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En retranchant de ce chiffre environ 10 0/0, soit 1.844 considérés comme impropres au service militaire, on voit qu'environ 16.000 hommes appartenant à un titre quelconque aux armées allemandes, autrichiennes ou italiennes habitent le département de la Seine(Septembre 1892.)

Service militaire. Périodes d'instruction. Français fixés dans les colonies ou à l'étranger. Le Conseil d'Etat a rendu un avis relatif aux dispenses des périodes d'exercices du temps de paix. Cet avis supprime la dispense qui jusqu'à présent avait été accordée aux hommes fixés aux colonies ou dans les pays de protectorat de l'Extrême-Orient, ainsi qu'aux hommes fixés ou voyageant à l'étranger.

Au point de vue de l'accomplissement des périodes d'exercices, ces hommes seront considérés désormais comme ajournés jusqu'à leur rentrée en France, à moins que les commandants de corps d'armée ne reconnaissent qu'en raison de leur résidence permanente dans les pays limitrophes ils peuvent être rappelés momentanément en France pour accomplir leurs devoirs militaires sans compromettre pour cela leur situation.

Jusqu'à l'âge de quarante-cinq ans, ces hommes seront tenus, s'ils rentrent en France, d'accomplir les périodes d'instruction pour lesquelles ils auront été considérés comme ajournés. (Avril 1892.)

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Suisse. Tutelle des Suisses en France. — A l'instance d'un Neuchâtelois domicilié au Havre, le consulat suisse en cette ville soumit à notre département de justice et police diverses questions relatives à la tutelle des Suisses résidant en France. Le département répondit à ces questions de la manière suivante : Aux termes de l'article 10 de la convention du 15 juin 1869, conclue entre la Suisse et la France au sujet de la compétence judiciaire et de l'exécution des jugements en matière civile, le juge français n'est pas compétent pour nommer un conseil judiciaire, mais bien pour ordonner des mesures conservatoires, dont un séquestre fait aussi partie. Si le juge français entendait prendre une mesure échappant à sa compétence, la partie en cause ou son représentant devrait appeler son intention sur l'article 11 de la convention, qui dit que le tribunal devant lequel est portée une demande qui n'est plus de sa compétence doit, d'office, renvoyer les parties devant les juges

qui en doivent connaître. Au besoin, la partie en cause pourrait s'adresser à la légation suisse à Paris, pour qu'elle demandât au ministre de la justice de faire respecter la convention. (Rapport à l'assemblée fédérale par le Conseil fédéral sur la justice en 1891).

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Instituteur. Nationalité. Un de nos concitoyens nous ayant signalé le fait que les Suisses appelés à remplir en France des fonctions rétribuées par l'Etat, notamment en qualité d'instituteurs, étaient obligés de se faire naturaliser Français pour conserver leurs places, nous avons pris sur ce point des informations auprès de notre légation à Paris. Celle-ci nous a exposé, dans deux rapports circonstanciés, la question de l'admission des Suisses aux emplois publics en France. Il résulte de ces rapports qu'en France, à teneur des lois et règlements en vigueur, les étrangers ne peuvent remplir aucun emploi, ni aucune place ou fonction dépendant directement du gouvernement et que la tendance générale est de les exclure des services placés sous le contrôle de l'Etat. En ce qui concerne plus particulièrement les instituteurs ou institutrices étrangers, ils sont à l'heure actuelle régis en France, toujours d'après les rapports de la légation, par la loi du 30 octobre 1886 sur l'organisation de l'enseignement primaire, article 4, et par le décret du 18 janvier 1887 sur le même objet, article 181. Ils ne sont pas admis à enseigner dans les écoles publiques primaires françaises; pour pouvoir enseigner dans les écoles privées, ils doivent être admis à domicile et être autorisés par le ministre de l'instruction publique. En présence de cette situation, il paraissait inutile de réclamer auprès du gouvernement français; aussi n'avons-nous pas donné suite à la communication de notre correspondant. (Ibid.)

Aff. Baumgartner. - Dans un cas analogue, une de nos compatriotes, Emilie Baumgartner, à Mulhouse, nous demandait d'intervenir en sa faveur auprès du gouvernement allemand. Directrice d'une école enfantine, elle courait le risque de perdre sa place si elle ne se faisait pas naturaliser en Allemagne. Notre département de justice et police fut d'avis que la condition d'acquérir la nationalité allemande pour exercer des fonctions dans un établissement placé sous la surveillance de l'État ne devait être considérée en principe comme inadmissible ni au point de vue des traités, ni à celui de la réciprocité. (Ibid.)

Délit politique. Non extradition. Il y avait une assemblée socialiste à Stassfurt (Prusse). A cette occasion, une foule de monde se pressait devant les abords du local de réunion. Les agents de police cherchèrent à la disperser. Mais il y eut résistance; quelques individus lancèrent des pierres contre les agents, en blessant plusieurs assez grièvement. Le fonctionnaire chargé d'instruire l'enquête s'adressa, par voie de commission rogatoire aux autorités bàloises, leur demandant, en se référant à l'article 12 du traité d'extradition germano-suisse, de procéder à l'interrogatoire d'un individu domicilié à Bâle, qui avait participé à cette échauffourée. Il s'agissait de savoir si un nommé W. Schulz y avait également assisté et s'il avait jeté des pierres contre les agents de police; il se serait ainsi rendu coupable de participation au délit de rébellion, fait prévu et puni par l'article 115 du Code pénal allemand. Restait à savoir si les autorités bâloises devaient faire droit à cette demande. Notre département de justice et police leur répondit négativement, par le motif qu'il s'agissait évidemment d'un délit politique. L'article 12 du traité d'extradition avec l'Allemagne exclut, dans ce cas, toute aide mutuelle pour l'exercice de la justice. (Ibid.)

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Nationalité française et italienne. Mariage. (Aff. Pinget.) Par les mêmes motifs que ceux invoqués jadis dans le cas Liésoz (F. féd. 1890, II, 135), le gouvernement français a refusé de reconnaître pour sa ressortissante la veuve Louise-Marianne Pinget née Chaubert, lorsque nous lui avons demandé d'en autoriser le rapatriement à raison du fait qu'elle tombait à la charge de la bienfaisance publique à Corsier (Vaud), lieu de son domicile. En 1856, la prénommée, qui est née à Corsier, s'est mariée à Vevey avec Charles Pinget, de Saint-Gingolph (Haute-Savoie). Ce dernier s'est légitimé jusqu'à sa mort par des actes d'immatriculation émanant du consulat général de France à Genève et sa nationalité française n'a pas été contestée non plus; bien celle de sa femme, par contre. Le ministère des affaires étrangères à Paris soutient qu'à teneur des lois françaises, celle-ci a conservé la nationalité sarde même après la cession de la Savoie à la France (1860), attendu que son mariage avec Pinget a eu lieu avant cette époque. Le fait que, par suite du traité d'annexion de 1860, son mari a changé de nationalité est inopérant à son égard, parce qu'elle n'est pas originaire elle-même des territoires cédés et n'y était pas domiciliée lors de l'annexion.

A l'appui de cette déclaration, nous avons cherché à obtenir du gouvernement italien la reconnaissance de la veuve Pinget. Mais ce gouvernement nous a répondu qu'à teneur des lois civiles en vigueur lors de la cession de Nice et de la Savoie à la France, ainsi que de la législation italienne actuelle, la femme suit la nationalité de son mari. Tout comme elle a acquis par l'effet de son mariage la nationalité originaire (sarde) de son mari, la dame Pinget l'a perdue ensuite avec ce dernier par suite du traité de cession et a acquis la nationalité française. Nous n'avons pas manqué de porter cette réponse à la connaissance du gouvernement français, en faisant observer que les arguments invoqués par l'Italie étaient conformes aux principes généraux du droit, qui n'admettent pas qu'on prenne en considération la nationalité à laquelle une femme appartenait avant son mariage. Le ministère français crut néanmoins devoir persister dans sa précédente opinion. (Ibid.)

Nationalité française et allemande. Enfant naturel. Reconnaissance. (Aff. Marchand.) - Marie Lacroix, de Pargny-Filain, Aisne, France, est accouchée à Berne, en 1888, d'une fille illégitime reconnue par Frédéric Marchand, de Dieuze, Lorraine, et inscrite dès lors au registre des naissances de Berne sous le nom de Berthe Marchand. Lorsque, plus tard, le rapatriement de cette enfant fut réclamé auprès du gouvernement français, on constata que Frédéric Marchand était devenu Allemand faute d'option pour la France en 1871-72. Les démarches faites auprès de l'Allemagne en vue du rapatriement de l'enfant n'ont pas abouti; il y avait impossibilité de prouver que les père et mère de l'intéressée avaient été ou étaient mariés, d'où la nécessité, pour les autorités allemandes, de considérer l'enfant comme illégitime et suivant la condition de sa mère. A teneur du droit lorrain, la simple reconnaissance d'un enfant n'a pas d'effet sur le statut personnel de l'intéressé.

En portant ces faits à la connaissance du gouvernement français, nous avons exprimé l'espoir que, vu la nationalité française de la mère, la fille en question serait reconnue Française. Dans sa réponse, le ministre de la justice déclare que, si la reconnaissance par le père est antérieure à la loi française du 26 juin 1889 sur la nationalité, elle a entraîné pour l'enfant la nationalité du père; si, au contraire, la reconnaissance est postérieure à cette loi, l'enfant suit la nationalité de la mère, par application de l'art. 8 modifié, chiffre 1er, alinéa 2, du Code civil, en ces termes : « Tout enfant né d'un Français en France ou à l'étranger est Français. »

Or, l'intéressée ayant été reconnue par son père en 1888, devant l'officier de l'état civil de Berne, elle suivrait, d'après la distinction établie par le ministère français, la nationalité de son père et devait être considérée comme ressortissante de l'Empire allemand. Il ne nous a pas été possible d'admettre cette théorie. Nous avons renouvelé auprès de la France notre précédente demande. En ce qui concerne la question de savoir si la reconnaissance d'un enfant illégitime par le père naturel apporte une modification au statut personnel de cet enfant, c'était, disions-nous, la loi du pays d'origine du père qui seule est applicable et non pas une autre législation, quelle qu'elle soit. Or, aux termes de la législation lorraine, la simple reconnaissance n'a pas les effets juridiques que prétend le gouvernement français et l'on devait, suivant nous, s'en tenir au fait que l'enfant dont il s'agit avait conservé sa nationalité française, qu'elle avait acquise comme fille illégitime d'une Française.

Ici encore le gouvernement français persista à soutenir sa thèse. Il continua à prétendre que l'intéressée ne pouvait être considérée comme Française, attendu que, ayant été reconnue par son père en 1888, elle avait perdu la qualité de Française, en vertu de la législation en vigueur en France. (Ibid.)

Outrage aux bonnes mœurs. (Publication pornographique.) L'invasion croissante des publications immorales et des gravures obscènes venues de l'étranger nous a occupé à différentes reprises en 1891. Nous nous en sommes tenus, il est vrai, au principe adopté jadis (voir notre rapport de gestion de 1878, F. Féd. 1879, II, 548), à savoir que les mesures destinées à combattre le mal, pour autant qu'elles doivent être prises à l'intérieur, sont du ressort des cantons, qu'elles constituent une des charges de leur autonomie en matière de droit pénal et dans le domaine de la police. Par contre, nous n'avons pas hésité, sur la demande des autorités cantonales, à intervenir auprès des gouvernements étrangers pour les engager à sévir énergiquement contre les individus qui, de l'étranger, offraient en vente ou cherchaient à répandre en Suisse des imprimés ou images pornographiques. Tant en Allemagne qu'en Belgique, dans les Pays-Bas et en Italie, nous avons obtenu le résultat désiré. La législation française, par contre, ne donnait pas, dans le cas spécial dont il s'agissait, les armes voulues pour la répression du fait signalé, c'est-à-dire d'annonces par la voie des journaux, attendu que les annonces elles-mêmes n'avaient rien d'obscène dans leur rédaction.

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