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Il est enfin nécessaire d'observer que lorsque la convention résulte d'actes faits en différents lieux, si ceux-ci peuvent être considérés comme des actes préparatoires et se rattachant à une opération principale, celle-ci sera considérée comme parfaite dans le lieu où la stipulation aura été conclue, parce que là seulement se réalise le duorum in idem placitum consensus. Tel est le cas de deux personnes qui, en voyageant dans différentes places, concluent la convention dans un lieu déterminé. Si, par contre, les différents actes, bien que se rattachant à une seule fin, peuvent être considérés comme des contrats partiels, chacun d'eux peut se dire parfait dans le lieu où il a été fait, comme il arrive pour les endossements d'une lettre de change qui est transmise dans différentes places. On doit en dire de même dans l'hypothèse d'une société d'assurances qui envoie un agent avec les contrats d'assurance contresignés par le président et par le secrétaire de la société, et avec la faculté de les remettre dans les différentes places en les contresignant, de façon que tous les contrats partiels souscrits par l'agent soient obligatoires pour la société. Dans cette hypothèse, on doit juger de l'obligation de la société, selon la loi du lieu où elle a son siège principal, mais on doit juger des contrats partiels selon la loi du lieu où la convention a été faite, parce que chacun d'eux est accompli dans le lieu où il a été stipulé.

251. Établissons maintenant quelques règles pour déterminer le lieu où l'obligation doit être exécutée, règles qui peuvent valoir quand les parties ne l'ont pas expressément déterminé, ou de façon à ne pas exclure une interprétation contraire.

Quelques-uns pensent que lorsque le lieu de l'accomplissement n'est pas rigoureusement fixé par la volonté expresse des parties, il doit se déterminer selon les prescriptions de la loi. Il est pourtant nécessaire d'observer que, dans l'absence de volonté expresse, le lieu de l'accomplissement peut se déterminer selon la volonté tacite ou selon les circonstances, et qu'ordinairement il résulte de la convention même.

Il y a quelques obligations dont l'accomplissement est telle

ment déterminé par la nature même de l'affaire, qu'il exclut absolument toute espèce de doute; telles sont, par exemple, la location ou la vente d'une maison ou d'un fonds de terre, les travaux à exécuter sur un immeuble déterminé, ou la construction ou réparation d'un édifice. Pour d'autres, le lieu de l'accomplissement résulte des circonstances ou de l'intention des parties, lesquelles ont compté que l'obligation serait exécutée dans le lieu de la stipulation. Si un individu qui réside dans une ville contracte des dettes pour ses besoins journaliers, ou si un ouvrier entrepreneur de travaux de son métier, ou si un voyageur vend une partie de marchandises, on présume que l'accomplissement de l'obligation doit se réaliser dans le lieu même où elle a eu son origine. Par contre, lorsque le lieu de l'accomplissement de l'obligation n'est déterminé ni expressė– ment, ni par la nature du contrat, ni par l'intention présumée des parties, on tiendra compte, pour l'exécution, du domicile de la personne, s'il s'agit d'une obligation personnelle, et s'il s'agit d'une negotiorum gestio, dans laquelle catégorie nous comprenons la tutelle et la curatelle, la gestion des affaires. d'autrui dans leur ensemble (mandat général) ou limitée à un objet déterminé, soit en vertu d'un contrat (mandat ou louage d'ouvrage), soit par la seule volonté du gérant (negotiorum gestio), et autres choses semblables, on doit, pour l'exécution, tenir compte de la loi du lieu où se trouve le siége principal du gérant.

Notons ici que lorsque le débiteur transporte son domicile dans un autre lieu avant d'exécuter l'obligation, la loi de l'ancien domicile est toujours valable pour tout ce qui se rapporte à l'accomplissement de son obligation.

252. En récapitulant toutes les régles établies par nous, nous pouvons conclure que:

1o La loi du lieu où l'obligation devient parfaite est celle qui doit régler le vinculum juris qui en dérive, et tout ce qui appartient à la substance et à la nature de la convention;

2o La loi du lieu désigné pour l'accomplissement doit régler

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l'exécution de l'obligation et tous les effets juridiques qui en dérivent ;

3o L'obligation qui naît d'une convention sera dite parfaite à partir du moment et dans le lieu où se réalise le duorum pluriumve in idem placitum consensus;

4o Le lieu de l'exécution se déterminera, ou selon la volonté expresse des parties, ou selon la nature de la convention et les circonstances, ou, à défaut de tout cela, d'après le domicile du débiteur.

Ces principes sont fondés sur la libre soumission des parties, de laquelle dépend, pour une grande part, la préférence donnée à l'une ou à l'autre loi (1).

(1) La règle pour la détermination de la lex loci applicable est basée sur l'intention présumée des parties contractantes. L'influence qu'on accorde à la lex loci contractús ne prend point sa source dans une déférence aveugle aux lois d'un pays étranger, mais elle est fondée sur la présomption légale que les parties contractantes avaient en vue la loi du pays où le contrat a été fait, et avaient en conséquence l'intention de s'y soumettre, excepté lorsqu'il s'agit de contrats se rapportant å des immeubles, quand les parties avaient en vue la loi d'un autre pays, ou quand la lex loci est injuste par elle-même ou contraire aux bonnes mœurs. (Voir lord Robertson, in Edmonstone vs. Edmonstone, 1er juin 1816; Ferguson's, Consistory Reports, p. 397; William-BeachLawrence, Commentaire sur Wheaton, édition française, t. III, p. 269.) P. P. F.

CHAPITRE II

De la loi qui doit régler la nature et les effets juridiques de l'obligation.

253. De la nature de l'obligation.

254. De la solidarité.

bénéfice de division entre les codébiteurs.

255. Du

256. Des moyens dont

peut disposer le créancier pour contraindre le débiteur à l'accomplissement de son obligation. - 257. Des effets juridiques qui dérivent de l'obligation. 258. Des effets immédiats. 259. Des effets qui dépendent du mode d'exécution. 260. Des effets incidentels. 261. Des intérêts. 262. Du taux de l'intérêt. 264. De la limite maximum de l'intérét

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263. Du taux du change.

permis. 265. De la dette à intérêts avec hypothèque.

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dommages et intérêts. 267. De l'intérêt moratoire.

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difficultés qui peuvent surgir pour déterminer le lieu où l'on peut dire que le retard a eu lieu. 269. De la clause pénale. 270. De la contrainte par corps.

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253. C'est d'après la loi du lieu où elle devient parfaite qu'on doit décider si l'obligation est civile ou naturelle, si elle est pure et simple, ou conditionnelle, si elle consiste à donner ou à faire, si c'est une obligation rei certe ou une obligation generis (1).

254. Quant à la solidarité des débiteurs engagés, soit qu'elle dérive immédiatement de la loi, soit qu'elle provienne de la convention, parce qu'elle a été expressément stipulée, elle doit être régie par la loi du lieu où le contrat a été fait. La solidarité, en

(1) Voir: Colmar, 25 avril 1821 (Müller); Sirey, 21, 2, 264.

effet, constitue la force de l'obligation et la sûreté du créancier, et doit dépendre de la loi sous laquelle les parties se sont obligées (1). Si, par exemple, plusieurs mandants étrangers confèrent un mandat à un Italien pour une affaire commune, ils sont tenus solidairement envers le mandataire pour tous les effets du mandat, selon la disposition de l'article 1756 du Code civil italien (2). La raison en est que le contrat de mandat devient parfait en Italie aussitôt que le mandataire accepte et exécute le mandat (3), et la force de l'obligation entre les mandants étrangers et le mandataire italien doit être réglée par notre loi, sous laquelle les parties se sont obligées. On doit dire la même chose dans l'hypothèse où plusieurs fidéjusseurs étrangers ont fourni caution pour le même débiteur et pour la même dette. Chacun d'eux sera engagé pour la dette entière selon les dispositions de notre loi (art. 1911) (4). Par la même raison, un étranger qui contracte mariage avec une veuve italienne, sans que celle-ci ait obtenu préalablement du conseil de famille l'autorisation d'administrer le patrimoine des enfants du premier lit, devient responsable solidairement de l'administration exercée dans le passé et de celle indûment conservée (5).

(1) Henry, On foreing Law, 39.

(2) < Si le mandat a été conféré par plusieurs personnes pour une affaire commune, dit l'article 1756 du Code civil italien, chacune d'elles est tenue solidairement envers le mandataire de tous les effets du mandat. » P. P. F.

(3) Voir no 261.

(4) L'article 1911 du Code civil italien porte que « lorsque plusieurs personnes ont cautionné un même débiteur pour une même dette, chacune d'elles est obligée pour la dette entière. »

P. P. F.

(5) Il importe de reproduire ici les articles 237, 238 et 239 du Code civil italien. Art. 237 : « La mère qui veut se remarier doit auparavant faire convoquer un conseil de famille... Le conseil délibérera si l'administration des biens doit être conservée à la mère, et pourra mettre des conditions à cette administration et à l'éducation des enfants. Les délibérations du conseil de famille seront soumises au tribunal...

Art. 238: « A défaut de la convocation requise par l'article précé

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