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ANCIENNE LÉGISLATION

CONCERNANT LES FORÊTS.

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IRE SECTION.

Ordonnance de Louis XIV,

SUR LE FAIT DES EAUX ET FORÊTS DU MOIS D'AOÛT 1669 (1).

Louis, par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre : A tous présens et à venir, salut.

Quoique le désordre qui s'était glissé dans les Eaux et forêts de notre royaume, fût si universel et si invétéré, que le remède en paraissait presqu'impossible, néanmoins le ciel a tellement favorisé l'application de huit années que nous avons donnée au rétablissement de cette noble et précieuse partie de notre domaine, que nous la voyons aujourd'hui en état de refleurir plus que jamais, et de produire avec abondance au public tous les avantages qu'il en peut espérer, soit pour les commodités de la vie privée, soit pour les nécessités de la guerre, ou enfin pour l'ornement de la paix, et accroissement du commerce par voyages de long cours dans toutes les parties du monde.

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Mais comme il ne suffit pas d'avoir rétabli l'ordre et la discipline, si par de bons et sages réglemens on ne l'assure pour

(1) La table des titres est à la fin de l'Ordonnance.

2o PART

en faire passer le fruit à la postérité, nous avons estimé qu'il était de notre justice, pour consommer un ouvrage si utile et si nécessaire, de nous faire rapporter toutes les ordonnances tant anciennes que nouvelles qui concernent la matière, afin que les ayant conférées avec les avis qui nous ont été envoyés des provinces par les Commissaires départis pour la réformation des Eaux et forêts, nous pussions sur le tout former un corps de lois claires, précises et certaines, qui dissipent toute l'obscurité des précédentes, et ne laissent plus de prétexte ou d'excuse à ceux qui pourront tomber en faute. A ces causes, après avoir ouï le rapport de personnes intelligentes et versées dans la matière, de l'avis de notre conseil, et de notre certaine science, pleine puissance et autorité royale, nous avons dit, déclaré et ordonné; 'disons, déclarons, ordonnons, et nous plaît ce qui ensuit.

TITRE 1er. De la Juridiction (1) des Eaux et forêts.

Art. 1. Les juges établis pour le fait de nos Eaux et forêts connaîtront, tant au civil qu'au criminel, de tous différends qui

(1) La juridiction des Eaux et forêts a été supprimée, tant par les lois des 7 et 14 septembre et 25 décembre 1790, qui ont attribué aux tribunaux ordinaires la connaissance des délits forestiers et des délits de chasse, que par la loi du 29 septembre 1791, qui a créé une Administration des Forêts pour veiller à la conservation des forêts de l'État, des communes et des établissemens publics.

Ensuite, ces dispositions ont elles-mêmes subi des modifications et des changemens, soit d'après le Code forestier et l'Ordonnance rendue pour son exécution, comme on l'a vu dans la première partie de cet ouvrage, soit d'après d'autres lois antérieures au Code, qui seront rappelées et analysées dans le tableau chronologique ci-après.

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Enfin, les autres parties de l'Ordonnance de 1669, excepté quelques-unes des dispositions relatives à la chasse et à la pêche, sont aujourd'hui également sans objet, conformément à l'art, 218 du Code forestier, qui porte : « Sont et demeurent abrogés, pour l'avenir, toutes lois, ordonnances, édits et déclarations, arrêts du Conseil, arrêtés et décrets, et tous réglemens intervenus, à quelque époque que ce soit, sur les matières réglées par le présent Code, en tout ce qui concerne les forêts. »

Cependant cet article ajoute: « Mais les droits acquis antérieurement au présent Code seront jugés, en cas de contestation, d'après les lois, ordonnances, édits et déclarations, arrêts du Conseil, arrêtés, décrets et réglemens ci-dessus mentionnés.

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Il résulte de cette restriction, qu'il était indispensable de placer l'Ordonnance de 1669 à côté même du Code forestier, puisque, dans certaines circonstances, elle peut encore être invoquée comme Loi.

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appartiennent à la matière, des eaux et forêts, entre quelques personnes, et pour quelque cause qu'ils aient été intentés.

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2. Déclarous faire partie de la matière qui leur est attribuée, toutes questions qui seront mues pour raison de nos forets bois, buissons et garennes, assiettes, ventes, coupes, délivran ces et récolemens, mesures, façons, défrichement ou repeuplement de nos bois, et de ceux tenus en grurie, grairie, ségrairie, tiers et danger, apanage, engagement, usufruit, et par indivis, usages, communes, landes, marais, pâtis, pâturage, panage, paisson, glandée, assiette, motion et changement de bornes et limites dans nos bois.

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3. Seront aussi de leur compétence toutes actions concernant les entreprises ou prétentions sur les rivières navigables et flottables, tant pour raison de la navigation et flottage, que des droits de pêche passage, pontonnage et autres, soit en espèces ou en deniers, conduite, rupture, et loyers de flottes, bacs et bateaux, épaves sur l'eau, constructions et démolitions d'écluses, gords, pêcheries, et moulins assis sur les rivières, visitation de poisson, tant és bateaux que boutiques et réservoirs, et des filets, engins et instrumens servant à la pêche, et généralement tout ce qui peut préjudicier à la navigation, charroi et flottage des bois de nos forêts, le tout néanmoins sans préjudice de la juridiction des prévôts des marchands, ès villes où ils sont en possession de connaître de tout ou de partie le ces matières, et de celles des officiers des turcies et levées, et autres qui pourraient avoir titres et possession pour

en connaître.

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4. Voulons pareillement qu'ils connaissent de tous différends sur le fait des îles, îlots, jayeaux, attérissemeus, accroissemens, alluvions, viviers, palus, bâtardeaux, chantiers, auzelées et curement de nos rivières, boires et fossés qui sont sur Jeurs rives.

5. Connaîtront en outre de toutes actions qui procèdent de contrats, ma marchés, promesses, baux, associations, tant entre marchands qu'autres pour fait de marchandise de bois de chauffage on merrein, cendres et charbons; pourvu toutefois que les contrats, marchés, promesses, baux et associations ajent été faits avant que les marchandises fussent transportées hors les bois, rivières et étangs, et non autrement.

6. S'il y a differend sur la taxe, ou sur le paiement des journées et salaires de manouvriers, bûcherons et autres artisans travaillant dans nos bois et forêts, pêcheurs, aides à bateaux passagers des bacs établis sur nos rivières, voulons qu'ils soient poursuivis et jugés aux sieges des Eaux et forêts.

7. Les mêmes sieges connaîtront de toutes causes, instances,

et procès mûs sur le fait de la chasse et de la pêche, prises des bêtes dans les forêts, et larcins de poissons sur l'eau ; même informeront des querelles, excès, assassinats et meurtres commis à l'occasion de ces choses, et en instruiront, et jugeront les procès, soit entre gentilshommes, officiers, marchands, bourgeois, ouvriers, bateliers, garenniers, pêcheurs ou autres de quelque qualité que ce soit, sans distinction quelconque, leur en attribuant en tant que besoin serait, toute cour, juridiction et connaissance, et l'interdisant expressément à tous autres juges, à peine de nullité, et d'amende arbitraire contre les parties qui les auront requis de procéder; sans préjudice toutefois à la juridiction des capitaines des chasses, que nous maintenons en leurs droits, ainsi qu'il sera dit au chapitre de la chasse.

8. A l'égard des autres crimes qui ne concernent les cas et matières ci-dessus, comme vols, meurtres, rapts, brigandages, et excès sur les personnes qui passent, ils n'en pourront connaître, quoique commis dans les forêts ou sur les eaux, sinon qu'ils eussent surpris les coupables en flagrant délit, auquel cas ils en informeront et décréteront seulement, et renvoyeront incessamment le prisonnier avec les charges, en toute sûreté, aux juges à qui la connaissance en appartient par les ordonnances.

9. La compétence des juges ne se réglera point en fait d'Eaux et forêts par le domicile du défendeur, ni par aucun privilége de causes commises, ou autre quel qu'il puisse être, mais par le lieu, s'il s'agit de délits, abus et malversations, ou la situation de la foret, et des eaux, s'il est question d'usages et de propriété, ou de l'exécution de contrats pour marchandises qui en proviennent.

10. N'entendons qué dans les différends de partie à partie nos officiers des Eaux et forêts connaissent de la propriété des eaux et bois appartenant aux communautés ou particuliers, sinon lorsqu'elle sera nécessairement connexe à un fait de réformation et visitation, ou incidente et proposée pour défense contre la poursuite; mais lorsqu'il s'agira du pétitoire, ou possessoire, échanges, partages, licitations, retrait lignager ou féodal, et d'autres actions qui seront directement et principalement intentées pour raison de la propriété, hors le fait de réformation et visitation, la connaissance en appartiendra aux baillifs, sénéchaux et autres juges ordinaires.

11. Nos officiers exerceront sur les Eaux et forêts des prélats, et autres ecclésiastiques, princes, chapitres, communautés régulières, séculières ou laïques, et de tous particuliers de quelque qualité qu'ils soient, la même juridiction qu'ils

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