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» déclarer nulle une décision à laquelle elle était » fondée à refuser la qualité de décision arbitrale. » En effet, il s'agissait d'un compromis nul.

Cet arrêt vient encore à l'appui de l'observation Taite plus haut, que s'il existait dans la loi un délai déterminé pour l'exercice de l'action en nullité, c'eût été le cas de s'en prévaloir de la part du demandeur en cassation, puisque, dans la cause, cette action avait été formée à une époque éloignée de la signification du jugement arbitral, et après un appel qui n'eut pas de succès; en outre, c'eût été pour la cour régulatrice une occasion de faire de ce délai un motif de décision.

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Enfin, il n'est pas également inutile d'observer que cette cour a décidé, par le même arrêt, que si un jugement arbitral rendu contre des mineurs et une mère tutrice, ayant avec eux des intérêts communs et connexes, porte en même temps atteinte aux droits particuliers de celle-ci; et si la nullité en est deman dée par le subrogẻ-tuteur, la mère tutrice peut intervenir dans l'instance.

On peut voir les motifs de cette dernière partie de l'arrêt du 28 mai 1818, D., t. Ier, p. 797, dont nous ne donnons ici que l'analyse pour servir d'indi cation et de guide en d'autres espèces.

2o Il est aujourd'hui invariablement décidé que si des associés ont voulu profiter du droit essentiel et primitif qui appartient à tous les citoyens de se faire juger par des arbitres volontaires et amiables-compositeurs, ces arbitres ne sont plus réputés arbitres forcés; en conséquence, si leur jugement renferme des

contraventions de la nature de celles spécifiées en l'art. 1028, c'est la voie de nullité devant les tribunaux ordinaires qui est recevable contre ledit jugement, et non la voie d'appel, comme dans le cas où ce jugement serait rendu par des arbitres forcés auxquels les parties auraient laissé ce caractère. (V. à l'Arbitrage forcé, au mot Action en nullité.)

Ce point de jurisprudence résulte des arrêts de la cour suprême, des 16 juillet 1817, 6 et 13 avril 1818 23 juin 1819, 1er mai 1822, D., t. Ier, p. 633, 635, 637, 799; S., XVII, 305; XVIII, 326, XX, 35.

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La stipulation même, dans le compromis, que les arbitres seraient autorisés à juger en dernier ressort sans appel, sans recours en cassation, sans formes de droit, et que leur sentence serait au besoin regardée par les parties comme transaction: une pareille stipulation, disons-nous, ne ferait point obstacle à ce que l'une d'elles pût exercer l'action en nullité, dans les cas prévus par l'art. 1028, sauf qu'en arbitrage forcé ce serait par la voie d'appel qu'il faudrait se pourvoir, ainsi qu'on le verra à l'Arbitrage forcé.

3o Nous arrivons à l'une des questions les plus importantes de ce traité, celle de savoir s'il ne répugne pas à la raison, et si l'on ne viole pas les principes en maintenant qu'il est permis de renoncer aux garanties établies par la loi contre les erreurs, abus, excès de pouvoirs, etc. des arbitres volontaires, et que les parties peuvent en conséquence, par le com promis, renoncer à toutes les voies de nullité établies dans l'art. 1028 C. Pr.

M. Carré, no 3374 (édition de 1824); annonce qu'il

avait professé, dans son analyse, no 3073, qu'une renonciation faite d'avance à se pourvoir en nullité lui semblait incompatible avec la nature des moyens pour lesquels cette action est ouverte, et détruirait le compromis lui-même dans sa substance, puisqu'elle en rendrait les effets impossibles; qu'il en serait de même, à son avis, de la renonciation à la voie de la requête civile. Aussi, dit-il, la loi ne suppose-t-elle pas la possibilité d'une renonciation à se pourvoir contre la sentence arbitrale, que relativement à l'appel. (1010 C. Pr.)

En faveur de cette opinion, M. Carré ajoutait que, par le compromis, les parties annoncent qu'elles veulent obtenir un jugement arbitral, et qu'il impliquerait qu'elles s'obligeassent à considérer comme jugement un acte qui n'en a pas les caractères, lorsqu'il est infecté des vices qui ouvrent la voie de nullité; il cite un arrêt de la cour de Rennes, du 7 juillet 1818, motivé sur ces considérations.

Toutefois, cet auteur semble hésiter, puisqu'il termine par dire, sans aucune autre observation, « mais l'arrêt de la cour de Rennes est contredit par >> celui de la cour de cassation, du 10 février 1817 ». (C'est une erreur; l'arrêt est du 31 décembre 1816. Voyez D., t. Ier, p. 799, et S., XVIII, 1, 38.) Cet arrêt de la cour suprême porte donc « que si, suivant l'art. 1010 C. Pr., les parties peuvent, lors et depuis le compromis, renoncer à l'appel, clles » peuvent aussi, nécessairement et par voie de con» séquence, renoncer à la voie de l'opposition à l'or» donnance d'exequatur. »

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Pour nous, qui avons sous les

yeux l'arrêt précité et l'exposé des faits, nous voyons que, dans l'espèce, les compromettans avaient renoncé à l'appel, recours en cassation, opposition à l'ordonnance d'exécution sous quelque prétexte que ce fùt, pour vices, tant à la forme qu'au fond; que malgré cette renonciation, l'un des compromettans avait formé opposition à l'or donnance d'exécution le motif que le tiers-arbitre avait prononcé seul, sans avoir conféré avec les arbitres partagés, et saus avoir adopté l'avis de l'un d'eux, ainsi que le prescrit la loi.

par

En première instance, la sentence arbitrale fut annulée, comme étant l'ouvrage du tiers-arbitre seul, mais la cour d'appel réforma. Il y eut pourvoi en cassation pour contravention aux art. 1018 et 1028 C. Pr., et la cour suprême rendit la décision qui suit: « Attendu que le Code de procédure, en assu jettissant, par son art. 1009, les parties et les arbi» tres à suivre, dans leur procédure, les délais et » les formes établies pour les tribunaux, leur a laissé » néanmoins la faculté de faire, à cet égard, toute » convention contraire; - Attendu qu'au cas parti» culier, les compromettans n'ont fait qu'user de » cette faculté dans toute sa latitude; Attendu » que si, suivant l'art. 1010 du même Code, les par» ties peuvent, lors et depuis le compromis, renon» cer à l'appel, elles peuvent aussi nécessairement, et par voie de conséquence, renoncer à la voie de l'opposition contre l'ordonnance d'exequatur, » comme l'ont fait ici les compromettans ; At» tendu, enfin, que ceux-ci avaient conféré à leurs

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» arbitres et sur-arbitre, le titre d'amiables-composi »teurs, et les avaient dispensés, tant par l'acte de » société que par le titre particulier de leur institu» tion, et dans les termes les plus explicites, de se » conformer, dans leurs décisions, à aucune espèce » de formes et de règles de droit; Rejette. »

Dans cet arrêt, il faut remarquer que la cour suprême ne rejette pas le pourvoi uniquement parce que le demandeur avait renoncé à la voie de l'opposition contre l'ordonnance d'exequatur; mais, qu'elle se fonde encore sur ce que les parties avaient donné aux arbitres les pouvoirs les plus étendus, et que, d'après ces pouvoirs, les arbitres avaient pu se dispenser de remplir les formalités dont l'inobservation servait de motif au pourvoi.

En un mot, le demandeur en cassation ne se plaignait que d'un vice dans la sentence, celui que le tiers--arbitre avait prononcé seul et sans avoir conféré de l'affaire avec les arbitres partagés; qu'il n'avait pu autoriser ce tiers à prononcer ainsi; que sa renonciation à une telle contravention violerait la loi; que cette clause, qui, d'ailleurs, n'était pas dans le compromis, était évidemment nulle et sans effet..

De la part du défendeur en cassation, il était soutenu qu'en fait, la sentence n'émanait point du tiers-arbitre seul; qu'elle était aussi l'ouvrage de l'un des arbitres, et qu'elle n'avait été renduc qu'après que le tiers-arbitre avait conféré avec les deux arbitres partagés.

D'après cet exposé, pourrait-on conclure que la cour de cassation a décidé en principe, et irrévocable

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