut du moins que ce discord résulte des faits ou de quelque acte de procédure : le procès-verbal isolé de l'un des arbitres ne suffirait pas pour le constater, ni par suite pour nommer le tiers arbitre (Toulouse, 11 janv. 1833 (1). — Cela nous paraît incontestable; autrement, il appartiendrait à un seul arbitre de déclarer le partage, de nommer un tiers arbitré et de juger même avec celui-ci.

767. Est-il nécessaire que le jugement déclaratif de partage soit signifié aux parties? La négative semble résulter de l'ensemble de l'art. 1018, où l'on voit que les rapports du tiers arbitre n'ont lieu qu'avec les arbitres divisés : si les parties doivent être désormais étrangères aux débats, de quelle utilité serait la signifi cation? Mais cela ne peut être exact que dans le cas où les arbitres ont eux-mêmes nommé le tiers arbitre, car, si cette nomination devait être faite par le tribunal, ou par les parties, ou par un tiers à qui celles-ci en auraient conféré le droit, la signification du jugement déclaratif de partage serait nécessaire; les parties ont, en effet, le plus grand intérêt à surveiller le choix qui est fait du tiers arbitre. Cependant, si le compromis contenait une dispense à cet égard, ou si les parties avaient acquiesce au jugement qui a déclaré le partage et nommé un tiers arbitre, la signification serait inutile; et il a été très-bien jugé en ce dernier sens qu'il suffit que, sur la simple représentation d'un jugement qui déclare le partage et nomme un tiers arbitre, celui-ci ait accepté sa mission et que les arbitres se soient volontairement réunis à lui pour conférer sur les questions qui les avaient partagés, pour qu'il n'y ait pas eu nécessité de signifier aux parties l'acte déclaratif de partage, ni, par suite, de le faire revêtir de l'ordonnance d'exécution (c. pr. 147, 1021; Rej., 23 mai 1857) (2). — Au surplus, MM. Chauveau sur Carré, no 3345, 4°, Thomine, t. 2, p. 674, les pouvoirs les plus illimités pour statuer sur tout ce qui était relatif à cette maison de commerce jusqu'à sa dissolution; - Rejette.

Du 10 fév. 1855.-C. C., sect. req.-MM. Zangiacomi, pr.-De Gartempe, rap.-Viger, av. gén., c. conf.-Mandaroux, av.

(1) (Arbola C. Pont.) - LA COUR ; Attendu que si, en matière d'arbitrage, le concours de tous les arbitres dans un même procès-verbal, ou dans des procès-verbaux séparés, n'est pas rigoureusement nécessaire pour constater l'existence du discord survenu entre les arbitres, il faut du moins que ce discord résulte des faits ou de quelque acte de la procédure; Attendu que, dans le procès dont s'agit, les deux pièces invoquées sont le procès-verbal isolé d'un des arbitres et un acte extrajudiciaire du 15 mars 1832, deux pièces que la cour n'a pas jugées suffisantes pour établir l'existence du discord entre arbitres; - Attendu que le con cours de tous les arbitres est de rigueur pour la nomination d'un tiers arbitre; Attendu l'expiration du compromis passé entre parties; Par ces motifs, vidant le renvoi au conseil, disant droit sur l'appel, réformant le jugement attaqué, renvoie les parties devant les premiers juges pour procéder à la nomination de nouveaux arbitres.

Du 11 janv. 1855-C. de Toulouse, 3 ch.-M. Miégeville, pr.

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(2) Espèce (Dubuc C. Bernault.) - Des arbitres avaient été chargés de prononcer sur une question qui divisait les sieurs Dubue et Bernault, et qui était ainsi conçue :

«Est-ce le cas de statuer dès à présent sur le mérite de l'acte du 19

LA COUR; — Attendu que des faits de la cause constatés par les pièces du procès, il résulte qu'il existait un véritable discord entre les deux arbitres Rousset et Dufour, de manière qu'il n'a pu dépendre du refus de celui-ci (après conférences successives entre ces deux arbitres et le tiers árbitre, le sieur Recoules) de rédiger et de déposer son avis motivé, ainsi que l'avait fait l'arbitre Rousset, malgré sommation de le faire, de paralyser l'arbitrage et d'empêcher le tiers arbitre de prononcer son avis, do manière à ce qu'il y eût, d'après le vœu de la loi et l'intention des parties, un jugement qui terminat la contestation soumise à l'arbitrage; d'où il suit que la sentence arbitrale, ainsi formée par l'adoption de l'avis écrit et motivé de l'arbitre Rousset par le tiers arbitre, lesquels ont signé ensemble cette sentence, a été régulièrement prononcée et n'est susceptible d'aucune critique raisonnable; Attendu qu'ayant ainsi régulièrement prononcé, on ne peut reprocher au tiers arbitre d'avoir excédé ses pouvoirs non plus que d'avoir violé l'autorité des jugements et arrêts qui avaient constitué l'arbitrage et déterminé le mode d'y procéder;-Attendu que le reproche fait à la sentence arbitrale, d'avoir violé la chose déjà ju-juin 1820, passé entre le sieur Dubuc et le sieur Bernault, en présence gée entre les parties en l'an 11, et contrevenu à la transaction intervenue postérieurement entre elles, n'est aucunement justifié, puisque, d'une part, on ne rapporte ni la sentence du 18 fract. an 11 ni la transaction postérieure, lorsque, au contraire, on trouve dans les actes et documents du procès que les parties se sont réservé (s'il survenait des difficultés sur F'exécution de l'acte de dissolution de leur société, sur tout ce qui en serait la suite, et sur d'autres objets quelconques, etc.), qu'il en serait décide amiablement par des arbitres choisis pour prononcer définitivement et en dernier ressort, réserve dont usèrent les parties en nommant précisément les arbitres qu'elles ont investis du pouvoir de prononcer sur tous les faits relatifs à l'association qui avait existé entre Carol et Sabatié; d'où résulte que, lors même qu'il serait vrai que le jugement et la transaction de l'an 11 auraient trait à quelques-uns des objets sur lesquels a statué le jugement arbitral dénoncé, il resterait prouvé que les parties avaient entendu renoncer aux chefs de ces jugement et transaction, en donnant aux arbitres nommés pour régler la liquidation de la maison dito de Toulouse,

et de l'agrément de madame la marquise de l'Aubépin? L'affaire est-elle suffisamment instruite sur ce chef? Et dans le cas de l'affirmative, l'acto dudit jour 19 juin 1820 a-t-il reçu son exécution? Ou, en d'autres termes, le sieur Bernault est-il resté, nonobstant cet acte, comme associé du sicur Dubuc, pour un tiers dans le desséchement dont il s'agit? Ou, au contraire, le sieur Bernault n'a-t-il droit à des bénéfices qu'en raison des seules mises de fonds qu'il aurait faites dans ladite société ? » - Par sentence du 28 mai 1854, les arbitres déclarèrent qu'il y avait partage entre eux sur ces diverses questions qui, en dernière analyse, revenaient à celle de savoir si le sieur Bernault était associé ou bailleur de fonds. Dans les avis distincts et séparés qu'ils rédigèrent en conséquence de ce partage, l'un des arbitres déclara que l'affaire ne lui paraissait pas suffisamment instruite, et qu'en conséquence il ne pouvait prononcer sur le fond. L'au tre arbitre déclara, au contraire, qu'il y avait instruction suffisante, et, statuant au fond, il décida que le sieur Bernault n'avait pas cessé d'être associé, et d'avoir droit, en cette qualité, à sa part de bénéfices, - Sur

Bellot, t. 3, p. 156, enseignent, d'une manière générale, que la notification du jugement déclaratif de partage doit être faite aux parties et qu'il doit être rendu exécutoire comme le serait le jugement au fond lui-même. Cette notification est nécessaire, suivant eux, soit lorsque les parties se sont réservé le droit de nommer le tiers départiteur, soit lorsqu'il doit être nommé par les arbitres ou par le président du tribunal. Par qui la notification doit-elle être faite? Évidemment par la partie la plus diligente. Dans ces deux hypothèses, en un mot, on applique le droit commun; mais la sagesse des parties sait d'ordinaire prévenir toute difficulté.

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le vu de ces deux avis et avant que la sentence déclarative du partage qui le nommait eût été rendue exécutoire et signifiée aux parties, un tiers arbitre prononça, le 11 juin 1854, en adoptant dans son entier l'avis du second des deux arbitres, après en avoir conféré avec eux, « réunis, estil dit, à cette fin dans son cabinet, »> Le tiers arbitre signa seul sa sentence qui, nonobstant toute demande en nullité, fut maintenue par arrêt de la cour d'Amiens, du 20 mai 1835.

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Pourvoi des héritiers Dubuc. 1° Violation de l'art. 61 c. com., des art. • 4021 et 1009 c. pr., en ce que le tiers arbitre avait statué, en exécution du jugement portant partage et désignation du tiers arbitre, lequel jugement constituait, au moins, un préparatoire dans le sens de l'art. 1021 c. pr., quoiqu'il n'eût été ni déposé au greffe, ni revêtu de l'ordonnance l'exécution; et en ce qu'il avait été exécuté par le tiers arbitre, sans avoir été signifié aux parties, contrairement à l'art. 147 c. pr. et à ce qui se pratique à l'égard des jugements qui nomment même de simples experts, interprétation qui, si elle était sanctionnée, priverait les parties de la faculté de récusation contre le tiers arbitre et leur oterait tout moyen de fournir de nouvelles défenses, puisqu'elles ignoreraient la nomination du tiers arbitre, 2o Violation des art. 1011 et 1018 c. pr., en ce que le liers arbitre a jugé sans qu'il fût constaté par tous les arbitres qu'il n'avait statué qu'après avoir conféré avec les arbitres réunis. -5° Violation de l'art. 1018, en ce que le tiers arbitre avait statué à la fois et sur la question de savoir si l'instruction était suffisante, et sur le fond, bien qu'il n'y cut partage réel que sur la première, et que le fond n'eût été jugé que par un seul arbitre. Dans l'espèce, disait-on, les questions étaient complexes, il est vrai; mais l'une n'impliquait pas nécessairement la seconde. Il n'y avait sur la question du fond qu'un seul avis exprimé. Le liers arbitre ne pouvait donc remplir sa mission qui était de choisir entre deux avis opposés : il devait s'abstenir, puisque le choix n'était pas possible. La nécessité de deux opinions ressort de quelques exemples: supposez un litige sur une demande de 40,000 fr.: un arbitre ne se trouve pas assez éclairé, l'autre se juge assez éclairé et allque la somme. Faudra-t-il que le tiers arbitre, qui ne peut avoir d'avis qui lui soit propre, s'il frouve l'instruction suffisante, accorde les 40,000 fr., quoiqu'il soit convaincu qu'il n'en est dù que la moitié? Et sans sortir de la cause, le tiers arbitre, si l'on déclare qu'il y avait partage sur les deux questions, aura été obligé de décider que le sieur Bernault prendrait part comme associé (puisque tel est l'avis de l'arbitre qui s'est cru assez éclairé), quoiqu'il aurait eu l'opinion qu'il devait prendre part comme bailleur de fonds. De là, de ce système vicieux, il pourrait résulter une décision qui serait contraire à l'avis d'un arbitre et à celui du tiers arbitre. On invoquait deux arrêts des cours de Poitiers et de Toulouse.

- 3°

Le défendeur répondait : 1° que la déclaration de partage n'était pas un jugement, pas plus devant les arbitres que devant les tribunaux ordinaires, et que cet acte, quel qu'il fût, n'ayant pas nécessité pour son exécution l'intervention des parties, il n'avait pas été nécessaire de le rendre exécutoire et de le faire signifier;-29 que la déclaration du tiers arbitre faisait foi de son contenu, bien que signée par le tiers arbitre seul, parce que cette déclaration était contenue dans la sentence du tiers arbitre, laquelle n'a pas besoin d'être signée par les autres arbitres, l'art. 1011 ne appliquant qu'aux actes qui sont faits par les arbitres en commun, pour Féclairer mutuellement, et non à ceux qui n'ont pour but que d'éclairer de tiers arbitre; que la question soumise aux arbitres comprenait tout le litige la forme et le fond; et que pour qu'il y eût partage sur cette question, il suffisait que, lorsque l'un des arbitres la jugeait sous toutes ses faces, l'autre déclarât ne pouvoir la juger tout entière. Il y avait alors diversité d'opinion, puisque l'un jugeait d'une manière, et que l'autre jugeait d'une manière différente, en déclarant ne pouvoir prononcer sur le fond. Il y avait incontestablement deux opinions entre lesquelles le tiers arbitre pouvait choisir, soit en ne jugeant que la forme, comme l'un des premiers arbitres, soit en jugeant la forme et le fond, comme l'autre l'avait fait. A cela nul inconvénient, puisque le tiers arbitre était libre dans son choix, et que, si la décision au fond ne lui eût pas paru juste et équitable, il pouvait adopter l'avis de celui qui s'était abstenu.

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Le système du pourvoi aurait pour résultat de rendre les arbitrages interminables. S'il était vrai, en effet, que le tiers arbitre n'eût dû prononcer que sur la partie de la question relative à la forme, l'affaire n'eût pu faire un seul pas; car la décision du tiers arbitre n'aurait pas suffi pour donner à l'un des arbitres les lumières qu'il avait déclaré ne pas avoir, et celui-ci n'aurait pu que se retrancher dans une abstention obsti

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768. La décision déclarative de partage doit être datée. ... Le défaut de date dans les avis des arbitres partagés entraîne la nullité de la sentence arbitrale rendue par le tiers arbitre, encora bien que l'acte par lequel ils ont déclaré leur partage, mais sans motiver leurs avis, lesquels ne l'ont été que plus tard, serait dale dans le délai qui leur était fixé, et, par exemple, la veille de ce délai, La date de ces avis, pas plus que celle de toute autre décision des arbitres, ne peut être prouvée par témoins pi par présomptions; elle doit l'être par l'acte lui-même (Paris, 19 août 1832) (1). On peut reprocher à cette décision, juste en

née. Ce serait, d'ailleurs, donner un moyen aux arbitres qui voudraient favoriser une partie, de rendre tout jugement impossible, puisqu'il leur suffirait de déclarer avec persistance que l'instruction ne leur parail pas suffisante. Il n'y a, en pareil cas, que le partage et l'appel d'un tiers arbitre qui puisse ouvrir une issue el assurer la fin du procès. Si le tiers arbitre pense qu'il n'y a pas instruction suffisante, il le dira; s'il pense qu'il y a instruction suffisante, il adoptera l'avis de celui qui aura jugé le fond; et, dans l'un et l'autre cas, les parties n'auront pas à se plaindre, puisque, en définitive, c'est l'opinion de la majorité qui l'emportera. Arrêt (ap. délib. en ch. du cons.).

LA COUR; - Sur le premier moyen: Allendu que le partage prenoncé par la sentence arbitrale du 28 mai 1854, sur les 2o, 6o, & et 10 questions, et la nomination d'un tiers arbitre, laissaient en suspens les droits des parties, et ne pouvaient donner licu, contre l'une d'elles, à aucun acte d'exécution; Attendu que le tiers arbitre a consenti, sur la simple représentation de l'acte portant sa nomination, à accepter la mission qui lui était confiée, et que les arbitres se sont volontairement réunis à lui pour conférer sur les questions qui les avaient partagés; Qu'il n'y a pas eu, dès lors, nécessité de notifier l'acte déclaratif de partage et contenant nomination d'un tiers arbitre, et, par conséquent, d'ob tenir une ordonnance d'exécution de cet acte;-Sur le deuxième moyen:

Attendu que le procès-verbal dressé par le tiers arbitre, le 11 juin 1835, porte qu'il a conféré avec les deux arbitres, réunis à cet effet dans son cabinet, sur les questions qui les divisent; » Allendu qu'il n'y aurait eu obligation de sommer les arbitres de se réunir qu'autant qu'ils ne l'auraient pas fait spontanément; Altendu que le procès-yerbal dressé par le tiers arbitre fait foi de ce qu'il contient et prouve, quoi que non signé des deux autres, que leur réunion et leur conférence ont eu lieu; - Sur le troisième moyen: Attendu que la deuxième question posée dans le jugement arbitral du 28 mai 1854 est complexe et embrasse non-seulement l'instruction, mais encore le fond, relatif à l'exécution de l'acte du 19 juin 1820; - Que le refus de l'un des arbitres, de prononcer sur les diverses parties ou sur l'ensemble de celle question, ne pouvait empêcher l'autre arbitre, qui trouvait l'instruction suffisante, de le déclarer et de faire droit au foud; Que le tiers arbitre, nommé pour vider le partage résultant de la diversité des opinions des deux premiers arbitres, n'était pas obligé de ne s'occuper que d'une partie de la question, et a pu, au contraire, adopter dans son entier l'une ou l'autre opinion; Qu'ainsi, le sieur Oger, tiers arbitre, en jugeant que la deuxième question était suffisamment instruite et qu'il y avait lieu d'y statuer, et en adoptant à cet égard, et sur le fond, l'opinion d'un des arbitres, loin de contrevenir à l'art. 1018, qui dispose d'une manière générale « que le tiers arbitre sera tenu de se conformer à l'un des avis des autres arbitres, » en a fait une juste application ; · Rejette, etc.

Du 25 mai 1857.-G. G., ch. civ.-MM. Boyer, pr.-Thil, rap.-Tarbé, av. gén., c. conf.-Moreau et Fichet, av.

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(1) (Raincourt C. Delas.) - LA COUR; ·Considérant qu'aux termes de l'art. 1018 c. pr., applicable en matière d'arbitrage forcé, le tiers arbitre juge seul, à la charge seulement d'appeler auprès de lui les arbitres divisés pour conférer entre eux, Qu'il est tenn de se conformer, en jugeant, à l'un des avis des autres arbitres; Que ces avis sout donc un des éléments essentiels du jugement qu'il prononce, et doivent être valables par eux-mêmes pour que le jugement le soit légalement; - Considėrant qu'ils ne peuvent être valables qu'autant qu'ils sont antérieurs à l'expiration des pouvoirs des arbitres, passé laquelle ceux-ci n'ont plus d'autre mission que de présenter au tiers arbitre les observations qui peuvent l'aider à former sa décision; Que, d'ailleurs, les avis dont l'un doit nécessairement former le jugement définitif, sont respectivement acquis aux parties du jour où le partage a été déclaré, sans que l'un ou l'autre des arbitres puisse ultérieurement modifier le sien;

Considérant que la date d'un avis, pas plus que celle de toute autre décision des arbitres, ne peut être prouvée par témoins ni par des présomptions; qu'elle doit l'être par l'acte lui-même; - Qu'en effet, l'art. 1917 c. pr. dispose qu'en cas de partage, les avis distincts des arbitres seront rédigés, soit dans le procès-verbal qui constate le partage, soit dans des procès-verbaux séparés ;- Que, par procès-verbaux, on ne peut entendre que des actes datés; - D'où il suit qu'à défaut de date, ces avis doivent être considérés comme postérieurs à l'expiration du compromis; Goo sidérant ensuite que les arbitres étaient tenus, d'après les termes du jugo

elle-même, trop de genéralité. En effet, la date des avis dont il s'agit ne doit pas tellement être renfermée dans l'acte même contenant ces avis, qu'elle ne puisse être cherchée ailleurs, ou résulter nécessairement de certaines circonstances. Ainsi, par exemple, si le tiers arbitre avait rendu sa sentence avant même l'expiration du délai donné par le compromis aux arbitres partagés, il est bien évident que le défaut de date serait sans influence; len serait de même si le procès-verbal non daté avait été enregistré dans le délai du compromis, ou si cette date avait été constatée dans un acte authentique passé dans le même temps. Toutefois, l'art. 1328 c. civ. ne serait pas applicable dans toutes ses parties le décès de l'un des arbitres partagés ne pourrait servir à suppléer la date, car le décès de l'un des arbitres mettant fin au compromis, le tiers arbitre ne peut plus, dès lors, rendre sa sentence. On opposerait en vain que le procès-verbal où sont consignés les avis partagés donne au tiers arbitre tous les éléments nécessaires pour prononcer sa sentence. L'impossibilité de la conférence exigée par l'art. 1018 c. pr. rend la position des parties très-inégale, car celle à qui l'opinion de l'arbitre décédé était acquise est loin d'avoir les mêmes chances que les autres pour l'adoption de cette opinion, puisque l'arbitre ne peut plus jouir des avantages incontestables d'une discussion verbale. D'ailleurs, l'art. 1012 est général et fait cesser les effets du comment du tribunal de commerce qui les a saisis de la contestation, de prononcer dans un délai de trois mois, lequel expirait le 4 mars 1831; Que la veille de ce jour, ils ont déclaré, dans leur procès-verbal, qu'ils étaient divisés d'opinion, et ont délaissé les parties a se pourvoir en nomination du sur-arbitre; mais qu'ils n'ont point inséré dans ce procèsverbal la substance de leurs avis opposés; Que les avis qu'ils ont remis au tiers arbitre, plusieurs mois apres, ne sont point datés; -Qu'ainsi, il ne conste point que ces avis aient été arrêtés et signés avant l'expiration des pouvoirs desdits arbitres; qu'ils doivent donc être annulés, et que leur nullité entraîne nécessairement celle de l'avis du sur-arbitre ;- Met l'appellation et ce dont est appel au néant; -Émendant, etc.

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Du 16 août 1832.-C. de Paris.-MM. Vincens, pr.-Berville, av. gén. (1) Espèce :-(Rolland C. Pédron.)- Le navire la Jeune Madeleine appartenait aux divers membres d'une société qui s'était formée pour partager le bénéfice des affrétements. Le sieur Pédron était intéressé dans cette société pour 4/64mes ou 1/16me. Le navire était commandé par le capitaine Rolland, intéressé aussi dans la même société, et ce dernier était tenu, au retour de chaque voyage, de rendre compte à chacun des associés de sa part dans le fret. En 1837, Pédron assigne Rolland devant le tribunal de commerce de Bordeaux, pour s'entendre condamner à lui rendre compte des affrétements de plusieurs années et à lui payer ce qui lui revenait dans les bénéfices, sinon à lui payer une somme de 600 fr. pour lui en donner lieu. Les parties furent renvoyées devant des arbitres forcés, qui seraient tenus de statuer dans les trois mois. · Ces arbitres, au nombre de deux, se réunirent. Pédron produisit les pièces dont i entendait se servir, et, voyant que le capitaine Rolland ne produisait rien de son côté, quoiqu'il eût été mis en demeure, il présenta requête aux arbitres pour que, conformément aux art. 1016 c. pr. et 59 c. com., ils rendissent jugement sur la production qu'il avait faite. Obtempérant à cette requête, les deux arbitres se mirent en devoir de juger, mais ils se trouvèrent divisés d'opinion. Les formalités qui furent remplies par suite de cette division sont constatées par la sentence arbitrale intervenue plus tard en ces termes : « Les deux arbitres nommés par le tribunal de commerce s'étant réunis, ont pris connaissance des pièces, et se sont trouvés divisés d'opinion pour le jugement à porter. Dans cette position, ils ont usé de la faculté qui leur est accordée et ont nommé pour tiers arbitre M. Grangeneuve, notaire de cette ville, lequel déclara, le 17 avril dernier (1858), accepter la nomination. Réunis avec mondit sieur Grangeneuve dans le cabinet de ce dernier, il a été fait une nouvelle lecture des pièces, et, après délibération, le jugement ci-après a été rendu... » Ce jugement, à la date du 25 avril 1858, a condamné Rotland, vu son retard à rendre compte, et par application de l'art. 534 c. pr., à remettre dans les deux mois, à Pédron, les comptes relatifs aux opérations du navire la Jeune Madeleine, sinon, et ce délai passé, à payer audit Pédron la somme de 300 fr. par provision, imputable aux formes de droit, somme que le jugement déclare avoir été arbitrée d'après les renseignements parvenus aux arbitres.

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Pourvoi de Rolland. -1° Violation des art. 57 et 59 c. com., en ce que les arbitres ne pouvaient juger sur les seules pièces produites par le sieur Pédron, tant que ce dernier n'avait pas sommé le demandeur, qui était en retard, de produire ses pièces et mémoires dans les dix jours (art. 57), et tant que ce délai de dix jours, ou le nouveau délai qu'auraient pu accorder les arbitres (art. 58), ne se trouvait pas expiré (art. 59). — On fait ressortir l'importance de ces formalités par cette considération que les jugements arbitraux rendus par défaut ne sont pas susceptibles d'op

promis par le décès de l'un des arbitres, que les choses soient entières ou non.

Au surplus, on ne peut se prévaloir du défaut de date de l'acte déclaratif de partage, alors qu'il y a eu nomination du tiers arbitre dans le délai et conférence entre lui et les arbitres divisés (Req., 21 janv. 1840) (1).

769. Le partage d'opinions déclaré sur un chef remet-il en question ceux sur lesquels les arbitres étaient tombés d'accord? La négative s'induit d'un arrêt de la cour de Paris du 27 janv. 1836 (aff. Reveilhac, V. n° 1153) et de la doctrine de plusieurs auteurs (MM. Locré, Esp. c. com., p. 275; Bellot, t. 3, p. 145).-M. Chauveau sur Carré, no 3345, 5o, estime que néanmoins il ne serait pas convenable de poursuivre l'exécution du jugement relatif aux chefs jugés s'il y avait quelque connexité entre les uns et les autres. Ce conseil peut être fort sage, mais dès qu'on reconnaît qu'il y a jugement, l'exécution peut en être poursuivie, sauf aux parties le droit de demander, et aux tribunaux la faculté d'accorder une surséance.

770. Les arbitres, avant de déclarer partage, doivent-ils, comme les juges ordinaires, se réduire à deux opinions?— MM. Berriat, p. 44, Lepage, Quest., p. 644, Boucher, p. 529, et Carré, Lois de la proc., no 3346, enseignent l'affirmative. Ils se fondent sur l'art. 1009 c. pr.', qui veut que les arbitres suivent les

position. On soutient, du reste, que l'art. 1016 c. pr. ne s'applique pas aux arbitrages forcés. 2o Violation des art. 1017, 1018 c. pr. combinés avec l'art. 60 c. com., en ce qu'il n'est pas constaté que les deux arbitres divisés, dans l'espèce, aient rédigé leur avis distinct et motivé, ce qui cependant est essentiel soit pour justifier la nécessité de nommer un tiers arbitre, soit pour s'assurer que le tiers arbitre a adopté l'avis de l'un des arbitres divisés; - En ce que, d'un autre côté, la déclaration de partage n'est pas datée, quoique la date soit nécessaire pour vérifier si cette déclaration et la nomination du tiers arbitre ont eu lieu dans les délais de l'arbitrage. On soutient, sur ce second moyen, que les art. 1017 et 1018 c. pr. doivent être déclarés applicables aux arbitrages forcés en tout ce qui n'y est pas dérogé par le code de commerce; qu'en effet, tous les auteurs enseignent que le code de commerce s'en est référé au code de procédure pour tous les points qu'il n'a pas réglés. -3° Fausse application de l'art. 554 c. pr. et violation des art. 57, 58 et 59 c. com. en ce que le jugement attaqué a prononcé contre le demandeur une condamnation provisoire, comme étant en retard de rendre le compte qui lui était demandé, tandis que le code de commerce n'autorisait pas une pareille condamnation, et que l'art. 534 c. pr., sur lequel les arbitres se sont fondés, était étranger à l'espèce où on ne voit ni jugement qui ordonne une reddition de compte, ni juge commissaire préposé pour le recevoir, ni enfin aucune des conditions prévues par le code de procédure, au titre des redditions de compte. On prétend que les arbitres, dans l'espèce, n'ayant à statuer que sur une contestation entre associés, devaient se renfermer dans l'application des art. 57, 58 et 59 c. com., c'est-à-dire qu'ils devaient et ne pouvaient prononcer contre le sieur Rolland qu'une condamnation définitive, faute par lui de faire une production suffisante de pièces, et après l'expiration des délais impartis pour cette production. Arrêt.

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LA COUR; Sur le 1er moyen tiré de la prétendue violation des art. 57 et 59 c. com. : Attendu que l'état de la procédure, constaté par la sentence arbitrale, prouve que la sommation dont parle l'art. 57 a été suffisamment suppléée par la requête présentée au tribunal arbitral par le sieur Pédron et signifiée au sieur Rolland, par laquelle requête Pédron demandait qu'à défaut par ce dernier d'avoir fait la production ordonnée par l'art. 57, il fût procédé conformément à l'art. 59;-Sur le 2e moyen, tiré du défaut de date de la décision qui a prononcé le partage d'opinion des arbitres et de la violation des art. 1017 et 1018 c. pr. civ.: Attendu qu'en supposant que les art. 1017 et 1018 soient applicables aux jugements arbitraux rendus en matière commerciale, ce ne pourrait être qu'autant qu'il serait douteux que le tiers arbitre eût été nommé hors du délai imparti aux arbitres pour prononcer leur décision, et que le tiers arbitre ne se serait pas réuni aux deux autres pour connaître leur opinion et délibérer avec eux; et qu'il résulte du jugement arbitral que c'est dans ce délai que le tiers arbitre a été nommé et qu'il y a eu réunion et délibération entre les trois arbitres; Sur le 3 moyen; Attendu qu'en condamnant le sieur Rolland à rendre compte de sa gestion, le jugement arbitral l'a nécessairement soumis à celles des formalités de l'art. 554 c. pr. qui étaient praticables devant les arbitres, et qu'en se bornant à ordonner le compte, sous peine de payement d'une somme provisoire, évidemment inférieure à celle qui devait être le résultat définitif du compte à rendre, le jugement arbitral est plus favorable que préjudiciable au demandeur; Rejette.

Du 21 janv. 1840.-C. C., ch. req.-MM. Lasagni, pr.-Jaubert, rap.Hébert, av. gén., c. conf.-Carette, av.

formes établies pour les tribunaux, à moins de convention contraire or, disent-ils, l'art. 117 ne reconnaît de partage que lorsqu'il y a division entre deux opinions; c'est alors seulement que l'art. 118 permet d'appeler un juge. Si donc, six arbitres étant nommés, chacun émet un avis différent, ils doivent, comme les juges, se réunir à deux avis; autrement, si le tiers arbitre pouvait adopter l'avis de l'un des six, il y aurait cinq voix contraires à celle qui prévaudrait. Or il est de l'essence des choses que tout jugement soit le résultat de la majorité : point de majorité, point de jugement. Néanmoins les auteurs du Praticien fondent l'opinion contraire 1° sur ce que l'art. 1009 ne renvoie aux règles suivies devant les tribunaux que pour les formes de la procédure; 2° sur ce que l'art. 1018 se borne à dire que le tiers arbitre est tenu de se conformer à l'avis de la majorité. Cette opinion des auteurs du Praticien est appliquée, par M. Merson, à l'arbitrage forcé, n° 101, et par M. Mongalvy à toute espèce d'arbitrage. C'est aussi l'opinion vers laquelle M. Chauveau sur Carré, no 3345, paraît incliner, et c'est, en effet, celle qui doit être suivie, d'après cette considération que la loi n'exige pas autre chose des arbitres que de faire connaître leurs avis c'est aux parties de s'imputer de n'avoir pas fait leur choix avec plus de prévoyance, s'il arrive qu'il ne puisse pas y avoir jugement. Il est inutile d'ajouter que des arbitres rempliront plus intelligemment leur devoir, lorsque, mettant de côté tout amour-propre, ils sauront se faire les concessions nécessaires pour arriver à une décision, c'est-à dire pour que le tiers arbitre soit mieux à même de remplir sa mission. Mais, en ne le faisant point, ils ne sauraient encourir une action en dommages-intérêts, alors même que le choix du tiers arbitre leur aurait été dévolu, et qu'ainsi il soit vrai de dire qu'on s'en est rapporté entièrement à eux du soin de mettre un terme à la contestation.

771. On a discuté sur le point de savoir si l'acte par lequel les parties déclarent leur partage d'opinions constitue un jugement véritable. Il a été jugé, sous la loi du 17 déc. 1790, qu'un tel acte n'est point, à proprement parler, un vrai jugement, mais un simple procès-verbal ne renfermant pas une transmission de propriété, non soumis dès lors à la formalité de l'enregistrement (Rej., 19 pluv. an 5; M. Chupiet, rap., aff. Brasset C. Hammel).

Cette proposition, qui reproduit le texte littéral de l'arrêt sur ce point, aurait de la peine à se soutenir seule dans le principe qu'elle énonce; car, outre que l'art. 1012 qualifie de décision l'acte de partage, on ne saurait lui dénier les caractères principaux du jugement.

Le jugement déclaratif de partage doit-il être revêtu de l'ordonnance d'exécution? — V. le chap. 11, art. 6.

772. 2° Avis distinct et motivé des arbitres. L'art. 1017 veut que les arbitres rédigent leur avis distinct et motivé soit dans un même procès-verbal, soit dans des procès-verbaux séparés. C'est ce qui résulte clairement des termes de cet article, et c'est avec juste raison qu'il a été décidé qu'il n'y a pas nullité de ce que le discord n'a pas été constaté par deux procès-verbaux séparés (Agen, 10 août 1811, aff. Luppé, V. infrà). — On jugeait sous la loi du 10 juin 1793 que les arbitres devaient rédiger en commun le procès-verbal constatant le partage : c'est ce qu'on fondait sur l'art. 15, sect. 5, de cette loi, « Attendu, porte l'arrêt, que cette disposition oblige les arbitres à rédiger en commun le procès-verbal qui constate le partage de leurs opinions, et que l'inobservation de cette loi rend l'opération des arbitres incertaine et sans effet; - Casse.» (22 fruct. an 5.-Sect. civ.-M. Giraudet, rap.-Aff. Birschaustheim.)-L'art. 1017 c. pr., est moins exclusif; il accorde aux parties la faculté de la rédaction en commun ou par avis séparé : cela est plus simple et d'une exécution plus propre à éviter les conflits entre les arbitres divisés et à donner plus de relief à chaque opinion.

773. Cette disposition est-elle prescrite à peine de nullité? Rien de plus constant que la jurisprudence qui s'est prononcée pour la négative (Agen, 20 janv. 1852, aff. Meulhet, V. n° 1025), mais rien de plus erroné non plus que ce principe général, si l'on prétendait l'appliquer dans tous les cas on verra tout à l'heure dans quel sens il doit être entendu; mais quant à présent, bornons-nous à constater que le principe se trouve posé dans la plupart des arrêts qui seront indiqués ci-dessous, et remarquons que ce principe serait une source constante d'erreurs s'il TOME V.

était accepté dans les termes généraux où il est énoncé. Pour apprécier la justesse des applications qui en ont été faites, il est indispensable de se référer aux espèces, et surtout de combiner l'art. 1017 avec l'art. 1018; car il résulte de cette dernière disposition que, lorsque les arbitres prennent part à la décision avec le tiers arbitre, le procès-verbal constatant les avis distincts devient tout à fait superflu.-V. nos 835 et suiv.

774. On a vu que, dès qu'il est constant que le partage existe entre les arbitres, il n'est pas indispensable, pour que les parties puissent aller en avant, qu'il soit rédigé par les arbitres un acte de partage à plus forte raison n'est-il point de nécessité im périeuse qu'ils aient rédigé chacun leur avis distinct et mɔti vé. Cela aurait lieu manifestement si les parties avaient investi le ti ers arbitre du droit de juger sans être tenu de se réunir à l'avis de l'un des arbitres (Req., 18 mai 1814, aff. Muguet, V. no 758). 775. Ensuite les parties peuvent dispenser les arbitres de rédiger un procès-verbal, contenant leurs avis distincts.Mais, d'une part, cette dispense ne doit s'entendre que des points sur lesquels il y avait eu dissidence, et non des points sur lesquels, s'étant trouvés d'accord, il y a eu de leur part jugement définitif a ce sujet (Agen, 6 déc. 1844, aff. Molié; D. P. 43. 2. 74). - De même aussi, la dispense ne saurait résulter, pour les arbitres, de ce qu'ils ont été investis du caractère de bons et amiables compositeurs ayant pouvoir de juger sans être tenus d'observer aucune des formalités prescrites par la loi (Pau, 24 av. 1823, aff. Casse, V. no 785). En effet, la rédaction d'avis distinct est, comme le remarque l'arrêt, de l'essence de la mission du tiers arbitre, et ce n'est point là une simple forme qui puisse être rangée dans la dispense prévue par le compromis. Au reste, l'arrêt cité pose cette proposition dans ses motifs, mais il en écarte ensuite l'application par le motif que les parties se trouvaient dans l'un des cas prévus par l'art. 1018.

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776. Les parties sont réputées avoir renoncé à se prévaloir du défaut de rédaction de ce procès-verbal, lorsque, sur la con. naissance que les arbitres leur ont donnée de leur dissentiment, elles ont elles-mêmes nommé le tiers arbitre (Pau, 24 av. 1823, aff. Casse, V. no 785). · Mais cette interprétation qui a éle donnée à l'arrêt n'est pas exacte: en se référant à l'espèce, on voit qu'il y avait eu conférence entre les arbitres et le tiers arbitre, et même jugement arrêté en commun, ce qui rendait tout à fait inutile, d'après la jurisprudence, la rédaction d'avis distinct. Mais, quant à la question en elle-même, et si nulle conférence n'avait eu lieu avec les arbitres, elle ne nous paraîtrait pas devoir être jugée dans le sens qui a été attribué à l'arrêt ci-dessus. On ne concevrait pas, en effet, comment il pourrait se faire que, de cela que les parties auraient elles-mêmes nommé le tiers arbitre, faculté qu'elles ont pu se réserver, elles seraient censées avoir dispensé les arbitres de rédiger leurs avis, puisque sans cette condition, et si les arbitres n'entrent pas en conférence avec lui, la mission du tiers arbitre sera légalement impossible.-D'ailleurs, et ceci est péremptoire, si le système que l'on combat était conforme à l'esprit de la loi, on devrait dire que les arbitres seraient pareillement dispensés de la rédaction de leurs avis, lorsque, à défaut de s'entendre sur le choix du tiers arbitre, la désignation devrait en être faite, en arbitrage volontaire par le président du tribunal, et en arbitrage forcé par le tribunal de commerce. Or, qui oserait soutenir une thèse semblable? -Revenons à ce qui est exact. La désignation du tiers arbitre faite par les parties, constatant virtuellement le partage, peut bien dispenser d'ur procès-verbal ou jugement établissant le fait unique du dissentiment des arbitres : elle ne doit pas les dispenser de rédiger leurs avis. Ce n'est que dès qu'on quitte la limite de l'art. 1017, pour entrer dans le domaine de l'art. 1018, c'est-à-dire que les arbitres et tiers arbitre ont été mis en présence et ont conféré entre eux, ou que ceux-là ont pris part au jugement, que le défaut de rédaction d'avis distinct et séparé ne peut plus être proposé comme cause de nullité de la sentence émanée du tiers arbitre. - Mais n'empiétons pas sur l'art. 1018 et restons dans les termes de l'art. 1017 et dans ceux de l'art. 60 c. com.

777. Il a été jugé, dans le sens de l'interprétation qu'on vient d'exprimer et par application de l'art. 60 c. com., que le sur-arbitre a pu être nommé par le tribunal de commerce à la demande de l'une des parties fondée sur le partage des arbitres, bien qu'il

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