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eanton, dit-il, ayant fixé ses regards sur une caricature difforme, maladroitement eu montre devant une boutique, a mis au monde, le 30 décembre 1821, un enfant sans tête. Cependant la face était formée sur le devant du sternum et des vraies côtes. La bouche, les mâchoires bien faites, deux grands yeux ouverts situes sur les bosses frontales de l'os coronal, les deux oreilles aux deux côtés de la fontanelle, les extrémités supérieures et inférieures bien conformées, les parties de la génération de même. Cet être, mort dans le sein de la mère, présentait le ventre. Ayant en vain cherché la tête, et n'en trouvant pas, je fis l'extraction, de l'eafant par les pieds. L'arrière-faix et le cordon ombilical étaient déja en dissolution. La femme, mère de six enfans vivaus, va fort bien. Avec tout le désir de rapporter l'enfant chez moi, j'ai cédé aux sollicitations du père et de la mère désolés, et je l'ai fait inhumer. »

Cambrai. Phénomène. Les journaux du nord offrent des faits aussi curieux. L'un nous apprend qu'une femme de la cominune de Sandemont (Pas-de-Calais), est accouchée de quatre garçons bien constitués; mais qui n'ont vécu que vingtquatre heures. Un autre nous donne les details suivans :

« Deux enfans du sexe féminin, tenant l'un à l'autre, sont venns au monde à Soignies, au bout de sept mois. Ils n'ont vécu qu'une demi-heure. Cette union des deux êtres étonne d'autant plus que chacun d'eux possède tous les membres et organes extérieurs ordinaires, enfin tout ce qui constitue la conformation la plus régulière. La jonction des deux corps est formée de la partie supérieure de la gorge jusqu'à l'ombilic: la téte et le menton, les épaules, les bras et les mains, les cuisses, les jambes et les pieds sont placés naturellement Les deux petites figures sont parfaites. Il semble qu'il n'y aurait qu'à couper la peau, depuis la gorge jusqu'au nombril, pour opérer la séparation des deux individus et leur dégagement total.

« On remarque qu'il n'existait qu'un seul cordon ombilical. »

4. Riom (Puy-de-Dôme). Assassinat d'une fille par son corrupteur. Parmi les affaires qui viennent d'être jugées par la cour d'assises de ce département, se trouve celle concernant les nommés Salgue, accusés du plus affreux assassinat. Une passion violente pour Catherine Fondegoire s'était allumée depuis trois ans dans le cœur de Maurice, un d'entre eux; il

avait en vain cherché à l'assouvir, et avait fait, il y a deux ans, des entreprises que la résistance de la jeune fille rendirent inutiles; mais enfin elle céda aux poursuites de Maurice Salgue, et devint enceinte. Jean-Baptiste Salgue père était riche et n'aurait jamais consenti au mariage de son fils avec Catherine Fondegoire. Sa famille même se sentait humiliée d'une pareille liaison, Maurice avait promis de lui donner des secours dans sa position. Celle-ci avait fait la confidence de sa grossesse et des dispositions de Maurice au curé de la paroisse, chez qui les deux amans devaient se rendre pour prendre des arrangemens.

Au jour indiqué, Catherine fut apercne le soir près de la maison des Salgues; depuis cette époque elle disparut On soupconna qu'elle avait été victime d'un hor rible attentat. Des perquisitions fureut faites dans la maison des Salgues et dans leur jardin; on trouva dans la maison un couteau en forme de stilet, encore tout ensanglanté, et dans le jardin, qu'on fit bêcher en totalité, on découvrit le cadavre de la malheureuse Fondegoire. L'ins pection de ce cadavre fit reconnaître que des coups de couteau lui avaientété portés à la gorge; que, pour étouffer les cris de la victime, on lui avait mis un baillon de paille, enfoncé si fortement dans la bouche, sans doute avec un bâton, qu'on cut peine à le retirer; qu'on avait de plus étranglee à plusieurs reprises, d'abord avec une corde, puis avec un mouchoir noué et serré avec force.

Un grand nombre de témoins ont été entendus dans cette affaire, dont les débats ont duré quatre jours. Le père Salgue mourut dans sa prison, trois jours avant le jugement; ses deux fils, Pierre et Antoine, ont été acquittés. Une foule de circonstances ont donné la conviction la plus entière de la culpabilité de Maurice, qui a été condamné à la peine de mort.

5. Versailles. Ecole royale.-Une espèce de maladie épidémique s'était déclarée, vers le 18 décembre dernier, à l'école royale spéciale militaire de Saint-Cyr; elle a fait des progrès si alarmans, qu'on a suspendu les exercices, et la plupart des élèves sont retournés chez leurs parens.

Il résulte des rapports faits au ministre de la guerre, que la maladie est une fièvre inflammatoire, à laquelle se joint, sur quelques individus, le caractère ataxique: elle n'est nullement contagieuse.

Les hommes de l'art out reconnu que cette épidéme était occasionée par la tem

pérature humide et chaude de l'atmosphère, la continuité des vents du sud-ouest, et l'abaissement extraordinaire, et presque inconnu, du baromètre pendant plusieurs jours.

6. Londres. Calculs sur la dette publique. Un de ces oisifs dont les capitales abondent, s'est amusé à faire le calcul sui

vant :

En admettant que la dette nationale d'Angleterre ne soit que de 700 millions sterl. (elle s'élève maintenant et en y comprenant la dette non fondée à plus de 827 millions), réduite en billets de bauque d'une livre sterl., à 312 billets à la livre, elle peserait 61 tonneaux 1,760 liv., et elle couvrirait 4,516 milles carrés, si tous les billets étaient collés les uns à côté des autres. Si la dette était réduite en guinées, chacune d'un pouce de largeur, en les mettant en ligne à côté l'une de l'autre, elles couvriraient un espace de 10,521 milles 558 yards; si le tout était en schellings, l'espace couvert serait de 209,959 milles 1,048 yards, ou à peu près neuf fois la circonférence du globe. Le poids en or serait de 14,981,272 livres; en argent de 325,806,451 livres, et en cuivre de 4,687,500 tonneaux, à 2,000 liv. le tonneau.

Il faudrait 9,375 bâtimens de 500 tonneaux chacun pour transporter cette dette réduite en cuivre. Le tonnage de la marine estimé 2 millions 300 mille tonneaux, ne suffirait pas, puisque la dette réduite en cuivre exigerait plus de deux fois cette charge.

Si l'on voulait compter la somme entière réduite en guinées, en supposant un travail continuel de douze heures par jour, et que l'on comptât 100 guinées par minute, il faudrait 29 ans six mois deux semaines cinq jours six heures; en schellings, il faudrait 578 ans huit mois deux semaines deux jours quatre heures; et en sous, il faudrait encore 1,132 ans pour terminer ce travail, en admettant qu'on ait commencé à la création du monde.

10. Paris. Mort de madame la duchesse de Bourbon.- La France vient de perdre, de la manière la plus inattendue, une princesse du sang de saint Louis. Aujourd'hui, à une heure, madame la duchesse de Bour. bon s'est rendue à l'église de Sainte-Geneviève, à la cérémonie de la consécration de ce fameux édifice qui venait d'être rendu au culte chrétien. A deux heures, la procession a commencé, et S. A. S. la suivait, quand tout à coup elle a paru éprouver une certaine vacillation qu'elle a

tâché de surmonter, ne voulant pas interrompre le service divin; mais le mal qui l'oppressait l'a emporté, et S. A. S. est tombée en défaillance. On l'a portée de suite à l'École de droit, dans un appartement au rez-de-chaussée; on a appelé le chirurgien le plus voisin; peu d'instans après, M. Pelletan, ainsi que plusieurs autres médecins distingués sout arrivés, mais tous leurs soins ont été inutiles: la princesse était morte.

A quatre heures, Mgr. le duc d'Orléans, qui avait été prévenu de cet événement, est arrivé. M. Pardessus, membre de la chambre des députés et professeur de l'école, est allé, sur la demande du prince, chercher M. le chancelier, qui est arrivé peu d'instans après accompagné de M. de Sémonville, grand référendaire de la chambre des pairs. Après le départ de Mgr. le duc d'Orléans, M. le chancelier a fait vérifier l'état du corps de la princesse, pour en dresser procès verbal. Le, soir, à huit heures, M. le marquis de Lauriston, ministre de la maison du Roi, et M. le marquis de Dreux-Brezé, grand maître des cérémonies, se sont rendus à l'École de droit pour faire dresser en leur présence l'acte de décès. M. le chancelier, M. le marquis de Sémonville étaient présens. Cet acte a été rédigé par M. Cauchy, secrétaire archiviste de la chambre des pairs, dans le cabinet de M. Pardessus. A dix heures et demie, le corps a été transporté à l'hôtel de S. A. S., rue de Varennes; il était escorté par un détachement de gendarmes.

Louise-Marie-Thérèse-Batilde d'Orléans était née à Saint-Cloud, le 9 juillet 1750; elle fut mariée le 24 avril 1770 à Mgr. le duc de Bourbon; le seul fruit de ce mariage a été l'infortuné duc d'Enghien, assassiné à Vincennes en 1804. Cette perte avait toujours été pour cette auguste princesse un sujet de douleur : elle ne trouvait de consolations que dans la religion et dans la bienfaisance. Les pauvres perdent en elle une mère.

11. Testament de madame la duchesse de Bourbon.· Quelques instans avant de monter en voiture pour se rendre à SainteGeneviève, S. A. S. était entourée de plusieurs personnes de distinction. M. Colin, son conseil, étant entré, S. A. lui demanda s'il n'avait pas sur lui le testament qu'elle avait fait, en ajoutant qu'elle aurait quelques modifications à y insérer. M. Colin n'ayant pas le testament, et demandant à la princesse si elle éprouvait des craintes sur sa santé : « Au contraire,

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J'exige absolument de n'être ni ouverte, ni embaumée, ni exposée à visage découvert, ni gardée, mais enterrée le plus promptement et le plus simplement possible.

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Par respect pour les dernières volontés de cette princesse, ses augustes parens ont obtenu du Roi que son corps serait conduit sans pompe au lieu de sa sépulture. La dépouille mortelle de cette princesse est déposée dans la chapelle de son palais. 15. Aujourd'hui, dans l'après-midi, on a transporté le corps de madame la duchesse de Bourbon à l'église des Missions étrangères, dans un corbillard attelé de six chevaux, et suivi de neuf voitures bourgeoises; après l'office des morts, la dépouille mortelle a été ramenée dans la chapelle de son hôtel. A onze heures du soir, le convoi s'est mis en marche pour Dreux. 17. Paris. Maison royale. Hier, à neuf heures du soir, S. A. R. madame est accouchée la duchesse d'Orléans heureusement, au Palais-Royal, d'un prince qui, d'après les ordres du Roi, a reçu les noms de Henri-Eugène-PhilippeLouis d'Orléans, duc d'Aumale.

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« Sa naissance a été constatée, aux termes de l'ordonnance du Roi, du 23 mars 1815, par M. le chancelier de France, accompagné du marquis de Sémonville, pair de France, grand référendaire de la chambre des pairs, et du chevalier Cauchy, garde des archives de ladite chambre, greffier de l'état civil de la maison royale, en présence du marquis de Lauriston, pair de France, ministre secrétaire de la maison du roi, et du marquis de Brézé, pair de France, grand maître des cérémonies de France.

« Les témoins désignés par le Roi, et qui ont signé en cette qualité, tant le procès verbal que l'acte de naissance, sout M. le marquis de Lally-Tolendal, pair de France, ministre d'Etat, et M. le prince duc de Poix, pair de France, capitaine des gardes-du-corps du Roi.

Annuaire hist. pour 1822.

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L'un et l'autre de ces actes ont été inscrits sur le double registre de l'état civil de la maison royale, et déposé aux archives de la chambre des pairs.

« Le jeune prince doit être tenu sur les fonts de baptême par LL. AA. SS. M. le duc de Bourbon et Mademoiselle d'Orléans.

18. Londres. Placet extraordinaire. Dans les derniers jours que le roi a passé à Brighton, S. M. a reçu un placet trèsextraordinaire, signé par un vieillard de cent huit ans, nommé Grant; il était conçu en ces termes :

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Sire, je ne peux plus vivre par mon travail, et je viens demander du pain à V. M. pour le pauvre Grant... Vous ne le connaissez pas, je vais vous dire qui il est : Il ne peut se vanter d'être le plus ancien serviteur de V. M., il doit avouer du moins qu'il est le plus ancien de vos ennemis. J'ai combattu en 1748 sous les drapeaux du malheureux Edouard, et je me trouvai à la bataille de Culloden, qui a décidé la question en faveur de votre famille; et je n'ai pas cessé de chérir le sang de mes anciens rois. >> Après avoir pris lecture de cette singulière demande, S. M. envoya aussitôt des marques de sa munificence à ce loyal centenaire, avec un brevet de pension de 60 livres sterling (1,500 francs), reversible sur la tête de sa fille, âgée de soixante-dix ans. Le vieux soldat boit, depuis ce jour, alternativement à la santé des Stuarts et des Brunswicks.

23. Paris. La quatrième chambre de première instance s'est occupée de la cause entre le sieur Pitou et le sieur Duriez, tapissier.

On se rappelle que c'est le sieur Duriez qui a fourni le lit de sangles, le matelas, le traversin, etc., sur lesquels fut placé, à ses derniers momens, monseigneuri duc de Berri.

Après la mort du prince, deux mois se passèrent sans que la famille royale pût connaître les services du sieur Duriez, Ce dernier chargea alors le sieur Pitou, libraire, d'écrire et faire imprimer la relation de ce qui s'était passé dans cette déplorable circonstance. Il lui promit, outre ses déboursés, le traversin sur lequel avait expiré l'auguste victime. S. A. R. Monsieur, ayant réclamé le coucher fourni par Duriez, il fut alors impossible de remettre le traversin promis au sieur Pitou. famille Il n'est pas inutile de dire royale a récompensé Duriez. Pitou, qui 54

que

se considère comme la cause occasionelle de ces bienfaits, réclamait de M. Duriez, outre le traversin qui lui avait été promis, une somme de 7,800 francs pour frais d'impression des mémoires et écrits qu'il avait publiés dans cette circonstance, pour faire connaître toute la vérité sur le dernier coucher du duc de Berri.

Le tribunal, en déclarant le sieur Pitou non-recevable dans sa première demande, a condamné le sieur Duriez à lui payer la somme de 500 fr. pour les frais d'impression, et de plus aux dépens.

25. Rome. Conversion d'un Musulman. Une conversion éclatante vient d'avoir lieu. « Osman Aga, ancien général mahométan, né à Candie, et âgé de quarante ans, après avoir passé plusieurs jours dans le couvent des Pères conventuels, près la basilique des douze Apôtres; après avoir édi fié les religieux par sa ferme résolution, et assisté à toutes les instructions qui conviennent à un catéchumène, a recu le baptême dans la même église, aujourd'hui jour de la fête de la Conversion de saint Paul. M. le cardinal Galeffi, évêque d'Albano, lui a administré ce sacrement, l'a confirmé, et lui a donné la communion. L'infant don Charles-Louis, fils de la duchesse de Lucques, a été son parrain, et lui a donné les noms de Charles-LouisPaul-Hercule-Joseph-Marie. La duchesse de Lucques assistait à la cérémonie. » 26. Orleans. Rixe entre des militaires français et des Suisses. Hier quelques sous-officiers d'un régiment ( 45 ) d'infanterie de ligne qui passait dans cette ville pour se rendre à la Rochelle, se sont pris de querelle avec des sous-officiers et soldats du régiment suisse en garnison dans cette ville. En un moment, elle a été toute en rumeur, les soldats se rassemblaient pour prendre fait et cause pour leurs camarades; le peuple même commençait à insulter les Suisses à leur jeter des pierres; on a craint que la querelle ne dégénérât en combat sanglant. Heureusement, des officiers et des généraux même sont accourus, et l'ordre a été rétabli, le régiment a continué sa route. Un sous-officier français qu'on supposait instigateur de la querelle a été conduit à la garde du camp. (C'est ce jeune Bories, qu'on verra figurer dans le complot de la Rochelle. Voyez 5 septembre.)

30. Paris. Cause contre la liste civile. -La Cour de cassation vient de prononcer sur le fameux procès intenté au Roi, par le chevalier Desgraviers. (Voyez Ann. pour 1821, p. 694.)

Elle a considéré que l'art. 20 de la loi du 8 novembre 1814, sur la liste civile et la dotation de la couronne, avait consacré, de la manière la plus formelle, cet ancien et inviolable principe de la monarchie, qu'à l'avènement du prince à la couronne ses biens étaient, de plein droit, réunis au domaine de l'État; que dès lors le prince devenu Roi ne pouvait plus ètre tenu personnellement des dettes qu'il avait antérieurement contractées, et que la Cour royale de Paris avait violé la loi, lorsqu'elle avait condamné le Roi à payer le prix de l'acquisition de l'Ile-Adam, faite par lui avant son avénement à la cou

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2. Christiania. (Norwège.) Température extraordinaire. Les vieillards de ce pays ne se souviennent pas d'avoir vu un hyver plus doux que celui-ci; dans tout le mois de décembre le thermomètre de Réaumur n'a pas été au-dessus de 5 à 10 degrés; jusqu'au 15 de janvier il n'est pas descendu à zéro, et on a vu pousser des roses dans des pays où l'on ne voit ordinairement à cette époque que des frimas (Voyez 1er avril.)

4. Bombay. (Indoustan.) - Un savant indien vient d'établir un journal hebdomadaire, dans la langue du Bengale. Les deux premiers numéros, qui contenaient des articles sur la liberté de la presse indigène, et sur le jugement par jury, ont été enlevés avec une avidité surprenante. Ce journal paraît sous le titre de Sungband Cowmuddy, ou la Lune des Nouvelles.

C'est la première entreprise de ce genre faite dans ces contrées.

8. Londres. Anecdote.- Un étranger que l'on disait alternativement Juif, Turc, Arménien et renégat, avait amassé une. grande fortune. Cet homme, que l'on aurait pris pour un patriarche, à cause de sa longue barbe blanche, avait été témoin volontaire de toutes les pestes qui ont désolé l'empire ture depuis quelques aunées. Lorsqu'il apprenait que ce fléau

avait éclaté dans une ville, il s'y rendait de suite, sous prétexte de faire son commerce d'une manière beaucoup plus avantageuse. Il ne répondait jamais clairement aux questions qu'on lui adressait.

Il paraissait fort extraordinaire qu'un vieillard déjà si riche pût s'exposer continuellement à une mort qui paraissait inévitable. Quand il arrivait dans une ville où régnait la peste, il s'enveloppait de la tête aux pieds de toile goudronnée, se couvrait les mains de gands de cuir noir, la figure d'un masque de verre, et monté sur des échasses, un bâton à la main avec un croc de fer au bout, il entrait dans les maisons où il prenait tout ce qui lui , convenait, et arrachait les bijoux que portaient quelquefois les cadavres des pestiférés; on assure que plus d'une fois il a bâté les effets de la peste, et qu'il a donné le coup de mort aux victimes dont les cris l'auraient empêché de commettre ses vols.

Si le hasard le conduisait dans une maison où la peste ne s'était pas encore manifestée, il s'annonçait comme médecin, et malheur à ceux qui se fiaient à lui. Chargé de trésors, il retournait toujours à Venise, où il attendait une nouvelle occasion d'exercer son horrible industrie. Appelé à Barceloune par la peste qui y éclata l'année dernière, il y avait déjà exercé son métier pendant une quinzaine de jours, quand on le surprit au moment où il poignardait un malade qui était dans le délire. C'était un jeune français fort aimé à Barcelonne à cause de sa probité; il venait de perdre sa femme et deux fils, et luttait lui-même contre la mort qui l'avait épargné jusqu'alors. Il fut pour ainsi dire assassiné dans les bras de sou compatriote, le capitaine R. qui était son ami, et qui arriva au moment où le jeune français recevait le coup mortel; il s'établit une lutte entre le capitaine et l'assassin qui, se voyant vaincu, lui offrit de l'or pour qu'il lui épargnât la vie; mais d'un coup d'épée il termina l'existence de ce monstre; les magistrats firent pendre son corps au coin d'une rue, et tout ce qui se trouvait chez lui fut vendu au profit des pauvres.

10. Bordeaux. Superstition. On ne cesse de vanter les progrès des lumières, et nos journaux sont remplis de traits dignes de figurer dans les annales du douzième siècle. Notre ville vient d'en voir un exemple. La femme Dardenne avait une fille àgée de dix-neuf aus, au lit de la mort. Une de ses voisines lui dit

que la malade souffrait du mal donné. Ou va consulter un devin qui demeure à quelques lieues de Bordeaux (Martin Gignoux, vigneron); il déclare que le mal provenait de deux châtaignes ensorcelées qu'on lui avait fait manger au marché, mais que si on parvenait à la faire vomir elle serait sauvée. La fille mourut. Martin Gignoux encore consulté par la malheureuse mère, lui désigna, sous le serment du secret, la femme Bedrene Largeteau comme celle qui avait donné les châtaignes ensorcelées, en ajoutant que cette femme était dans le maléfice, parce qu'elle avait été donnée au démon par une de ses parentes qui avait fait pacte avec lui.

Il n'en fallut pas davantage; la pauvre mère ne put retenir le fatal secret. Une rumeur populaire s'élève contre Maric Bedrene; le bruit de sa possession et de ses maléfices se répand dans le marché : de confidence en confidence, la chose est de notoriété publique. Marie Bedrene, devenue un objet d'effroi, a porté plainte, coutre la veuve Dardenne, en diffamation; et la veuve Dardenne a été condamnée, en police correctionnelle, à 25 francs d'amende, 300 francs de dommages et intérêts, et à tous les frais de la procédure. Le devin Martin est renvoyé devant le tribunal de simple police, comme prévenu d'avoir fait le métier de deviner et de pronostiquer.

15. Perth. (Écosse.) Découverte. — Un particulier a découvert récemment, et constaté par des expériences multipliées, que la tourbe noire d'Écosse produit du gaz qui n'est pas inférieur en qualité ni en quantité à celui qu'on extrait du cbarbon. Il a, en outre, le précieux avantage d'être en grande partie exempt de l'odeur méphitique qu'exhale le gaz de charbon. Le goudron qu'on obtient' par le procédé peut être employé utilement à divers objets, et le charbon peut alimenter les fournaux des brasseurs, des distillateurs, etc. Le même particulier, par un moyen simple et peu coûteux, donne à la tourbe noire autant de consistance et de solidité que le charbon en a, ce qui non-seulement la rend propre au chauffage, n ais augmente la quantité de gaz qu'elle produit.

17. Glascow. (Ecosse.) Crédulité du peuple. La populace de cette ville, sur le bruit absurde que dans une fabrique de rouge on saignait les enfans pour employer leur sang à faire du rouge, est venue assaillir cette fabrique, en a enfoncé les fenêtres et les portes. L'arrivée des troupes n'ayant pas suffi

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