Page images
PDF
EPUB

envoya de bonne heure des pionniers, qui vinrent raser la grande muraille de notre jardin, formant notre clôture; et le 30 juillet, la ville ayant été en effet assiégée, puis prise après vingt-six jours de tranchée ouverte, il est impossible de se figurer dans cette circonstance nos embarras et dommages.

Le prince de Conti s'établit dans notre maison, avec un étatmajor et train si considérable que son secrétaire avait son logement dans un grenier. Les généraux nous blâmèrent presque tous d'avoir quitté notre maison de Miséricorde, où il eût été bien plus facile, disaient-ils, de nous mettre à couvert au moyen d'une sauvegarde royale que dans un petit bourg; ce qui nous fit grandement regretter notre ancienne demeure.

1699. Les désirs de monsieur de Haulchin ainsi que de toute la communauté pour une rentrée à la Miséricorde furent couronnés d'un très-agréable succès; car Mgr le vicaire général de Hinnisdael, étant venu, le 2 juin, inspecter notre maison, y revint le 20 août avec acte d'approbation de notre supplique et de donation absolue de notre chapelle, le tout signé par Son Altesse Électorale Joseph-Clément de Bavière, évêque et prince de Liége, nous en mettre dans toutes les formes et possessions canoniques. En reconnaissance de cet important service, nous lui promimes spontanément de faire chanter la messe pour lui tous les ans à pareil jour. Dès lors nous demeurâmes provisoirement quelques-unes à la Miséricorde, où ne tardèrent pas de nous arriver celles du noviciat.

1701. Monsieur de Haulchin ramène à Marchienne le restant des religieuses, et au comble de ses désirs, après quelques jours seulement de maladie, il s'y endormit dans le Seigneur, regretté à tant de titres et pleuré de la généralité de ses filles. Il faut remarquer que jusqu'ici les religieux de Bonne-Espérance nous ont conduites gratuitement pendant cinquante années; aussi ne les oublierons-nous jamais.

Le Bon Dieu nous rendit encore un de Haulchin, frère du

du précédent, et comme lui un trésor pour nous, le R. P. Bernard de Haulchin, prêtre de l'Oratoire, homme zélé, infatigable, etc.

1703. Démolition de nos cloîtres de Marchienne. Pendant plus de six semaines, nous fumes occupées à décrotter et à mettre en place tous les matériaux nous ramenés à Miséricorde pour pareille bâtisse.

1704. D'après la permission de profaner notre église de Marchienne et les ossements de nos sœurs y inhumées à Miséricorde, on les y enterra avec messe de Requiem; et presqu'aussitôt nous eussions pu faire marché pour la maison de Marchienne avec des Carmes Déchaussés la recherchant ; mais il ne fut pas possible de faire consentir les habitants à recevoir des religieux mendiants. Elle fut vendue à un riche habitant, en faveur duquel la supérieure, absolue en ses volontés, fit signer le contrat de vente par la trop timide communauté à des conditions très-désavantageuses.

Le 14 mai, messieurs Joseph et Gérard Montpellier mirent la première pierre, avec les cérémonies religieuses prescrites, de nouveaux bâtiments nécessaires à Miséricorde. Ce fut le R..P. Hennequart, Oratorien, qui, demeurant chez nous pendant tout l'été, dirigea les ouvrages; les sœurs vidèrent ellesmêmes les caves.

1705. C'est à la même époque que sans bruit se retira le R. P. de Haulchin, ayant horreur de communiquer avec un trop fameux janséniste exilé, lequel avait déjà endoctriné la supérieure.

1706. La supérieure dut se rendre à Liége chez Mgr de Hinnisdael, et à peine est-elle rentrée que Son Altesse Sérénissime Joseph-Clément, passant devant notre cloître, vint nous donner sa bénédiction; mais leurs paternelles admonitions ne l'empêchèrent pas de sortir et de voir le trop dangereux exilé retiré ailleurs, et elle appela, en remplacement de notre vivement et regretté père de Haulchin, un supérieur de

l'Oratoire de Thuin, mais venant si peu, que nous étions quelquefois cinq et six semaines sans pouvoir nous confesser. Septembre. Mgr de Hinnisdael arrive tout à coup pour s'informer des plaintes qu'on avait à faire de la supérieure. Aucune n'osa parler.

1707. Le 30 décembre, décès de notre bon père de Haulchin.

1709. Le fameux janséniste revint chez nous, mais malgré nous. La supérieure le reçoit comme un évêque à très-grands frais; il ose, quoiqu'interdit, célébrer solennellement, mais de grand matin, et nous avons beau gémir et pleurer!

Dans cette même année mémorable (1709), le Port-Royaldes-Champs fut rasé par ordre du roi Louis XIV pour l'opiniâtreté de ces dames à se soutenir dans le jansénisme. Elles furent dispersées en divers monastères pour être surveillées très-soigneusement. Notre supérieure n'en acheta pas moins une partie de leurs livres lui offerts; c'étaient les ouvrages du père Quesnel, poison dont nous nous gardâmes et dont on nous délivra dans une visite postérieure.

Même année encore se donna, le 11 septembre, la bataille de Malplaquet. Nous sauvâmes par précaution beaucoup d'effets; mais, grâce à Notre-Dame-de-Miséricorde, nous restâmes tranquilles.

1710. Encore une visite très-frayeuse du janséniste, en laquelle la supérieure se plaignant d'un froid à la tête, il lui persuada que, comme l'impératrice reine, elle devait se faire faire une calotte en or de ducat; toutefois malgré son empire nous n'y donnâmes pas notre assentiment.

1713. Visite tout extraordinaire ordonnée par Son Altesse le prince-évêque Joseph-Clément de Bavière. Messieurs Rolain, son secrétaire, et de Macrelle, doyen de Sainte-Croix, arrivent donc le 29 juillet. Ayant exhibé à la supérieure leur commission, ils ordonnèrent tout de suite un silence absolu sur tout ce qui allait se passer. Il s'agissait, après examen particuANALECTES X.

24

lier de chacune de nous, que toutes nous missions notre signature au pied d'un formulaire pour détruire tout soupçon de jansénisme, et la chose nous étant expliquée par monsieur Malfroy, curé de Thy-le-Château, et le doyen de Nalinne, nos confesseurs extraordinaires, appelés, il n'y en eut aucune qui ne s'y prêtât. Nous signâmes même toutes très-volontiers, malgré toutes les ruses et les menées sourdes de la supérieure, laquelle ne voulut jamais y consentir. Elle demanda sa déposition, à condition seulement qu'elle retiendrait le nom de supérieure ; ce qui lui fut néanmoins provisoirement accordé. Ces messieurs visiteurs repartirent la veille de Saint-Laurent, après avoir recommandé qu'on eût grand soin de l'obstinée et que la sous-prieure gouvernât la communauté avec charité et douceur en attendant les ordres du prince.

Pendant tout ce temps là, nous ne vimes notre confesseur ordinaire; il vint aussitôt la visite terminée nous faire ses adieux. Trois jours après, sur une ordonnance du consistoire de Liége, nous choisîmes pour confesseur monsieur le curé de de Marchienne entre les trois sujets nous proposés.

L'élection d'une supérieure canonique eut lieu presqu'aussitôt. Monsieur Rousseau, curé de Marchienne, délégué spécialement à cet effet, y procéda selon les formes voulues, assisté de monsieur Enrare, bénéficier de Monceau. Monsieur le curé en informa tout de suite la précédente, lui présenta une lettre de Son Altesse qu'il lut à haute voix, par où elle la remerciait des services qu'elle nous avait rendus, et ordonnait à la communanté de lui porter toujours du respect; sur quoi elle prit pourtant la main de la nouvelle élue pour la conduire à sa place et lui baiser la bague.

Son évêque est venu tout exprès de Liége, après avoir célébré la sainte Messe dans ce charitable dessein, essaya, mais à pure perte, de ramener à l'obéissance notre rebelle. Il eut la bonté de nous témoigner beaucoup de bienveillance et satisfaction, mais repartit pour Fosse, désolé de n'avoir atteint

le but principal de son voyage. De là il manda par un courrier à monsieur Rousseau de se faire remettre par l'incorrigible les livres et son portefeuille; ce qu'il exécuta avec tous les égards nécessaires, égards qu'il eut encore, lorsque, le 29 septembre, il fut chargé de la conduire à Dinant au couvent des Ursulines, où elle trouva en arrivant une gratification y envoyée par le compatissant prince-évêque, savoir 18 écus pour son voyage, et 50 écus pour ses autres besoins.

Après seize mois et demi, elle fut transportée chez nos consœurs les Sépulchrines de Sainte-Walburge, à Liége; puis trois ans après elle demanda d'être placée.

Archives particulières de M. Edouard Pirmez, à Marchienne-au-Pont.

SÉRIE DES ABBESSES DE WAUTHIER-BRAINE.

La meilleure notice sur l'ancienne abbaye de Wauthier-Braine se trouve dans la Géographie et histoire des communes belges par Tarlier et Wauters, Canton de Nivelles, p. 119-121. Cependant la liste des abbesses que les auteurs donnent n'est pas complète. La première abbesse qu'ils citent est Claire del Barre. N'y a-t-il pas là une faute typographique, et ne faut-il pas lire Del Lare ou De Laer, conformément au manuscrit d'où la liste suivante est extraite. Nous le croyons d'autant plus que les auteurs de la Géographie et histoire des communes belges parlent un peu plus loin de la même Claire et de son père Simon Del Lare.

A die fundationis, quae fuit vigesima quarta mensis maii anno Domini millesimo ducentesimo vigesimo quarto, prae

« PreviousContinue »