Page images
PDF
EPUB

114. L'acte est inutile, quand il est devenu sans objet, comme cela se présente après la défaillance de la condition suspensive, pour l'acte affecté de cette modalité, ou pour celui qui transfèrerait la propriété d'une chose déjà détruite. 115. L'acte est nul, si ayant la propriété de produire des effets de droit, par suite de son existence propre et de celle de son objet, il en est néanmoins privé par la loi. La nullité se présente sous deux variétés : nullité de droit et annulabilité.

116. La nullité de plein droit est destinée à sanctionner les prohibitions de la loi. Elle est d'ordre public: le juge n'a pas à la prononcer, car la loi elle-même s'en est chargée; il doit se borner à la constater pour en déduire les conséquences qui s'y rattachent. Sans doute, il y aura le plus souvent à apprécier, eu égard à leur influence sur les bonnes mœurs et l'ordre public, les faits d'où découle la nullité, mais il ne lui est point loisible de maintenir l'acte accompli en violation des dispositions obligatoires de la loi. Il en résulte plusieurs conséquences également graves par leur portée pratique : 1o que cet acte est privé d'effets dès sa naissance, comme s'il était inexistant; 2o qu'il peut être attaqué par toute personne intéressée à en faire prononcer la nullité; 3° que cette nullité ne peut pas être couverte par la confirmation des intéressés, car cette confirmation rencontre dans les prescriptions de la loi les mèmes obstacles que l'acte à couvrir; 4o que la nullité de l'acte persiste indéfiniment et ne peut pas se prescrire. Malheureusement, les cas où la nullité est de droit n'ont pas été désignés par la loi avec une précision suffisante et à côté des cas où elle résulte d'un texte formel, il en est d'autres nombreux où elle est seulement prononcée d'une manière tacite.

117. La simple annulabilité est d'ordre privé. Elle a pour but la protection d'un intérêt particulier. La loi ne l'a point décrétée à l'avance, mais elle a confié aux tribunaux le soin de la prononcer. Il en résulte, à l'encontre de ce qui se produit pour la nullité de droit: 1° Quelle ne peut être prononcée que sur la requète du titulaire (ou de son représentant) de l'intérêt qu'elle est destinée à protéger, et non [point sur la

requête de tout intéressé; 2o Que l'acte annulable n'est point nul dès sa naissance, mais produit ses effets jusqu'à ce que la nullité ait été prononcée : toutefois la nullité est rétroactive; 3o L'annulabilité cesse si l'acte vient à être confirmé, et dans ce cas, sa validité remonte à son origine et ne date point seulement de la confirmation (129); 4° L'action en nullité est soumise à la prescription.

L'annulabilité a généralement pour cause les vices de la volonté, et constitue alors une mesure de protection pour l'auteur ou la partie dont la volonté n'a pas été libre et éclairée. Mais elle peut aussi être fondée sur d'autres motifs établis en faveur d'une personne déterminée (mineurs).

IV. DE LA PREUVE.

118. On entend par preuves les moyens propres à convaincre les juges dans le cas où l'on se voit contester un droit. La justice n'accorderait aucune protection au droit qui ne serait pas établi; aussi dit-on avec raison que l'existence d'un droit n'est rien si on n'en peut pas fournir la preuve. Or, c'est là, souvent, une source de graves difficultés. Il en résulte que l'obligation de faire la preuve est un véritable fardeau pour celui à qui elle incombe et qu'il est pour lui du plus haut intérêt de se constituer en temps voulu des éléments de preuve suffisants.

119. D'abord, à qui incombe ce fardeau? Il est de règle que les personnes sont indépendantes les unes des autres. Elles ne se doivent rien le unes aux autres en dehors des engagements qu'elles peuvent avoir pris en vertu d'actes juridiques, ou de ceux que la loi leur impose comme conséquence de certains faits matériels dommageables pour autrui (blessures aux personnes, dégâts causés aux biens, etc.). En outre, celui qui invoque un acte juridique, ou un fait matériel, comme constitutifs d'un droit en sa faveur, doit prouver l'existence de cet acte, la réalité de ce fait. Pareillement, celui qui, après avoir contracté volontairement ou par l'effet de la loi une dette vis-à-vis d'autrui, se croit libéré doit prouver l'acte ou le fait d'où résulte sa libération par exemple, le locataire devra,

[graphic]

les deux cas, d'ailleurs, la contestation sera réglée non suivant la procédure de l'inscription de faux, mais suivant celle, beaucoup plus simple et rapide, de la vérification d'écriture (P. civ., 18 os. De cette épreuve, l'acte pourra sortir comme faux ok sera de nul effet comme preuve, ou bien il sera reconnu par la partie adverse ou légalement tenu pour reconnu.

Dans ces deux derniers cas, il a entre ceux qui l'ont souscrit,
ontre leurs héritiers et ayants cause la même foi que l'acte
authentique (C. civ., 1322). Son contenu pourra bien être con-
testé comme celui de l'acte authentique, mais la nature des
preuves à opposer à ses affirmations ne sera pas fondée sur les
menes distinctions. Elle dépendra des motifs sur lesquels
repose la contestation: si l'acte est attaqué comme mensonger,
bien que n'ayant subi ni modification frauduleuse ni falsifica-
tion depuis qu'il a été rédigé, son caractère mensonger aura
pour cause: ou bien la fraude ou le dol, et dans ce cas toule
preuve sera admise pour rétablir la vérité (C. civ., 1353); ou bien
la simulation ou le déguisement, et alors l'acte ne peut être
combattu que par un autre écrit appelé contre-lettre (1);
mais si contre l'acte sincère à l'origine, et déjà reconnu volon-
tairement ou en justice, sont invoquées des modifications frau-
duleuses par additions, grattages ou surcharges, il y a falsifi-
cation d'écritures, et son contenu ne peut être combattu que
par la procédure de l'inscription de faux (P. civ., 214).

127. Il est bien nécessaire de noter que les actes privés ne
peuvent être opposés aux tiers et n'ont d'effets contre eux
qu
'autant qu'ils ont une date certaine et un écrit à date cer-

taine: to du jour de la mort de l'une des personnes qui l'ont

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

ici toutes les personnes autres que les parties et leurs ayants cause à titre universel.

128. L'acte juridique par lequel on concède un droit à autrui s'appelle acte constitutif. L'écrit destiné à servir de preuve à un acte juridique ou à un fait, et passé au moment où ils se sont accomplis, s'appelle acte primordial. On appelle acte confirmatif l'acte qui interviendrait dans la suite pour constater la confirmation ou la ratification d'un acte juridique dans le cas où celui-ci se trouverait menacé de nullité ou de rescision, soit, par exemple, par suite de l'incapacité de son auteur ou par suite d'un vice du consentement. On appelle récognitif l'acte qui intervient pour reconnaitre l'existence d'un droit.

129. La valeur de l'acte de confirmation ou de ratification, est fort limitée. Cet acte n'est valable que lorsqu'on y trouve la substance de l'acte primordial, la mention du motif de l'action en nullité ou en rescision et l'intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée. En d'autres termes, il faut que l'écrit fasse la preuve de ces faits que l'auteur avait pleine conscience de la menace de nullité pesant sur l'acte à confirmer ou ratifier, et que son intention est bien de l'en délivrer en renonçant à l'action en nullité ou en rescision que la loi lui réservait (117). Toutefois un écrit n'est point nécessaire pour établir la preuve d'une ratification ou confirmation : il suffit pour cela qu'il ait été fait volontairement à l'engagement qui avait été contract l'époque à laquelle l'obligation pouvait être valablem ée ou ratifiée. Exemple : un mineur achète à crédit bligation qu'il prend d'en payer le prix est suscept fiée par les tribunaux, car le mineur est frappé d devenu majeur et par conséquent capable, il po e pas immédia"atifier son engagement [ dans ce cas, onstancié, et co uteur agit rait pas

[graphic]

pour être admis à exercer ses droits prouver, l'existence du bail qui les lui confère, et s'il se prétend libéré du prix de son loyer, il en devra faire la preuve; de la même façon, le cultivateur qui se prétend trompé par son marchand d'engrais ou de semencés doit prouver le fait matériel qui constitue la fraude insuffisance de dosage ou défaut de germination, etc., s'il veut qu'il lui soit assuré réparation du dommage par les tribunaux, et le marchand qui prétendrait s'être libéré en donnant cette réparation doit lui-même le prouver.

120. D'une manière générale, il y a donc à prouver ou des faits matériels, ou des actes juridiques. Or, ces deux sources de droits sont loin d'être soumises aux mêmes règles en ce qui concerne les modes de preuves permis à leur égard. Pour les simples faits matériels, la règle générale est que tout moyen susceptible de convaincre le juge peut être employé en particulier la preuve par témoins. Pour les actes juridiques, la règle est contraire, et la loi exige en général que la preuve soit fournie par écrit. La raison de ces différences est que l'écrit est, de toutes les preuves, la plus certaine, mais que si on peut très généralement l'obtenir quand il s'agit d'un acte juridique, cela devient le plus souvent impossible quand il s'agit d'un simple fait. L'admission de tout mode de preuve à l'égard de celui-ci est donc une nécessité pratique. Ces règles générales comportent d'ailleurs des exceptions inhérentes à la nature des faits ou des actes à prouver, et que nous indiquerons s'il y a lieu en étudiant les matières auxquelles elles se rapportent.

121. Les modes de preuve admis par la loi sont au nombre de cinq, savoir: 1° la preuve littérale; 2o la preuve testimoniale; 3o les présomptions; 4° l'aveu; 5° le serment.

Preuve littérale ou preuve par écrit.

122. Elle peut se présenter sous plusieurs formes. Les deux principales sont l'acte authentique et l'acte sous seing privé. Le Code civil fait aussi figurer sous ce titre les registres des marchands, les registres et papiers domestiques, les tailles, les

« PreviousContinue »