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pas encore écoulé trois mois depuis que le jugement qui rejette les nullités a été rendu. Nous indiquons cette marche à la partie, parce que nous pensons que le cas qui nous occupe n'étant qu'un sujet d'argumentation, il ne doit rentrer dans la règle générale qu'autant qu'il est exécutable avec cette règle, car la loi n'a pu vouloir l'impossible. Du moment donc qu'elle a ouvert deux voies pour attaquer l'acte qualifié jugement arbitral, l'une pour le faire annuler, s'il est entaché des vices prévus par l'art. 1028, et l'autre pour le faire réformer pour griefs justifiés, elle n'a pas entendu offrir un recours illusoire; en conséquence, elle a voulu accorder le temps nécessaire pour faire vider toutes les difficultés, et il est évident que son vœu ne serait pas rempli si l'on prétendait que le temps qui s'écoule pour l'instance en nullité compte dans le délai fixé par l'art. 443, et si ce délai étant révolu, après le jugement qui rejette les moyens de nullité, on voulait priver la partie de recourir à la voie d'appel pour faire valoir ses griefs contre la sentence reconnue avoir caractère de jugement, et cela dans le délai déterminé.

Par tous ces motifs, nous pensons donc que le délai de l'appel ne peut rigoureusement courir que du jour où les moyens de nullité ayant été rejetés, l'acte arbitral a reçu le caractère de jugement.

Nous ajouterons même que si la partie faisait appel du jugement qui a rejeté ses moyens de nullité contre la sentence arbitrale, le délai pour proposer ensuite les griefs contre ce jugement par la voie d'appel, ne partiraitque du jour de l'arrêt confirmatif dudit jugement.

V. Touchant la renonciation à l'appel, nous allons, comme sur la précédente question, faire quelques observations qui nous semblent utiles.

Premièrement. On doit distinguer dans l'art. 1010 C. Pr., deux dispositions, l'une relative au cas où l'arbitrage a lieu dès l'origine de la contestation; l'autre relative au cas où l'arbitrage est convenu après que la contestation est passée par les voies de l'appel ou de la requête civile, c'est-à-dire après qu'il y a eu décision sur l'une ou l'autre voie prise; car, s'il n'y a encore que de simples actes de pourvoi à l'une ou à l'autre, le compromis est réputé avoir eu lieu sur le fond primitif de l'affaire, arrêt de la cour de cassation, 17 juillet, 1817, S. XVIII, 1, 331.

Dans le premier cas, les parties peuvent, lors ou depuis le compromis, renoncer à l'appel; dans le second cas, comme le jugement arbitral est définitif et sans appel, il est évident qu'on ne peut stipuler, dans un compromis sur appel ou sur requête civile, que le jugement à intervenir sera sujet à l'appel; par conséquent une renonciation à cette voie serait inutile.

La raison qui fait interdire l'appel dans cette dernière hypothèse, c'est que les parties ont déjà subi deux degrés de juridiction sur le litige, et que la loi, qui tend toujours à mettre un terme aux procès, voulu permettre aux parties de reculer ce

n'a pas

terme en prenant une voie déjà parcourue.

Ainsi, on peut faire appel, ou y renoncer, lorsque le compromis est fait au début de la contestation, ou

même sur jugement de première instance, mais cette faculté est prohibée lorsque le compromis a lieu sur appel ou sur requête civile. Tel est est le véritable esprit de la loi : elle a voulu que, dans ce dernier cas, l'arbitrage fùt souverain, parce qu'il ne peut jamais y avoir trois degrés de juridiction, et que ce serait sortir des bornes du droit commun, chose qui cependant arriverait, puisque la clause du compromis, si elle était autorisée, conduirait à faire prononcer deux fois sur un appel.

A cette opinion, qu'il est facile de se former d'après le texte de l'art. 1010 C. Pr., se réunissent celles de divers commentateurs. (On peut voir M. Pi geau, t. Ier, p. 22; Delaporte, t. II, p. 480; DemiauCrouzhillac, p. 575; Carré, n. 3292 et autres. )

Toutefois, ces auteurs, et cela est sensible, sont d'avis que la stipulation de faire appel ou d'y renoncer, alors que le compromis est sur appel ou sur requête civile, n'entraîne pas la nullité de ce compromis, et, par suite, de la sentence qui interviendrait; seulement la clause serait réputée non écrite.

Secondement. Il est à remarquer que la renonciation serait encore sans effet, si elle était consentie par le tuteur d'un mineur ou le représentant d'un incapable, intéressé à la contestation.

Troisièmement. Les parties doivent savoir que leur renonciation à l'appel doit être unanime, comme dans le cas de révocation (1008); non seulement l'art. 1010 l'exige par cette disposition : Les parties pourront renoncer à l'appel; mais, parce qu'il est de

principe (1134 C. C.) que les conventions ne peuvent être détruites que de la même manière qu'elles ont été formées.

aux

Les parties doivent aussi exprimer en termes formels leur renonciation à la voie d'appel, afin d'éviter toute difficulté d'interprétation sur leur intention à cet égard. Cependant, nous verrons questions et décisions ce qui a été décidé par les cours supérieures, dans les cas où la renonciation n'est pas énoncée en termes exprès; mais, nous conseillons aux compromettans de ne laisser aucun doute dans la manifestation de leur volonté pour renoncer l'appel.

Quatrièmement. Enfin, nous devons ajouter que si les parties, tout en faisant cette renonciation à l'appel, étaient convenues d'une peine contre celle qui appellerait, l'appel ne serait pas moins recevable, parce qu'on ne pourrait voir, dans ce cas, une renonciation absolue, mais seulement un dédit ou manque de tenir sa promesse, laquelle peut être rachetée en payant la somme convenue, dès l'instant de la signification de l'acte d'appel, ou au moins en faisant des offres réelles avant de plaider. En la peine serait exigible par l'autre partie, aussitôt qu'elle aurait connaissance de l'appel. Tel est également l'avis de M. Carré, n. 3293.

tout cas,

QUESTIONS ET DÉCISIONS.

1o (DÉLAI, JUGEMENT, ORDONNANCE D'EXÉCUTION. Peut-on interjeter appel d'un jugement arbitral, quoi

qu'il ne se soit pas encore écoulé huit jours depuis l'ordonnance d'exécution, alors qu'il s'est écoulé plus de huit jours depuis la date du jugement?

Décidé affirmativement par la cour de cassation, arrêt du 14 ventôse an VI, D., t. Ier, p. 808, qui a considéré que a d'après l'art. 14 du titre 5 de la loi » du 16 août 1790, la déchéance de l'appel ne s'ap>> pliquait qu'au cas où il avait été signifié avant le » délai de huitaine; qu'aucune loi n'avait fixé la date » d'un jugement arbitral au jour de l'ordonnance qui » l'avait rendu exécutoire, qu'ensorte cette ordon»nance ne changeait rien à la véritable date. »

Il en serait de même sous notre Code de procédure; l'art. 449 établit qu'aucun appel d'un jugement non exécutoire par provision, ne peut être interjeté dans la huitaine, à dater du jour du jugement.

En conséquence, les règles et les formes pour l'appel des jugemens des tribunaux ordinaires étant applicables aux jugemens arbitraux, et la loi n'ayant nulle part établi de distinction, nous pensons que la huitaine dans laquelle on ne peut interjeter appel, court du jour du jugement, et non de celui où l'ordonnance d'exécution a été délivrée.

2o. (DÉLAI, SIGNIFICATION, ÉCHÉANCE.) Dans le calcul du délai de l'appel, faut-il compter le jour de la signification du jugement et celui de l'échéance des délais accordés pour appeler ?

La cour de cassation, par plusieurs arrêts, et notamment par ceux des 20 novembre 1816 et 9 juillet 1817, S., XVII, 1, 192 et 334, a toujours décidé cette question pour la négative. Cette cour s'est fondée sur

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