Page images
PDF
EPUB

leurs? Avec une telle stipulation, les tribunaux ont-ils s'en attribuer la connaissance, sous le prétexte que cette demande était urgente ?

pu

La cour suprême, par son arrêt du 2 septembre 1813, D., t. Ier, p. 665, a décidé affirmativement la première partie de la question, en déclarant que nulle exception à l'arbitrage n'était admissible, et qu'en conséquence les tribunaux ne pouvaient, sous aucun prétexte, s'attribuer la connaissance des contestations quelconques qui pouvaient naître de l'exécution du traité entre les parties.

4° (CONNAISSANCE DE LEUR COMPÉTENCE.) En matière d'arbitrage volontaire, les arbitres sont-ils obligés de renvoyer aux tribunaux les contestations qui s'élèvent devant eux relativement à l'étendue des pouvoirs qui leur ont été confiés? En d'autres termes, les arbitres peuvent-ils connaître de leur compétence? Sont-ils des juges?

La cour de cassation, par son arrêt du 28 juillet 1818, S., XIX, 1, 22; D., t. Ier, 700, n'a rien laissé à désirer sur ces questions; elle les a toutes décidées affirmativement avec des motifs très-puissans.

soient

On peut dire, en effet, que quoique les arbitres ne pas des magistrats institués par le prince pour rendre la justice en son nom; qu'ils n'aient pas un caractère public, et qu'ils ne puissent pas rendre leurs jugemens exécutoires, ils ne sont pas moins des juges à l'égard des parties qui les ont nommés, et leurs décisions font la loi de ces parties avec l'homologation du président du tribunal, pour en garantir l'exécution. Aussi la cour régulatrice reconnaît-elle,

dans cette qualité de juge des contestations entre les citoyens, le pouvoir de connaître eux-mêmes de leur compétence, bien qu'ils n'y soient pas expressément autorisés par le compromis, parce que, dit-elle, aucune loi ne leur interdit cette faculté dans les matières qui n'exigent pas la communication au ministère public. Enfin, le droit de juger leur propre compétence est la conséquence naturelle du caractère de juges dont ils sont investis par les parties.

5o (CONTESTATION INCIDENTE.) Lorsque, dans le cours d'une instance soumise à des arbitres volontaires, il s'élève entre les parties une contestation incidente, par exemple, celle de savoir si l'une des parties n'a pas contrevenu à une clause pénale stipulée contre celle qui, par sa faute, mettrait obstacle à l'exécution du compromis, est-ce aux arbitres qu'il appartient de statuer sur cet incident, ou au tribunal?

La cour de cassation, arrêt du 12 juillet 1809, D., t. Ier, 701, a décidé que ce pouvoir appartenait aux arbitres.

6° (CONTRAINTE PAR CORPS.) Des arbitres volontaires peuvent-ils prononcer la contrainte par corps en certains cas?

Sur cette question, les auteurs sont très-divisés; MM. Berriat-Saint-Prix, p. 45, note 26; Delvincourt, t. II, p. 255; le Praticien, t. V, p. 393, et autres écrivains, fondent leurs avis sur les art. 2063 et 2067 C. C., et ils en concluent que les arbitres volontaires ne peuvent être compétens pour prononcer la contrainte par corps. MM. Carré, Lois de la Procéd., no 3334; Pardessus, Droit com., no 1404, enseignent,

au contraire, que la contrainte par corps peut être prononcée par un jugement arbitral, dans tous les cas où le tribunal, que les arbitres remplacent, aurait droit de la prononcer. L'auteur du Répertoire, Vbo Arbitrage, n. 9, atteste qu'il en etait de même sous l'ancienne jurisprudence. Ce dernier sentiment peut avoir en sa faveur la jurisprudence actuelle, ainsi qu'on va le voir par deux arrêts dont nous allons rapporter les espèces; cependant, de ces deux arrêts, peut-on en former un principe invariable pour d'autres espèces? Voilà la difficulté qu'il faut lever.

La cour de Pau, arrêt du 4 juillet 1821, D., t. Ier,

709, a décidé que des arbitres, amiables compositeurs, pouvaient prononcer la contrainte par corps, dans les cas où l'art. 126 C. Pr. laisse à la prudence des tribunaux de la prononcer, et spécialement en matière de reddition de compte de tutelle. La cour, à cet égard, se fonde sur de très-bons motifs.

Mais, eût-elle jugé ainsi dans le cas où des arbitres ordinaires, soumis à des règles déterminées par la loi, auraient prononcé la contrainte par corps dans autres affaires où le tribunal aurait pu ou dû la prononcer? Nous le pensons, par ce motif qui parle à la raison, que les arbitres volontaires étant de véritables juges dont les décisions, qualifiées jugement par la loi, en ont le caractère et les effets, il doit s'ensuivre que, dès l'instant qu'ils remplacent des juges institués, ils peuvent, comme ces derniers, appliquer à l'espèce qui leur est soumise la disposition d'une loi qui prononce la contrainte par corps. Ce n'est pas le cas, ici, d'opposer le texte de l'art. 2063 C. C., et de dire que les

arbitres ne peuvent prononcer la contrainte par corps, puisque les parties elles-mêmes ne peuvent s'y soumettre le raisonnement serait futile. Sans doute que les parties ne peuvent établir dans un compromis que les arbitres auront la faculté de déclarer qu'une d'elles, si elle succombe, sera contrainte, même par corps, à exécuter le jugement, quand la loi ne permet pas cette mesure; mais quand, indépendamment de la volonté des parties, c'est la loi qui les y soumet pour le fait qu'elle a prévu, pourquoi les arbitres ne pourraient-ils pas la prononcer? Pourquoi, par exemple, ne pourraient-ils pas déclarer qu'une partie qui a négligé de rétablir des pièces communiquées,

y sera contrainte par corps, dès que le tribunal peut

l'ordonner ainsi, en se fondant sur l'art. 126 C. Pr.?

A l'appui de cette doctrine vient le second arrêt, que nous avons annoncé. Celui-ci émane de la cour de cassation, qui, le 1er juillet 1823, D., t. Ier, 711; S., XXIV, re, 5, a décidé que les arbitres volontaires, comme les arbitres forcés, peuvent prononcer la contrainte par corps entre marchands, dans le cas où les tribunaux de commerce ont le droit de la prononcer eux-mêmes. C'est donc comme si la cour suprême avait dit que les arbitres volontaires peuvent prononcer la contrainte par corps comme les tribunaux institués, dans tous les cas où la loi inflige cette rigucur.

C'est du moins par les même motifs que ci-dessus qu'elle a décidé, savoir: que « les arbitres volontaires » légalement institués étant, entre les parties qui >> les ont nommés, de véritables juges autorisés par la loi, et leurs sentences étant de véritables juge

» mens dont elle garantit et assure l'exécution, il suit

» de là

que

de pareils arbitres sont compétens pour >> prononcer la contrainte par corps. >>

7° (EXCÈS DE POUVOIRS.) Les arbitres qui ont reçu des parties le pouvoir de terminer, par un seul et même jugement, toutes les contestations énoncées au compromis, excèdent-ils leur mandat, lorsqu'en jugeant défini tivement quelques-uns des points, ils interloquent sur d'autres?

Décidé négativement par l'arrêt de la cour de cassation du 11 février 1806, S., VII, 11, 787.

80 (EXCÈS DE POUVOIRS.) Les arbitres commettent-ils un excès de pouvoirs en prononçant sur une question qui n'est pas expressément énoncée dans le compromis, si cette question est une suite et une dépendance nécessaire de celles qui sont prévues?

Jugé négativement par arrêt de la cour d'Aix du 3 février 1817, S., XVII, 11, 415, et D., t. Ier, p. 794. Ainsi, lorsque sur compromis, ayant pour objet un droit de passage, les parties débattent devant les arbitres la question de propriété de l'objet pour lequel le passage est réclamé, les arbitres prononcent, sans excéder leurs pouvoirs, et sur le passage et sur la propriété.

9o (FOI DUE AUX ARBITRES.) La déclaration des arbitres attestant qu'ils ont vu les pouvoirs en vertu desquels ils ont pris qualité, fait-elle foi par elle-même de l'existence réelle de ces pouvoirs?

La cour de cassation s'était prononcée pour la négative par son arrêt du 8 frimaire an XII, S., IV, 1, 662, et l'on doit penser que, depuis l'existence du

[ocr errors]
« PreviousContinue »