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A la vérité, nous sommes pleinement d'avis que si les arbitres avaient omis de liquider les dépens, on pourrait recourir au président du tribunal qui délivre l'ordonnance d'exequatur pour en faire la taxe, parce que les arbitres ayant terminé leur mission par la sentence définitive, il faut bien, pour éviter l'arbitraire, qu'une autorité intervienne; et quelle autre autorité peut taxer les dépens, si ce n'est le magistrat qui rend exécutoire la sentence?

1o (CONDAMNATION AUX AMENDES.) Les arbitres peuvent-ils condamner à l'amende dans les cas où la loi prescrit aux juges d'appliquer cette peine?

Nous pensons, avec un grand nombre d'auteurs,

que

les arbitres ne peuvent condamner à l'amende (V. Nouv. Répert., t. Ier, p. 297). Boucher, p. 174. les auteurs du Praticien, t. V, p. 393, et M. Carré, no 3333, tous partagent cette opinion. Ce dernier se fonde sur ce que l'amende est une peine qu'il n'appartient qu'à la puissance publique de prononcer, que la compétence des arbitres étant limitée à ce qui concerne l'intérêt des parties qui ont compromis, ceux-ci commettraient un excès de pouvoir en prononçant une amende dans l'intérêt du fisc.

SECTION VIII.

et

Des causes qui suspendent le délai de l'arbitrage et les pouvoirs des arbitres.

Il y a plusieurs causes qui suspendent le délai de l'arbitrage, mais nous devons nous occuper d'abord

de celles qui sont spécialement prévues par le Code de procédure; savoir: le décès d'un des compromettans et l'inscription de faux; nous verrons ensuite de quelle nature peuvent être certaines autres causes.

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L'art. 1013 porte; Le décès, lorsque tous les héri¬ tiers sont majeurs, ne mettra pas fin au compromis; le délai pour instruire et juger sera suspendu pendant celui pour faire inventaire et délibérer.

On ne peut se dissimuler que le texte de cet artidle fait naître des questions importantes qu'il serait difficile de résoudre, d'après le sens qu'offre sa rédaction, mise en rapport avec celle de l'art. 1122 C. C., surtout lorsqu'on ne trouve, ni dans la jurisprudence intervenue depuis la publication du Code de procédure civile, ni dans l'exposé des motifs de la loi, fait au Corps-Législatif par M. le conseiller d'état Galli (séance du 19 avril 1806), ancun éclaircissement propre à guider dans l'interprétation et l'application dudit art. 1013.

Il est vrai qu'on peut ici se retrancher dans la maxime inclusio unius, exclusio alterius; mais une telle maxime peut-elle servir à violer certains principes de droit qu'on regarde comme immuables? Nous ne le

pensons pas.

Quoi qu'il en soit, nous ne rechercherons point quel a pu être le but ou l'intention du législateur en

rédigeant ainsi qu'il l'est l'art. 1013. Nous nous bornerons à dire que, d'après le sens de sa rédaction, si tous les héritiers du compromettant, décédé dans le cours de l'arbitrage, ne sont pas majeurs, c'est-à-dire s'il y a parmi eux des mineurs, le compromis prend fin; que si, au contraire, tous les héritiers sont majeurs, le délai pour instruire et juger n'est que suspendu pendant le temps accordé, par l'art. 795 C. C., aux héritiers pour faire inventaire et délibérer, c'est-à-dire pendant trois mois pour l'inventaire, et quarante jours en sus pour délibérer, sauf la modification portée audit article. Durant donc ce laps de temps, le délai du compromis ne court pas, et les arbitres doivent suspendre leurs opérations.

» rer,

Ainsi, conformément aux dispositions des art. 1013 C. Pr. et 795 C. C. combinés, on voit que le législateur a voulu faire jouir les héritiers tous majeurs du compromettant décédé de la règle générale posée dans l'art. 797 C. C., qui est que « pendant la du> rée des délais pour faire inventaire et pour délibél'héritier ne peut être contraint à prendre qua» lité; il ne peut être obtenu contre lui de condam->> nation ». Par conséquent, ces héritiers ne se trouvent point liés, de plein droit, par le compromis passé par leur auteur décédé, et il paraît qu'on ne peut leur appliquer les principes établis dans les art. 724 et 1122 C. C. Le premier porte que les héritiers légitimes sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt, sous l'obligation d'acquitter toutes les charges de la succession.

Le second article déclare que dans dans un con

trat, comme le compromis, qui réunit les conditions requises par l'art. 1108 C. C. pour sa validité, on est censé avoir stipulé pour soi et pour ses héritiers ou ayans-cause.

Sur ce point, M. Carré, Lois de la Procéd., p. 428, en commentant l'art. 1013 C. Pr., se borne à dire que cet article se rapporte à l'art. 1122 C. C.; mais que, suivant la règle inclusio unius, exclusio alterius, il faut décider que le compromis prend fin, si tous les héritiers de la partie décédée ne sont pas majeurs; mais, encore un coup, cette simple observation ne résout pas certaines difficultés, notamment une trèsgrave dont nous allons bientôt nous occuper : elle n'est qu'une paraphrase de l'art. 1013.

En un mot, puisqu'à défaut d'élémens puisés dans les décisions judiciaires et dans les discussions législatives, il faut rentrer dans l'esprit dudit art. 1013, avec sa dérogation, nous établirons donc qu'au décès d'un des compromettans, quoique celui-ci soit censé avoir stipulé pour lui et pour ses héritiers et ayanscause, le compromis prend fin si, parmi ses héritiers,

il

y a des mineurs; que ci ces mêmes héritiers sont tous majeurs, ils ne sont pas tenus de reprendre les erremens de l'affaire mise en arbitrage par la convention de leur auteur, ils ont la faculté de délibérer s'ils accepteront ou non la succession, avec les chances du compromis. Pendant ce temps, le délai de l'arbitrage est suspendu, et les arbitres ne peuvent instruire et juger, jusqu'à ce que ces héritiers tous majeurs aient pris qualité; d'où il suit que si, par exemple, un compromis a été souscrit le 1er janvier

sons,

pour expirer au 31 mars, et que l'un des compromettans soit décédé le 10 février; si, nous le suppoles héritiers ne mettent que vingt jours pour faire inventaire et délibérer, le délai du compromis n'expirera que le 20 avril, à cause de la prorogation motivée par le décès. Si les héritiers acceptent la succession, plus de difficulté, le compromis reçoit son effet, le délai de l'arbitrage reprend son cours, et les arbitres continuent leurs opérations.

Mais quid, s'ils renoncent à la succession, et qu'il ne se présente plus, par exemple, que des ayanscause, que deviendra le compromis? Demeurera-t-il encore sans effet, comme dans le cas où il y a des mineurs parmi les héritiers? Faudra-t-il appliquer ici la règle inclusio unius, exclusio alterius? Les créanciers de ceux qui ont renoncé seront-ils privés du bénéfice de l'art. 788 C. C., qui leur permet de se faire autoriser à accepter la succession du chef de leurs débiteurs, en leur lieu et place? Et si tel cas arrive, les créanciers ne peuvent, à la vérité, profiter des avantages de la succession que jusqu'à concurrence seulement de leurs créances; mais, en acceptant, ne se soumettent-ils pas aux résultats des engagemens de l'auteur de l'hérédité? Et si, par supposition, le jugement des arbitres est favorable à cette hérédité, n'obtiennent-ils pas plus de garantie pour leurs

créances?

D'un autre côté, le compromettant du décédé pourrait-il opposer des exceptions fondées contre l'exercice des droits des créanciers touchant l'exécution du compromis?

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