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bien comprise, habilement, largement traitée : oui ce ne sont pas deux plans d'architecte, ce sont deux tableaux rompus, où. fléchissent sous le poids des siècles l'ogive gothique et le cintre roman, ces arcs-boutants titubant de vieillesse, ces débris de colonnettes et de chapiteaux écroulés sur le sol dans l'herbe grasse des solitudes, tout cela a été vu, à l'heure de midi; mais il y manque un élément, à cette œuvre incomplète : quel? l'idée. Qui surprendra, comme des tentures noires, le long de ces murs féodaux et scolastiques, ces ombres que Rembrault accroche à l'embrasure de ses fenêtres, aux encoignures de ses plafonds hollandais? Qui allumera des lueurs incertaines et étranges, dans ces débris du passé, spectres de pierres qui doivent avoir la nuit d'étranges visions? Monsieur Laurent douterait-il de son talent? Il a le pouvoir : le vouloir seul lui manque, un effort! et nous lui prédisons le succès.

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Mêmes observations, avec des éloges mérités, à Monsieur Tauxier Alphonse, (de Villers-Cotterêts). Parfaitement maître de son art, il sait que la gravure sur bois, offrant moins de ressources imprévues que l'eau forte, exige un soin plus consciencieux du détail subordonné à une heureuse entente de l'effet général. Le sujet est habilement choisi une vue de Consberg (Norwège). C'est moitié marine, moitié paysage; ici des flots, un port encombré de voiles; là des tours, des remparts et toute une ville étagée le long d'une colline verdoyante: tout cela d'un dessin net, fini, un peu minutieux. Mais nous le demandons à Monsieur Tauxier : sans le livret saurions-nous que nous sommes en Norwège, et non à Yarmouth, Ver-Schelling ou tout autre port d'Angleterre ou de Hollande. Où est le caractère âpre des paysages scandinaves! où est la teinte sombre de ces eaux froides et bleues, et comme menaçantes, dans le sein desquelles se forment les ice-bergs ? où sont ces nuages lourds descendus des Dofrines?. Monsieur Tauxier a trouvé sa voie ; il y marche d'un pas sûr; mais pourquoi cheminer dans le ravin avec la foule, quand on peut monter sur le talus de la route.

Donnons des éloges à une reproduction habile et conscienciencieuse par le même artiste, de Remember, l'œuvre si justement populaire de Monsieur Grégoire.

Nous terminons par une eau forte de Monsieur Lhermitte : collier renaissance, vases, japonais. C'est un travail très convenablement réussi, et d'une exécution très soignée. Mais chaque genre est brillant de sa propre beauté, et, ce nous semble, Monsieur Lhermitte se résigne trop facilement à une humilité volontaire. Tout à sa poésie; dans chaque objet est un sens; cherchez-le, et traduisez, suivant la très judicieuse remarque de Balzac, Doumier, donne du caractère, de la poésie, même à un balai, que ce soit le balai du broken, ou de la maison Bancal; avec trois soucoupes, un seau, une fontaine, Chardin nous arrête, nous captive. Un rayon plus vif sur ces vases Japo

nais, sur « la glu d'émail où le soleil s'est pris »; une ombre plus capricieusement accentuée sur ces vases antiques, où s'enroule une théorie de ménades et de faunes dansants, et Monsieur Lhermitte s'étonnera lui-même d'avoir fait une œuvre. J. SALMON.

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Travaux des Ponts et Chaussées, Travaux de la Ville de Saint-Quentin.

DÉCRET.

EXTRAIT DES MINUTES DE LA SECRÉTAIRERIE D'ÉTAT. Au Palais impérial de Cambray, le 28 avril 1810. NAPOLÉON, Empereur des Français, Roi d'Italie, et Protecteur de la Confédération du Rhin,

Nous avons décrété et décrétons ce qui suit :

TITRE PREMIER.

Travaux des Ponts et Chaussées.

Art. Ier. Les travaux du canal et de la navigation de la Somme, depuis sa jonction avec le canal Crozat, près Ham, jusqu'à Saint-Valery, seront repris cette année.

II. Il sera prélevé, chaque année, à dater de 1811, pour être affectée à ces travaux, une somme de 300,000 francs, à prendre sur l'imposition destinée aux travaux des systèmes de canaux se rattachant au canal de Saint-Quentin.

Il sera de plus fait un prêt par la caisse des canaux, montant à la somme de 2,400,000 fr. sur laquelle tl sera versé, pour la présente année 1810, 300,000 francs. La quotité à affecter aux années suivantes sera fixée par le budget annuel des ponts et chaussées.

III. Il sera ouvert une route de Saint-Quentin à Péronne ; elle s'embranchera, auprès de Roupy, sur la route de Paris à Saint-Quentin.

IX. La somme de 300,000 francs à laquelle sont évaluées les dépenses de la construction de cette route, sera fournie, les trois quarts dans les Départements de l'Aisne et de lá Somme, qui y contribueront également au moyen des centimes additionnels imposés à cet effet, à dater de 1811, et le quart par la commune de Saint-Quentin, sur le produit de la vente des fortifications dont la cession faite à ladite ville, comme il est dit ci-après.

V. La route de Paris à Saint-Quentin sera élargie, en 1811, dans la partie qui traverse ladite ville, à l'entrée de la grande place.

VI. Les indemnités pour démolition des maisons et la dépense du pavage, seront acquittées, par ladite ville, sur les revenus et sur les produits de la vente des terrains des fortifications.

TITRE II.

Travaux de la Ville de Saint-Quentin.

VII. Les fortifications de la ville de Saint-Quentin seront démolies.

VIII. Nous faisons donation à ladite ville des matériaux desdites fortifications, ainsi que des terrains qu'elles occupent, pour en disposer et en jouir en toute propriété.

IX. Sont exceptés de ladite cession les fortifications antérieurement démolies et les terrains qui sont le long du canal. Lesdits terrains seront vendus, et les fonds provenant de la vente, versés à la caisse des canaux, et affectés spécialement aux dépenses du canal et de la navigation de la Somme.

X. Un boulevard sera planté autour de la ville, sur l'emplacement des fortificatious, et il y sera établi des promenades publiques.

XI. Les fonds provenant, tant de la vente des matériaux des fortifications, que de la vente des terrains qui sont disponibles, après l'établissement du boulevard et des promenades publiques, seront versés dans la caisse de la ville, pour concourir aux dépenses des travaux ordonnés par les articles 4 et 6 ci-dessus, et à ceux qui seront ordonnés ci-après.

XII. L'hôtel-de-ville sera réparé, des salles convenables y scront disposées pour les tribunaux civil, de commerce, de paix et de prud'hommes.

XIII. L'arsenal de l'artillerie est concédé à la ville, en toute propriété.

XIV. Les prisons judiciaires et la police seront établies et transférées dans le local de l'arsenal.

XV. Les sept petites places et les revers non pavés dans la ville de Saint-Quentin, seront incessamment pavés.

XVI. Des abreuvoirs et une fontaine seront disposés de manière à fournir plus commodément des eaux salubres aux besoins de la ville.

XVII. Les tueries actuellement existantes seront supprimées, le local sera vendu, et le prix versé dans la caisse de la ville, qui formera, sans délai, un nouvel établissement hors de la ville.

XVIII. Lesdits travaux seront faits sur les fonds de la ville provenant, tant de la vente des matériaux et des terrains des fortifications, que du restant libre annuel sur les fonds ordinaires.

XIX. Les plans et projets seront soumis à notre Ministre de l'intérieur avant le premier janvier prochain.

XX. Nos Ministres de l'intérieur, de la guerre et du trésor public, sont chargés de l'exécution du présent décret.

Signé NAPOLÉON (1).

(Communiqué par Ars. LEDUC.)

ÉGLISE COLLÉGIALE DE SAINT-QUENTIN.

MESSE EN

MUSIQUE

DE M. VATIN.

Dimanche dernier, à 11 h. 1/2 du matin, une foule compacte et recueillie se pressait dans l'immense nef et dans le choeur de la Collégiale. A l'occasion du cinquantième anniversaire de son entrée à l'église, M. Vatin faisait chanter une messe solennelle de sa composition. Cet empressement de la population saint-quentinoise ne nous a nullement étonné. Depuis longues années déjà, M. Vatin a su, par son travail et son désintéressement, se concilier l'estime et la sympathie de ses concitoyens.

Le nombre des exécutants était d'environ 325. La plupart étaient d'anciens élèves de M. Vatin; ils avaient voulu, répondant à son invitation, payer une nouvelle dette de reconnaissance à leur maître. Etaient là aussi plusieurs professeurs de musique de la ville et d'autres amateurs et artistes, dont nous avons pu apprécier une fois de plus le talent. Je ne parlerai pas de la Société philharmonique ni de la Société chorale; elles sont maintenant au-dessus de tout éloge. Enfin, les enfants de la maîtrise, ceux des Frères et des deux écoles communales. Ce choeur d'enfants a fait sur tous la plus heureuse impression... Avec de tels éléments, avec des ressources aussi puissantes, le succès de l'œuvre était assuré.

M. Vatin n'est plus un étranger pour nous; il y a longtemps déjà qu'il s'est fait connaître dans le monde musical. Un recueil de cantiques, dont l'édition a été rapidement enlevée, nous a permis d'apprécier son beau talent. Mais ici le travail était bien autrement important; il s'agissait d'une œuvre tout-à-fait gigantesque. Nous avons su depuis qu'il en avait coûté à M. Vatin plusieurs années d'études; nous n'en sommes pas surpris. Les grands maitres ont pu seuls, jusqu'à présent, prétendre à ce genre étonnant de composition qui révèle toujours chez son auteur un don de l'intelligence tout-à-fait à part: c'est le génie musical.

Nous n'essaierons pas de donner ici une analyse complète de cette messe, une étude longue et approfondie pourrait seule nous le permettre. Cédant à un désir, bien légitime d'ailleurs, voulant aussi payer à notre excellent ami une dette de cœur, nous nous contenterons de transmettre aux lecteurs quelques-unes de nos impressions personnelles. Puissent-elles être l'interprète fidèle de tous ceux qui ont eu le privilége de l'entendre.

La marche de cette composition est celle des maîtres. Partout le même caractère religieux, partout la même accentuation musicale. Ce qui nous a surtout frappé, c'est le choix heureux des motifs et le grand talent d'orchestration. Disons en passant que M. Vatin excelle dans ce genre de travail. Une grande pratique est venue développer

(1) Le 27 avril 1810, l'Empereur Napoléon Ier avait visité la ville et les Ateliers de Saint-Quentin, accompagné de l'Impératrice Marie-Louise qu'il avait épousée le 18 du même mois, après avoir divorcé avec Joséphine Tascher de la Pagerie.

chez lui cette science si peu connue de la combinaison et de l'harmonisation des parties. Nous avons pu en juger tout à notre aise dans les nombreuses et savantes modulations qui précédaient toujours les soli et les chœurs.

En général, les introductions et les finals ont été traités de main de maître, surtout l'introduction du Kyrie et le finale du Gloria. Pour ce qui est maintenant de certains détails: le Kyrie était bien l'expression de la prière. L'âme qui prie aime le calme, elle se plaît dans la solitude. Lå seulement eile trouve le recueillement, une des conditions essentielles de la bonne prière. Ainsi, les soli et l'orchestration de ce morceau: c'était le calme musical, mais un calme rendu agréable à tous par la modulation... Ce qui nous a plus particulièrement touché dans le Gloria, ce sont les différentes invocations, et surtout le Suscipe... L'orchestre alors par les répétitions du motif, était bien l'image de l'âme persévérant dans la prière. I! y avait quelque chose de celeste dans le chant du hautbois et du violoncelle. Ces deux instruments étaient bien là dans leur caractère de douceur et de pénétration... De même dans le Credo, cette profession complète de la foi catholique. Les solis du commencement, faits avec goût et méthode, ont frappé nos amateurs en musique. Ce genre d'exécution, d'ailleurs, réussit toujours dans une œuvre de longue haleine comme celle-ci. En même temps qu'elle rompt la monotonie des choeurs, elle repose l'âme des impressions fortes qu'elle ressent à l'audition complète de tout un orchestre. Dirai-je que l'Et incarnatus est (ce verset du Credo qui désespère beaucoup de nos artistes religieux) a été fort heureusement interprété. L'auteur, avec cette habitude qu'il a du sens religieux, a parfaitement compris toute la grandeur de ce mystère. Cette grande pensée, grâce à son orchestration, a saisi tous les cœurs. L'impression a été complète au chant de: Et homo factus est... Ainsi l'Et resurrexit. La rentrée faite par les trompettes et autres instruments à timbre éclatant, la progession d'orchestre, l'ensemble des voix exprimaient bien le triomphe et la joie. C'était l'Eglise tout entière s'affirmant dans cet acte de la résurrection. Enfin, l'Et vitam, finale du Credo souvent répeté et fortement accentué, c'était le cri de l'espérance, mais de l'espérance du souverain bonheur.

Les impressions produites par l'Agnus, morceau final, ont été les mêmes que celles du Kyrie. Le genre de composition était d'ailleurs le même ; des deux cotes, c'est la prière.

Nous avons pu constater une fois de plus la différence qui existe entre la musique religieuse et la musique profane. La première parle à l'âme, mais à l'âme sanctifiée par le souvenir de Dieu. De là, le recueillement, la joie intime qu'elle commande à tous ses auditeurs. La seconde, au contraire, s'adressant de préférence aux passions, excite chez beaucoup le désordre intérieur, image fidèle de l'âme qui s'éloigne de Dieu...

En terminant ce compte-rendu qui, dans sa brièveté, ne peut donner qu'une idée bien imparfaite de cette grande oeuvre, nous adresserons à son auteur nos félicitations les plus sincères. Un travail aussi important que celui-là, une exécution aussi brillante, ne pourront que grandir le nom de M. Vatin... Espérons que bientôt une voix plus autorisée que la nôtre lui rendra justice et qu'un titre honorifique lui sera accordé comme une juste récompense de tous ses travaux. C'est notre désir à tous...

L'abbé C. GEispitz,

Vicaire, maître de chœur á lá Collégiale.

LES FÊTES DE LA FONTAINE

A CHATEAU-THIERRY.

Les fêtes de Château-Thierry, dédiées à l'immortel fabuliste, ont eu lieu dimanche et lundi.

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