Page images
PDF
EPUB

quand les opérations sont commencées, peut être pris à partie : la cour de cassation l'a décidé ainsi. (V. à l'Arbtirage forcé, au mot Déport.)

[ocr errors]

QUESTIONS ET DÉCISIONS.

1o (CAUSE LÉGITIME DU REFUS NON CONNU DES PARTIES, FIN DU COMPROMIS.) Lorsque l'un des arbitres refuse sa mission pour une cause légitime, le compromis cesse-t-il d'exister à l'instant méme, et quoique ce refus ne soit pas encore connu des parties?

Décidé affirmativement par la cour de cassation, arrêt du 24 décembre 1817, S., XVHI, 1, 141; D., t. Ier, p. 688; elle a considéré qu'il suffit que l'un des arbitres refuse sa mission pour que le compromis cesse d'exister à l'instant même, et quoique ce refus ne soit pas encore connu des parties, par la raison que le compromis n'autorisait pas l'arbitre qui restait ni à juger seul ni à s'adjoindre un autre arbitre, et que les parties ne s'étaient pas imposé l'obligation de remplacer l'arbitre refusant.

La cour suprême avait décidé dans le même sens, par son arrêt du 6 novembre 1809, S., X, 1, 38: elle avait ajouté à ses motifs que, si les délais fixés pour l'arbitrage étaient expirés, toute contestation attribuée aux arbitres rentrait essentiellement dans les attributions des juges ordinaires, sauf toutefois la volonté des parties pour renouveler la juridiction arbitrale.

Comme nous l'avons dit au commencement de cette section, les parties qui veulent jouir de l'avantage

que leur offre la loi de terminer leurs différends par la voie de l'arbitrage, sont donc intéressées à prévoir toutes les causes qui mettent fin au compromis; et si elles ne l'ont pas fait, elles doivent y porter un prompt remède, lorsque ces causes se présentent, autrement la loi rendrait impossible, pour un temps ou pour toujours, l'exécution de leur convention.

2o (PROCURATION D'UNE PARTIE ACCEPTÉE PAR L'ARBITRE, DÉPORT.) L'arbitre qui accepte de l'une des parties une procuration à l'effet de citer l'autre partie en conciliation devant le juge de paix sur les difficultés qui sont l'objet du compromis, est-il censé par cela seul se déporter? L'autre partie, en conséquence, est-elle fondée à demander la nullité du jugement rendu par les arbitres, après sa comparution au bureau de paix où il n'y a pas eu

conciliation?

en

Jugé affirmativement par la cour de Bruxelles, arrêt du 4 fructidor an XII, S., V, 11, 535; D., t. Ier, p. 685. Cette décision est fort sage; il est évident, effet, qu'un arbitre qui accepte des pouvoirs en opposition directe avec le compromis, s'est dessaisi par là de sa qualité, puisqu'il a confondu celle qu'il a prise postérieurement avec l'intérêt de sa partie. « Ainsi, dit l'arrêt, il a cessé d'ètre juge, et la déci»sion à laquelle il a concouru, en cette qualité, est » une monstruosité en droit. »

Au surplus, les motifs de l'arrêt de la cour de Bruxelles rentrent dans l'esprit de l'art. 378 C. Pr.,

n° 8.

3o (ABSENCE D'UN ARBITRE, LES AUTRES PROCÈDENT,

NULLITÉ.) En supposant que, dans une contestation, les parties, au lieu de se borner simplement à une expertise, ont qualifié les experts d'arbitres; si, de trois de ces arbitres nommés volontairement pour procéder ENSEMBLE à une estimation, l'un d'eux ne se présente pas, ou refuse de se présenter, le jugement rendu par les deux autres, sans que l'arbitre absent ait été remplacé, estil nul?

Décidé affirmativement par la cour de cassation, arrêt du 2 septembre 1811, D., t. Ier, 687. En voici les motifs : « Attendu que, soit qu'on conside>> rât la mission donnée aux trois experts nommés par » le traité comme une simple expertise, soit qu'on la >> considérât comme un véritable arbitrage, l'absence >> ou le refus de l'un de ces trois experts mettait obsta>>cle à ce que les deux autres pussent procéder, puis» que dans le cas d'expertise il fallait, d'après les » art. 303, 316 et 318 C. Pr., qu'un autre expert fût » nommé à sa place par les parties, ou à défaut par » le tribunal, et que, dans le cas d'arbitrage, le com» promis, suivant l'art. 1012, avait cessé d'exister; » casse l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, qui avait » donné effet à la convention, devenue nulle tant par >> l'inexécution de la volonté des parties que par le » vœu formel de la loi. »

4° (OPÉRATIONS COMMENCÉES, DÉPORT.) La clause d'un compromis portant qu'en cas de retraite ou de refus de l'un des arbitres, pour une cause quelconque, il sera procédé à son remplacement, autoriset-elle les arbitres à se déporter, lorsqu'ils ont com

mencé leurs opérations? Cette clause déroge-t-elle à l'art. 1014, ou se renferme-t-elle dans le cas prévu par l'art. 1012?

Jugé négativement par la cour royale de Paris, 8 mai 1824, D., t. Ier, p. 688; elle a considéré, comme le tribunal de la Seine, d'où venait l'appel, que par le compromis qui porte la clause ci-dessus énoncée, les parties n'avaient entendu prévoir qu'un des cas de l'art. 1012, et en tant que les opérations ne seraient pas commencées, et que rien ne portait à croire qu'elles avaient également voulu prévoir le cas de l'art. 1014, qui- défend de se déporter quand les opérations sont commencées; que par le fait, l'instruction étant achevée et un jugement ayant été rendu sur quelques points du litige, l'arbitre, en se déportant, s'était mis en opposition avec l'art. 1014. « D'où il résultait, porte l'arrêt, que cette circons>> tance, non prévue par le compromis, loin d'attri>> buer aux parties qui avaient nommé cet arbitre le » droit de le remplacer par un autre arbitre de leur >> choix, devait au contraire entraîner l'inefficacité du » compromis, quant aux points de la contestation » encore à juger, si l'arbitre démissionnaire ne sc >> réunissait pas à ses co-arbitres pour faire droit aux » parties dans les délais fixés. »

Nous avons cru devoir analyser cet arrêt, afin qu'on puisse mieux en apprécier les motifs. Il est certain, en effet, que si, dans un compromis, les parties établissaient une clause semblable à celle dont il s'agit, sans autres explications, notamment sans prévoir le cas où les opérations scraient commencées, on

ne pourrait interpréter la clause que dans le sens de l'art. 1012, c'est-à-dire que le compromis ne finit pas pour déport, refus de l'un des arbitres, quand il y a stipulation que le remplacement sera au choix des parties ou au choix des arbitres restans; mais, il serait impossible d'appliquer cette même clause au cas de l'art. 1014, puisqu'il y est défendu aux arbitres de se déporter quand leurs opérations sont commencées. Ainsi, lorsque, dans le compromis, il y a clause qu'en cas de déport d'un des arbitres, le remplacement sera au choix des parties, et qu'il n'y est pas dit que ce remplacement aura lieu, quoique les opérations soient commencées, il est clair qu'en l'absence d'une telle intention, la loi défendant à l'arbitre de se déporter une fois qu'il a commencé d'opérer, doit rendre inutile la stipulation qui n'a pas prévu cette circonstance, sauf aux parties, si l'arbitre ne justifie pas de causes légitimes de son déport, à le poursuivre en dommages et intérêts.

L'arrêt de la cour de Paris nous paraît donc conforme aux principes; cependant, il faut dire que les parties, qui ont toujours la libre disposition de leurs droits dans la juridiction volontaire à laquelle elles se sont soumises, pourraient, d'un commun accord, ne pas tenir à la règle de la loi, et la rendre sans effet; elles pourraient, en conséquence, remplacer l'arbitre qui se serait déporté après avoir commencé les opérations, et cela sans exiger de lui des excuses légitimes et sans l'attaquer en dommages et intérêts; mais si, comme dans l'espèce soumise à la décision de cette cour, l'une des parties protestait contre le

« PreviousContinue »