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donnée à son goût. Il ne pourra pas être tenu de prendre des denrées qui ne lui conviennent pas. S'il achète pour revendre, ou pour l'usage de son personnel, il suffira, pour qu'il soit tenu d'accepter les marchandises, qu'on les lui livre de qualité loyale et marchande.

3o Il est des choses que l'on est dans l'usage d'essayer avant de les accepter: tels sont les animaux, même sur un champ de foire. Le prix en est généralement fixé après un examen des plus superficiels, mais l'acceptation en est subordonnée à un examen plus approfondi et quelquefois à un véritable essai. Là encore, l'acquéreur pourra être plus ou moins exigeant selon la destination de la chose qu'il achète : pour un cheval de selle, il pourra exiger d'autres qualités que pour un cheval de charrue, etc. La vente à l'essai est toujours présumée faite sous condition suspensive, de sorte que jusqu'à l'acceptation, les risques sont à la charge du vendeur, sauf le cas de stipulation contraire. Mais les parties pourraient aussi affecter la vente à l'essai de la condition résolutoire, et dans ce cas les risques incomberaient à l'acquéreur jusqu'au moment de la résolution.

605. Il arrive quelquefois, la vente conclue, que l'une des parties remette à l'autre une somme en attachant à ce fait une signification particulière et qui diffère suivant les cas. Quelquefois, cette somme est simplement l'expression des dommages-intérêts auxquels pourrait donner lieu la résiliation du contrat, de telle sorte que la partie qui l'a remise sera déliée de ses engagements à la seule condition de l'abandonner à l'autre, et celle-ci de même à la condition de payer le double : dans ce cas la somme remise porte le nom d'arrhes ou dédit. D'autres fois, elle est remise à titre d'acompte, ou bien encore pour indiquer que le contrat est irrévocablement conclu : on lui donne alors le nom de denier à Dieu. Il importe donc de distinguer les arrhes du denier à Dieu, car la signification en est nettement différente. La distinction sera cependant d'autant plus difficile que la somme donnée avec une même signification porte quelquefois les deux noms différents dans des pays différents. Elle s'établira sur ce fait que le denier à - Dieu représente en général une somme de peu de valeur eu

égard au contrat, tandis que les arrhes ont une importance suffisante pour couvrir la perte qu'éprouverait l'une des parties si le contrat n'était pas exécuté.

Mode extérieur de la vente.

606. Par rapport à son mode extérieur, la vente peut être privée ou publique. On la dit privée lorsqu'elle a lieu de gré à gré, c'est-à-dire à la suite de négociations engagées sans aucune forme particulière, et publique, lorsqu'elle a lieu aux enchères publiques.

607. La vente privée peut avoir lieu par acte notarié, ou par acte sous seings privés, ou mème hors de la présence d'aucun témoin, mais elle est soumise aux règles générales en ce qui concerne la preuve. En fait, les ventes d'immeubles ont lieu devant notaire le plus souvent et en fait toujours, sinon en droit, il en résulte une garantie plus grande pour l'acquéreur, le notaire étant plus apte à assurer l'accomplissement des formalités accessoires telles que vérification des hypothèques qui pourraient grever le bien, vérification des titres de propriété, transcription de l'acte de vente, etc. Les ventes de meubles ont lieu plutôt de la main à la main, et cela suffit car l'acquéreur est protégé par la règle en fait de meubles la possession vaut titre.

608. La forme publique, pour la vente, peut être volontaire ou forcée. La loi la rend obligatoire pour la vente des biens appartenant aux mineurs et aux interdits, dans leur propre intérêt et pour celle des biens saisis dans l'intérêt des créanciers. Les ventes pour lesquelles la forme publique est obligatoire ne donnent lieu ni à la garantie des vices rédhibitoires ni à la rescision pour cause de lésion.

Effets de la vente.

609. La vente fait naître une obligation de donner qui a pour conséquence un transfert de propriété, immédiat ou non, selon que la vente est ou non affectée d'une condition suspensive et opposable aux tiers ou non selon qu'il s'agit de

meubles ou d'immeubles, selon que l'acte a été transcrit ou non, d'après les règles qui ont été déjà analysées. Avec le transfert de la propriété, s'opère également un déplacement des risques.

Mais la vente donne également naissance à d'autres obligations dont l'étendue peut être modifiée par des conventions particulières et que nous étudierons séparément pour le vendeur d'abord et pour l'acheteur ensuite.

610. Obligations du vendeur. Le vendeur est tenu d'expliquer clairement ce à quoi il s'oblige. En matière de contrats, il est de règle générale que ce qui est ambigu s'interprète par ce qui est d'usage dans le pays où le contrat est passé (C. civ., 1159), mais quand il s'agit de la vente, tout pacte obscur ou ambigu s'interprète contre le vendeur. En dehors des particularités qui peuvent résulter de clauses spéciales celuici est tenu à deux obligations principales: 1o délivrer la chose; 2o la garantir.

611. Obligation de délivrer la chose. La délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance ou possession de l'acheteur (C. civ., 1604). Elle s'opère de façon différente suivant la nature de cette chose. S'il s'agit de meubles, ce sera par la tradition réelle ou la remise des clefs des bâtiments qui les contiennent, ou même par le seul consentement des parties si le transport ne peut pas s'en faire au moment de la vente ou si l'acheteur les avait déjà en son pouvoir à un autre titre. La tradition des droits incorporels se fait ou par la remise des titres, ou par l'usage que l'acquéreur en fait, du consentement du vendeur. La délivrance des immeubles se fait ou par la remise des clefs s'il s'agit d'un bâtiment ou par la remise des titres de propriété.

La délivrance doit se faire au terme convenu. Elle doit se faire au lieu où était, au temps de la vente, la chose qui en a fait l'objet. Les frais en sont à la charge du vendeur, ceux d'emballage et de transport, à celle de l'acheteur.

La chose doit être livrée dans l'état où elle se trouve au moment de la vente, mais avec ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel; tels seront les immeubles par destination dans le cas de vente d'un bien rural.

:

Pour ce qui est des fruits, les règles admises sont celles qui ont été appliquées pour l'usufruit les fruits en nature ne suivent le sol qu'autant qu'ils ne sont pas détachés et les fruits civils s'acquièrent jour par jour.

Le vendeur est tenu de délivrer la contenance telle qu'elle est portée au contrat; si cela ne lui est pas possible, trois cas sont à examiner.

1o La vente a porté sur un seul immeuble et a été faite avec indication de la contenance à raison de tant la mesure: si l'étendue livrée n'est pas l'étendue promise, le prix total sera exactement proportionnel à l'étendue livrée, de sorte qu'il sera tenu compte de toute diminution comme de toute augmentation par rapport à l'étendue promise. L'acquéreur pourrait même refuser d'en prendre livraison si la contenance était supérieure d'un vingtième à celle qui avait été annoncée. 2o La vente a porté sur un bloc dont la contenance et le prix ont été indiqués en totalité : dans ce cas, il n'y aura lieu à augmentation ou à diminution du prix pour excédent ou déficit de contenance que si la différence entre la contenance réelle et celle qui a été déclarée est d'un vingtième au moins. Si la contenance, supérieure, donne lieu à une augmentation du prix, l'acquéreur aura le choix entre verser la différence avec les intérêts pour garder la chose vendue, ou résilier le contrat. Il aurait même dans ces deux cas la faculté de résilier également pour défaut de contenance, s'il prouvait que la chose est, pour cette raison, impropre à l'usage auquel il la destinait.

3o Il a été vendu deux fonds par un seul et même contrat, pour un seul et même prix, avec désignation de la mesure de chacun dans ce cas, si l'un est plus grand et l'autre plus petit qu'il n'a été annoncé, on établira une compensation jusqu'à due concurrence entre les deux, et c'est seulement après cette compensation que se règlera l'augmentation ou la diminution. du prix conformément aux principes applicables à l'un ou à l'autre des deux cas précédents.

612. L'action ou supplément du prix de la part du vendeur et celle en diminution de la part de l'acheteur doivent ètre intentées dans l'année, à compter du jour du contrat, à peine de déchéance.

Dans tous les cas où l'acquéreur a le droit de se désister du

contrat, le vendeur lui doit, outre le prix s'il l'a reçu, les frais de ce contrat.

613. Le vendeur cesse d'être tenu de livrer la chose si l'acheteur ne paie pas le prix au terme convenu ou bien, dans le cas où un terme lui aurait été accordé pour le paiement, si depuis la vente il est tombé en faillite ou en déconfiture. Dans ces conditions, en effet, l'acheteur se trouvant dans l'impossibilité de remplir son engagement, on ne peut imposer au vendeur l'obligation de satisfaire au sien. Mais il en serait autrement si l'acheteur donnait caution de payer au terme.

614. Obligation de garantie. Le vendeur doit garantir à l'acheteur la possession paisible et la possession utile de la chose vendue.

615. Lui garantir la possession paisible, c'est s'abstenir luimème de tout fait qui serait de nature à porter atteinte aux droits qu'il a cédés et garantir semblable abstention de la part des tiers. Si l'acquéreur vient à ètre troublé dans sa possession par un tiers, le vendeur devra intervenir en justice pour faire cesser le trouble et s'il n'y parvient pas, celui-ci aboutissant à une éviction soit partielle, soit totale de l'acquéreur, ce dernier aura droit à des dommages-intérêts calculés plus ou moins largement selon que le vendeur était de bonne ou de mauvaise foi.

616. Le vendeur doit encore garantir la possession utile et pour cela, répondre des vices rédhibitoires. On entend par là les défauts cachés de la chose vendue, qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. Les vices apparents et que l'acheteur a pu constater lui-même ne donnent lieu à aucune garantie. Mais les vices apparents dont l'acheteur n'aurait pas pu avoir connaissance, soit, par exemple, par suite des circonstances dans lesquelles le marché a été conclu, deviennent vices rédhibitoires. Réciproquement, les vices. cachés si l'acquéreur en a eu connaissance lors de la vente, cessent d'être rédhibitoires. Ces vices peuvent affecter les meubles aussi bien que les immeubles.

617. L'acheteur a le choix entre rendre la chose et se faire

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