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tenir. Gardez seulement le secret de la résolution que je prends; il y a des mesures à observer en retirant un homme, recommandable d'ailleurs par son mérite et ses services. Il ne demeurera que peu de mois encore auprès de vous; mais il faut qu'il paroisse qu'il souhaite de revenir, et je suis persuadé qu'il ne sera pas difficile de l'y disposer. Si j'en usois autrement, on diroit que je me suis laissé surprendre aux mauvais offices qu'on lui auroit rendus; on vous le reprocheroit aussi : cette précipitation produiroit un très-mauvais effet pour l'avenir. Vous serez bien aise que l'on croie en Espagne, que vous avez confiance en mes ambassadeurs jamais on ne le croira si on voit que je les rappelle malgré eux; vous entendrez dire, au contraire, que les intrigues de cour ne sont pas moins puissantes sous votre règne, qu'elles l'ont été sous celui du roi précédent. Enfin, je retirerai le cardinal d'Etrées; mais je ne puis le faire que dans quelques mois. Puisque vous êtes content que l'abbé d'Etrées demeure, je lui donnerai une lettre d'ambassadeur après le départ de son oncle.

:

AU MÊME.

26 juillet 1703.

LORSQUE VOUS me demandez un général, je ne sais si vous envisagez bien toutes les contradictions qu'il auroit à essuyer en Espagne : elles le rendroient inutile, et vous verriez naître de nouvelles plaintes contre les Français. Après ce que vous m'avez fait savoir de vos intentions pour l'abbé d'Etrées, il ne conviendroit point de donner à un autre le caractère d'am. bassadeur: des changemens si fréquens perdent les affaires.

AU CARDINAL D'ÉTRÉES.

10 août 1703.

Je vois qu'on a entièrement changé l'esprit du roi d'Espagne à votre égard. Non-seulement il me demande instamment, aussi bien que la reine, de vous rappeler; mais je vois qu'il vous cache ses résolutions, en même temps qu'il m'en instruit par ses lettres. Le tort que cette dissention fait aux affaires, m'est encore moins sensible que la manière dont vous êtes traité. Ainsi, je crois devoir à l'attachement

personnel que vous m'avez toujours témoigné et à l'amitié que j'ai pour vous, de vous accorder la permission de revenir auprès de moi, sans attendre que vous la demandiez. Je serai très-aise de vous voir délivré de toutes les peines que votre zèle vous a fait souffrir, et de vous témoigner moi-même la satisfaction que j'ai des importans services que vous m'avez rendus en Italie et en Espagne.

A PHILIPPE V.

16 septembre 1703.

Vous serez satisfait sur le départ du cardinal d'Etrées; et s'il reçoit encore ma lettre à Madrid, je suis persuadé qu'il en partira incessamment après l'avoir lue. Je souhaite que sa retraite mette vos affaires en meilleur état : il en est temps. L'abbé d'Etrées n'oubliera rien pour vous plaire. Je lui écris de ne point entrer dans le despacho. Il convient qu'il ne soit présentement rempli que de vos sujets. Ils en auront plus d'attention aux intérêts de V. M.; ils n'imputeront pas aux seuls Français la cause de tous les maux de la monarchie. Je me rapporte sur les affaires à ce que l'abbé d'Etrées vous en dira, &c.

AU CARDINAL D'ÉTRÉES.

16 septembre 1703.

COMME Vous êtes hors d'état de remédier présentement aux désordres vos conseils n'étant plus écoutés, il est de votre prudence d'ôter le prétexte de dire, que votre présence empêche qu'on ne fasse toutes les dispositions qui conviendroient au bien des affaires. Si vous êtes donc retenu par quelque raison particulière, je vous permets de dire, que je vous ai donné un ordre positif de partir sans délai, et je vous le donne en effet, afin que vous le puissiez dire avec vérité.

A L'ABBÉ D'ÉTREES.

16 septembre 1703.

Il faut songer à combattre également les ennemis intérieurs de l'Espagne et les étrangers. Les premiers ont fait jusqu'à présent ce qu'ils ont pu, pour rejeter la haine générale sur les Français. Il ne faut pas douter qu'ils ne songent à vous perdre, et non-seulement vous, mais tous ceux que j'enverrois en Espagne, et que la jalousie de voir entrer mes ambassadeurs

dans les plus secrets conseils du Roi Catholique, ne soit la principale raison de l'animosité que les principaux de la nation auront contre eux. J'ai cru qu'il étoit autant de mon service que de votre intérêt, de ne vous y pas

exposer.

AU MARECHAL DE VILLARS.

Fontainebleau, le 27 septembre 1703.

MON COUSIN, j'ai reçu hier la lettre que vous m'avez écrite le 18 de ce mois; vous verrez par la réponse que je vous ai faite à celle du 10, ce que je pense de l'état présent des affaires de Bavière, et quelles sont mes intentions sur le parti que vous avez à prendre.

Je souhaite que la nouvelle qui se répand, et qui me revient de différens endroits, soit véritable; on assure qu'un détachement de l'armée que vous commandez, a battu quatre ou cinq mille hommes du prince de Bade qui vouloient passer le Lech, qu'il s'est éloigné d'Augsbourg, et que le magistrat de cette ville a renvoyé la garnison qui y étoit entrée, pour observer une plus exacte neutralité. Cet événement pourroit changer la face des affaires. La difficulté de me donner de vos nouvelles, et celle d'avoir des miennes, ne permettant

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