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qu'il n'a pas songé, comme il est vrai, à faire rappeler. A l'égard du nommé Regnault, il m'a dit qu'il l'avoit employé uniquement à cause de la connoissance qu'il avoit de la langue espagnole; et que sa conduite vous ayant déplu, il alloit lui écrire de revenir incessamment. Je crois que c'est ce que vous pouvez demander de sa part. De la mienne, j'ai pris des prétextes pour ne pas envoyer cette année mon neveu en Espagne; et vous devez être assuré, qu'en quelqu'occasion que ce soit, vous recevrez toujours des marques de mon attention à vous faire plaisir,

A M. AMELOT.

29 avril 1709.

Il y a des conjonctures où le courage doit céder à la prudence; et comme les peuples, zélés présentement, pourroient bien ne pas penser toujours de même, ni comme mon petit-fils, il vaut mieux songer à régner en quelqu'endroit, que de perdre en même temps tous ses Etats (1).

(1) Philippe v avoit déclaré dans une lettre à son aïeul, du 17 avril, qu'il ne quitteroit jamais l'Espagne qu'avec la vie,

les

A PHILIPPE V.

3 juin 1709.

QUOIQUE ma tendresse pour mes peuples ne soit pas moins vive que celle que j'ai pour mes propres enfans; quoique je partage tous maux que la guerre fait souffrir à des sujets aussi fidèles, et que j'aie fait voir à toute l'Europe que je desirois sincèrement de les faire jouir de la paix, je suis persuadé qu'ils s'opposeroient eux-mêmes à la recevoir à des conditions également contraires à la justice et à l'honneur du nom français.

AU MARECHAL DE VILLARS.

3 juin 1709.

J'AI su par le marquis de Torci, qu'il vous avoit informé à son passage de tout ce qui s'est passé à la Haye, dans les conférences qui se sont tenues entre lui, le prince Eugène, le duc de Marlborough et le Pensionnaire. Vous avez bien prévu qu'il me seroit impossible d'accepter des conditions, qui donneroient seulement lieu à une suspension d'armes pour deux mois, et qui me mettroient dans la né

cessité de me joindre à mes ennemis, pour détrôner le roi d'Espagne, ou de recommencer la guerre contre eux, après les avoir mis ent possession des places les plus importantes de ma frontière, et dont ils auroient bien de la peine à se rendre les maîtres, si je pouvois trouver moyen de faire payer mes troupes et de les faire vivre. J'ai mandé au sieur Rouillé de déclarer, que je ne pouvois accepter les propositions qui avoient été faites, et que je révoquois toutes les offres que le marquis de Torci avoit eu pouvoir de leur faire de ma part.

A PHILIPPE V.

5 août 1709.

Je vous avois écrit qu'avant de parler à mon neveu, j'attendrois de vous de nouveaux éclaircissemens sur l'affaire dont vous m'avez informé. Mais elle fait tant de bruit, que j'ai cru qu'il ne convenoit plus de garder le silence, et que je devois pour vos propres intérêts, l'engager à me rendre compte des ordres qu'il a donnés à mon insu. Je suis persuadé par la manière dont il s'est expliqué, qu'il ne m'a rien caché. Ainsi je puis vous assurer, qu'il n'a jamais eu intention d'agir contre votre service.

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Il dit lui-même que, quand il auroit pu former un projet aussi contraire à ses devoirs, il savoit assez que j'aurois été très éloigné de l'appuyer, et que si je ne soutenois pas les droits de V. M., je soutiendrois encore moins à votre préjudice, ceux qu'il ne peut avoir qu'après vous et vos enfans. Il attribue à la légèreté et à l'imprudence de deux hommes qui agissoient en son nom, ce qu'ils ont dit et fait au-delà des ordres qu'il leur a donnés, et qui se réduisoient à protester, contre les changemens qui ne sont que trop à craindre dans l'état présent des affaires. Il vouloit vous écrire et vous éclaircir lui-même de sa conduite, mais je l'en ai empêché, comptant que vous me croirez quand je vous assure, qu'il a pris confiance eu deux hommes incapables de le servir. Au moins il n'a pas eu la pensée de vous nuire, comme leurs démarches ont donné lieu de le croire. Non-seulement mon neveu désavoue leurs intrigues; mais il se remet à vous de prendre, à l'égard de l'un et de l'autre, les résolutions que vous jugerez à propos. La meilleure à mon avis est d'assoupir incessamment une affaire, dont l'éclat n'a déjà fait que trop de mal. Une plus grande recherche de la part de V. M. acquerroit de nouveaux partisans à ses ennemis, et quand ce mal ne seroit pas à prévoir, c'en

seroit toujours un très-grand, de leur donner l'espérance de voir naître des divisions dans ma famille. Recevez donc le conseil que je vous donne, comme une marque de la tendre amitié que j'ai pour vous.

AU MARECHAL DE VILLARS.

20 septembre 1709.

MON COUSIN, vous m'avez rendu de si grands et si importans services depuis plusieurs années, et j'ai de si grands sujets d'être content de tout ce que vous ayez fait dans le cours de la présente campagne, en arrêtant par vos sages dispositions les vastes projets que les ennemis avoient formés, et vous m'avez donné des si essentielles de votre zèle, parmarques ticulièrement dans la bataille du 11 de ce mois (1), dans laquelle mes troupes encouragées par votre bon exemple, ont remporté le principal avantage sur mes ennemis (2), que j'ai cru devoir vous témoigner la satisfaction que j'en ai, en vous accordant la dignité de pair de

(1) La bataille de Malplaquet.

(2) Les Français ne gagnèrent pas la bataille, mais ils tuèrent beaucoup plus de monde aux ennemis qu'ils n'en perdirent eux-mêmes.

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