Page images
PDF
EPUB

parlement et autres nos cours, il survient aucun doute ou difficulté sur l'exécution de quelques articles de nos ordonnances, édits, déclarations et lettres patentes, nous leur défendons de les interpréter; mais voulons qu'en ce cas elles aient à se retirer par devers nous pour apprendre ce qui sera de notre intention. Ord., 1667, tit. 1, art. 7.

[Alors le Roi, seul législateur, interprétait seul la loi; et l'interprétation devait précéder le jugement.

La puissance législative s'exerce collectivement par le Roi, la Chambre des pairs et la Chambre des députés des départemens. (Charte, 15.) Le Roi propose la loi. (Charte, 16.) La proposition de loi est portée, au gré du Roi, à la Chambre des pairs ou à celle des députés, excepté la loi de l'impôt, qui doit être adressée d'abord à la Chambre des députés. (Charte, 17.)- Toute loi doit être discutée et vôtée librement par la majorité de chacune des deux chambres. ( Charte, 18. V. les art. suivans.)

Art. 1. Lorsqu'après la cassation d'un premier arrêt ou jugement en dernier ressort, le deuxième arrêt ou jugement rendu dans la même affaire, entre les mêmes parties, est attaqué par les mêmes moyens que le premier, la Cour de cassation prononce toutes les chambres réunies.

Art. 2. Lorsque la Cour de cassation a annulé deux arrêts ou jugemens en dernier ressort rendus dans la même affaire entre les mêmes parties, et attaqués par les mêmes moyens, le jugement de l'affaire est, dans tous les cas, renvoyé à une Cour royale. La Cour royale, saisie par l'arrêt de cassation, prononce toutes les chambres assemblées.

S'il s'agit d'un arrêt rendu par une chambre d'accusation, la Cour royale n'est saisie que de la question jugée par cet arrêt. En cas de mise en accusation ou de renvoi en Police correctionnelle ou de simple police, le procès sera jugé par la Cour d'assise ou par l'un des tribunaux du département où l'instruction aura été commencée. Lorsque le renvoi est ordonné sur une question de compétence ou de procédure en matière criminelle, il ne saisit la Cour royale que du jugement de cette question. L'arrêt qu'elle rend ne peut être attaqué sur le même point et par les mêmes moyens par la voie du recours en cassation : toutefois, il en est référé au Roi, pour être ultérieurement procédé par ses ordres à l'interprétation de la loi.

En matière criminelle, correctionnelle ou de police, la Cour royale, à laquelle l'affaire aura été renvoyée par le deuxième arrêt de la Cour de cassation, ne pourra appliquer une peine plus grave que celle qui résulterait de l'interprétation la plus favorable à l'accusé.

Art 3. Dans la session législative qui suit le référé, une loi interprétative est proposée aux Chambres.

Art. 4. La loi du 16 septembre 1807, relative à l'interprétation des lois, est abrogée. (Loi du 1er août 1828.)]

4. Ce même droit de faire observer les lois, et de maintenir dans l'état l'ordre général par l'administration de la justice, et le bon usage de la puissance souveraine, donne au prince le droit d'employer son autorité pour faire observer les lois de l'Église, dont il doit être le protecteur, le conservateur et l'exécuteur; afin que par le secours de cette autorité la religion règne sur tous les sujets, et que la police temporelle, appuyant celle de l'Église,

l'une et l'autre maintiennent l'état dans la tranquillité qui doit être l'effet de leur union (1). (Charte, 57.)

[Chacun professe sa religion avec une égale liberté, son culte la même protection. (Charte, 5.)

et obtient pour Cependant la religion catholique, apostolique et romaine est la religion de l'état. (Charte, 6.)

Les ministres de la religion catholique, apostolique et romaine, et ceux des autres cultes chrétiens, reçoivent seuls des traitemens du Trésor Royal. (Charte, 7.)]

5. Comme le gouvernement souverain regarde l'ordre universel de l'état et le bien public, et qu'il s'étend à tout ce qui doit composer cet ordre, et former la police générale pour l'administration de la justice, pour les armes, pour les finances, et pour tout ce qui peut demander l'usage de l'autorité; le souverain a le pouvoir de remplir les charges et les emplois nécessaires pour toutes ces différentes parties de l'ordre, de personnes qui en exercent les fonctions, de marquer à chacun les siennes, et leur donner la dignité, l'autorité, ou les autres caractères propres pour celles qui leur sont commises. (Charte, 14, 57.) Ce qui renferme le droit de créer les charges dont l'usage peut être nécessaire pour le bien public; d'en régler les droits et les fonctions, et aussi le droit de supprimer celles qui peuvent être inutiles et à charge à l'état (2).

6. Le pouvoir de faire les lois renferme celui d'accorder quelques dispenses que les règles peuvent souffrir; et c'est un des droits du souverain de donner des dispenses de cette nature. Ainsi, par exemple, c'est une des règles de l'établissement des officiers qu'ils aient l'àge réglé par les lois; mais, comme il peut y avoir des personnes en qui leur naissance, leur vertu, leur capacité, fassent un mérite si distingué qu'ils puissent remplir dignement des charges avant l'âge réglé pour les exercer; il est du bien public que le souverain les dispense de cette règle, et il n'y a que lui seul qui ait ce pouvoir (3). (Charte, art. 1.)

7. C'est aussi par un juste effet de l'ordre de la justice et de la police, qu'on a établi dans les états les mieux policés divers priviléges, qui ne sont autre chose que des exceptions des règles communes en faveur de quelques personnes. (Charte, art. 1. Ainsi, par exemple, il est juste que des inventeurs de choses nouvelles, qui sont d'une utilité singulière pour le bien public, et qui veulent en tirer quelque avantage, aient le privilége de faire seuls le commerce des choses dont ils donnent l'usage au public, et que ce privilége leur soit accordé pendant un certain

(1) Nos Rois se qualifient protecteurs, gardes, conservateurs et exécuteurs de ce que l'Église enseigne et ordonne. V. l'ord. de François I, en juillet 1543. V. le chap. 10 du Traité des lois, t. 1, p. 29, v. l'art. 9 de la sect. 3. (2) Exod. 18. 21. Deuter. 1. 15. 16. 2. Reg. 18. (3) L. 2 C. de his qui ven. at. impetr.

temps, pour tenir lieu d'un prix du mérite d'un tel service, pour récompenser leur travail et leurs dépenses, et pour servir d'un exemple qui attire, à l'imitation de ces inventeurs, ceux qui peuvent être capables de rendre de pareils services. Et il y a diverses sortes d'autres priviléges qui sont des bienfaits et des graces qu'on ne peut tenir que du souverain (1).

[Toute idée nouvelle, dont la manifestation ou le développement peut devenir utile à la société, appartient primitivement à celui qui l'a conçue, et ce serait attaquer les droits de l'homme dans leur essence que de ne pas regarder une découverte industrielle comme la propriété de son auteur. (Préambule de la loi du 31 déc. 1790.)

Art. 1er. Toute découverte ou nouvelle invention, dans tous les genres d'industrie, est la propriété de son auteur; en conséquence, la loi lui en garantit la pleine et entière jouissance, suivant le mode et pour le temps qui seront ci-après déterminés. (Loi du 31 déc. 1790. V. lois du 14-25 mai 1791, du 25 sept. 1792; arrêté du 5 vendémiaire an 9; décret du 25 janvier 1807.)

L'obtention d'un brevet, depuis que l'invention est devenue publique par le fait même de l'inventeur, ne peut lui conférer une propriété exclusive. (Cass. 10 fév. 1806.)]

8. Comme il est de l'ordre général de la justice et de la bonne police d'un état, que les services et autres mérites qui peuvent contribuer au bien public soient récompensés ou par des titres d'honneur, ou par d'autres graces qui, venant de la main du souverain, soient plus distinguées; il a seul le droit de dispenser ces sortes de graces. Ainsi, c'est lui seul qui peut anoblir les personnes qui, n'étant pas nées dans le rang de la noblesse, s'en sont rendues dignes. Ainsi, il peut créer des ordres qui donnent une dignité et un rang d'honneur à ceux qu'il y élève, leur accordant des marques singulières de ce bienfait, qui le fassent paraître ou sur leurs personnes, ou dans leurs armes, et qui leur attirent la considération et le respect qui peut être dû à cette dignité. Ainsi, le souverain peut, en faveur de personnes de qualité, et pour leurs services, ériger des fiefs en terres titrées. Ainsi, il peut donner des pensions sur le fonds des deniers publics à ceux qui, par quelque service singulier, ont mérité cette récompense et marque d'honneur.

[La noblesse ancienne reprend ses titres. La nouvelle conserve les siens. Le Roi fait des nobles à volonté; mais il ne leur accorde que des rangs et des honneurs, sans aucune exemption des charges et des devoirs de la société. (Charte, 71.) — La Légion-d'honneur est maintenue. Le Roi déterminera les réglemens intérieurs et la décoration. (Charte 72.)

[ocr errors]

Art. 1o. La Légion-d'honneur est instituée pour récompenser les services civils et militaires. (Ord. du 26 mars 1816.)]

(1) L. un. C. de privil. Corp. urb. Rom. L. 1. C. de priv. Dom. Aug. v. Tit. ff. de priv. vet.

9. Outre ces sortes de bienfaits et de graces dont la dispensation n'appartient qu'au souverain, il y en a plusieurs autres que le bien de l'état rend nécessaires, et qu'on ne peut tenir que de lui. Ainsi, lorsqu'un étranger veut établir sa demeure dans un état, et y jouir de la liberté et des droits propres à ceux qui en sont sujets, et que n'y ont pas les sujets des autres états, ils sont mis au nombre des membres de l'état dont ils veulent devenir sujets par une grace du prince, qu'on donne en France par des lettres de naturalité qu'on obtient du roi, et qu'on appelle ainsi, parce que ceux qui les obtiennent sont réputés par l'effet de ces lettres, naturels français (1). (C. civ. 11, 13, s.; 726, 912.)

[Un étranger devient citoyen français, lorsqu'après avoir atteint l'âge de 21 ans accomplis, et avoir déclaré l'intention de se fixer en France; il y a résidé pendant dix années consécutives. (Art. 3 de la constit. du 22 frimaire an 8.) — Nous nous réservons, néanmoins, d'accorder lesdites lettres, quand nous le jugerons convenable, avant les dix ans de résidence révolus. (Loi du 14 oct. 1814, art. 3, § 2.)

Les étrangers qui rendront ou qui auront rendu des services importans à l'état, ou qui apporteront dans son sein des talens, des inventions ou une industrie utile, ou qui formeront de grands établissemens, pourront, après un an de domicile, jouir du droit de citoyen français. (Art. 1er du Sén. cons. du 19 fév. 1808.) Ce droit leur sera conféré par un decret spécial rendu sur le rapport d'un ministre, le Conseil-d'état `entendu (art. 2). — Il sera délivré à l'impétrant une expédition dudit decret, visé par le grand-juge ministre de la justice (art. 3). L'impétrant, muni de cette expédition, se présentera devant la municipalité de son domicile, pour y prêter le serment d'obéissance aux constitutions du royaume, et de fidélité au Roi; il sera tenu registre et dressé procès-verbal de cette prestation de serment (art. 4).

Lorsqu'un étranger, en se conformant aux dispositions de l'acte constitutionnel du royaume, du 22 frimaire an 8, aura rempli les conditions exigées pour devenir citoyen français, sa naturalisation est prononcée par le Roi. (Art. 1oo du décret du 17 mars 1809.) — La demande en naturalisation et les pièces à l'appui seront transmises, par le maire du domicile du pétitionnaire, au préfet qui les adressera, avec son avis, au graud-juge, ministre de la justice (art. 3).

Conformément aux anciennes constitutions françaises, aucun étranger ne pourra siéger, à compter de ce jour, ni dans la Chambre des pairs, ni dans celle des députés, à moins que, par d'importans services rendus à l'état, il ait obtenu des lettres de naturalisation vérifiées par les deux chambres. (Art. 1er de l'ord. du 4 juin 1814.) Les dispositions du Code civil, relatives aux étrangers et à leur naturalisation n'en restent pas moins en vigueur, et seront exécutées selon leur forme et teneur (art. 2).]

10. La légitimation des bâtards est encore un des droits propres au souverain, qui seul peut, par des lettres qu'on appelle de légitimation, faire cesser l'obstacle et l'incapacité que faisait en eux le vice de leur naissance, qui les excluait de certains hon

(1) L. 1. C. de jur. aur. anul. L. 2. eod. V. l'art. 3 de la sect. 4. du tit. 5.

neurs,

de certaines charges, dont ils sont rendus capables par le bienfait de cette légitimation (1). (C. civ. 756, s.; Charte, 1.)

Ces paroles sont tirées de cette Novelle 74, où il est parlé d'une manière de légitimation qui était en usage dans le Droit romain, lorsqu'un père, qui n'avait que des enfans bâtards, ordonnait par son testament, qu'ils fussent ses successeurs légitimes. Cette disposition avait son effet, si ces enfans en obtenaient la confirmation par lettres du prince.

L'effet de la légitimation des bâtards par lettres du prince, est borné à faire cesser les incapacités dont il est parlé dans cet article, et ne s'étend pas à leur donner le droit de succéder comme l'ont cru plusieurs, et comme il est même réglé par quelques coutumes. Cet usage de la légitimation blesserait l'équité et les bonnes mœurs; et il serait injuste et malhonnête, qu'un bâtard, légitimé par des lettres, vînt partager avec des enfans légitimes la succession de leur père ou de leur mère, et qu'il prétendît celles des enfans et des parens de son père ou de sa mère. Car toutes ces successions sont affectées par la nature et par les lois à ceux à qui la naissance légitime donne le titre d'enfant et parens; et le vice d'une naissance illégitime ne peut être effacé de sorte que le bâtard entre dans la condition naturelle de fils ou de parent légitime, au préjudice de ceux qui le sont. (V. l'art. 3 de la sect. 5 du tit. 5, et la remarque qu'on y a faite.)

[La loi du 12 brumaire an 2 (2 novembre 1793) dispose: art. 1or. Les enfans actuellement existans, nés hors du mariage, seront admis aux successions de leur père et de leur mère, ouvertes depuis le 14 juillet 1789.

Ils le seront également à celles qui s'ouvriront à l'avenir, sous la réserve portée par l'art. 10, ci-après.

Art. 2. Leurs droits de successibles sont les mêmes que ceux des autres enfans.

Un arrêt de cassation, du 16 pluviose an 13, porte : l'art. 5 de la déclaration de 1639, touchant les mariages secrets, et qui excluait les enfans nés de ces mariages de la succession de leur père et mère, a été abrogé par la loi du 20 septembre 1792 et par la loi du 12 brumaire qui, admettant les enfans naturels à succéder, ne comportent pas l'exclusion d'enfans nés de mariages secrets.

Art. 10. A l'égard des enfans nés hors du mariage, dont le père et la mère seront encore existans lors de la promulgation du Code civil, leur état et leurs droits seront en tout point réglés par les dispositions du Code.

Le Code civil règle l'état et les droits des enfans naturels pour les successions ouvertes depuis la loi du 12 brumaire (2). Les tribunaux ne pouvaient, avant la promulgation du Code civil, régler définitivement l'état et les droits des enfans naturels des pères et mères décédés dans l'intervalle de cette loi au Code (3). (V. t. 1, p. 98.)]

II. Toutes ces sortes de droits sont des suites naturelles de la puissance de ceux qui ont le gouvernement souverain, et il peut y en avoir d'autres que les lois propres de chaque état réservent de même au souverain seul. Ainsi, en France, c'est le roi seul,

(1) Nov. 74. c. 2. SI.

(2) Cass. 4 germinal an ro. (3) Cass. 4 prairial an II.

« PreviousContinue »