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» La régénération de l'Allemagne peut seule produire de nouvelles familles nobles, et ren» dre leur éclat à celles qui le furent jadis.

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Bientôt l'insurrection allemande gagne de village en village. Partout elle est d'avance organisée. Chaque citoyen est obligé de s'opposer avec toute arme quelconque à l'invasion de l'ennemi. Toutes les localités sont déclarées de bonne défense. La levée en masse doit se rassembler dès que l'ennemi paraît, et la levée en masse se compose de tout ce qui n'entre pas dans l'armée de ligne ou dans la landwer. Elle doit seconder le corps d'armée s'il résiste; et, s'il se retire, elle doit agir sur les derrières de l'ennemi. La levée en masse doit combattre à outrance. Tous les moyens lui sont bons contre les Français. Elle doit harceler l'ennemi, lui couper les vivres; elle ne doit pas craindre d'anéantir les soldats marchant isolément. La levée en masse n'a pas d'uniforme, parce qu'un uniforme la ferait reconnaître. Elle a des officiers qu'elle se choisit ellemême; elle s'arme indifféremment de fusils, de faux, de sabres et de fourches. A l'approche des Français, les habitans doivent évacuer les villages et se retirer dans les bois, emporter les farines, faire couler les tonneaux, brûler les moulins et les bateaux, combler les sources, couper les ponts. Il en coûte moins, dit l'ordonnance,

de rebâtir un village que de nourrir l'ennemi.

Dans les villes qui sont occupées par l'armée française, les bals, les fêtes sont interdits; les mariages même sont défendus; il est surtout ordonné de ne point faire le service de la garde nationale. Les désordres de la populace, dit encore le règlement, sont moins nuisibles que la police qui rendrait à l'ennemi des forces disponibles.

Telles sont les nouvelles armes que la politique des ennemis de Napoléon se propose d'employer contre lui.

Ainsi donc la guerre change de nature. Désormais les rois vont feindre d'être entraînés par les peuples. Resteront-ils les maîtres de diriger cette machine qu'ils ont empruntée à l'arsenal révolutionnaire? C'était une arme que la république avait léguée à Napoléon contre les rois. Napoléon, tout capable qu'il soit de la diriger, n'a pas voulu s'en servir, dans la crainte de bouleverser tous les trônes ; et des rois sont

Ce grand homme a mérité la reconnaissance de tous les rois; car, en rétablissant le trône de France, il a fermé le foyer du volcan qui les menaçait tous....... (Fontanes, 28 décembre 1813.)

C'est un bien faux jugement que celui par lequel on adjuge à Napoléon la représentation de la révolution...... Ah! que c'est peu connaître ce qui s'est passé!........ Je di

assez téméraires aujourd'hui pour y toucher! Napoléon la voit avec étonnement, avec inquiétude même; il a peine à concevoir que la peur qu'ils ont de sa force puisse les aveugler à ce point.

La défection de la Prusse donne aux alliés un renfort de cent mille hommes divisés en quatre armées 1.

La première et la seconde, commandées par Yorck et Bulow, arrivent par Berlin sur les pas de Wittgenstein. Blücher, à la tête de la troisième, s'élance de Breslau à travers la Lusace, pour joindre à Dresde les Russes de Wintzingerode et de Koutousoff. Tauenzien reste en arrière

rais bien plus vrai en prenant une route absolument contraire..... Si Napoléon n'est plus à la tête de l'Europe, si la France a perdu ses conquêtes, ne serait-ce pas pour s'être séparé de la révolution ?........ Qui sait si un consul n'eût pas duré plus qu'un empereur ?..... Qui sait si des citoyens n'eussent pas défendu plus virilement leurs foyers contre les étrangers que ne l'ont fait des sujets ?... Qui sait jusqu'à quel point le retour d'une cour a détrempé nos âmes? (M. l'abbé de Pradt, 1821; tom. 1, pag. 263. )

1 Les 42,000 hommes que la convention de Paris laissait à la Prusse ne passaient que six mois sous les armes, et 42,000 autres les remplaçaient pendant les six mois suivans, de sorte que la Prusse exerçait par an le double de l'état militaire qui lui était accordé. (Voir l'ouvrage de M. de Monvéran, sur l'Angleterre, to. vi, pag. 178.)

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avec la quatrième pour faire le blocus des forteresses de l'Oder.

Heureusement la Prusse a mis, à couver sa défection, le temps qu'il fallait pour y porter remède.

Déjà, comme nous l'avons vu, les deuxième et cinquième corps d'armée, conduits par le général Lauriston et par le duc de Bellune sont arrivés sur l'Elbe et se sont ralliés au vice- roi. Un troisième, formé des divisions Dufour et Dumonceau va les y rejoindre; il part de Wezel, et, dirigé par le général Vandamme, prend la route de Brême et d'Osnabruck.

D'autres armées se forment encore avec ce qui reste à recevoir des levées décrétées le 11 janvier. Chaque jour voit ces colonnes s'épaissir et s'étendre. Le maréchal Ney, qui vient d'être décoré du titre de prince de la Moskwa, et le duc de Raguse, qui arrive d'Espagne, sont partis de Paris pour aller en prendre le commandement. Le général de Wrède réunit une nouvelle armée bavaroise à Bamberg; nos alliés du Wurtemberg, de Darmstadt et de Bade préparent aussi de nouveaux contingens. Mais comment compter sur nos alliés? La défection de la Prusse doit nous en faire prévoir bien d'autres!...

Napoléon, qui n'a jamais fait avancer une armée sans préparer aussitôt une réserve, pense

que le moment des grandes précautions est venu. Désormais pour réserves ce ne sont plus des corps d'armée qui suffisent; il nous faut des conscriptions tout entières.

La levée de 1813 a paré aux événemens de Russie; la levée du mois de janvier nous donne le supplément de force que les derniers événemens de Prusse rendent nécessaires. Maintenant, pour faire face à tout ennemi nouveau qui surviendrait, Napoléon ordonne que la conscription de 1814 soit rendue disponible, et qu'elle soit complétée à cent quatre-vingt mille hommes par les classes antérieures '.

La désobéissance même nous fournira un supplément de ressources. Les états de la con

I

Trop de Français ont succombé sans doute dans ces guerres incessantes! mais «<il serait facile de prouver que » de toutes les puissances de l'Europe la France est celle qui, depuis 1800, a le moins perdu.

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L'Espagne, qui a éprouvé tant de défaites, a perdu da>>vantage dans la proportion de sa population. Que l'on >> considère ce que l'Aragon seul a sacrifié à Sarragosse.

>> Les levées de l'Autriche, détruites à Marengo, à Ho>> henlinden; celles de 1805 détruites à Ulm, à Auster» litz; celles de 1809 détruites à Eckmuhl, à Wagram, » ont été hors de proportion avec sa population.

>> Dans ces campagnes, les armées françaises avaient » avec elles des armées bavaroises, wurtembergeoises, » saxonnes, polonaises, italiennes, suisses, qui compo

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